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29/05/2020 | FRANCE | N°418488

France | France, Conseil d'État, 4ème - 1ère chambres réunies, 29 mai 2020, 418488


Vu la procédure suivante :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 16 juin 2014 par laquelle l'inspectrice du travail de la section 12C de l'unité territoriale de Paris a autorisé la société Vietnam Airlines JSC à le licencier et celle du ministre du travail, de l'emploi et du dialogue social du 4 février 2015 ayant rejeté son recours hiérarchique. Par un jugement n°s 1501651, 1505372 du 24 novembre 2015, le tribunal administratif a annulé ces deux décisions.

Par un arrêt n°16PA00116 du 21 décembre

2017, la cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel formé par la ...

Vu la procédure suivante :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 16 juin 2014 par laquelle l'inspectrice du travail de la section 12C de l'unité territoriale de Paris a autorisé la société Vietnam Airlines JSC à le licencier et celle du ministre du travail, de l'emploi et du dialogue social du 4 février 2015 ayant rejeté son recours hiérarchique. Par un jugement n°s 1501651, 1505372 du 24 novembre 2015, le tribunal administratif a annulé ces deux décisions.

Par un arrêt n°16PA00116 du 21 décembre 2017, la cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel formé par la société Vietnam Airlines JSC contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 22 février, 21 mai et 19 octobre 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Vietnam Airlines JSC demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge M. A... la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code du travail ;

- le code de justice administrative et l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 modifiée ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Yaël Treille, auditeur,

- les conclusions de M. Frédéric Dieu, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Gatineau, Fattaccini, Rebeyrol, avocat de la société Vietnam Airlines JSC et à la SCP Boré, Salve de Bruneton, Mégret, avocat de M. B... A....

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par une décision du 16 juin 2014, l'inspectrice du travail de la section 12C de l'unité territoriale de Paris a autorisé la société Vietnam Airlines JSC à licencier pour faute M. A..., délégué du personnel et salarié protégé. Le ministre du travail, de l'emploi et du dialogue social a rejeté, le 4 février 2015, le recours hiérarchique formé par M. A... contre cette décision. Par un jugement du 24 novembre 2015, le tribunal administratif de Paris a, sur la demande de M. A..., annulé ces deux décisions. La société Vietnam Airlines JSC se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 21 décembre 2017 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté son appel contre ce jugement.

2. Aux termes de l'article L. 2411-5 du code du travail, dans sa rédaction alors applicable : " Le licenciement d'un délégué du personnel, titulaire ou suppléant, ne peut intervenir qu'après autorisation de l'inspecteur du travail ". En vertu de ces dispositions, les salariés légalement investis des fonctions de délégué du personnel bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des salariés qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle. Lorsque le licenciement de l'un de ces salariés est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé. Dans le cas où la demande de licenciement est motivée par un comportement fautif, il appartient à l'inspecteur du travail et, le cas échéant, au ministre, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les faits reprochés au salarié sont d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement, compte tenu de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé et des exigences propres à l'exécution normale du mandat dont il est investi. Il doit aussi vérifier, notamment, la régularité de ce projet de licenciement au regard de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé, au nombre desquelles figurent les stipulations des accords collectifs de travail applicables au salarié.

3. Aux termes de l'article 19 de la convention collective nationale du personnel au sol des entreprises de transport aérien du 22 mai 1959, étendue par arrêté du 10 janvier 1964, dans sa rédaction issue en dernier lieu d'un avenant à la convention du 10 janvier 2001 étendu par arrêté du 29 avril 2002 : " A l'issue de l'entretien préalable, toute proposition de licenciement pour faute constituant une infraction à la discipline, à l'exclusion du licenciement pour faute grave ou pour faute lourde justifiant une rupture immédiate du contrat de travail prononcée par l'employeur, est soumise pour avis à un conseil de discipline, lorsque l'intéressé en fait expressément la demande. / Cette demande, formulée par écrit, doit parvenir à l'employeur 8 jours calendaires après la première présentation de la proposition, envoyée en recommandé avec avis de réception, informant le salarié du motif de son licenciement et du délai dont il dispose pour saisir le conseil de discipline. / En l'absence de demande de saisine exprimée dans le délai prescrit, ce courrier vaut notification de licenciement (...) ".

4. En jugeant qu'il résulte clairement de ces stipulations que lorsque le licenciement pour faute d'un personnel au sol d'une entreprise de transport aérien est envisagé, ce salarié doit être mis à même de demander dans le délai qu'elles fixent la saisine d'un conseil de discipline avant qu'il ne soit licencié et, lorsqu'il s'agit d'un salarié protégé, avant que l'autorité administrative n'autorise son licenciement, la cour administrative d'appel de Paris, qui a suffisamment motivé son arrêt, n'a pas dénaturé la portée de ces stipulations et n'a pas commis d'erreur de droit.

5. Il résulte de ce qui précède que le pourvoi de la société Vietnam Airlines JSC doit être rejeté, y compris ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de cette société une somme de 3 000 euros à verser, au même titre, à M. A....

D E C I D E :

--------------

Article 1 : Le pourvoi de la société Vietnam Airlines JSC est rejeté.

Article 2 : La société Vietnam Airlines JSC versera une somme de 3 000 euros à M. A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la société Vietnam Airlines JSC et à M. B... A....

Copie en sera adressée à la ministre du travail.


Synthèse
Formation : 4ème - 1ère chambres réunies
Numéro d'arrêt : 418488
Date de la décision : 29/05/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

TRANSPORTS - TRANSPORTS AÉRIENS - PERSONNELS - PERSONNELS DES COMPAGNIES AÉRIENNES - LICENCIEMENT D'UN MEMBRE DU PERSONNEL AU SOL - SALARIÉ DEVANT AVOIR ÉTÉ MIS À MÊME DE DEMANDER LA SAISINE D'UN CONSEIL DE DISCIPLINE (ART - 19 DE LA CONVENTION COLLECTIVE DU 22 MAI 1959) [RJ1].

65-03-01-01 Il résulte clairement des stipulations de l'article 19 de la convention collective nationale du personnel au sol des entreprises de transport aérien du 22 mai 1959, dans sa rédaction issue en dernier lieu d'un avenant à la convention du 10 janvier 2001 étendu par arrêté du 29 avril 2002, que, lorsque le licenciement pour faute d'un personnel au sol d'une entreprise de transport aérien est envisagé, ce salarié doit être mis à même de demander dans le délai qu'elles fixent la saisine d'un conseil de discipline avant qu'il ne soit licencié et, lorsqu'il s'agit d'un salarié protégé, avant que l'autorité administrative n'autorise son licenciement.

TRAVAIL ET EMPLOI - LICENCIEMENTS - AUTORISATION ADMINISTRATIVE - SALARIÉS PROTÉGÉS - CONDITIONS DE FOND DE L'AUTORISATION OU DU REFUS D'AUTORISATION - PERSONNEL AU SOL D'UNE ENTREPRISE DE TRANSPORT AÉRIEN - SALARIÉ DEVANT AVOIR ÉTÉ MIS À MÊME DE DEMANDER LA SAISINE D'UN CONSEIL DE DISCIPLINE (ART - 19 DE LA CONVENTION COLLECTIVE DU 22 MAI 1959) [RJ1].

66-07-01-04 Il résulte clairement des stipulations de l'article 19 de la convention collective nationale du personnel au sol des entreprises de transport aérien du 22 mai 1959, dans sa rédaction issue en dernier lieu d'un avenant à la convention du 10 janvier 2001 étendu par arrêté du 29 avril 2002, que, lorsque le licenciement pour faute d'un personnel au sol d'une entreprise de transport aérien est envisagé, ce salarié doit être mis à même de demander dans le délai qu'elles fixent la saisine d'un conseil de discipline avant qu'il ne soit licencié et, lorsqu'il s'agit d'un salarié protégé, avant que l'autorité administrative n'autorise son licenciement.


Références :

[RJ1]

Cf., sur le contrôle par l'autorité administrative du respect des accords collectifs de travail, CE, 21 mai 2008, Ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement c/,, n° 304394, p. 183 ;

CE, 29 juin 2016, M.,, n° 387412, T. p. 979.


Publications
Proposition de citation : CE, 29 mai. 2020, n° 418488
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Yaël Treille
Rapporteur public ?: M. Frédéric Dieu
Avocat(s) : SCP GATINEAU, FATTACCINI, REBEYROL ; SCP BORE, SALVE DE BRUNETON, MEGRET

Origine de la décision
Date de l'import : 09/06/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2020:418488.20200529
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