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28/01/2019 | FRANCE | N°414756

France | France, Conseil d'État, 7ème - 2ème chambres réunies, 28 janvier 2019, 414756


Vu la procédure suivante :

Mme B...A...a demandé au tribunal administratif de Rouen, en premier lieu, d'annuler la décision du directeur de la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL) du 4 mars 2015 lui réclamant un trop-perçu d'un montant de 64 146,28 euros, en deuxième lieu, d'annuler, d'une part, la décision du 21 avril 2015 portant avis de reversement de la même somme et la décision du 29 juillet 2015 portant rejet de son recours gracieux et, d'autre part, d'annuler la décision du 22 septembre 2015 portant mise en demeure de payer la mê

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Vu la procédure suivante :

Mme B...A...a demandé au tribunal administratif de Rouen, en premier lieu, d'annuler la décision du directeur de la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL) du 4 mars 2015 lui réclamant un trop-perçu d'un montant de 64 146,28 euros, en deuxième lieu, d'annuler, d'une part, la décision du 21 avril 2015 portant avis de reversement de la même somme et la décision du 29 juillet 2015 portant rejet de son recours gracieux et, d'autre part, d'annuler la décision du 22 septembre 2015 portant mise en demeure de payer la même somme, en dernier lieu, d'annuler la décision du 5 décembre 2013 en tant qu'elle prononce l'annulation de sa pension de réversion à compter du mois de décembre 2013.

Par un jugement n°s 1501251, 1503108, 1503123 du 4 août 2017, le tribunal administratif de Rouen a annulé les décisions des 21 avril, 29 juillet et 22 septembre 2015 en tant qu'elles procèdent à la récupération des sommes versées du 1er septembre 2002 au 31 décembre 2009.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 2 octobre et 21 décembre 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la Caisse des dépôts et consignations demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement dans la mesure de l'annulation prononcée ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter dans cette mesure la demande de Mme A....

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code civil ;

- le code des pensions civiles et militaires de retraite ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le décret n° 65-773 du 9 septembre 1965 ;

- le décret n° 2003-1306 du 26 décembre 2003 ;

- le décret n° 2007-173 du 7 février 2007 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Thomas Pez-Lavergne, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Gilles Pellissier, rapporteur public,

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Odent, Poulet, avocat de la Caisse des dépôts et consignations ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 10 janvier 2019, présentée par la Caisse des dépôts et consignations ,

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces produites devant les juges du fond que, depuis le 1er octobre 1993, Mme A...a bénéficié d'une pension de réversion du chef de son époux, décédé le 24 septembre 1993. La Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL) lui a adressé le 16 juillet 2013 un formulaire de déclaration sur l'honneur destiné à mettre à jour sa situation familiale. Mme A...a retourné, en septembre 2013, ce formulaire en indiquant vivre en concubinage notoire depuis le mois de septembre 2002. Par une décision du 5 décembre 2013, le directeur de la CNRACL a annulé la pension de réversion de Mme A...à compter du 1er décembre 2013. Par un courrier du 4 mars 2015, le directeur de la CNRACL a fixé à 64 146,28 euros le montant des sommes indûment versées au titre de la période du 1er septembre 2002 au 30 novembre 2013. Par un courrier du 21 avril 2015, le directeur de la CNRACL a adressé à Mme A...un avis de reversement de la somme de 64 146,28 euros. Par une décision du 29 juillet 2015, le directeur de la CNRACL a rejeté le recours gracieux formé par Mme A...contre cette dernière décision. Par un courrier du 22 septembre 2015, le directeur de la CNRACL a mis Mme A...en demeure de payer la somme de 64 146,28 euros. Sur demande de MmeA..., le tribunal administratif de Rouen a annulé les décisions des 21 avril, 29 juillet et 22 septembre 2015 en tant qu'elles portent sur les sommes versées du 1er septembre 2002 au 31 décembre 2009. La Caisse des dépôts et consignations demande au Conseil d'Etat d'annuler dans cette mesure ce jugement.

2. Si, en principe, le droit à pension de réversion est régi par les dispositions en vigueur à la date du décès de l'ayant cause, la restitution des sommes payées indûment au titre d'une pension est soumise, en l'absence de disposition contraire, aux dispositions en vigueur à la date à laquelle l'autorité compétente décide de procéder à la répétition des sommes indûment versées.

3. Aux termes de l'article 1er du décret du 26 décembre 2003 relatif au régime de retraite des fonctionnaires affiliés à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales : " Les dispositions du présent décret s'appliquent aux fonctionnaires mentionnés à l'article 2 du décret n° 2007-173 du 7 février 2007 relatif à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales et à leurs ayants cause ". L'article 2 du décret du 7 février 2007 relatif à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales dispose que : " Sont obligatoirement affiliés à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales les fonctionnaires soumis aux dispositions de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 (...) ". Aux termes de l'article 47 du décret du 26 décembre 2003 précité, qui reprennent les dispositions de l'article 43 du décret du 9 septembre 1965 portant règlement d'administration publique relatif au régime de retraite des tributaires de la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales : " Le conjoint survivant ou divorcé qui contracte un nouveau mariage ou vit en état de concubinage notoire perd son droit à pension (...) ".

4. L'article 59 du décret du 26 décembre 2003 précité dispose que : " (...) La restitution des sommes payées indûment au titre des pensions, de leurs accessoires, d'avances provisoires sur pensions, attribués en application des dispositions du présent décret est réglée conformément aux dispositions de l'article L. 93 du code des pensions civiles et militaires de retraite (...) ". Aux termes de l'article L. 93 du code des pensions civiles et militaires de retraite : " Sauf le cas de fraude, omission, déclaration inexacte ou de mauvaise foi de la part du bénéficiaire, la restitution des sommes payées indûment au titre des pensions, de leurs accessoires ou d'avances provisoires sur pensions, attribués en application des dispositions du présent code, ne peut être exigée que pour celles de ces sommes correspondant aux arrérages afférents à l'année au cours de laquelle le trop-perçu a été constaté et aux trois années antérieures ".

5. L'époux de Mme A...était fonctionnaire public territorial, soumis aux dispositions de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale. Par suite, compte tenu, ainsi qu'il a été dit au point 2, de la date à laquelle la CNRACL a décidé de procéder à la répétition des sommes indûment versées, les dispositions relatives aux règles de prescription applicables à la pension de réversion perçue par Mme A...sont celles du décret du 26 décembre 2003, qui renvoient au code des pensions civiles et militaires de retraite.

6. La perception par MmeA..., à compter du 1er septembre 2002, de sa pension de réversion malgré son concubinage notoire est consécutive à une absence de déclaration auprès de l'administration de son changement de situation. Cette omission, alors même qu'elle ne révèle aucune intention frauduleuse ou mauvaise foi, fait obstacle à l'application de la prescription prévue par l'article L. 93 du code des pensions civiles et militaires de retraite. Dès lors, le tribunal administratif de Rouen a commis une erreur de droit en estimant que Mme A...pouvait bénéficier de cette prescription.

7. Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen de son pourvoi, la Caisse des dépôts et consignations est fondée à demander l'annulation des articles 2 et 3 du jugement qu'elle attaque.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Les articles 2 et 3 du jugement du 4 août 2017 du tribunal administratif de Rouen sont annulés.

Article 2 : L'affaire est renvoyée, dans la mesure de la cassation ainsi prononcée, au tribunal administratif de Rouen.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la Caisse des dépôts et consignations et à Mme B...A....

Copie en sera adressée à la ministre des solidarités et de la santé et au ministre de l'action et des comptes publics.


Synthèse
Formation : 7ème - 2ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 414756
Date de la décision : 28/01/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux des pensions

Publications
Proposition de citation : CE, 28 jan. 2019, n° 414756
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Thomas Pez-Lavergne
Rapporteur public ?: M. Gilles Pellissier
Avocat(s) : SCP ODENT, POULET

Origine de la décision
Date de l'import : 05/02/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2019:414756.20190128
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