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02/12/2019 | FRANCE | N°430712

France | France, Conseil d'État, 7ème - 2ème chambres réunies, 02 décembre 2019, 430712


Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 7 mai 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'Union nationale des syndicats CGT des CROUS (UN-CGT-CROUS), la Fédération CGT de l'enseignement, de la recherche et de la culture (FERC-CGT) et l'Union fédérale CGT des syndicats de l'Etat (UFSE-CGT) demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 28 février 2019 de la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation portant nomination au conseil d'administration du Centre national des oeuvres

universitaires et scolaires (CNOUS) en tant qu'il comporte, au c), les mo...

Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 7 mai 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'Union nationale des syndicats CGT des CROUS (UN-CGT-CROUS), la Fédération CGT de l'enseignement, de la recherche et de la culture (FERC-CGT) et l'Union fédérale CGT des syndicats de l'Etat (UFSE-CGT) demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 28 février 2019 de la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation portant nomination au conseil d'administration du Centre national des oeuvres universitaires et scolaires (CNOUS) en tant qu'il comporte, au c), les mots : " personnels ouvriers " ainsi que les mots : " personnels administratifs : / M. C... A..., membre titulaire. / Mme D... B..., suppléante " ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite de la ministre refusant de supprimer, au c) de l'article R. 822-4 du code de l'éducation, dans sa rédaction issue du décret du 29 juillet 2016 relatif aux missions et à l'organisation des oeuvres universitaires, les mots : " à raison de deux titulaires et de deux suppléants choisis parmi les personnels ouvriers, et d'un titulaire et d'un suppléant choisis parmi les personnels administratifs " ;

3°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite de la ministre refusant de supprimer, au c) de l'article R. 822-10 du code de l'éducation, dans sa rédaction issue du même décret, les mots : " à raison de deux titulaires et deux suppléants représentant les personnels ouvriers, et un titulaire et un suppléant représentant les personnels administratifs " ainsi que les mots : " aux commissions administratives paritaires dans l'académie pour les personnels administratifs et au vu des résultats des élections à la commission paritaire régionale pour les personnels ouvriers ".

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la Constitution, notamment son Préambule ;

- le code de l'éducation ;

- le code du travail ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- la loi n° 2008-789 du 20 août 2008 ;

- la loi n° 2010-751 du 5 juillet 2010 ;

- le décret n° 2016-1042 du 29 juillet 2016 ;

- le décret n° 2017-41 du 17 janvier 2017 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Marc Firoud, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Gilles Pellissier, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

Sur les conclusions dirigées contre la décision implicite de la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation refusant de modifier les articles R. 822-4 et R. 822-10 du code de l'éducation, dans leur rédaction issue du décret du 29 juillet 2016 :

1. Aux termes du cinquième alinéa de l'article L. 822-1 du code de l'éducation : " (...) La désignation des représentants des personnels aux conseils d'administration du centre national et des centres régionaux du réseau des oeuvres est effectuée, respectivement, par le ministre chargé de l'enseignement supérieur et le recteur d'académie sur proposition des organisations syndicales représentatives, qui s'assurent d'une participation égale entre femmes et hommes ". Aux termes de l'article R. 822-4 du même code, dans sa rédaction issue du décret 29 juillet 2016 relatif aux missions et à l'organisation des oeuvres universitaires, le conseil d'administration du Centre national oeuvres universitaires et scolaires (CNOUS) comprend notamment : " (...) c) Trois membres titulaires et trois suppléants représentant les personnels du centre national et des centres régionaux désignés par le ministre chargé de l'enseignement supérieur, sur proposition des organisations syndicales représentatives au plan national, à raison de deux titulaires et de deux suppléants choisis parmi les personnels ouvriers, et d'un titulaire et d'un suppléant choisis parmi les personnels administratifs ". Aux termes de l'article R. 822-10 du même code, dans sa rédaction issue du même décret, le conseil d'administration de chaque centre régional des oeuvres universitaires (CROUS) comprend notamment : " (...) c) Trois représentants titulaires des personnels et trois suppléants, à raison de deux titulaires et deux suppléants représentant les personnels ouvriers, et un titulaire et un suppléant représentant les personnels administratifs, nommés par le recteur d'académie sur proposition des organisations syndicales représentatives dans le ressort du centre, cette représentativité étant appréciée au vu des résultats des élections aux commissions administratives paritaires dans l'académie pour les personnels administratifs et au vu des résultats des élections à la commission paritaire régionale pour les personnels ouvriers ".

2. L'Union nationale des syndicats CGT des CROUS (UN-CGT-CROUS) et autres demandent l'annulation de la décision implicite par laquelle la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation a refusé de modifier les articles R. 822-4 et R. 822-10 du code de l'éducation en supprimant, dans le premier article, les mots : " à raison de deux titulaires et de deux suppléants choisis parmi les personnels ouvriers, et d'un titulaire et d'un suppléant choisis parmi les personnels administratifs " et, dans le second article, les mots : " à raison de deux titulaires et deux suppléants représentant les personnels ouvriers, et un titulaire et un suppléant représentant les personnels administratifs " ainsi que les mots : " aux commissions administratives paritaires dans l'académie pour les personnels administratifs et au vu des résultats des élections à la commission paritaire régionale pour les personnels ouvriers ".

3. En premier lieu, en l'absence de disposition législative ou réglementaire précisant les critères au regard desquels est appréciée la représentativité des organisations syndicales appelées à proposer les noms des représentants du personnel au sein du conseil d'administration d'un établissement public, il appartient à l'administration de procéder librement à ce choix dans l'intérêt général, en s'assurant de la représentativité suffisante des organisations syndicales qu'elle retient à cette fin, sans d'ailleurs être tenue d'assurer une représentation des différentes catégories d'agents. Il appartient toutefois au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de contrôler les motifs sur lesquels l'administration s'est fondée pour effectuer son choix et de prononcer l'annulation de la décision prise si le motif retenu est erroné en droit, s'il repose sur un fait matériellement inexact, s'il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ou enfin s'il procède d'un détournement de pouvoir.

4. Si les syndicats requérants invoquent les dispositions de l'article 1er de la loi du 20 août 2008 portant rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail, il résulte de leurs termes mêmes qu'elles n'ont pour objet que de modifier des dispositions du code du travail qui ne sont pas applicables aux établissements publics à caractère administratif comme le CNOUS et les CROUS. Par ailleurs, les dispositions de la loi du 5 juillet 2010 relative à la rénovation du dialogue social et comportant diverses dispositions relatives à la fonction publique, dont se prévalent également les requérants, ne régissent pas la composition des conseils d'administration des établissements publics. Il suit de là qu'en l'absence de dispositions précisant les critères au regard desquels est appréciée la représentativité des organisations syndicales appelées à proposer les noms des représentants du personnel aux conseils d'administration du CNOUS et des CROUS, les syndicats requérants ne sont pas fondés à soutenir que le pouvoir réglementaire aurait été tenu de prévoir, aux articles R. 822-4 et R. 822 10 du code de l'éducation, que cette représentativité devait être appréciée au regard des seuls résultats des élections professionnelles aux comités techniques de ces établissements.

5. Il ne ressort pas des pièces du dossier que le choix d'apprécier la représentativité des organisations syndicales pour la désignation des représentants du personnel aux conseils d'administration des CROUS au regard des résultats, d'une part, des élections aux commissions administratives paritaires dans l'académie pour les personnels administratifs et, d'autre part, des élections à la commission paritaire régionale pour les personnels ouvriers, reposerait sur un fait matériellement inexact ou serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.

6. En second lieu, si le décret du 29 mars 2017 relatif aux emplois et types d'emplois des établissements publics administratifs de l'Etat figurant sur la liste prévue au 2° de l'article 3 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 a mis fin à la faculté pour le CNOUS et les CROUS de recruter des personnels ouvriers contractuels, il ressort des pièces du dossier que le nombre de ces personnels ouvriers non titulaires demeure élevé dans les effectifs de ces établissements. Dans ces conditions, les dispositions contestées pouvaient sans illégalité continuer de prévoir une représentation spécifique de cette catégorie de personnel au sein des conseils d'administration du CNOUS et des CROUS.

7. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la fin de non-recevoir opposée par la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation, que les syndicats requérants ne sont pas fondés à demander l'annulation de la décision implicite refusant de modifier les articles R. 822-4 et R. 822-10 du code de l'éducation.

Sur les conclusions dirigées contre l'arrêté du 28 février 2019 de la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation portant nomination au conseil d'administration du Centre national des oeuvres universitaires et scolaires :

8. Si tout justiciable est recevable à invoquer au soutien d'un recours formé à l'encontre d'une décision administrative individuelle l'illégalité éventuelle de l'acte administratif réglementaire qui sert de fondement à cette décision, il ne saurait cependant en être inféré qu'il existerait nécessairement un lien de connexité, au sens de l'article R. 341-1 du code de justice administrative, entre le recours tendant à l'annulation pour excès de pouvoir d'un règlement et celui contestant la légalité d'une décision individuelle prise sur le fondement de ce règlement. En l'absence de connexité entre les conclusions de la requête critiquant le décret et celles mettant en cause une mesure individuelle prise sur son fondement, le Conseil d'Etat n'est pas compétent en premier ressort pour connaître des conclusions de la requête dirigées contre l'arrêté du 28 février 2019 portant nomination au conseil d'administration du Centre national des oeuvres universitaires et scolaires. Il y a lieu, dès lors, d'attribuer le jugement de ces conclusions au tribunal administratif de Cergy-Pontoise, compétent pour en connaître en vertu de l'article R. 312-9 du code de justice administrative.

D E C I D E :

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Article 1er : Les conclusions de la requête de l'Union nationale des syndicats CGT des CROUS et autres dirigées contre l'arrêté du 28 février 2019 de la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation portant nomination au conseil d'administration du Centre national des oeuvres universitaires et scolaires sont renvoyées au tribunal administratif de Cergy-Pontoise.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à l'Union nationale des syndicats CGT des CROUS, première requérante dénommée, à la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation et au président du tribunal administratif de Cergy-Pontoise.

Copie en sera adressée au ministre de l'action des comptes publics.


Synthèse
Formation : 7ème - 2ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 430712
Date de la décision : 02/12/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 02 déc. 2019, n° 430712
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Marc Firoud
Rapporteur public ?: M. Gilles Pellissier

Origine de la décision
Date de l'import : 24/12/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2019:430712.20191202
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