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11/04/2018 | FRANCE | N°401560

France | France, Conseil d'État, 10ème chambre, 11 avril 2018, 401560


Vu la procédure suivante :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler la décision implicite de rejet née du silence gardé pendant plus de deux mois par le président du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Melun sur sa demande de communication de plusieurs documents.

Par un jugement n° 1505295 du 26 février 2016, le tribunal administratif de Melun a annulé la décision implicite du bureau d'aide juridictionnelle du tribunal de grande instance de Melun ayant refusé de communiquer à M. B...les documents ayant dési

gné les membres du bureau d'aide juridictionnelle qui ont instruit ses de...

Vu la procédure suivante :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler la décision implicite de rejet née du silence gardé pendant plus de deux mois par le président du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Melun sur sa demande de communication de plusieurs documents.

Par un jugement n° 1505295 du 26 février 2016, le tribunal administratif de Melun a annulé la décision implicite du bureau d'aide juridictionnelle du tribunal de grande instance de Melun ayant refusé de communiquer à M. B...les documents ayant désigné les membres du bureau d'aide juridictionnelle qui ont instruit ses demandes n° 2010/005938 et 2011/005679, les documents ayant désigné les membres de la commission de la section 1 de la division 1 du bureau qui ont instruit ses demandes n° 2010/005938 et 2011/005679 et le document ayant désigné le secrétaire qui a adressé au bâtonnier de Paris une copie de la décision n° 2011/005679, a enjoint au garde des sceaux, ministre de la justice, de communiquer à M. B... ces documents dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement et a rejeté le surplus de ses conclusions.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 18 juillet et 17 octobre 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il a rejeté le surplus de ses conclusions ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros au profit de Me Occhipinti, qui déclare renoncer en ce cas à l'aide de l'Etat, en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991;

- le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Stéphane Hoynck, maître des requêtes,

- les conclusions de Mme Aurélie Bretonneau, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à Me Occhipinti, avocat de M. A...B...;

Considérant ce qui suit :

Sur la fin de non-recevoir tirée de la tardiveté du pourvoi :

1. Aux termes de l'article 39 du décret du 19 décembre 1991 pris pour l'application de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique : " Lorsqu'une demande d'aide juridictionnelle en vue de se pourvoir en matière civile devant la Cour de cassation est adressée au bureau d'aide juridictionnelle établi près cette juridiction avant l'expiration du délai imparti pour le dépôt du pourvoi ou des mémoires, ce délai est interrompu. Un nouveau délai court à compter du jour de la réception par l'intéressé de la notification de la décision du bureau d'aide juridictionnelle ou, si elle est plus tardive, de la date à laquelle un auxiliaire de justice a été désigné. (...) Les délais de recours sont interrompus dans les mêmes conditions lorsque l'aide juridictionnelle est sollicitée à l'occasion d'une instance devant le Conseil d'Etat ou une juridiction administrative statuant à charge de recours devant le Conseil d'Etat ".

2. Il ressort des pièces du dossier que dans le délai de deux mois courant à compter de la date de la notification du jugement attaqué, M. B...a présenté une demande d'aide juridictionnelle qui, par application des dispositions citées ci-dessus, a interrompu le délai du recours contentieux. Il est constant que le pourvoi a ensuite été présenté avant l'expiration du délai de deux mois qui avait recommencé à courir à compter de la notification au requérant de la décision du bureau d'aide juridictionnelle du Conseil d'Etat, laquelle est intervenue le 23 mai 2016. La fin de non recevoir tirée de la tardiveté du pourvoi, opposée par le garde des sceaux, ministre de la justice, ne peut dès lors qu'être rejetée.

Sur l'omission de réponse à des conclusions à fin de communication :

3. Il ressort des écritures de M. B...dans son mémoire enregistré le 7 juillet 2015 au greffe du tribunal administratif de Melun, qu'il a demandé l'annulation du refus implicite du bureau d'aide juridictionnelle du tribunal de grande instance de Melun de lui communiquer le document " donnant délégation à l'huissier de justice membre du bureau, aux dates des décisions n° 2010/005938, rendues les 13 décembre 2011, 23 janvier, 10 mai, 23 juillet, 17 décembre 2012 et 16 avril 2013 " et à défaut d'existence de ce document, le document ayant désigné le secrétaire qui a adressé, en vertu de l'article 79 du décret du 19décembre 1991, ces décisions au président de la chambre des huissiers du département pour désignation d'un huissier de justice. En omettant de se prononcer sur cette demande, le tribunal administratif de Melun a entaché son jugement d'un défaut de réponse à conclusions. M. B...est fondé à demander, dans cette mesure, l'annulation du jugement qu'il attaque.

Sur les conclusions dirigées contre le rejet des conclusions à fin d'astreinte :

4. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. " et aux termes de l'article L. 911-3 du même code : " Saisie de conclusions en ce sens, la juridiction peut assortir, dans la même décision, l'injonction prescrite en application des articles L. 911-1 et L. 911-2 d'une astreinte qu'elle prononce dans les conditions prévues au présent livre et dont elle fixe la date d'effet. ". Il résulte de ces dispositions qu'il appartient au juge administratif d'apprécier dans chacun des cas qui lui est soumis s'il y a lieu de prononcer une astreinte. En jugeant qu'il n'y avait pas lieu, "compte tenu des circonstances de l'espèce", d'assortir son injonction d'une astreinte, le tribunal administratif de Melun s'est livré, sans les dénaturer, à une appréciation souveraine des faits et circonstances de l'espèce et a suffisamment motivé son jugement sur ce point.

Sur les conclusions du garde des sceaux, ministre de la justice, relatives à l'amende pour recours abusif :

5. Aux termes de l'article R. 741-12 du code de justice administrative : " Le juge peut infliger à l'auteur d'une requête qu'il estime abusive une amende dont le montant ne peut excéder 3 000 euros ". La faculté prévue par ces dispositions constituant un pouvoir propre du juge, les conclusions du garde des sceaux, ministre de la justice, tendant à ce que M. B...soit condamné à une telle amende ne sont pas recevables.

6. Il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est fondé à demander l'annulation du jugement qu'il attaque que dans la mesure indiquée au point 3. M. B...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par suite, son avocat peut se prévaloir des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Occhipinti, avocat de M.B..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros à verser à Me Occhipinti.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Melun du 26 février 2016 est annulé en tant qu'il omet de statuer sur le refus du bureau d'aide juridictionnelle du tribunal de grande instance de Melun de communiquer le document donnant délégation à l'huissier de justice, membre du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Melun, aux dates des décisions n° 2010/005938 de ce bureau pour désigner un huissier pour assister les bénéficiaires de l'aide juridictionnelle et, à défaut d'existence de ce document, le document ayant désigné le secrétaire qui a adressé en vertu de l'article 79 du décret du 19 décembre 1991 ces décisions au président de la chambre des huissiers du département pour désignation d'un huissier de justice.

Article 2 : L'affaire est renvoyée au tribunal administratif de Melun dans la mesure indiquée à l'article 1er.

Article 3 : L'Etat versera à Me Occhipinti, avocat de M.B..., une somme de 3 000 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cet avocat renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 4 : Le surplus des conclusions de M. B...est rejeté.

Article 5 : Les conclusions de la garde des sceaux, ministre de la justice tendant à la condamnation de M. B...à une amende pour recours abusif sont rejetées.

Article 6 : La présente décision sera notifiée à M. A...B...et à la garde des sceaux, ministre de la justice.


Synthèse
Formation : 10ème chambre
Numéro d'arrêt : 401560
Date de la décision : 11/04/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 11 avr. 2018, n° 401560
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Stéphane Hoynck
Rapporteur public ?: Mme Aurélie Bretonneau
Avocat(s) : OCCHIPINTI

Origine de la décision
Date de l'import : 17/04/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2018:401560.20180411
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