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17/12/2018 | FRANCE | N°420441

France | France, Conseil d'État, 17 décembre 2018, 420441


Vu la procédure suivante :

Mme F...D...a demandé à la Cour nationale du droit d'asile d'annuler la décision du 25 avril 2016 de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) qui a refusé de lui reconnaitre la qualité de réfugié ou, à défaut, de lui accorder le bénéfice de la protection subsidiaire. Par une décision n° 16017066 du 21 décembre 2017, la Cour nationale du droit d'asile a rejeté sa demande.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 7 mai et 7 août 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Et

at, Mme D...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cette décision ;

2°) réglan...

Vu la procédure suivante :

Mme F...D...a demandé à la Cour nationale du droit d'asile d'annuler la décision du 25 avril 2016 de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) qui a refusé de lui reconnaitre la qualité de réfugié ou, à défaut, de lui accorder le bénéfice de la protection subsidiaire. Par une décision n° 16017066 du 21 décembre 2017, la Cour nationale du droit d'asile a rejeté sa demande.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 7 mai et 7 août 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme D...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cette décision ;

2°) réglant l'affaire au fond, de lui reconnaitre la qualité de réfugié ou, à défaut, lui accorder le bénéfice de la protection subsidiaire ;

3°) de mettre à la charge de l'OFPRA une somme de 3 000 euros au profit de la SCP Ohl-Vexliard, son avocat, au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve que la SCP renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés et le protocole signé à New York le 31 janvier 1967 relatif au statut des réfugiés ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Paul-François Schira, auditeur,

- les conclusions de Mme Anne Iljic, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Ohl, Vexliard, avocat de Mme D...;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis à la Cour nationale du droit d'asile que MmeD..., de nationalité rwandaise, s'est vu refuser la qualité de réfugié par une décision du 25 avril 2016 de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA). Elle se pourvoit en cassation contre la décision du 21 novembre 2017 par laquelle la Cour a rejeté sa demande d'annulation de cette décision.

2. Aux termes des stipulations du paragraphe A, 2° de l'article 1er de la convention de Genève du 28 juillet 1951 et du protocole signé à New York le 31 janvier 1967, doit être considérée comme réfugiée toute personne qui " craignant avec raison d'être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut, ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays ". Aux termes de l'article L. 712-1 du même code : " Le bénéfice de la protection subsidiaire est accordé à toute personne qui ne remplit pas les conditions pour se voir reconnaître la qualité de réfugié et pour laquelle il existe des motifs sérieux et avérés de croire qu'elle courrait dans son pays un risque réel de subir l'une des atteintes graves suivantes : a) La peine de mort ou une exécution ; b) La torture ou des peines ou traitements inhumains ou dégradants ; c) S'agissant d'un civil, une menace grave et individuelle contre sa vie ou sa personne en raison d'une violence qui peut s'étendre à des personnes sans considération de leur situation personnelle et résultant d'une situation de conflit armé interne ou international ".

3. Il appartient à la Cour nationale du droit d'asile, qui statue comme juge de plein contentieux sur le recours d'un demandeur d'asile dont la demande a été rejetée par l'OFPRA, de se prononcer elle-même sur le droit de l'intéressé à la qualité de réfugié ou, à défaut, de la protection subsidiaire, au vu de l'ensemble des circonstances de fait dont elle a connaissance au moment où elle statue. A ce titre, il lui revient, pour apprécier la réalité des risques invoqués par le demandeur, de prendre en compte l'ensemble des pièces que celui-ci produit à l'appui de ses prétentions. En particulier, lorsque le demandeur produit devant elle des pièces qui comportent des éléments circonstanciés en rapport avec les risques allégués, il lui incombe, après avoir apprécié si elle doit leur accorder crédit et les avoir confrontées aux faits rapportés par le demandeur, d'évaluer les risques qu'elles sont susceptibles de révéler et, le cas échéant, de préciser les éléments qui la conduisent à ne pas regarder ceux-ci comme sérieux.

4. Pour rejeter la demande de MmeD..., la Cour a jugé, par une appréciation souveraine, que les deux attestations de M. C...E..., responsable politique, et M. A...B..., qui se présente comme un opposant politique au régime rwandais, produites par l'intéressée à l'appui de ses craintes, n'étaient pas de nature à emporter sa conviction sans se prononcer sur les autres témoignages circonstanciés versés au dossier qui lui était soumis. En statuant ainsi sans chercher à évaluer les risques que ces pièces étaient susceptibles de révéler ni préciser les éléments qui la conduisaient à ne pas les regarder comme sérieux, la cour a entaché sa décision d'insuffisance de motivation et d'erreur de droit.

5. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, que Mme D...est fondée à demander l'annulation de la décision qu'elle attaque.

6. Mme D...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par suite, son avocat peut se prévaloir des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que la SCP Ohl, Vexliard renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le versement à cette SCP de la somme de 3 000 euros.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La décision de la Cour nationale du droit d'asile du 21 décembre 2017 est annulée.

Article 2 : L'affaire est renvoyée devant la Cour nationale du droit d'asile.

Article 3 : L'Office français de protection des réfugiés et apatrides versera à la SCP Ohl, Vexliard, avocat de MmeD..., sous réserve qu'elle renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à Mme F...D...et à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides.


Synthèse
Numéro d'arrêt : 420441
Date de la décision : 17/12/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 17 déc. 2018, n° 420441
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur public ?: Mme Anne Iljic
Avocat(s) : SCP OHL, VEXLIARD

Origine de la décision
Date de l'import : 25/12/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2018:420441.20181217
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