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27/12/2017 | FRANCE | N°405894

France | France, Conseil d'État, 5ème chambre, 27 décembre 2017, 405894


Vu la procédure suivante :

Mme A...B...a demandé au tribunal administratif de Toulon de condamner le centre hospitalier intercommunal (CHI) de Toulon-La-Seyne-sur-Mer à lui verser le solde de son indemnité de licenciement, de condamner cet établissement à l'indemniser des préjudices ayant résulté de l'illégalité de ce licenciement, de désigner un expert aux fins d'évaluer ses préjudices et de lui allouer une provision de 5 000 euros. Mme B...a également demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler la décision du 14 décembre 2011 par laquelle le directeur du CH

I de Toulon-La-Seyne-sur-Mer a prononcé son licenciement, d'enjoindre à...

Vu la procédure suivante :

Mme A...B...a demandé au tribunal administratif de Toulon de condamner le centre hospitalier intercommunal (CHI) de Toulon-La-Seyne-sur-Mer à lui verser le solde de son indemnité de licenciement, de condamner cet établissement à l'indemniser des préjudices ayant résulté de l'illégalité de ce licenciement, de désigner un expert aux fins d'évaluer ses préjudices et de lui allouer une provision de 5 000 euros. Mme B...a également demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler la décision du 14 décembre 2011 par laquelle le directeur du CHI de Toulon-La-Seyne-sur-Mer a prononcé son licenciement, d'enjoindre à cet établissement de la réintégrer dans ses fonctions de praticien attaché dans un délai de deux mois et de le condamner à lui verser diverses sommes au titre de son indemnité de licenciement et de la perte de ses traitements. Par un jugement n° 1300024, 1300026 du 25 septembre 2015, le tribunal administratif a condamné le CHI de Toulon-La-Seyne-sur-Mer à verser à Mme B... le solde de son indemnité de licenciement et rejeté le surplus de ses conclusions.

Par un arrêt n° 15MA04266, 15MA04322 du 11 octobre 2016, la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté les appels de Mme B...contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire et deux mémoires complémentaires, enregistrés les 12 décembre 2016 et 13 mars et 13 décembre 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme B... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à ses appels ;

3°) de mettre à la charge du CHI de Toulon-La-Seyne-sur-Mer la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Marc Lambron, conseiller d'Etat,

- les conclusions de Mme Laurence Marion, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Spinosi, Sureau, avocat de Mme B...et à la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat du centre hospitalier intercommunal Toulon-la-Seyne-sur-Mer.

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que Mme B...a été recrutée à compter du 1er juillet 1997 par le CHI de Toulon-La-Seyne-sur-Mer en qualité de praticien attaché à temps partiel au service de médecine nucléaire; qu'elle a subi le 23 mars 2011 dans le cadre du service la fracture d'un orteil, provoquée par l'utilisation d'une poubelle défectueuse ; qu'à l'occasion des examens imposés par cet accident, il a été constaté qu'elle était atteinte d'une maladie de Bowen ; qu'elle a été jugée apte à reprendre son activité en septembre 2011, sous la double réserve de limiter la station debout et de ne plus être exposée aux rayonnements ionisants ; que, devant son refus d'accepter un poste aménagé en pharmacie, le directeur du CHI a prononcé son licenciement pour inaptitude physique par une décision du 14 décembre 2011 ; que Mme B...a saisi le tribunal administratif de Toulon de conclusions aux fins d'annulation de la décision prononçant son licenciement et de conclusions indemnitaires fondées sur l'illégalité de cette décision et sur les fautes que le CHI aurait commises en n'assurant pas la sécurité de ses agents ; que, par un jugement du 25 septembre 2015, le tribunal administratif de Toulon a seulement fait droit à ses conclusions relatives au versement du solde de son indemnité de licenciement ; que Mme B...se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 11 octobre 2016 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a refusé d'annuler ce jugement en tant qu'il rejette le surplus de ses conclusions ;

Sur les conclusions dirigées contre l'arrêt en tant qu'il statue sur le recours pour excès de pouvoir dirigé contre la décision du 14 décembre 2011 et sur la demande indemnitaire fondée sur l'illégalité de cette décision :

2. Considérant qu'il résulte d'un principe général du droit, dont s'inspirent tant les dispositions du code du travail relatives à la situation des salariés qui, pour des raisons médicales, ne peuvent plus occuper leur emploi que les règles statutaires applicables dans ce cas aux fonctionnaires, que, lorsqu'il a été médicalement constaté qu'un salarié se trouve, de manière définitive, atteint d'une inaptitude physique à occuper son emploi, il incombe à l'employeur public, avant de pouvoir prononcer son licenciement, de chercher à reclasser l'intéressé ; que la mise en oeuvre de ce principe implique que l'employeur propose à ce dernier un emploi compatible avec son état de santé et aussi équivalent que possible avec l'emploi précédemment occupé ou, à défaut d'un tel emploi, tout autre emploi si l'intéressé l'accepte ; que, dans le cas où le reclassement s'avère impossible, faute d'emploi vacant, ou si l'intéressé refuse la proposition qui lui est faite, il appartient à l'employeur de prononcer, dans les conditions applicables à l'intéressé, son licenciement ; que ce principe est applicable aux agents contractuels de droit public des établissements hospitaliers ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces soumises aux juges du fond qu'à l'occasion de sa reprise d'activité en septembre 2011, Mme B...s'est vu proposer un poste au sein du pôle pharmacie du centre hospitalier ; que l'intéressée a refusé cette proposition au motif qu'elle impliquait une quotité de travail diminuée de moitié par rapport à celle de son poste précédent ; que la cour a jugé que, dans les circonstances de l'espèce, l'établissement avait satisfait par cette proposition à son obligation de reclassement en relevant que Mme B..." n'établissait pas qu'il existait des postes vacants que le centre hospitalier aurait omis de lui proposer " ; qu'en statuant ainsi, alors que le juge de l'excès de pouvoir ne peut exiger de l'agent qui demande un reclassement qu'il prouve l'existence de postes susceptibles de lui être proposés, la cour a entaché son arrêt d'une erreur de droit ;

Sur les conclusions dirigées contre l'arrêt en tant qu'il statue sur la demande indemnitaire fondée sur les fautes que le CHI aurait commises en n'assurant pas la sécurité de ses agents :

4. Considérant qu'en jugeant que les fautes que le CHI aurait commises en ne prévoyant pas un équipement suffisant en poubelles sécurisées pour déchets radioactifs et ne prenant pas des mesures suffisantes afin de prévenir le risque de contracter la maladie de Bowen, à les supposer établies, " ne présentent pas un lien direct avec la perte d'emploi dont Mme B...demande réparation ", sans préciser si elle se fondait sur l'absence de lien direct entre les fautes imputées au CHI et la pathologie de l'intéressée, ou sur l'absence de lien direct entre cette pathologie et la perte de son emploi, la cour n'a pas mis le juge de cassation en mesure d'exercer le contrôle qui lui incombe ; que son arrêt est sur ce point entaché d'une insuffisance de motivation ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'arrêt du 11 octobre 2016 de la cour administrative d'appel de Marseille doit être annulé ;

6. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de MmeB..., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du CHI de Toulon-La-Seyne-sur-Mer la somme de 4 000 euros à verser à Mme B...au titre de ces mêmes dispositions ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt du 11 octobre 2016 de la cour administrative d'appel de Marseille est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Marseille.

Article 3 : Le CHI de Toulon-La-Seyne-sur-Mer versera la somme de 4 000 euros à Mme B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions présentées par le CHI de Toulon-La-Seyne-sur-Mer au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à Mme A...B..., au centre hospitalier intercommunal de Toulon-La-Seyne-sur-Mer et à la ministre des solidarités et de la santé.


Synthèse
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 405894
Date de la décision : 27/12/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 27 déc. 2017, n° 405894
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Marc Lambron
Rapporteur public ?: Mme Laurence Marion
Avocat(s) : SCP SPINOSI, SUREAU ; SCP WAQUET, FARGE, HAZAN

Origine de la décision
Date de l'import : 16/01/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2017:405894.20171227
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