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28/03/2018 | FRANCE | N°411559

France | France, Conseil d'État, 4ème et 1ère chambres réunies, 28 mars 2018, 411559


Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 16 juin et 14 septembre 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le syndicat national des enseignements du second degré (SNES) demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la note de service n° 2017-088 du 3 mai 2017 de la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les

autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'éducation ;

- la loi n° 84-16 du ...

Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 16 juin et 14 septembre 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le syndicat national des enseignements du second degré (SNES) demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la note de service n° 2017-088 du 3 mai 2017 de la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'éducation ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le décret n° 72-580 du 4 juillet 1972 ;

- le décret n° 72-581 du 4 juillet 1972 ;

- le décret n° 72-582 du 4 juillet 1972 ;

- le décret n° 72-583 du 4 juillet 1972 ;

- le décret n° 2005-850 du 27 juillet 2005 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Anissia Morel, maître des requêtes,

- les conclusions de Mme Sophie-Justine Lieber, rapporteur public ;

1. Considérant que par une note de service n° 2017-088 du 3 mai 2017, parue au bulletin officiel du ministère de l'éducation nationale le 4 mai 2017, la ministre de l'éducation nationale a précisé les modalités de mutation à Mayotte des personnels enseignants des premier et second degrés détenant la certification Français langue seconde pour la rentrée scolaire 2017 ; que par la présente requête, le syndicat national des enseignants du second degré (SNES) demande l'annulation pour excès de pouvoir de cette note de service ;

Sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre de l'éducation nationale :

2. Considérant qu'il ressort des statuts du syndicat requérant que celui-ci a pour objet la défense des intérêts des seuls enseignants du second degré ; qu'il en résulte que ce syndicat n'a intérêt à demander l'annulation de la décision litigieuse qu'en tant qu'elle s'applique à ces enseignants ; que la requête du SNES doit donc être rejetée en tant qu'elle demande l'annulation des dispositions de la note de service qui s'appliquent aux enseignants du premier degré ;

Sur la légalité de la note de service attaquée :

3. Considérant que, par la note de service attaquée, la ministre de l'éducation nationale a, à l'issue notamment du mouvement national de mutation inter-académique des personnels du second degré, soumis à l'avis des instances paritaires compétentes, organisé un mouvement complémentaire de mutation afin de pourvoir, pour la rentrée scolaire 2017, le maximum de postes restés vacants dans l'académie de Mayotte, par un appel à candidature auprès des personnels enseignants détenant la certification Français langue seconde ;

4. Considérant, en premier lieu, que le chef de service adjoint à la directrice générale des ressources humaines pouvait signer au nom de celle-ci, sur le fondement de l'article 1er du décret du 27 juillet 2005 relatif aux délégations de signature des membres du gouvernement, la note de service attaquée ; que le moyen tiré de ce que cette note aurait été signée par une autorité incompétente ne peut, par suite, qu'être écarté ;

5. Considérant, en deuxième lieu, que si la section IV de la note de service attaquée dispose que le choix des candidats doit être opéré par le vice-recteur de Mayotte, celui-ci est, contrairement à ce que soutient le syndicat requérant, compétent pour effectuer les affectations au sein de cette académie en vertu des articles R. 262-1 et R. 262-2 du code de l'éducation et des statuts particuliers applicables aux personnels enseignants du second degré ; que, par ailleurs, ces dispositions n'ont ni pour effet, ni pour objet de déroger aux dispositions de ces mêmes statuts particuliers, qui imposent l'examen des affectations par les instances paritaires compétentes ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la note de service serait illégale, faute d'avoir repris la règle de consultation préalable des instances paritaires compétentes, ne peut qu'être écarté ;

6. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 60 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat : " Dans toute la mesure compatible avec le bon fonctionnement du service, les affectations prononcées doivent tenir compte des demandes formulées par les intéressés et de leur situation de famille. Priorité est donnée aux fonctionnaires séparés de leur conjoint pour des raisons professionnelles, aux fonctionnaires séparés pour des raisons professionnelles du partenaire avec lequel ils sont liés par un pacte civil de solidarité (...), aux fonctionnaires handicapés (...) et aux fonctionnaires qui exercent leurs fonctions (...) dans un quartier urbain où se posent des problèmes sociaux et de sécurité particulièrement difficiles, ainsi qu'aux fonctionnaires qui justifient du centre de leurs intérêts matériels et moraux dans une des collectivités régies par les articles 73 et 74 de la Constitution (...) / Dans les administrations ou services mentionnés au deuxième alinéa du présent article, l'autorité compétente peut procéder à un classement préalable des demandes de mutation à l'aide d'un barème rendu public (...) / Ce classement est établi dans le respect des priorités figurant au quatrième alinéa du présent article. Toutefois, l'autorité compétente peut édicter des lignes directrices par lesquelles elle définit, sans renoncer à son pouvoir d'appréciation, des critères supplémentaires établis à titre subsidiaire dans des conditions prévues par décret en Conseil d'Etat " ; que si ces dispositions autorisent l'administration à établir des critères supplémentaires en vue du classement préalable des demandes de mutation, ceux-ci ne sauraient, en raison de leur caractère subsidiaire, avoir d'autre effet que de permettre le départage de demandes ayant obtenu, en application des critères prioritaires prévus par le quatrième alinéa du même article, un classement identique ;

7. Considérant que les dispositions des 3ème, 4ème et 5ème alinéas de la section IV de la note de service attaquée instaurent une priorité au bénéfice des enseignants mutés dans l'académie de Mayotte pour l'année 2017-2018 en prévoyant qu'ils bénéficieront soit d'un " droit au retour dans leur académie d'origine dès lors qu'ils en feront la demande ", soit d'une " priorité absolue d'affectation dans l'académie qu'ils souhaitent rejoindre " sous réserve, dans cette dernière hypothèse, d'avoir effectué quatre années de service dans ce département ; qu'il ressort des termes mêmes de la note de service attaquée que celle-ci ne subordonne pas l'application de ces règles de priorité, liées à l'acceptation d'une affectation dans l'académie de Mayotte, au respect des priorités figurant au quatrième alinéa de l'article 60 de la loi du 11 janvier 1984 ; que, par suite, le syndicat requérant est fondé à soutenir que ces dispositions, divisibles du reste de la note de service attaquée, comportent des règles qui méconnaissent les dispositions de l'article 60 de la loi du 11 janvier 1984 et sont, par suite, entachées d'illégalité ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le SNES est seulement fondé à demander l'annulation des dispositions des 3ème, 4ème et 5ème alinéas de la section IV de la note de service n° 2017-088 du 3 mai 2017 de la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche en tant qu'elles s'appliquent aux enseignants du second degré ;

9. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat verse au syndicat requérant, qui n'a pas eu recours au ministère d'avocat et ne fait état d'aucun frais, la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Les dispositions des 3ème, 4ème et 5ème alinéas de la section IV de la note de service n° 2017-088 du 3 mai 2017 de la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche sont annulées en tant qu'elles s'appliquent aux enseignants du second degré.

Article 2 : Le surplus des conclusions du syndicat national des enseignements du second degré est rejeté.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au syndicat national des enseignements du second degré et au ministre de l'éducation nationale.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 28 mar. 2018, n° 411559
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Anissia Morel

Origine de la décision
Formation : 4ème et 1ère chambres réunies
Date de la décision : 28/03/2018
Date de l'import : 10/04/2018

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 411559
Numéro NOR : CETATEXT000036753602 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2018-03-28;411559 ?
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