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24/07/2019 | FRANCE | N°423053

France | France, Conseil d'État, 6ème chambre, 24 juillet 2019, 423053


Vu la procédure suivante :

M. J...G..., Mme H...G..., M. K...D..., Mme B...D..., M. E...L..., M. I...A...et M. C...F...ont demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 30 novembre 2017 par lequel le maire de Brétigny-sur-Orge (Essonne) a accordé à la société Green City Imobilier un permis de construire une résidence de trente logements collectifs. Par une ordonnance n° 1803396 du 18 juin 2018, le président de la 9ème chambre du tribunal administratif de Versailles a rejeté cette demande.

Par un pourvoi sommaire et un

mémoire complémentaire, enregistrés au secrétariat du contentieux du Conse...

Vu la procédure suivante :

M. J...G..., Mme H...G..., M. K...D..., Mme B...D..., M. E...L..., M. I...A...et M. C...F...ont demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 30 novembre 2017 par lequel le maire de Brétigny-sur-Orge (Essonne) a accordé à la société Green City Imobilier un permis de construire une résidence de trente logements collectifs. Par une ordonnance n° 1803396 du 18 juin 2018, le président de la 9ème chambre du tribunal administratif de Versailles a rejeté cette demande.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'État les 9 août et 24 octobre 2018, M. G...et autres demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cette ordonnance ;

2°) de mettre à la charge de la commune de Brétigny-sur-Orge une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Didier Ribes, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Stéphane Hoynck, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Baraduc, Duhamel, Rameix, avocat de M. G...et autres, à la SCP Jean-Philippe Caston, avocat de la commune de Bretigny-sur-orge et à la SCP L. Poulet, Odent, avocat de la société Green City Immobilier ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que le maire de Brétigny-sur-Orge a délivré à la société Green City Immobilier, par un arrêté du 30 novembre 2017, un permis de construire une résidence de trente logements collectifs. Par une ordonnance du 18 juin 2018, le président de la 9ème chambre du tribunal administratif de Versailles a rejeté la demande de M. G...et autres tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de cet arrêté comme manifestement irrecevable en l'absence de régularisation de la présentation des pièces jointes au moyen de l'application informatique mentionnée à l'article R. 414-1 du code de justice administrative, dénommée Télérecours, au motif que ces pièces n'avaient pas été répertoriées par un signet les désignant conformément à leur inventaire. M. G...et autres se pourvoient en cassation contre cette ordonnance.

2. Aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " (...) les présidents de formation de jugement des tribunaux et des cours (...) peuvent, par ordonnance : / (...) 4° Rejeter les requêtes manifestement irrecevables, lorsque la juridiction n'est pas tenue d'inviter leur auteur à les régulariser ou qu'elles n'ont pas été régularisées à l'expiration du délai imparti par une demande en ce sens ; (...) Les présidents des formations de jugement des cours peuvent (...), par ordonnance, rejeter (...), les requêtes dirigées contre des ordonnances prises en application des 1° à 5° du présent article (...) ". Aux termes de l'article R. 612-1 du même code : " Lorsque des conclusions sont entachées d'une irrecevabilité susceptible d'être couverte après l'expiration du délai de recours, la juridiction ne peut les rejeter en relevant d'office cette irrecevabilité qu'après avoir invité leur auteur à les régulariser. / (...) / La demande de régularisation mentionne que, à défaut de régularisation, les conclusions pourront être rejetées comme irrecevables dès l'expiration du délai imparti qui, sauf urgence, ne peut être inférieur à quinze jours. La demande de régularisation tient lieu de l'information prévue à l'article R. 611-7 ".

3. Aux termes de l'article R. 412-2 du code de justice administrative : " Lorsque les parties joignent des pièces à l'appui de leurs requêtes et mémoires, elles en établissent simultanément un inventaire détaillé (...) ". L'article R. 414-1 du même code dispose : " Lorsqu'elle est présentée par un avocat, un avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, une personne morale de droit public autre qu'une commune de moins de 3 500 habitants ou un organisme de droit privé chargé de la gestion permanente d'un service public, la requête doit, à peine d'irrecevabilité, être adressée à la juridiction par voie électronique au moyen d'une application informatique dédiée accessible par le réseau internet. La même obligation est applicable aux autres mémoires du requérant (...) ". Aux termes des dispositions de l'article R. 414-3 du même code, dans leur rédaction applicable au litige : " Par dérogation aux dispositions des articles R. 411-3, R. 411-4, R. 412-1 et R. 412-2, les requérants sont dispensés de produire des copies de leur requête et des pièces qui sont jointes à celle-ci et à leurs mémoires. / Les pièces jointes sont présentées conformément à l'inventaire qui en est dressé. / Lorsque le requérant transmet, à l'appui de sa requête, un fichier unique comprenant plusieurs pièces, chacune d'entre elles doit être répertoriée par un signet la désignant conformément à l'inventaire mentionné ci-dessus. S'il transmet un fichier par pièce, l'intitulé de chacun d'entre eux doit être conforme à cet inventaire. Le respect de ces obligations est prescrit à peine d'irrecevabilité de la requête. / Les mêmes obligations sont applicables aux autres mémoires du requérant, sous peine pour celui-ci, après invitation à régulariser non suivie d'effet, de voir ses écritures écartées des débats. / Si les caractéristiques de certaines pièces font obstacle à leur communication par voie électronique, ces pièces sont transmises sur support papier, dans les conditions prévues par l'article R. 412-2. L'inventaire des pièces transmis par voie électronique en fait mention ".

4. Les dispositions citées au point 3 relatives à la transmission de la requête et des pièces qui y sont jointes par voie électronique définissent un instrument et les conditions de son utilisation qui concourent à la qualité du service public de la justice rendu par les juridictions administratives et à la bonne administration de la justice. Elles ont pour finalité de permettre un accès uniformisé et rationalisé à chacun des éléments du dossier de la procédure, selon des modalités communes aux parties, aux auxiliaires de justice et aux juridictions.

5. Ces dispositions organisent la transmission par voie électronique des pièces jointes à la requête à partir de leur inventaire détaillé. Cet inventaire doit s'entendre comme une présentation exhaustive des pièces par un intitulé comprenant, pour chacune d'elles, un numéro dans un ordre continu et croissant ainsi qu'un libellé suffisamment explicite.

6. Ces dispositions imposent également, eu égard à la finalité mentionnée au point 4, de désigner chaque pièce dans l'application Télérecours au moins par le numéro d'ordre qui lui est attribué par l'inventaire détaillé, que ce soit dans l'intitulé du signet la répertoriant dans le cas de son intégration dans un fichier unique global comprenant plusieurs pièces ou dans l'intitulé du fichier qui lui est consacré dans le cas où celui-ci ne comprend qu'une seule pièce. Dès lors, la présentation des pièces jointes est conforme à leur inventaire détaillé lorsque l'intitulé de chaque signet au sein d'un fichier unique global ou de chaque fichier comprenant une seule pièce comporte au moins le même numéro d'ordre que celui affecté à la pièce par l'inventaire détaillé. En cas de méconnaissance de ces prescriptions, la requête est irrecevable si le requérant n'a pas donné suite à l'invitation à régulariser que la juridiction doit, en ce cas, lui adresser par un document indiquant précisément les modalités de régularisation de la requête.

7. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que M. G...et autres ont adressé au tribunal administratif de Versailles, le 11 mai 2018, en utilisant l'application Télérecours, une demande accompagnée d'un inventaire mentionnant huit pièces qui y étaient numérotées par ordre croissant continu et désignées par des libellés suffisamment explicites ainsi que de huit fichiers comprenant chacun une seule pièce et reprenant les numéros des pièces figurant à l'inventaire mais sans comporter aucun libellé. Le 15 mai 2018, l'avocat de la requérante a reçu une invitation à régulariser cette demande dans le délai de quinze jours. Cette demande de régularisation précisait, notamment, qu'en cas de transmission des pièces dans des fichiers séparés, l'intitulé de chacun des fichiers devait être conforme à l'inventaire des pièces. Toutefois, dès lors que chaque fichier transmis le 11 mai 2018 était intitulé d'après le numéro d'ordre affecté par l'inventaire détaillé à la pièce qu'il comprenait, le président de la 9ème chambre du tribunal administratif de Versailles a commis une erreur de droit en rejetant la demande des requérants comme manifestement irrecevable au motif que leur avocat n'avait pas, comme il y était tenu, régularisé leur requête en produisant les fichiers assortis d'un intitulé les désignant conformément à l'inventaire des pièces. Par suite, sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen du pourvoi, les requérants sont fondés à demander l'annulation de l'ordonnance qu'ils attaquent.

8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Brétigny-sur-Orge le versement à M. et MmeG..., M. et MmeD..., M. L..., M. A...et M. F...de la somme de 300 euros chacun, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'ordonnance du tribunal administratif du 18 juin 2018 est annulée.

Article 2 : L'affaire est renvoyée au tribunal administratif de Versailles.

Article 3 : La commune de Brétigny-sur-Orge versera à M. et MmeG..., M. et MmeD..., M.L..., M. A...et M. F...une somme de 300 euros chacun au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. J...G..., premier dénommé, pour l'ensemble des requérants, et à la commune de Brétigny-sur-Orge.


Synthèse
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 423053
Date de la décision : 24/07/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 24 jui. 2019, n° 423053
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Didier Ribes
Avocat(s) : SCP BARADUC, DUHAMEL, RAMEIX ; SCP JEAN-PHILIPPE CASTON ; SCP L. POULET, ODENT

Origine de la décision
Date de l'import : 30/07/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2019:423053.20190724
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