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08/03/2018 | FRANCE | N°417964

France | France, Conseil d'État, Juge des référés, 08 mars 2018, 417964


Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 7 et 26 février 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'Union nationale des associations de santé à domicile (UNASDOM), l'Union nationale des associations d'insuffisants respiratoires et de la qualité de l'air, le GIRC (Graves insuffisants respiratoires chroniques) et le Syndicat national des associations de malades insuffisants respiratoires (SYNAMAIR) demandent au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative :>
1°) d'ordonner la suspension de l'exécution de l'arrêté du 13 déce...

Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 7 et 26 février 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'Union nationale des associations de santé à domicile (UNASDOM), l'Union nationale des associations d'insuffisants respiratoires et de la qualité de l'air, le GIRC (Graves insuffisants respiratoires chroniques) et le Syndicat national des associations de malades insuffisants respiratoires (SYNAMAIR) demandent au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative :

1°) d'ordonner la suspension de l'exécution de l'arrêté du 13 décembre 2017 modifiant la procédure d'inscription et les conditions de prise en charge du dispositif médical à pression positive continue pour traitement de l'apnée du sommeil et prestations associées au paragraphe 4 de la sous-section 2, section 1, chapitre 1er, titre Ier de la liste prévue à l'article L. 165-1 (LPPR) du code de la sécurité sociale ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- la condition d'urgence est remplie dès lors que l'arrêté contesté a commencé à produire ses effets ;

- il existe un doute sérieux quant à la légalité de la décision contestée ;

- il a été pris aux termes d'une procédure irrégulière dès lors que les avis de la Commission nationale d'évaluation des dispositifs médicaux et des technologies de santé, pris pour l'édiction de l'arrêté litigieux, sont irréguliers en ce que la CNEDIMTS ne se serait pas prononcée sur les modalités de prise en compte des données collectées pouvant donner lieu à une modulation du tarif de responsabilité ou du prix ;

- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation en ce que les tarifs de remboursement sont automatiquement modulés selon l'usage des dispositifs médicaux contre l'apnée du sommeil par les patients ;

- il est entaché d'une erreur de droit en ce qu'il aurait violé les dispositions de la directive 95/46/CE du 24 octobre 1995 ;

- il est pris en méconnaissance du principe d'intelligibilité et de clarté de la norme ;

- il est pris en méconnaissance, d'une part, de la règlementation en matière de collecte et de transfert des données de santé et, d'autre part, de la loi du 6 janvier 1978 ;

- il est pris en méconnaissance du principe de sécurité juridique dès lors qu'il ne permet pas aux prestataires de s'adapter à la nouvelle réglementation par une période transitoire suffisante.

Par un mémoire en défense, enregistré le 23 février 2018, la Haute Autorité de santé conclut au rejet de la requête. Elle soutient que les moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense et un nouveau mémoire, enregistrés les 23 et 27 février 2018, la ministre des solidarités et de la santé conclut, à titre principal, à l'irrecevabilité de la requête et, à titre subsidiaire, au rejet de la requête. Elle soutient que la condition d'urgence n'est pas remplie et que les moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés.

La requête a été communiquée au ministre de l'action et des comptes publics qui n'a pas produit de mémoire.

Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part, l'Union nationale des associations de santé à domicile (UNASDOM), l'Union nationale des associations d'insuffisants respiratoires et de la qualité de l'air, le GIRC (Graves insuffisants respiratoires chroniques) et le Syndicat national des associations de malades insuffisants respiratoires (SYNAMAIR) et, d'autre part, la ministre de la solidarité et de la santé, la Haute Autorité de la santé et le ministre de l'action et des comptes publics ;

Vu le procès-verbal de l'audience publique du 28 février 2018 à 10 heures au cours de laquelle ont été entendus :

- Me Gaschignard, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de l'UNASDOM et autres ;

- les représentants de l'UNASDOM et autres ;

- les représentants de la ministre des solidarités et de la santé ;

- les représentants de la Haute Autorité de santé ;

et à l'issue de laquelle le juge des référés a reporté la clôture de l'instruction au jeudi 1er mars à 18 heures ;

Vu le nouveau mémoire, enregistré le 1er mars 2018 avant la clôture de l'instruction, présenté par l'UNASDOM et autres ;

Vu le nouveau mémoire, enregistré le 1er mars 2018 avant la clôture de l'instruction, présenté par la ministre des solidarités et de la santé ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la directive 95/46/CE du 24 octobre 1995 ;

- le code de la santé publique, notamment son article D. 5232-4 ;

- le code de la sécurité sociale, notamment ses articles L. 165-1-3 et R. 165-76 ;

- la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 ;

- le décret n° 2017-809 du 5 mai 2017 ;

- le code de justice administrative ;

Considérant ce qui suit :

Sur les conclusions de la requête de l'Union nationale des associations de santé à domicile et autres :

1. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision ".

2. L'Union nationale des associations de santé à domicile (UNASDOM), l'Union nationale des associations d'insuffisants respiratoires et de la qualité de l'air, le GIRC (Graves insuffisants respiratoires chroniques) et le Syndicat national des associations de malades insuffisants respiratoires (SYNAMAIR) ont saisi le juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, d'une demande tendant à la suspension de l'arrêté du 13 décembre 2017 ayant modifié la procédure d'inscription et les conditions de prise en charge du dispositif médical à pression positive continue pour traitement de l'apnée du sommeil et prestations associées au paragraphe 4 de la sous-section 2, section 1, chapitre 1er, titre Ier de la liste prévue à l'article L. 165-1 (LPPR) du code de la sécurité sociale. Il prévoit notamment que la prise en charge par l'assurance maladie obligatoire sera modulée en fonction des données d'observance transmises par l'appareil utilisé et que ce régime est entré en vigueur à compter du 1er janvier 2018.

Sur la condition tenant à l'existence d'un moyen propre à faire naître un doute sérieux sur la légalité de l'arrêté du 13 décembre 2017 :

3. Aux termes du 4° de l'article L. 165-1-3 du code de la sécurité sociale : " Les tarifs de responsabilité ou les prix mentionnés, respectivement, aux articles L. 165-2 et L. 165-3 peuvent être modulés, sans préjudice des autres critères d'appréciation prévus aux mêmes articles L. 165-2 et L. 165-3, en fonction de certaines données collectées, notamment celles relatives aux modalités d'utilisation du dispositif médical mis à disposition. Dans le cadre de la procédure d'inscription d'un tel dispositif médical sur la liste mentionnée à l'article L. 165-1, la commission spécialisée de la Haute Autorité de santé mentionnée au même article L. 165-1 se prononce dans son avis sur les modalités selon lesquelles sont prises en compte les données collectées pouvant, le cas échéant, donner lieu à une modulation du tarif de responsabilité ou du prix, notamment au regard du bon usage des produits ou prestations concernés. Cette modulation du tarif de responsabilité ou du prix des produits et prestations mentionnés audit article L. 165-1 ne peut avoir d'incidence sur la qualité de la prise en charge du patient par les prestataires. Une moindre utilisation du dispositif médical ne peut en aucun cas conduire à une augmentation de la participation de l'assuré mentionnée au I de l'article L. 160-13 aux frais afférents à ce dispositif et à ses prestations associées. ".

4. Aux termes du I de l'article R. 165-76 du code de la sécurité sociale : " I.- Les prestataires mentionnés à l'article L. 5232-3 du code de la santé publique peuvent recueillir, avec le consentement écrit du patient, l'ensemble des données relatives à la durée et la fréquence d'utilisation télétransmises par le dispositif médical mis à la disposition du patient. Le cas échéant, le prestataire peut recueillir ces mêmes données, par tout moyen adapté et sécurisé, lorsque le dispositif médical ne comporte pas une fonction de télétransmission ou lorsque le patient, qui a consenti au recueil des données, n'a pas donné son consentement à l'activation de cette fonction. / Le prestataire détermine le niveau d'utilisation du dispositif médical en fonction des données recueillies et des conditions fixées par l'arrêté inscrivant le dispositif sur la liste prévue à l'article L. 165-1. En cas d'application d'une modulation des tarifs de responsabilité ou des prix, le prestataire concerné applique le tarif de responsabilité correspondant au niveau d'utilisation du dispositif médical. ".

5. Aux termes de l'article D. 5232-4 du code de la santé publique : " Le prestataire de services et le distributeur de matériels agissent en toutes circonstances dans l'intérêt de la personne malade ou présentant une incapacité ou un handicap. Ils respectent sa dignité et son intimité et celles de sa famille. / Ils respectent les choix de cette personne et de son entourage. ".

6. Les moyens soulevés par les associations requérantes, tirés de l'irrégularité de la procédure, de l'erreur manifeste d'appréciation, de l'erreur de droit dans l'application des dispositions de la directive 95/46/CE du 24 octobre 1995 et de la méconnaissance, de la règlementation en matière de collecte et de transfert des données de santé, de la loi du 6 janvier 1978 ainsi que des principes d'intelligibilité, de clarté et de sécurité, ne sont pas, en l'état de l'instruction, propres à créer un doute sérieux sur la légalité de l'arrêté attaqué.

7. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la recevabilité de la requête et sur la condition de l'urgence à suspendre l'exécution de l'arrêté contesté, que la requête de l'Union nationale des associations de santé à domicile (UNASDOM) et autres, y compris les conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, doit être rejetée.

O R D O N N E :

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Article 1er : La requête de l'Union nationale des associations de santé à domicile (UNASDOM) et autres est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à l'Union nationale des associations de santé à domicile (UNASDOM), représentant désigné pour l'ensemble des requérants, à la ministre des solidarités et de la santé, à la Haute Autorité de santé et au ministre de l'action et des comptes publics.


Synthèse
Formation : Juge des référés
Numéro d'arrêt : 417964
Date de la décision : 08/03/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 08 mar. 2018, n° 417964
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Avocat(s) : SCP GASCHIGNARD

Origine de la décision
Date de l'import : 20/03/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2018:417964.20180308
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