Vu les procédures suivantes :
Le département de la Côte-d'Or a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Dijon d'ordonner, sur le fondement des dispositions de l'article L. 521-3 du code de justice administrative, l'expulsion de Mme A... B..., ainsi que celle de tout occupant de son chef, du logement qu'elle occupe dans l'enceinte du collège Henri Dunant, rue Charles Oursel à Dijon, à titre principal sans délai, et à titre subsidiaire à compter du 11 mai 2020. Par une ordonnance n° 2001117 du 30 avril 2020, rectifiée par une ordonnance du 18 mai 2020 du président du tribunal administratif, le juge des référés a ordonné l'expulsion demandée à compter du 11 mai 2020.
1° Sous le n° 440634, par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 15 mai et 2 juin 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme B... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'ordonnance du 30 avril 2020 ;
2°) statuant en référé, de rejeter la demande du département de la Côte-d'Or ;
3°) de mettre à la charge du département de la Côte-d'Or la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
2° Sous le n° 441647, par un pourvoi enregistré le 7 juillet 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme B... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'ordonnance du 30 avril 2020 telle que rectifiée par celle du 18 mai suivant ;
2°) statuant en référé, de rejeter la demande du département de la Côte-d'Or ;
3°) de mettre à la charge du département de la Côte-d'Or la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu :
- le code de l'éducation ;
- le code général de la propriété des personnes publiques ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Guillaume de La Taille Lolainville, maître des requêtes,
- les conclusions de Mme Karin Ciavaldini, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Lyon-Caen, Thiriez, avocat de Mme B... et à Me Le Prado, avocat du département de la Côte-d'Or ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés que le président du conseil départemental de la Côte-d'Or et la rectrice de l'académie de Dijon ont mis fin, par décision du 22 janvier 2020, à la concession à Mme B... d'un logement pour nécessité absolue de service dans l'enceinte du collège Henri Dunant de Dijon, en lui impartissant un délai courant jusqu'au 1er mars suivant pour libérer les lieux. Faute pour cette décision d'avoir été exécutée, le département de la Côte-d'Or a saisi le juge des référés du tribunal administratif de Dijon d'une demande tendant à ce qu'il ordonne, sur le fondement de l'article L. 521-3 du code de justice administrative, l'expulsion de ce logement de Mme B... ainsi que celle de tout occupant de son chef. Par une ordonnance du 30 avril 2020, rectifiée le 18 mai suivant par application de l'article R. 741-11 du code de justice administrative, le juge des référés du tribunal administratif a ordonné l'expulsion ainsi sollicitée à compter du 11 mai. Les pourvois formés par Mme B... les 15 mai et 7 juillet 2020, enregistrés respectivement sous les nos 440634 et 441647, tendent à l'annulation de cette ordonnance telle que rectifiée. Il y a lieu de les joindre pour qu'il y soit statué par une même décision.
2. D'une part, aux termes de l'article L. 511-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés statue par des mesures qui présentent un caractère provisoire. Il n'est pas saisi du principal et se prononce dans les meilleurs délais. " Aux termes de l'article L. 521-3 du même code : " En cas d'urgence et sur simple requête qui sera recevable même en l'absence de décision administrative préalable, le juge des référés peut ordonner toutes autres mesures utiles sans faire obstacle à l'exécution d'aucune décision administrative. " Lorsque le juge des référés est saisi, sur le fondement de ces dispositions, d'une demande d'expulsion, il lui appartient de rechercher si, au jour où il statue, cette demande présente un caractère d'urgence et d'utilité et ne se heurte à aucune contestation sérieuse.
3. D'autre part, aux termes de l'article L. 5 du code de justice administrative : " L'instruction des affaires est contradictoire. Les exigences de la contradiction sont adaptées à celles de l'urgence, du secret de la défense nationale et de la protection de la sécurité des personnes. " Aux termes de l'article L. 522-1 du même code : " Le juge des référés statue au terme d'une procédure contradictoire écrite ou orale. " Aux termes de l'article R. 522-4 de ce code : " Notification de la requête est faite aux défendeurs. / Les délais les plus brefs sont donnés aux parties pour fournir leurs observations. Ils doivent être rigoureusement observés, faute de quoi il est passé outre sans mise en demeure. "
4. Lorsque, saisi d'une demande tendant à ce qu'il ordonne, sur le fondement de l'article L. 521-3 du code de justice administrative, l'expulsion de l'occupant d'un logement, le juge des référés estime qu'il y a lieu d'engager la procédure contradictoire prévue à l'article L. 522-1 du même code, il lui incombe de communiquer cette demande d'expulsion au défendeur en l'expédiant, en principe, à l'adresse du logement occupé. La procédure suivie n'est toutefois pas entachée d'irrégularité dans le cas où la communication a été faite à une autre adresse, si l'intéressé a été mis en mesure de présenter utilement ses observations en défense.
5. En l'espèce, il ressort du dossier du juge des référés que la demande du département de la Côte-d'Or tendant à ce que soit ordonnée l'expulsion de Mme B... du logement qu'elle occupait dans l'enceinte du collège Henri Dunant à Dijon a été expédiée, non à l'adresse de ce logement, mais à une autre adresse, qui correspond à celle du domicile de son époux, duquel elle était séparée et avec lequel elle était en instance de divorce. Il ne ressort pas des pièces du dossier que Mme B..., qui n'a produit aucune défense dans le cadre de l'instance de référé, aurait néanmoins effectivement reçu communication de la demande d'expulsion. Dès lors, Mme B... est fondée à soutenir que le caractère contradictoire de la procédure a été méconnu et à demander pour ce motif, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de son pourvoi, l'annulation de l'ordonnance qu'elle attaque.
6. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, par application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l'affaire au titre de la procédure de référé engagée.
7. Il résulte de l'instruction que Mme B... a quitté, le 10 juillet 2020, le logement qu'elle occupait dans les locaux du collège Henri Dunant de Dijon. Par suite, la demande du département de la Côte-d'Or tendant à ce que son expulsion de ce logement soit ordonnée est devenue sans objet. Dès lors, il n'y a plus lieu d'y statuer.
8. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
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Article 1er : L'ordonnance du 30 avril 2020 du juge des référés du tribunal administratif de Dijon, rectifiée par ordonnance du 18 mai 2020 du président de ce tribunal, est annulée.
Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur la demande du département de la Côte-d'Or tendant à l'expulsion de Mme B..., ainsi que de tout occupant de son chef, du logement occupé dans l'enceinte du collège Henri Dunant, rue Charles Oursel à Dijon.
Article 3 : Les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative par Mme B... et par le département de la Côte-d'Or sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à Mme A... B... et au département de la Côte-d'Or.
Copie en sera adressée au ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports.