Vu la procédure suivante :
Par deux demandes, la société SMA, subrogée dans les droits de la commune d'Orléans, a demandé au tribunal administratif d'Orléans de condamner plusieurs sociétés en réparation de désordres affectant la construction d'un centre de conférences. Par deux ordonnances n° 1100771 et n° 1100774 du 31 octobre 2017, le vice-président du tribunal administratif d'Orléans a donné acte du désistement de la société SMA.
Par une ordonnance n°s 17NT03649, 17NT03652 du 22 février 2018, le président de la 4ème chambre de la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté les appels formés par la société SMA contre ces ordonnances.
Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 23 avril et 8 juin 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société SMA demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cette ordonnance ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à ses appels ;
3°) de mettre à la charge de la société Ineo Centre, de la société Egis Bâtiments, de la société Qualiconsult, de la société Gallier, de M. C... D..., de la société Hervé Thermique et de Me A... B... ès qualités de liquidateur de la société Amif Expansion la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. François Lelièvre, maître des requêtes,
- les conclusions de Mme Mireille Le Corre, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP L. Poulet, Odent, avocat de la société SMA, à la SCP Célice, Soltner, Texidor, Perier, avocat de la société Ineo centre, et à la SCP Boutet-Hourdeaux, avocat des sociétés Qualiconsult et Gallier ;
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " (...) les premiers vice-présidents des tribunaux et des cours (...) peuvent, par ordonnance : / 1° Donner acte des désistements (...) ". Aux termes de l'article R. 611-8-1 du code de justice administrative, figurant au livre VI de ce code relatif à l'instruction des requêtes, dans sa rédaction alors applicable : " Le président de la formation de jugement ou, au Conseil d'Etat, le président de la chambre chargée de l'instruction peut demander à l'une des parties de reprendre, dans un mémoire récapitulatif, les conclusions et moyens précédemment présentés dans le cadre de l'instance en cours, en l'informant que, si elle donne suite à cette invitation, les conclusions et moyens non repris seront réputés abandonnés. En cause d'appel, il peut être demandé à la partie de reprendre également les conclusions et moyens présentés en première instance qu'elle entend maintenir. / Le président de la formation de jugement ou, au Conseil d'Etat, le président de la chambre chargée de l'instruction peut en outre fixer un délai, qui ne peut être inférieur à un mois, à l'issue duquel, à défaut d'avoir produit le mémoire récapitulatif mentionné à l'alinéa précédent, la partie est réputée s'être désistée de sa requête ou de ses conclusions incidentes. La demande de production d'un mémoire récapitulatif informe la partie des conséquences du non-respect du délai fixé ".
2. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que par deux demandes, la société SMA, subrogée dans les droits de la commune d'Orléans, a demandé au tribunal administratif d'Orléans de condamner plusieurs sociétés en réparation de désordres affectant la construction d'un centre de conférences. Par deux ordonnances du 31 octobre 2017 prises sur le fondement de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, le vice-président du tribunal administratif d'Orléans a, par application du second alinéa de l'article R. 611-8-1 du code de justice administrative, donné acte à la société du désistement de ses demandes. La société SMA se pourvoit en cassation contre l'ordonnance du 22 février 2018 par laquelle le président de la 4ème chambre de la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté les appels qu'elle avait formés contre les deux ordonnances de première instance.
3. A l'occasion de la contestation en appel de l'ordonnance prenant acte du désistement d'un requérant en l'absence de réponse à l'expiration du délai qui lui a été fixé pour produire un mémoire récapitulatif, il incombe au juge d'appel, saisi de moyens en ce sens, de vérifier que l'intéressé a reçu la demande mentionnée par les dispositions de l'article R. 611-8-1 du code de justice administrative, que cette demande fixait un délai d'au moins un mois au requérant pour répondre et l'informait des conséquences d'un défaut de réponse dans ce délai, que le requérant s'est abstenu de répondre en temps utile et d'apprécier si le premier juge, dans les circonstances de l'affaire, a fait une juste application des dispositions de l'article R. 611-8-1. Il n'appartient au juge de cassation de remettre en cause cette dernière appréciation que dans le cas où il estime, au vu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, qu'il a été fait un usage abusif de la faculté ouverte par ces dispositions.
4. En premier lieu, contrairement à ce qui est soutenu, l'ordonnance attaquée, par laquelle le président de la 4ème chambre de la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté les appels formés contre les deux ordonnances donnant acte, en première instance, du désistement de la société SMA de ses demandes par application de l'article R. 611-8-1, est suffisamment motivée et n'est entachée d'aucune omission de statuer.
5. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 611-10 du code de justice administrative : " Sous l'autorité du président de la chambre à laquelle il appartient et avec le concours du greffier de cette chambre, le rapporteur fixe, eu égard aux circonstances de l'affaire, le délai accordé aux parties pour produire leurs mémoires. Il peut demander aux parties, pour être jointes à la procédure contradictoire, toutes pièces ou tous documents utiles à la solution du litige. / Le président de la formation de jugement peut déléguer au rapporteur les pouvoirs qui lui sont conférés par les articles (...) R. 611-8-1 ". Pour écarter le moyen soulevé en appel par la société SMA, selon lequel les ordonnances donnant acte du désistement de ses demandes étaient irrégulières dès lors que le rapporteur en charge du dossier au tribunal administratif n'aurait pas reçu de délégation du président de la formation de jugement pour l'inviter à produire un mémoire récapitulatif au titre de l'article R. 611-8-1 du code de justice administrative, l'ordonnance attaquée s'est notamment fondée sur le motif que le président de la formation de jugement du tribunal administratif, en signant les ordonnances contestées en appel, devait être regardé comme s'étant approprié les actes d'instruction pris sous son autorité. En se fondant sur ce motif, qui suffit pour écarter le moyen soulevé en appel, le président de la 4ème chambre de la cour administrative d'appel de Nantes n'a pas commis d'erreur de droit.
6. En troisième lieu, ni la demande de production du mémoire récapitulatif ni l'ordonnance donnant acte du désistement ne sont tenues d'indiquer les motifs pour lesquels il a été estimé qu'il y avait lieu d'inviter une partie à produire un mémoire récapitulatif en application de l'article R. 611-8-1 du code de justice administrative. Dès lors, la société SMA n'est pas fondée à soutenir que le président de la 4ème chambre de la cour administrative d'appel de Nantes aurait commis une erreur de droit en jugeant que le vice-président du tribunal administratif d'Orléans avait pu se borner à citer les dispositions de l'article R. 611-8-1 du code de justice administrative.
7. En quatrième lieu, le président de la 4ème chambre de la cour administrative d'appel de Nantes n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant que la circonstance que la société SMA avait produit des mémoires récapitulatifs avant la clôture de l'instruction ne faisait pas obstacle à l'application des dispositions de l'article R. 611-8-1 du code de justice administrative, dès lors que ces mémoires n'avaient pas été produits dans le délai imparti.
8. En dernier lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'il aurait été fait en l'espèce, au vu de l'ensemble des circonstances de l'affaire, un usage abusif de la faculté ouverte par l'article R. 611-8-1 du code de justice administrative.
9. Il résulte de ce qui précède que la société SMA n'est pas fondée à demander l'annulation de l'ordonnance qu'elle attaque.
10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la société Ineo Centre, de la société Egis, de la société Qualiconsult, de la société Gallier, de M. D..., de la société Hervé Thermique et de Me B..., qui ne sont pas les parties perdantes dans la présente instance, le versement des sommes que demande, à ce titre, la société SMA. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société SMA une somme globale de 3 000 euros à verser aux sociétés Gallier et Qualiconsult au titre des mêmes dispositions.
D E C I D E :
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Article 1er : Le pourvoi de la société SMA est rejeté.
Article 2 : La société SMA versera la somme de 3 000 euros aux sociétés Gallier et Qualiconsult en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la société SMA, à la société Ineo Centre, à la société Egis Bâtiments, à la société Qualiconsult, à la société Gallier, à M. C... D..., à la société Hervé Thermique et à Me A... B....