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27/03/2019 | FRANCE | N°426269

France | France, Conseil d'État, 8ème - 3ème chambres réunies, 27 mars 2019, 426269


Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 14 décembre 2018 et 21 février 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. et Mme A... B... demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le deuxième alinéa du paragraphe n° 82 des commentaires administratifs publiés le 11 avril 2008 au bulletin officiel des impôts sous la référence 7 S-3-08 ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres

pièces du dossier ;

Vu :

- le code de commerce ;

- le code général des impôts et le ...

Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 14 décembre 2018 et 21 février 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. et Mme A... B... demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le deuxième alinéa du paragraphe n° 82 des commentaires administratifs publiés le 11 avril 2008 au bulletin officiel des impôts sous la référence 7 S-3-08 ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de commerce ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jean-Marc Vié, maître des requêtes,

- les conclusions de Mme Karin Ciavaldini, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes des dispositions de l'article 885-0 V bis du code général des impôts, dans leur rédaction alors en vigueur : " I.-1. Le redevable peut imputer sur l'impôt de solidarité sur la fortune 75 % des versements effectués au titre de souscriptions au capital initial ou aux augmentations de capital de sociétés, en numéraire ou en nature par apport de biens nécessaires à l'exercice de l'activité (...) La société bénéficiaire des versements mentionnée au premier alinéa doit satisfaire aux conditions suivantes : (...) f) Etre en phase d'amorçage, de démarrage ou d'expansion au sens des lignes directrices concernant les aides d'Etat visant à promouvoir les investissements en capital-investissement dans les petites et moyennes entreprises (2006 / C 194 / 02) (...) ".

2. Le paragraphe n° 82 de l'instruction publiée le 11 avril 2008 au bulletin officiel des impôts sous la référence 7 S-3-08, relative à la réduction d'impôt de solidarité sur la fortune en faveur de l'investissement dans les petites et moyennes entreprises, énonce que : " Le capital d'amorçage est défini par les lignes directrices comme : " le financement fourni pour étudier, évaluer et développer un concept de base préalablement à la phase de démarrage ". / Pour l'application des dispositions de l'article 885-0 V bis, cette phase correspond à la période au cours de laquelle l'entreprise n'est qu'au stade de projet et n'est donc pas encore constituée juridiquement. La société est donc en phase de formation ".

3. Les lignes directrices n° 2006/C 194/02 de la Commission européenne concernant les aides d'Etat visant à promouvoir les investissements en capital-investissement dans les petites et moyennes entreprises, publiées le 18 août 2006, précisent que, pour assurer leur compatibilité avec le marché commun, les aides en matière de capital-investissement doivent être restreintes au financement des phases d'amorçage, de démarrage et d'expansion des petites et moyennes entreprises. Le e) du point 2.2 de ces lignes directrices définit le capital d'amorçage comme le " financement fourni pour étudier, évaluer et développer un concept de base préalablement à la phase de démarrage ", la phase d'amorçage étant caractérisée par des défaillances de marché prononcées en raison du risque élevé qu'elle implique pour un investisseur potentiel. Le f) du même point 2.2 désigne le capital de démarrage comme le " financement fourni aux entreprises qui n'ont pas commercialisé de produits ou de services et ne réalisent pas encore de bénéfices, pour le développement et la première commercialisation de leurs produits ", tandis que le h) indique que le capital d'expansion est constitué du " financement visant à assurer la croissance et l'expansion d'une société qui peut ou non avoir atteint le seuil de rentabilité ou dégager des bénéfices, et employé pour augmenter les capacités de production, développer un marché ou un produit ou renforcer le fonds de roulement de la société ".

4. Il résulte des termes mêmes du I.1 de l'article 885-0 V bis du code général des impôts que la réduction d'impôt de solidarité sur la fortune qu'il prévoit au titre des souscriptions au capital initial ou aux augmentations de capital de sociétés est limitée aux versements effectués au profit de sociétés en phase d'amorçage, de démarrage ou d'expansion au sens des lignes directrices n° 2006/C 194/02 de la Commission européenne. Ainsi qu'il a été dit au point 3, ces phases s'entendent, au sens des lignes directrices, comme la période continue de développement d'une petite ou moyenne entreprise allant de la création du concept de cette entreprise jusqu'à sa croissance, en passant par la commercialisation de ses premiers produits ou services. Dans la mesure où les lignes directrices définissent le capital de démarrage comme celui destiné aux entreprises qui n'ont pas encore commercialisé de produits ou de services, en vue du développement et de la première commercialisation de ces derniers, et le capital d'amorçage comme le capital destiné, non à des entreprises, mais à l'étude et à l'approfondissement d'un concept de base préalable à la phase de démarrage, la constitution d'une entreprise marque nécessairement le début de la phase de démarrage et l'achèvement de la phase d'amorçage qui la précède.

5. Il s'ensuit qu'en énonçant que la phase d'amorçage correspond à la période au cours de laquelle l'entreprise n'est qu'au stade de projet et n'est donc pas encore constituée juridiquement, les commentaires attaqués n'ont méconnu la portée ni des dispositions du f) du I.1 de l'article 885-0 V bis du code général des impôts, ni des lignes directrices concernant les aides d'Etat visant à promouvoir les investissements en capital-investissement dans les petites et moyennes entreprises. La circonstance alléguée qu'il existerait une discontinuité entre la phase d'amorçage de l'entreprise, telle que décrite par le paragraphe n° 82 de l'instruction attaquée, et les phases de démarrage et d'expansion, dont la définition est éclairée par les énonciations des paragraphes n° 86 et n° 87 de cette instruction, est en tout état de cause dépourvue d'incidence sur la légalité des commentaires attaqués. Au demeurant, les dispositions de l'article 885-0 V bis, pas davantage que les lignes directrices, n'introduisent de discontinuité entre les différentes phases du processus de développement de l'entreprise, chacune étant d'ailleurs identiquement éligible au dispositif de réduction d'impôt de solidarité sur la fortune en faveur de l'investissement dans les petites et moyennes entreprises.

6. Enfin, si les requérants soutiennent que l'interprétation de la loi donnée par les commentaires attaqués conduirait à introduire une différence de traitement injustifiée entre les sociétés en phase de formation et les sociétés déjà constituées, cette argumentation n'est pas dirigée contre l'instruction en litige qui, ainsi qu'il a été dit, n'ajoute pas à la loi qu'elle a pour objet de commenter, mais revient à mettre en cause la conformité de la loi elle-même au principe constitutionnel d'égalité. Une telle argumentation ne saurait, toutefois, être invoquée devant le juge de l'excès de pouvoir que selon les modalités régissant la présentation des questions prioritaires de constitutionnalité, qui n'ont, en l'espèce, pas été respectées.

7. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre de l'action et des comptes publics, que M. et Mme B... ne sont pas fondés à demander l'annulation des commentaires administratifs qu'ils attaquent.

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de M. et Mme B...est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. et Mme A...B...et au ministre de l'action et des comptes publics.


Synthèse
Formation : 8ème - 3ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 426269
Date de la décision : 27/03/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 27 mar. 2019, n° 426269
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Jean-Marc Vié
Rapporteur public ?: Mme Karin Ciavaldini

Origine de la décision
Date de l'import : 02/04/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2019:426269.20190327
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