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12/10/2020 | FRANCE | N°445101

France | France, Conseil d'État, Juge des référés, 12 octobre 2020, 445101


Vu la procédure suivante :

Mme A... F..., Mme I... M..., Mme E... C..., M. N... H..., M. B... L..., Mme J... K... et M. G... D... ont demandé au juge des référés du tribunal administratif de Pau, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, à titre principal, d'ordonner la suspension de l'exécution de l'arrêté du 14 septembre 2020 par lequel le préfet des Pyrénées-Atlantiques a imposé le port d'un masque dans certaines conditions et dans certaines villes du département et, à titre subsidiaire, d'ordonner une expertise sur les conséqu

ences du port d'un masque durant huit à dix heures par jour, sur la d...

Vu la procédure suivante :

Mme A... F..., Mme I... M..., Mme E... C..., M. N... H..., M. B... L..., Mme J... K... et M. G... D... ont demandé au juge des référés du tribunal administratif de Pau, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, à titre principal, d'ordonner la suspension de l'exécution de l'arrêté du 14 septembre 2020 par lequel le préfet des Pyrénées-Atlantiques a imposé le port d'un masque dans certaines conditions et dans certaines villes du département et, à titre subsidiaire, d'ordonner une expertise sur les conséquences du port d'un masque durant huit à dix heures par jour, sur la détermination des zones d'affluence dans les communes visées par l'arrêté ainsi que d'enjoindre au préfet des Pyrénées-Atlantiques de restreindre le port d'un masque dans des périmètres où la distanciation physique est difficile et seulement à des heures de forte affluence et d'en exonérer les sportifs. Par une ordonnance n° 2001810 du 26 septembre 2020, le juge des référés du tribunal administratif de Pau a rejeté leur demande.

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 5 et 8 octobre 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme F... et autres demandent au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative :

1°) d'annuler l'ordonnance du 26 septembre 2020 ;

2°) à titre principal, d'ordonner la suspension de l'exécution de l'arrêté du 14 septembre 2020 du préfet des Pyrénées-Atlantiques ;

3°) à titre subsidiaire, en premier lieu, d'ordonner les mesures d'urgence propres à sauvegarder les libertés fondamentales, en deuxième lieu, d'enjoindre au préfet des Pyrénées-Atlantiques de revoir la délimitation des périmètres où le respect de la distanciation physique est difficile et les heures de forte affluence et, en dernier lieu, d'enjoindre au préfet des Pyrénées-Atlantiques de dispenser de l'obligation du port du masque les personnes pratiquant des activités physiques ou sportives.

Ils soutiennent que :

- le juge des référés de première instance a omis de statuer sur leur demande tendant, a minima, à la modification de l'arrêté contesté du 14 septembre 2020 afin notamment de dispenser de l'obligation du port du masque les personnes pratiquant des activités physiques ou sportives ;

- la condition d'urgence est remplie dès lors que l'arrêté contesté affecte gravement, de manière immédiate et pour une durée significative, leurs libertés fondamentales sans qu'aucun intérêt public ne s'attache au maintien de telles mesures ;

- l'arrêté contesté porte une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté individuelle, à la liberté d'aller et venir, à la liberté d'entreprendre, à la liberté de réunion, à la liberté d'expression, à la dignité humaine, au droit au respect de la vie privée et au droit à l'intégrité physique ;

- il cause un préjudice financier aux commerces situés dans la zone géographique qu'il délimite et favorise, de ce fait, les commerces situés en dehors de cette zone ;

- il méconnaît les dispositions de la loi n° 2010-1192 du 11 octobre 2010 ainsi que la dignité humaine dès lors que le port du masque obligatoire, en ce qu'il cache le visage du porteur, aboutit à occulter son identité et sa personnalité ;

- il crée une discrimination à l'encontre des personnes dispensées de l'obligation du port du masque, en raison d'une situation de handicap ;

- il n'est pas justifié par des raisons impérieuses liées aux circonstances locales dès lors que, d'une part, le risque sanitaire pour l'ordre public n'est plus établi compte tenu du faible taux de mortalité et du caractère modéré de la virulence et de la contagiosité de la covid-19 et, d'autre part, il n'est pas démontré que les zones délimitées sont des secteurs fortement fréquentés et dans lesquels il est difficile de faire respecter les règles de distanciation sociale ;

- il est inadapté à la poursuite de l'objectif recherché faute de preuve de l'efficacité du port du masque obligatoire ;

- il est disproportionné dès lors que, d'une part, il s'applique de façon générale dans les communes désignées, sans distinction entre les zones exigües à forte fréquentation et les zones à faible affluence et, d'autre part, il ne prévoit aucune dispense de l'obligation du port du masque pour les personnes pratiquant des activités physiques ou sportives ;

- il est entaché d'irrégularités dès lors que, d'une part, il n'est ni daté, ni signé, et, d'autre part, il n'est pas assorti de la preuve d'une publication préalable de l'avis du directeur général de l'agence régionale de santé ;

- il institue un dispositif contraventionnel dépourvu de base légale dès lors que ce dispositif ne saurait se fonder sur l'article L. 3136-1 du code de la santé publique.

Par un mémoire en défense, enregistré le 8 octobre 2020, le ministre des solidarités et de la santé conclut au rejet de la requête. Il soutient que la condition d'urgence n'est pas remplie et qu'aucune atteinte grave et manifestement illégale n'est portée à une liberté fondamentale.

La requête a été communiquée au Premier ministre qui n'a pas produit d'observations.

Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part, Mme F... et les autres requérants et, d'autre part, le Premier ministre et le ministre des solidarités et de la santé ;

Ont été entendus lors de l'audience publique du 09 octobre 2020 à 9 h 30 :

- Me Hourdeaux, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat des requérants ;

- le représentant du ministre des solidarités et de la santé ;

à l'issue de laquelle le juge des référés a différé la clôture de l'instruction au même jour à 21 heures.

Le ministre des solidarités et de la santé a présenté un nouveau mémoire, tendant aux mêmes fins que son mémoire en défense, enregistré avant la clôture de l'instruction.

Mme F... et autres ont présenté un nouveau mémoire, tendant aux mêmes fins que leur requête, enregistré avant la clôture de l'instruction.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la santé publique ;

- la loi n° 2020-856 du 9 juillet 2020 ;

- le décret n° 2020-860 du 10 juillet 2020 ;

- le décret n° 2020-1128 du 12 septembre 2020 ;

- le code de justice administrative ;

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : " Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. Le juge des référés se prononce dans un délai de quarante-huit heures ".

2. L'émergence d'un nouveau coronavirus, responsable de la maladie à coronavirus 2019 ou covid-19 et particulièrement contagieux, a été qualifiée d'urgence de santé publique de portée internationale par l'Organisation mondiale de la santé le 30 janvier 2020, puis de pandémie le 11 mars 2020. La propagation du virus sur le territoire français a conduit le ministre des solidarités et de la santé puis le Premier ministre à prendre, à compter du 4 mars 2020, des mesures de plus en plus strictes destinées à réduire les risques de contagion. Le législateur, par l'article 4 de la loi du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19, a déclaré l'état d'urgence sanitaire pour une durée de deux mois à compter du 24 mars 2020, puis, par l'article 1er de la loi du 11 mai 2020 prorogeant l'état d'urgence sanitaire et complétant ses dispositions, a prorogé cet état d'urgence sanitaire jusqu'au 10 juillet 2020 inclus.

3. En vertu du I de l'article 1er de la loi du 9 juillet 2020 organisant la sortie de l'état d'urgence sanitaire, du 11 juillet 2020 au 30 octobre 2020 inclus, le Premier ministre peut, par décret pris sur le rapport du ministre chargé de la santé, dans l'intérêt de la santé publique et aux seules fins de lutter contre la propagation de l'épidémie de covid-19, réglementer la circulation des personnes. En vertu du deuxième alinéa du II du même article, lorsque ces mesures doivent s'appliquer dans un champ géographique qui n'excède pas le territoire d'un département, le Premier ministre peut habiliter le représentant de l'Etat dans le département à les décider lui-même, après avis, rendu public, du directeur général de l'agence régionale de santé. Ces mesures, selon le III de cet article, " sont strictement proportionnées aux risques sanitaires encourus et appropriées aux circonstances de temps et de lieu. Il y est mis fin sans délai lorsqu'elles ne sont plus nécessaires ". Le IV du même article précise qu'elles peuvent faire l'objet, devant le juge administratif, des recours présentés, instruits et jugés selon les procédures prévues aux articles L. 521-1 et L. 521-2 du code de justice administrative. Enfin, il résulte du VII du même article que la violation de ces mesures peut faire l'objet d'une amende d'un montant forfaitaire de 135 euros, et, en cas de récidive dans les quinze jours, d'une amende de cinquième classe ou, en cas de violation à plus de trois reprises dans un délai de trente jours, de six mois d'emprisonnement et de 3 750 euros d'amende ainsi que de la peine complémentaire de travail d'intérêt général. Aux termes du II de l'article 1er du décret du 10 juillet 2020 prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l'épidémie de covid-19 dans les territoires sortis de l'état d'urgence sanitaire et dans ceux où il a été prorogé : " Dans les cas où le port du masque n'est pas prescrit par le présent décret, le préfet de département est habilité à le rendre obligatoire, sauf dans les locaux d'habitation, lorsque les circonstances locales l'exigent ". Il résulte de l'annexe 1 de ce décret que le masque doit alors répondre aux caractéristiques techniques fixées par l'article 30-0 E de l'annexe IV au code général des impôts.

4. Par un arrêté du 14 septembre 2020, pris sur le fondement du II de l'article 1er du décret du 10 juillet 2020 mentionné au point 3 ci-dessus, le préfet des Pyrénées-Atlantiques a imposé le port du masque, à compter du 15 septembre 2020 et jusqu'au 17 octobre 2020 inclus, à toute personne âgée d'au moins onze ans et plus d'une part, sur les voies publiques et les espaces ouverts au public situés à l'intérieur de périmètres définis pour les communes de Bayonne, Biarritz, Espelette, Guéthary, et Saint-Jean-de-Luz durant une partie de la journée et, pour les communes d'Anglet, Boucau, Hendaye, Pau et Saint-Pierre d'Irube toute la journée, d'autre part, sur les marchés de plein vent, les vide-greniers et les brocantes du département durant les horaires d'ouverture, et enfin, dans un rayon de 50 mètres, aux abords des établissements scolaires, d'accueil des jeunes enfants et d'enseignement supérieur ainsi que sur les campus. Le port du masque est également rendu obligatoire aux abords des établissements sportifs, d'une part, dans un rayon de 150 mètres à l'occasion de l'accueil de rencontres professionnelles, deux heures avant le début de la rencontre et jusqu'à deux heures après la fin de celle-ci, et d'autre part, dans un rayon de 50 mètres à l'occasion de l'accueil de compétitions de clubs amateurs, une heure avant le début de la compétition jusqu'à une heure après la fin de celle-ci. Sont exemptés du port du masque les personnes en situation de handicap qui sont munies d'un certificat médical justifiant de cette dérogation, les personnes pratiquant une activité sportive ainsi que les fumeurs.

5. Mme F... et autres relèvent appel de l'ordonnance du 26 septembre 2020 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Pau a rejeté leur demande présentée sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, et tendant à titre principal, qu'il suspende l'exécution de l'arrêté du 14 septembre 2020 mentionné au point 4

ci-dessus, et à titre subsidiaire, qu'il ordonne une expertise sur " les problématiques du port du masque jusqu'à 8h00 à 10h00 par jour " et qu'il enjoigne au préfet du département, d'une part, de limiter l'obligation du port du masque à des périmètres où la distanciation physique est difficile et à des heures de forte affluence et, d'autre part, d'exclure de l'obligation du port du masque toutes les personnes pratiquant une activité physique.

6. Pour rejeter la demande des requérants, le juge des référés du tribunal administratif de Pau a relevé, en premier lieu, que la circulation du virus était active dans le département des Pyrénées-Atlantiques et que le port systématique du masque en plein air était recommandé lors de la présence d'une forte densité de personnes ou lorsque le respect de la distance physique ne pouvait être garanti. En deuxième lieu, il a estimé que la circonstance qu'à certains moments, certaines rues incluses dans le périmètre d'application de l'arrêté ne soient pas abondamment fréquentées ne suffisait pas à caractériser la disproportion de la mesure contestée dès lors que les zones concernées étaient susceptibles de connaître une affluence de piétons. En troisième lieu, il a estimé que les requérants n'établissaient pas que la mesure de police contestée portait une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté d'entreprendre des commerçants exerçant leur activité à l'intérieur des périmètres définis. En dernier lieu, il a jugé qu'il ne lui incombait pas de se prononcer sur la régularité de l'arrêté préfectoral et qu'à la supposer établie, l'illégalité alléguée des sanctions encourues en cas de contraventions aux prescriptions de l'acte contesté n'était pas susceptible de caractériser une atteinte grave et manifestement illégale aux libertés fondamentales invoquées par les requérants.

7. Le caractère proportionné d'une mesure de police s'apprécie nécessairement en tenant compte de ses conséquences pour les personnes concernées et de son caractère approprié pour atteindre le but d'intérêt général poursuivi. Sa simplicité et sa lisibilité, nécessaires à sa bonne connaissance et à sa correcte application par les personnes auxquelles elle s'adresse, sont un élément de son effectivité et doivent, à ce titre, être prises en considération. Il en résulte que le préfet, lorsqu'il détermine les lieux dans lesquels il rend obligatoire le port du masque, est en droit de délimiter des zones suffisamment larges pour englober de façon cohérente les points du territoire caractérisés par une forte densité de personnes ou une difficulté à assurer le respect de la distance physique, de sorte que les personnes qui s'y rendent puissent avoir aisément connaissance de la règle applicable et ne soient pas incitées à enlever puis remettre leur masque à plusieurs reprises au cours d'une même sortie. Il peut, de même, définir les horaires d'application de cette règle de façon uniforme dans l'ensemble d'une même commune, voire d'un même département, en considération des risques encourus dans les différentes zones couvertes par la mesure qu'il adopte. Il doit, toutefois, tenir compte de la contrainte que représente, même si elle reste mesurée, le port d'un masque par les habitants des communes concernées, qui doivent également respecter cette obligation dans les transports en commun et, le plus souvent, dans leur établissement scolaire ou universitaire ou sur leur lieu de travail.

8. En premier lieu, il résulte de l'instruction, en l'état actuel des connaissances, que, d'une part, le virus SARS-CoV-2 peut se transmettre par gouttelettes respiratoires, par contacts et par voie aéroportée et que, d'autre part, les personnes peuvent être contagieuses sans le savoir, notamment pendant la phase pré-symptomatique, de l'ordre de cinq jours en moyenne, de l'infection. Or il résulte des avis et recommandations tant de l'Organisation mondiale de la santé que du Haut Conseil de la santé publique ou du conseil scientifique covid-19, appuyés sur les études épidémiologiques récentes et la revue de la littérature scientifique existante, que le port d'un masque, qui ne présente pas de risque particulier pour les personnes qui le portent, est efficace pour réduire le risque de contamination par le virus. Si le risque de contamination est, de façon générale, moins élevé en plein air, la possibilité qu'un aérosol contenant du virus soit inhalé avec une charge infectante suffisante ou qu'une transmission par gouttelettes ait lieu existe en cas de forte concentration de population. Ainsi, le Haut Conseil de la santé publique recommande, dans un avis du 20 août 2020, en l'état actuel des connaissances et des ressources disponibles, de porter systématiquement un masque en plein air lors de la présence d'une forte densité de personnes ou lorsque le respect de la distance physique ne peut être garantie, par exemple en cas de rassemblement, regroupement, file d'attente, ou dans les lieux de forte circulation.

9. En deuxième lieu, il résulte de l'instruction que le département des Pyrénées-Atlantiques a été inscrit, par décret du 12 septembre 2020 susvisé, sur la liste des zones de circulation active du virus dans lesquelles la loi du 9 juillet 2020 citée au point 3 ci-dessus permet la prise de mesures plus contraignantes visant à limiter sa propagation. Selon le point de situation épidémiologique réalisé par l'agence régionale de santé de Nouvelle-Aquitaine à la date du 5 octobre 2020, si le nombre de personnes hospitalisées pour covid-19 reste encore peu élevé dans le département des Pyrénées-Atlantiques, le nombre total de nouveaux cas qui avait dépassé le seuil d'alerte de 50 cas pour 100 000 habitants début septembre, s'élève à 88 le 1er octobre 2020. Le taux de positivité qui s'établissait à 3,5 % au 9 septembre 2020, soit au-delà du seuil d'alerte de 1 % correspondant à une épidémie active, atteint désormais 5,9 % au 1er octobre 2020. 14 clusters étaient identifiés dans le département à cette même date, dont 3 dans des établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes. Enfin, pour la période du

16 septembre au 7 octobre 2020, il apparaît que les patients reconnus positifs au virus sont principalement localisés dans les communes du littoral atlantique ainsi que dans la commune de Pau et ses environs.

10. En troisième lieu, il résulte également de l'instruction et notamment des éléments figurant dans le mémoire du ministre enregistré le 9 octobre 2020 après l'audience publique, que le préfet des Pyrénées-Atlantiques a imposé le port du masque au sein de périmètres restreints et cohérents, limités aux centres-villes des communes de Bayonne, Biarritz, Pau et Saint-Jean-de-Luz et aux quelques rues ou espaces ouverts au public les plus fréquentés des communes d'Anglet, Boucau, Espelette, Guéthary, Hendaye et Saint-Pierre d'Irube. A cet égard, le ministre a établi, sans être sérieusement contesté, que la fréquentation touristique, certes moins importante qu'en période estivale, perdurait au mois d'octobre dans les communes du littoral ainsi que dans la commune d'Espelette. En outre, si le port du masque est obligatoire toute la journée dans les périmètres définis pour les communes d'Anglet, Boucau, Hendaye, Pau et Saint-Pierre d'Irube, il n'en résulte pas une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale dès lors que l'exclusion de certaines périodes horaires, qui ne pourraient être qu'une période nocturne, présenterait un intérêt très limité. Par ailleurs, par arrêté modificatif du 9 octobre 2020, l'obligation du port du masque aux abords des établissements scolaires et d'accueil des jeunes enfants qui ne sont pas situés dans le périmètre d'application de l'arrêté contesté, a été limitée aux seuls horaires d'entrées et de sorties. Enfin, le préfet des Pyrénées-Atlantiques n'a pas entendu réserver la dérogation à l'obligation de porter le masque aux seules personnes pratiquant la course à pied ou le vélo, activités mentionnées à titre indicatif dans l'arrêté, mais à toutes les personnes pratiquant une activité physique ou sportive. Dans ces conditions, les mesures contestées ne peuvent être regardées comme portant une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté individuelle, à la liberté d'aller et venir, à la liberté d'entreprendre, à la liberté de réunion, à la liberté d'expression, à la dignité humaine, au droit au respect de la vie privée et au droit à l'intégrité physique invoqués par les requérants.

11. En quatrième lieu, les moyens tirés du défaut de signature de l'arrêté contesté, qui ne serait par ailleurs pas daté, et de publication des avis de l'agence régionale de santé des 1er et 11 septembre 2020 au visa desquels cet arrêté a été pris ne sont, en tout état de cause, pas de nature à établir l'existence d'une atteinte grave et manifestement illégale aux libertés fondamentales invoquées.

12. En cinquième et dernier lieu, le VII de l'article 1er de la loi du 9 juillet 2020 prévoit l'application aux mesures prises en application des I et II de ce même article, des troisième à septième alinéas de l'article L. 3136-1 du code de la santé publique. Il résulte de ces dispositions combinées que la violation des mesures prises par le représentant de l'Etat dans le département pour imposer le port du masque peut, ainsi qu'il a été dit au point 3 ci-dessus, faire l'objet de l'amende prévue pour les contraventions de quatrième classe, en cas de récidive dans les quinze jours, de l'amende prévue pour les contraventions de cinquième classe et, en cas de violation à plus de trois reprises dans un délai de trente jours, de six mois d'emprisonnement et de 3 750 euros d'amende ainsi que de la peine complémentaire de travail d'intérêt général. Par suite, le moyen tiré de ce que ces sanctions, mentionnées à l'article 9 de l'arrêté contesté, seraient dépourvues de base légale ne peut, en tout état de cause, qu'être écarté.

13. Il résulte de tout ce qui précède que Mme F... et autres ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le juge des référés du tribunal administratif de Pau a rejeté leur demande.

O R D O N N E :

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Article 1er : La requête de Mme F... et autres est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à Mme A... F..., premier requérant dénommé, pour l'ensemble des requérants, et au ministre des solidarités et de la santé.

Copie en sera adressée au Premier ministre.


Synthèse
Formation : Juge des référés
Numéro d'arrêt : 445101
Date de la décision : 12/10/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 12 oct. 2020, n° 445101
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Avocat(s) : SCP BOUTET-HOURDEAUX

Origine de la décision
Date de l'import : 18/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2020:445101.20201012
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