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28/10/2020 | FRANCE | N°445455

France | France, Conseil d'État, Juge des référés, 28 octobre 2020, 445455


Vu la procédure suivante :

I. Sous le n° 445455, par une requête, enregistrée le 19 octobre 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Groupe Lucien Barrière, la Société lilloise Animation Touristique, la Société touristique de l'Île du Ramier, la Société touristique et thermale d'Enghien-les-Bains, la Société pour le développement touristique de Cassis et la Société Développement Touristique Carry demandent au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative :

1°)

d'ordonner la suspension de l'exécution des dispositions du c) du 1° du II de l'arti...

Vu la procédure suivante :

I. Sous le n° 445455, par une requête, enregistrée le 19 octobre 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Groupe Lucien Barrière, la Société lilloise Animation Touristique, la Société touristique de l'Île du Ramier, la Société touristique et thermale d'Enghien-les-Bains, la Société pour le développement touristique de Cassis et la Société Développement Touristique Carry demandent au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative :

1°) d'ordonner la suspension de l'exécution des dispositions du c) du 1° du II de l'article 51 du décret n° 2020-1262 du 16 octobre 2020 prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l'épidémie de covid-19 dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire, interdisant l'accueil du public dans les établissements recevant du public (ERP) de type P (salles de jeux) sur le territoire des zones définies par le préfet de département où l'interdiction de déplacement mentionnée au I du même article s'applique ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent que :

- l'atteinte portée à la liberté d'entreprendre et à la liberté du commerce et de l'industrie présente un caractère grave dès lors qu'elles se trouvent totalement empêchées d'exercer leurs activités pendant au moins un mois ;

- cette atteinte est manifestement illégale car elle présente un caractère disproportionné par rapport à l'objectif de lutte contre la propagation du virus Covid-19, dès lors que la mesure d'interdiction d'accueil du public est générale et absolue et ne prend pas en compte les circonstances particulières de chaque établissement concerné, qu'elle n'est pas justifiée puisqu'il n'est pas établi par des éléments scientifiques ou statistiques que les établissements recevant du public de type P à vocation de salles de jeux tels que les casinos seraient des lieux de propagation du covid-19, qu'elle occulte la spécificité des activités exploitées par les casinos et la mise en place d'un protocole sanitaire très strict visant à protéger tant les visiteurs que le personnel et que les mesures imposées aux casinos sont plus strictes que celles imposées à d'autres établissements qui peuvent accueillir du public comme les restaurants, les cinémas, les salles de spectacles et les centres commerciaux ;

- la condition d'urgence est remplie, compte tenu de l'atteinte à leurs libertés fondamentales et aux conséquences extrêmement dommageables pour leurs intérêts ainsi que pour les intérêts financiers des communes délégantes et de l'Etat.

Par un mémoire en intervention, enregistré le 20 octobre 2020, le syndicat " Casinos de France " conclut à ce qu'il soit fait droit à la requête de la société Groupe Lucien Barrière et autres. Elle soutient que son intervention est recevable et reprend les mêmes moyens que les sociétés requérantes.

Par un mémoire en défense, enregistré le 24 octobre 2020, le ministre des solidarités et de la santé conclut au rejet de la requête. Il soutient que la décision litigieuse répond à une situation sanitaire alarmante et s'applique à des établissements présentant un risque particulièrement élevé, ce risque étant intrinsèque à l'activité pratiquée, que le respect d'un protocole sanitaire même strict ne peut suffire à y parer, et que ce risque est renforcé par le caractère festif des activités en cause et le brassage qu'elles favorisent.

Par un mémoire en intervention, enregistré le 25 octobre 2020, la Société du Grand Casino du Touquet, la Société des Hôtels et Casino de Deauville, la Société du Casino de Trouville, la Société Fermière du Casino de Riva Bella, la Société Nouvelle du Palais d'Emeraude de Dinard, la Société Fermière du Casino de Saint-Malo, la Société d'expansion touristique de Biarritz, la Société du Casino du Cap d'Agde, la Société du Casino de Saint-Raphaël, la Société du Casino de Sainte-Maxime, la Société niçoise d'exploitations balnéaires, la Société d'exploitation touristique de Menton et la Société Fermière du Casino municipal de Niederbronn-les-Bains concluent à ce qu'il soit fait droit à la requête de la société Groupe Lucien Barrière et autres. Elles soutiennent que leur intervention est recevable et reprennent les mêmes moyens que les sociétés requérantes.

Par un mémoire en intervention, enregistré le 25 octobre 2020, l'Association Nationale des Elus des Territoires Touristiques conclut à ce qu'il soit fait droit à la requête de la société Groupe Lucien Barrière et autres. Elle soutient que son intervention est recevable et reprend les mêmes moyens que les sociétés requérantes.

Par un mémoire en intervention, enregistré le 25 octobre 2020, les communes d'Enghien-les-Bains de Deauville et du Touquet-Paris-Plage concluent à ce qu'il soit fait droit à la requête de la société Groupe Lucien Barrière et autres. Elles soutiennent que leur intervention est recevable et reprennent les mêmes moyens que les sociétés requérantes.

Par un mémoire en intervention, enregistré le 25 octobre 2020, la commune de Cannes, la Société Casinotière du Littoral Cannois et la Société Fermière du Casino Municipal de Cannes concluent à ce qu'il soit fait droit à la requête de la société Groupe Lucien Barrière et autres. Elles soutiennent que leur intervention est recevable et reprennent les mêmes moyens que les sociétés requérantes. Elles soutiennent en outre que les dispositions créent une rupture d'égalité entre les différents établissements recevant du public dès lors que les salles de spectacle et les restaurant sont autorisés à rester ouverts de 6 heures à 21 heures sur les territoires couverts par le couvre-feu.

La requête a été communiquée au Premier ministre et au ministre de l'intérieur, qui n'ont pas produit d'observations.

II. Sous le n° 445460, par une requête, enregistrée le 19 octobre 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société CLMCE demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, d'enjoindre au Premier ministre de modifier, dans un délai de trois jours à compter de la notification de l'ordonnance à intervenir, les dispositions de l'article 51 du décret du 16 octobre 2020 prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l'épidémie de covid-19 dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire, en ce qu'elles interdisent aux salles de jeux situées dans les zones définies par le préfet de département, dans les départements couverts par l'interdiction de déplacement entre 21 heures et 6 heures du matin, d'accueillir du public, en prenant les mesures strictement proportionnées aux risques sanitaires encourus et appropriées aux circonstances de temps et de lieu aujourd'hui applicables pour maintenir l'ouverture au public des salles de jeux.

Elle soutient que :

- la condition d'urgence est remplie, compte tenu des difficultés financières engendrées par cette fermeture et de l'impact sur son image auprès du public ;

- les dispositions contestées portent une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté d'entreprendre et à la liberté du commerce et de l'industrie en prévoyant une fermeture générale et absolue illimitée dans le temps et injustifiée en l'absence de donnée scientifiques indiquant que les salles de jeux constitueraient des endroits particulièrement propices à la transmission rapide, simultanée et à grande échelle du virus covid-19 et en généralisant cette interdiction à toutes les salles de jeux situées dans les zones définies par les préfets dans les département où l'interdiction de déplacement s'applique alors que la catégorie des salles de jeux régit des établissements hétéroclites et que ce régime est plus restrictif que celui applicable à d'autres catégories d'établissements.

Par un mémoire en intervention, enregistré le 20 octobre 2020, le syndicat " Casinos de France " conclut à ce qu'il soit fait droit à la requête de la société CLMCE. Elle soutient que son intervention est recevable et reprend les mêmes moyens que la société requérante.

Par un mémoire en défense, enregistré le 24 octobre 2020, le ministre des solidarités et de la santé conclut au rejet de la requête. Il soutient que la décision litigieuse répond à une situation sanitaire alarmante et s'applique à des établissements présentant un risque particulièrement élevé, ce risque étant intrinsèque à l'activité pratiquée, que le respect d'un protocole sanitaire même strict ne peut suffire à y parer, et que ce risque est renforcé par le caractère festif des activités en cause et le brassage qu'elles favorisent.

Par un mémoire en intervention, enregistré le 25 octobre 2020, l'Association Nationale des Elus des Territoires Touristiques conclut à ce qu'il soit fait droit à la requête de la CLMCE. Elle soutient que son intervention est recevable et reprend les mêmes moyens que la société requérante.

Par un mémoire en intervention, enregistré le 25 octobre 2020, la société Dunkerque Loisirs, la société Yport Loisirs, la société Villers-sur-Mer Loisirs, la société Luc-sur-Mer Loisirs, la société Pau Loisirs, la société Bagnères de Bigorre Loisirs, la société Argelès Gazost Loisirs, la société Valras Plage Loisirs, la société Sète Loisirs, la société Grau du Roi Loisirs, la société Cagnes-sur-Mer Loisirs et la société Saint-Gervais Loisirs concluent à ce qu'il soit fait droit à la requête de la société CLMCE. Elles soutiennent que leur intervention est recevable et reprennent les mêmes moyens que la société requérante.

Par un mémoire en intervention, enregistré le 25 octobre 2020, la commune de Cannes, la Société Casinotière du Littoral Cannois et la Société Fermière du Casino Municipal de Cannes concluent à ce qu'il soit fait droit à la requête de la société CLMCE. Elles soutiennent que leur intervention est recevable et reprennent les mêmes moyens que la société requérante. Elles soutiennent en outre que les dispositions créent une rupture d'égalité entre les différents établissements recevant du public dès lors que les salles de spectacle et les restaurant sont autorisés à rester ouverts de 6 heures à 21 heures sur les territoires couverts par le couvre-feu.

La requête a été communiquée au Premier ministre et au ministre de l'intérieur, qui n'ont pas produit d'observations.

III. Sous le n° 445471, par une requête, enregistrée le 19 octobre 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le comité social et économique du Club Montmartre demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative :

1°) d'ordonner la suspension de l'exécution du décret n° 2020-1262 du 16 octobre 2020 prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l'épidémie de covid-19 dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire en ce qu'il ne permet pas aux salles de jeux d'accueillir du public en dehors de la période durant laquelle les déplacements de personnes hors de leur lieu de résidence sont interdits ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- il justifie d'un intérêt lui donnant qualité pour agir ;

- la condition d'urgence est remplie dès lors que le décret, qui prolonge la fermeture du Club Montmartre résultant d'un arrêté du préfet de police du 5 octobre 2020 pour une durée minimale de quatre semaines, entraîne des effets économiques potentiellement irréversibles ;

- les dispositions contestées portent une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté du commerce et de l'industrie et à la liberté d'entreprendre et au droit d'accès à des activités culturelles et aux loisirs garanti par les dispositions de l'article 13 du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, par les stipulations de l'article 15 du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels et par les dispositions de l'article 140 de la loi n° 98-657 d'orientation relative à la lutte contre les exclusions du 29 juillet 1998, la mesure contestée n'étant ni nécessaire, l'activité des salles de jeux n'étant pas de nature à faire obstacle au port du masque associé à la distanciation physique, ni adaptée, compte tenu de la mise en place d'un protocole sanitaire spécifique et de l'absence de cas avéré de contamination qui serait survenu au sein de ces établissements et d'étude permettant de conclure à l'existence de tels cas, ni proportionnée, en l'absence de risques spécifiques présentés par l'activité des salles de jeux.

Par un mémoire en défense, enregistré le 24 octobre 2020, le ministre des solidarités et de la santé conclut au rejet de la requête. Il soutient que la décision litigieuse répond à une situation sanitaire alarmante et s'applique à des établissements présentant un risque particulièrement élevé, ce risque étant intrinsèque à l'activité pratiquée, que le respect d'un protocole sanitaire même strict ne peut suffire à y parer, et que ce risque est renforcé par le caractère festif des activités en cause et le brassage qu'elles favorisent.

La requête a été communiquée au Premier ministre et au ministre de l'intérieur, qui n'ont pas produit d'observations.

IV. Sous le n° 445476, par une requête, enregistrée le 19 octobre 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Club Circus Paris demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative :

1°) d'ordonner la suspension de l'exécution des dispositions du c) du 1° du II de l'article 51 du décret n° 2020-1262 du 16 octobre 2020 du Premier ministre, interdisant l'accueil du public dans les établissements recevant du public de type P " salles de jeux " sur le territoire des zones définies par le préfet de département où l'interdiction de déplacement mentionnée au I du même article s'applique ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la condition d'urgence est remplie dès lors que les dispositions contestées portent une atteinte grave et immédiate à liberté du commerce et de l'industrie ainsi qu'à la liberté d'entreprendre, qu'elles portent une atteinte particulièrement grave et immédiate à la situation des exploitants des salles de casinos et clubs de jeux et que la suspension demandée n'est nullement de nature à nuire à l'objectif d'intérêt général de lutte contre le covid-19 alors que la fermeture généralisée des casinos et clubs de jeux est de nature à dégrader les finances publiques ;

- les dispositions contestées portent une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté d'entreprendre et à la liberté du commerce et de l'industrie dès lors que le critère de fermeture retenu, à savoir le classement des salles de jeux en établissements recevant du public de type P, n'est pas pertinent et justifié au regard de l'objectif poursuivi de lutte contre la propagation de l'épidémie de covid-19, que la mesure de fermeture générale imposée dans les zones de couvre-feu est disproportionné, l'objectif de lutte contre l'épidémie de covid-19 pouvant être atteint par des mesures moins contraignantes, eu égard au caractère limité des risques de contamination liés à la fréquentation d'un casino ou d'un club de jeux et et à la mise en place d'un protocole sanitaire rigoureux.

Par un mémoire en intervention, enregistré le 20 octobre 2020, le syndicat " Casinos de France " conclut à ce qu'il soit fait droit à la requête de la société Club Circus Paris. Elle soutient que son intervention est recevable et reprend les mêmes moyens que la société requérante.

Par un mémoire en défense, enregistré le 24 octobre 2020, le ministre des solidarités et de la santé conclut au rejet de la requête. Il soutient que la décision litigieuse répond à une situation sanitaire alarmante et s'applique à des établissements présentant un risque particulièrement élevé, ce risque étant intrinsèque à l'activité pratiquée, que le respect d'un protocole sanitaire même strict ne peut suffire à y parer, et que ce risque est renforcé par le caractère festif des activités en cause et le brassage qu'elles favorisent.

Par un mémoire en intervention, enregistré le 25 octobre 2020, la société Casino Allevard, la société du Casino de Vals-les-Bains et la société du Casino de Briançon concluent à ce qu'il soit fait droit à la requête de la société Club Circus Paris. Elles soutiennent que leur intervention est recevable et reprennent les mêmes moyens que la société requérante.

Par un mémoire en intervention, enregistré le 25 octobre 2020, l'Association Nationale des Elus des Territoires Touristiques conclut à ce qu'il soit fait droit à la requête de la Club Circus Paris. Elle soutient que son intervention est recevable et reprend les mêmes moyens que la société requérante.

Par un mémoire en intervention, enregistré le 25 octobre 2020, la commune de Cannes, la Société Casinotière du Littoral Cannois et la Société Fermière du Casino Municipal de Cannes concluent à ce qu'il soit fait droit à la requête de la société Club Circus Paris. Elles soutiennent que leur intervention est recevable et reprennent les mêmes moyens que la société requérante. Elles soutiennent en outre que les dispositions créent une rupture d'égalité entre les différents établissements recevant du public dès lors que les salles de spectacle et les restaurant sont autorisés à rester ouverts de 6 heures à 21 heures sur les territoires couverts par le couvre-feu.

La requête a été communiquée au Premier ministre et au ministre de l'intérieur, qui n'ont pas produit d'observations.

V. Sous le n° 445477, par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 19 et 25octobre 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Clubs by Joa et la société Joagroupe Holding demandent au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative :

1°) d'ordonner toutes mesures qu'il estimera utiles afin de faire cesser l'atteinte grave et manifestement illégale portée à leurs libertés fondamentales ;

2°) d'ordonner la suspension de l'exécution des dispositions du c) du 1° du II de l'article 51 du décret n° 2020-1262 du 16 octobre 2020 du Premier ministre en ce qu'il prévoit la fermeture des salles de jeux, établissements recevant du public de type " P ", dans les zones mentionnées au I de l'article 51 de ce décret ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent que :

- elles justifient d'un intérêt leur donnant qualité pour agir ;

- la condition d'urgence est remplie dès lors que les dispositions contestées portent une atteinte grave et immédiate portée à la liberté d'entreprendre et qu'elles ont des effets économiques immédiats et potentiellement irréversibles sur la situation des sociétés requérantes ;

- l'interdiction de l'ouverture des clubs de jeux et casinos dans les zones de couvre-feu porte une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté d'entreprendre et à la liberté du commerce et de l'industrie dès lors qu'elle présente un caractère disproportionné dans la mesure où des couvertures encadrées par des protocoles sanitaires stricts et contrôlés permettent de parvenir à l'objectif de préservation de la santé publique, aucun casino ou club de jeux n'ayant été recensé en tant que cluster, l'absence de propagation du virus au sein des casinos et des clubs de jeux résultant de la mise en place de protocoles sanitaires stricts plus contraignants que ceux mis en place au sein d'établissements dont l'ouverture n'est pas remise en cause par le décret litigieux ;

- les casinos ne représentent pas un risque particulièrement élevé, leurs clients n'étant pas majoritairement des personnes à risques, l'activité qui est pratiquée y étant assise, n'impliquant pas une expression orale favorisant le dépôt de gouttelettes sur des surfaces ou du matériel touché par d'autres joueurs et les protocoles sanitaires permettant de garantir une stricte désinfection des matériels après chaque utilisation et les bars des casinos étant fermés.

Par un mémoire en intervention, enregistré le 20 octobre 2020, le syndicat " Casinos de France " conclut à ce qu'il soit fait droit à la requête des sociétés Clubs by Joa et Joagroupe Holding. Il soutient que son intervention est recevable et reprend les mêmes moyens que les sociétés requérantes.

Par un mémoire en défense, enregistré le 24 octobre 2020, le ministre des solidarités et de la santé conclut au rejet de la requête. Il soutient que la décision litigieuse répond à une situation sanitaire alarmante et s'applique à des établissements présentant un risque particulièrement élevé, ce risque étant intrinsèque à l'activité pratiquée, que le respect d'un protocole sanitaire même strict ne peut suffire à y parer, et que ce risque est renforcé par le caractère festif des activités en cause et le brassage qu'elles favorisent.

Par un mémoire en intervention, enregistré le 24 octobre 2020, la société Casino Antibes la Siesta, la société Casino d'Argelès Plage, la société Casino d'Ax les Thermes, la société Casino du Boulou, la société Casino de Canet Plage, la société Casino d'Etretat, la société d'exploitation du casino de Fécamp, la société Casino de la Seyne sur mer, la société Casino du Lac du Der, la société Casino du Tréport, la société nouvelle du Casino de Lons-le-Saunier, la société gestion du Casino de Mandelieu-la-Napoule, la société Casino de Montrond-les-Bains, la société Casino de Santenay, la société Casino de Saint-Aubin, la société Casino de Saint-Cyprien, la société Casino de Saint-Jean-de-Luz et la société Casino d'Uriage concluent à ce qu'il soit fait droit à la requête des sociétés Clubs by Joa et Joagroupe Holding. Elles soutiennent que leur intervention est recevable et reprennent les mêmes moyens que les sociétés requérantes.

Par un mémoire en intervention, enregistré le 25 octobre 2020, l'Association Nationale des Elus des Territoires Touristiques conclut à ce qu'il soit fait droit à la requête des sociétés Clubs by Joa et Joagroupe Holding. Elle soutient que son intervention est recevable et reprend les mêmes moyens que les sociétés requérantes.

Par un mémoire en intervention, enregistré le 25 octobre 2020, la commune de Cannes, la Société Casinotière du Littoral Cannois et la Société Fermière du Casino Municipal de Cannes concluent à ce qu'il soit fait droit à la requête de la société Clubs by Joa et Joagroupe Holding. Elles soutiennent que leur intervention est recevable et reprennent les mêmes moyens que les sociétés requérantes. Elles soutiennent en outre que les dispositions créent une rupture d'égalité entre les différents établissements recevant du public dès lors que les salles de spectacle et les restaurant sont autorisés à rester ouverts de 6 heures à 21 heures sur les territoires couverts par le couvre-feu.

La requête a été communiquée au Premier ministre et au ministre de l'intérieur, qui n'ont pas produit d'observations.

VI. Sous le n° 445522, par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 20 et 25 octobre 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société du Casino de Palavas, la société du Casino Municipal d'Aix-en-Provence, la société du Grand Casino de Lyon, la société Le Lyon Vert, la société du Casino le Lion Blanc et la société Pleinair Casino demandent au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative :

1°) d'ordonner la suspension de l'exécution des dispositions du décret n° 2020-1262 du 16 octobre 2020 du Premier ministre et, notamment, de celles du c) du 1° du II de son article 51 ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent que :

- les dispositions contestées portent une atteinte grave à la liberté d'entreprendre dès lors que les casinos qu'elles gèrent font en conséquence l'objet d'une fermeture administrative ;

- cette atteinte est manifestement illégale, cette mesure d'interdiction n'étant ni nécessaire, ni adaptée, ni proportionnée, dès lors que la situation sanitaire prévalant au sein des casinos ne rend nullement nécessaire la prise de mesure plus restrictives que celles applicables aux autres établissements recevant du public, que la mesure contestée crée un risque de concentration de joueurs plus important dans les casinos demeurés ouverts, que les mesures mises en oeuvre au sein des casinos pour faire barrière au covid-19 et assurer la protection des salariés, des clients et des fournisseurs ou prestataires ont emporté la satisfaction des services de contrôle et que les dispositions contestées interdisent tout accueil du public dans l'ensemble des établissements recevant du public de type P, sans opérer de distinction entre ces établissements ;

- la condition d'urgence est remplie dès lors que les dispositions contestées portent une atteinte manifeste et immédiate à la liberté d'entreprendre, qu'elles préjudicient de manière irrémédiable à la situation économique et financière des sociétés requérantes et qu'elles portent atteinte à la continuité de la mission de service public des casinos ;

- l'administration n'étaye pas l'existence d'un risque plus élevé dans les casinos, dès lors que la moyenne d'âge dans les casinos est plus jeune qu'elle ne le prétend, que la politique sanitaire mise en place ne permet pas les rassemblements, que les procédures mises en place évitent les risques de transmission de particules virales, qu'il n'existe pas de facteur de risque supplémentaire lié à la consommation d'alcool et que les casinos disposent d'un système de ventilation.

Par un mémoire en intervention, enregistré le 23 octobre 2020, le syndicat " Casinos de France " conclut à ce qu'il soit fait droit à la requête de la société du Casino de Palavas et autres. Elle soutient que son intervention est recevable et reprend les mêmes moyens que les sociétés requérantes.

Par un mémoire en intervention, enregistré le 23 octobre 2020, la société du Casino du Palais de la Méditerranée, la société Cannes Centre Croisette, la société l'Eden Beach Casino, la société du Grand Casino de Cabourg, la société du Casino de la Grande Motte, la société du Casino de Saint Amand, la société du Casino de Calais, la société du Casino du Touquet, la société Jean Metz, la société du Casino municipal de Royat, la société du Casino de Salies de Béarn, la société du Grand Casino d'Annemasse, la société Forges Thermal, la société du Grand Casino du Havre, la société du Casino des Bains de Mer de Dieppe, la société de la Compagnie pour le développement du tourisme hyérois, la société du Grand Casino de Bandol et la société touristique thermale et hôtelière de Divonne concluent à ce qu'il soit fait droit à la requête de la société du Casino de Palavas et autres. Elles soutiennent que leur intervention est recevable et reprennent les mêmes moyens que les sociétés requérantes.

Par un mémoire en défense, enregistré le 24 octobre 2020, le ministre des solidarités et de la santé conclut au rejet de la requête. Il soutient que la décision litigieuse répond à une situation sanitaire alarmante et s'applique à des établissements présentant un risque particulièrement élevé, ce risque étant intrinsèque à l'activité pratiquée, que le respect d'un protocole sanitaire même strict ne peut suffire à y parer, et que ce risque est renforcé par le caractère festif des activités en cause et le brassage qu'elles favorisent.

Par un mémoire en intervention, enregistré le 25 octobre 2020, l'Association Nationale des Elus des Territoires Touristiques conclut à ce qu'il soit fait droit à la requête de la société du Casino de Palavas et autres. Elle soutient que son intervention est recevable et reprend les mêmes moyens que les sociétés requérantes.

Par un mémoire en intervention, enregistré le 25 octobre 2020, la commune d'Enghien-les-Bains, la commune de Deauville et la commune du Touquet-Paris-Plage concluent à ce qu'il soit fait droit à la requête de la société du Casino de Palavas et autres. Elles soutiennent que leur intervention est recevable et reprennent les mêmes moyens que les sociétés requérantes.

La requête a été communiquée au Premier ministre et au ministre de l'intérieur, qui n'ont pas produit d'observations.

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu :

- la Constitution, et notamment son Préambule ;

- le pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels ;

- le code de la santé publique ;

- la loi n°98-657 du 29 juillet 1988 ;

- le décret n° 2020-1257 du 14 octobre 2020 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part, la société Groupe Lucien Barrière et autres, la société CLMCE, le comité social et économique du Club Montmartre, la société Club Circus Paris, la société Clubs by Joa et autre, et la société Casino de Palavas et autres, d'autre part, le Premier ministre, le ministre de l'intérieur et le ministre des solidarités et de la santé ;

Ont été entendus lors de l'audience publique du 26 octobre 2020 à 10 heures 30 :

- Me A..., avocate au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocate de la société Casino de Palavas et autres ;

- Me Froger, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de la société Groupes Lucien Barrière et autres, de la société CLMCE, de la société Club Circus Paris et de la société Clubs by Joa et Joagroupe;

- Me Molinié, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat du comité social et économique du Club Montmartre ;

- Me Thiriez, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de la commune de Cannes, de la Société Casinotière du Littoral Cannois et de la Société Fermière du Casino Municipal de Cannes ;

- les représentants du ministre des solidarités et de la santé ;

- les représentants des sociétés Groupe Lucien Barrière et autres, CLMCE, Club Circus Paris, Casino de Palavas et du comité social et économique du Club Montmartre ;

à l'issue de laquelle le juge des référés a clos l'instruction.

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : " Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. Le juge des référés se prononce dans un délai de quarante-huit heures. ".

2. Les requêtes visées ci-dessus, présentées sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, sont dirigées contre les dispositions du décret n° 2020-1262 du 16 octobre 2020 prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l'épidémie de covid-19 dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire relatives à la fermeture des casinos et salles de jeux dans certaines zones du territoire. Il y a donc lieu de les joindre pour statuer par une seule ordonnance.

3. Le syndicat des casinos de France, l'Association Nationale des Elus des Territoires Touristiques, les communes d'Enghien-les-Bains, de Deauville, du Touquet-Paris-Plage, la commune de Cannes, la Société Casinotière du Littoral Cannois et la Société Fermière du Casino Municipal de Cannes, la Société du Grand Casino du Touquet et ses co-intervenants, la société Dunkerque Loisirs et ses co-intervenants, la société Casino Allevard et ses co-intervenants, la société Casino Antibes la Siesta et ses co-intervenants et la société du Casino du Palais de la Méditerranée et ses co-intervenants justifient d'un intérêt suffisant pour intervenir au soutien des requêtes.

Sur les circonstances :

4. L'émergence d'un nouveau coronavirus, responsable de la maladie à coronavirus 2019 ou covid-19 et particulièrement contagieux, a été qualifiée d'urgence de santé publique de portée internationale par l'Organisation mondiale de la santé le 30 janvier 2020, puis de pandémie le 11 mars 2020. La propagation du virus sur le territoire français a conduit le ministre des solidarités et de la santé puis le Premier ministre à prendre, à compter du 4 mars 2020, des mesures de plus en plus strictes destinées à réduire les risques de contagion. Pour faire face à l'aggravation de l'épidémie, le législateur, par l'article 4 de la loi du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19, a déclaré l'état d'urgence sanitaire pour une durée de deux mois à compter du 24 mars 2020, puis, par l'article 1er de la loi du 11 mai 2020 prorogeant l'état d'urgence sanitaire et complétant ses dispositions, a prorogé cet état d'urgence sanitaire jusqu'au 10 juillet 2020 inclus. Au vu de l'évolution de la situation sanitaire, les mesures générales adoptées par décret ont assoupli progressivement les sujétions imposées afin de faire face à l'épidémie. Enfin, par un décret du 10 juillet 2020, pris sur le fondement de la loi du 9 juillet 2020 organisant la sortie de l'état d'urgence sanitaire, le Premier ministre a prescrit les mesures générales nécessaires pour faire face à l'épidémie de covid-19 dans les territoires sortis de l'état d'urgence sanitaire et dans ceux au sein desquels il a été prorogé.

5. Par un décret n° 2020-1257 du 14 octobre 2020, pris en conseil des ministres et sur le rapport du ministre des solidarités et de la santé, le Président de la République a déclaré l'état d'urgence sanitaire sur l'ensemble du territoire de la République à compter du 17 octobre 2020 à 0 heure, sur le fondement des dispositions de l'article L. 3131-13 du code de la santé publique.

6. Aux termes de l'article L. 3131-15 du code de la santé publique dispose, dans sa rédaction issue de la loi du 11 mai 2020 : " I. - Dans les circonscriptions territoriales où l'état d'urgence sanitaire est déclaré, le Premier ministre peut, par décret réglementaire pris sur le rapport du ministre chargé de la santé, aux seules fins de garantir la santé publique : (..) 2° Interdire aux personnes de sortir de leur domicile, sous réserve des déplacements strictement indispensables aux besoins familiaux ou de santé ; (...) / 5° Ordonner la fermeture provisoire et réglementer l'ouverture, y compris les conditions d'accès et de présence, d'une ou plusieurs catégories d'établissements recevant du public ainsi que des lieux de réunion, en garantissant l'accès des personnes aux biens et services de première nécessité ; (...) III. - Les mesures prescrites en application du présent article sont strictement proportionnées aux risques sanitaires encourus et appropriées aux circonstances de temps et de lieu. Il y est mis fin sans délai lorsqu'elles ne sont plus nécessaires. ".

7. Dans ce cadre, par un décret n° 2020-1262 du 16 octobre 2020, le Premier ministre a prescrit de nouvelles mesures générales nécessaires pour faire face à l'épidémie de covid-19. Le I de l'article 51 de ce décret prévoit que " Dans les départements mentionnés à l'annexe 2, le préfet de département interdit, dans les zones qu'il définit, aux seules fins de lutter contre la propagation du virus, les déplacements de personnes hors de leur lieu de résidence entre 21 heures et 6 heures du matin à l'exception des déplacements pour les motifs suivants " précisément énumérés à ce même I. Le II de ce même article prévoit que " Dans les zones définies par le préfet de département où l'interdiction mentionnée au I s'applique : / 1° Les établissements recevant du public relevant des types d'établissements définis par le règlement pris en application de l'article R. 123-12 du code de la construction et de l'habitation figurant ci-après ne peuvent accueillir du public : (...) / c) établissements de type P : Salles de jeux ; (...) 2° Les autres établissements recevant du public ne peuvent accueillir de public entre 21 heures et 6 heures du matin sauf pour les activités mentionnées à l'annexe 5 ; (...) "

Sur les demandes en référé :

8. Les requérants demandent au juge des référés du Conseil d'Etat d'ordonner, sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, la suspension de l'exécution des dispositions du c) du 1° du II de l'article 51 du décret du 16 octobre 2020 qui imposent la fermeture totale des établissements de type P à vocation de salles de jeux dans les zones où le préfet de département a interdit les déplacements de personnes hors de leur lieu de résidence entre 21 heures et 6 heures du matin, en application du I de ce même article, et pas seulement une fermeture pendant la période de couvre-feu, ou d'enjoindre au Premier ministre de modifier ces dispositions. Ils soutiennent que ces dispositions portent une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté du commerce et de l'industrie et à la liberté d'entreprendre ainsi qu'à l'accès à la culture et aux loisirs.

9. Dans l'actuelle période d'état d'urgence sanitaire, il appartient aux différentes autorités compétentes de prendre, en vue de sauvegarder la santé de la population, toutes dispositions de nature à prévenir ou à limiter les effets de l'épidémie. Ces mesures, qui peuvent restreindre l'exercice des droits et libertés fondamentaux, doivent, dans cette mesure, être nécessaires, adaptées et proportionnées à l'objectif de sauvegarde de la santé publique qu'elles poursuivent.

10. Il est constant que malgré les mesures de police sanitaire graduées en fonction de la situation sanitaire de chaque territoire prises sur le fondement de la loi du 9 juillet 2020 pour faire face au risque de reprise de l'épidémie, la circulation du virus sur le territoire métropolitain s'est amplifiée ces dernières semaines et que l'on constate une nette aggravation de la crise sanitaire. Il résulte ainsi de l'instruction qu'au 22 octobre 2020, le taux d'incidence (nombre de nouveaux cas rapporté à la population) s'élevait à 251 pour 100 000 personnes, sur l'ensemble de la population, contre 118 pour 100 000 personnes pendant la semaine du 28 septembre au 4 octobre 2020, que le taux de positivité des tests réalisés était de 13,7 % contre 9,2 % et que 10 166 nouvelles hospitalisations ont été recensées sur les sept derniers jours dont 1 627 en réanimation. Il résulte également de l'instruction qu'au 20 octobre 2020, dans neuf métropoles situées dans les départements figurant à l'annexe 2 du décret, les taux d'incidence s'échelonnaient, pour 100 000 personnes, entre 283,7 à Rouen et 798,5 à Saint-Etienne, dépassant même les 800 nouveaux cas dans certaines zones, le taux de positivité des tests s'échelonnait entre 13,4 % et 25,6 %, le taux d'occupation des lits de réanimation par des patients atteints du covid-19 entre 29 % et 54 %, entraînant par suite la déprogrammation des opérations non urgentes et la fermeture des services non liés à l'épidémie, et que ces données sont en forte et constante progression sur les derniers jours

11. Il résulte de l'instruction que les casinos et les clubs de jeux demeurent des espaces favorisant le brassage d'une population importante, en dépit de la baisse de fréquentation constatée depuis l'apparition de l'épidémie de covid-19 en France. En dépit d'un protocole sanitaire renforcé mis en place dans ces établissements, leur activité implique une présence prolongée des joueurs, des déplacements au sein des établissements et des opportunités de contacts entre joueurs et avec des surfaces. Dans le contexte de la forte aggravation de la situation sanitaire, et même si aucun " cluster " n'a, à ce stade, été détecté dans ces établissements, la fermeture des salles de jeux dans les zones où, compte tenu du niveau élevé de circulation du virus et du risque de saturation des capacités de réanimation, le préfet de département décide d'interdire les déplacements des personnes hors de leur lieu de résidence entre 21 heures et six heure du matin ne peut être regardée, en l'état de l'instruction, comme une mesure n'étant manifestement pas nécessaire, adaptée et proportionnée à l'objectif de sauvegarde de la santé publique.

12. Les requérants ne peuvent utilement se prévaloir de ce que le 2° du II de l'article 51 n'impose à d'autres types d'établissements, au demeurant placées dans des situations différentes, comme les restaurants, les théâtres et les cinémas, de ne fermer, dans les mêmes zones, qu'entre 21 heures et 6 heures du matin.

13. Par suite, et dès lors que les libertés fondamentales invoquées, en particulier la liberté d'entreprendre et la liberté du commerce et de l'industrie, doivent être conciliées avec les autres libertés fondamentales, parmi lesquelles figure le droit au respect de la vie, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que les dispositions prévoyant la fermeture totale des établissements de type P à vocation de salles de jeux dans les zones où le préfet de département a interdit les déplacements de personnes hors de leur lieu de résidence entre 21 heures et 6 heures du matin porterait une atteinte manifestement illégale à ces libertés fondamentales.

14. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la condition d'urgence, les requêtes ne peuvent qu'être rejetées, y compris les conclusions présentées en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

O R D O N N E :

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Article 1er : Les interventions du syndicat " Casinos de France ", de l'Association Nationale des Elus des Territoires Touristiques, des communes d'Enghien-les-Bains, de Deauville et du Touquet-Paris-Plage, de la commune de Cannes, de la Société Casinotière du Littoral Cannois, de la Société Fermière du Casino Municipal de Cannes, de la Société du Grand Casino du Touquet, de la Société des Hôtels et Casino de Deauville, de la Société du Casino de Trouville, de la Société Fermière du Casino de Riva Bella, de la Société Nouvelle du Palais d'Emeraude de Dinard, de la Société Fermière du Casino de Saint-Malo, de la Société d'expansion touristique de Biarritz, de la Société du Casino du Cap d'Agde, de la Société du Casino de Saint-Raphaël, de la Société du Casino de Sainte-Maxime, de la Société niçoise d'exploitations balnéaires, de la Société d'exploitation touristique de Menton, de la Société Fermière du Casino municipal de Niederbronn-les-Bains, de la société Dunkerque Loisirs, de la société Yport Loisirs, de la société Villers sur Mer Loisirs, de la société Luc sur Mer Loisirs, de la société Pau Loisirs, de la société Bagnères de Bigorre Loisirs, de la société Argelès Gazost Loisirs, de la société Valras Plage Loisirs, de la société Sète Loisirs, de la société Grau du Roi Loisirs, de la société Cagnes sur Mer Loisirs, de la société Saint Gervais Loisirs, de la société Casino Allevard, de la société du Casino de Vals les Bains, de la société du Casino de Briançon, de la société Casino Antibes la Siesta, de la société Casino d'Argelès Plage, de la société Casino d'Ax les Thermes, de la société Casino du Boulou, de la société Casino de Canet Plage, de la société Casino d'Etretat, de la Société d'exploitation du Casino de Fécamp, de la société Casino de la Seyne sur mer, de la société Casino du Lac du Der, de la société Casino du Tréport, de la Société nouvelle du Casino de Lons-le-Saunier, de la Société de gestion du Casino de Mandelieu-la-Napoule, de la société Casino de Montrond-les-Bains, de la société Casino de Santenay, de la société Casino de Saint-Aubin, de la société Casino de Saint-Cyprien, de la société Casino de Saint-Jean-de-Luz et la société Casino d'Uriage sont admises.

Article 2 : Les requêtes de la société Groupe Lucien Barrière et autres, de la société CLMCE, du comité social et économique du Club Montmartre, de la société Club Circus Paris, de la société Clubs by Joa et autre et de la société Casino de Palavas et autres sont rejetées.

Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée aux sociétés Groupe Lucien Barrière, Clubs by Joa et Casino de Palavas, en tant que requérants premièrement dénommés, au Club Circus Paris, Clubs by Joa en tant que requérants premièrement dénommés, à la société CLMCE, au comité social et économique du Club Montmartre et à la société Club Circus Paris, aux communes d'Enghien-les-Bains et de Cannes et aux sociétés du Grand Casino du Touquet, Dunkerque loisirs, Casino Allevard, Casino Antibes la Siesta et du Casino du Palais de la Méditerranée en tant qu'intervenants premièrement dénommés, au syndicat " Casinos de France " à l'Association Nationale des Elus des Territoires Touristiques ainsi qu'au ministre de l'intérieur et au ministre des solidarités et de la santé.

Copie en sera adressée au Premier ministre.


Synthèse
Formation : Juge des référés
Numéro d'arrêt : 445455
Date de la décision : 28/10/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 28 oct. 2020, n° 445455
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Avocat(s) : SCP FOUSSARD, FROGER ; SCP LYON-CAEN, THIRIEZ

Origine de la décision
Date de l'import : 14/11/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2020:445455.20201028
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