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18/12/2017 | FRANCE | N°400220

France | France, Conseil d'État, 5ème - 4ème chambres réunies, 18 décembre 2017, 400220


Vu la procédure suivante :

La société civile immobilière (SCI) Saint-Pons-La-Tour a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté de péril imminent du 14 décembre 2011 du maire d'Aix-en-Provence concernant le domaine de Saint-Pons. Par un jugement n° 1201199 du 18 septembre 2014, le tribunal administratif a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 14MA04566 du 30 mars 2016, la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté l'appel formé par la SCI Saint-Pons-La-Tour contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire,

enregistrés les 30 mai et 30 août 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'...

Vu la procédure suivante :

La société civile immobilière (SCI) Saint-Pons-La-Tour a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté de péril imminent du 14 décembre 2011 du maire d'Aix-en-Provence concernant le domaine de Saint-Pons. Par un jugement n° 1201199 du 18 septembre 2014, le tribunal administratif a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 14MA04566 du 30 mars 2016, la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté l'appel formé par la SCI Saint-Pons-La-Tour contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 30 mai et 30 août 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la SCI Saint-Pons-La-Tour demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) de mettre à la charge de la commune d'Aix-en-Provence la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu

- le code de la construction et de l'habitation ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jean-Dominique Langlais, maître des requêtes,

- les conclusions de Mme Laurence Marion, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Garreau, Bauer-Violas, Feschotte-Desbois, avocat de la SCI Saint-Pons-La-Tour et à Me Haas, avocat de la commune d'Aix-en-Provence.

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la SCI Saint-Pons-La-Tour est propriétaire du domaine de Saint-Pons-La-Tour, situé sur le territoire de la commune d'Aix-en-Provence ; que, par une lettre du 1er décembre 2011, le maire de cette commune a, en application de l'article L. 511-3 du code de la construction et de l'habitation, informé la SCI qu'il envisageait de mettre en oeuvre une procédure de péril imminent et qu'il saisissait le tribunal administratif de Marseille en vue de la désignation d'un expert ; que l'expert désigné par une ordonnance du 9 décembre 2011 du juge des référés du tribunal administratif ayant conclu, dans un rapport remis le jour même, à l'existence d'un péril grave et imminent, le maire a pris, le 14 décembre 2011, un arrêté de péril imminent ordonnant à la SCI de prendre dans un délai d'un mois les mesures conservatoires nécessaires ; que, par un jugement du 18 septembre 2014, le tribunal administratif de Marseille a rejeté une demande de la SCI tendant à l'annulation de cet arrêté ; que la SCI se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 30 mars 2016 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté son appel contre ce jugement ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-3 du code de la construction et de l'habitation : " En cas de péril imminent, le maire, après avertissement adressé au propriétaire, demande à la juridiction administrative compétente la nomination d'un expert qui, dans les vingt-quatre heures qui suivent sa nomination, examine les bâtiments, dresse constat de l'état des bâtiments mitoyens et propose des mesures de nature à mettre fin à l'imminence du péril s'il la constate. / Si le rapport de l'expert conclut à l'existence d'un péril grave et imminent, le maire ordonne les mesures provisoires nécessaires pour garantir la sécurité, notamment, l'évacuation de l'immeuble (...) " ; qu'en vertu de l'article R. 556-1 du code de justice administrative, lorsque le juge administratif est saisi par le maire, sur le fondement de l'article L. 511-3 du code de la construction et de l'habitation, d'une demande tendant à la désignation d'un expert, il est statué suivant la procédure de référé prévue à l'article R. 531-1 du code de justice administrative, qui dispose que : " S'il n'est rien demandé de plus que la constatation de faits, le juge des référés peut, sur simple requête qui peut être présentée sans ministère d'avocat et même en l'absence d'une décision administrative préalable, désigner un expert pour constater sans délai les faits qui seraient susceptibles de donner lieu à un litige devant la juridiction. Il peut, à cet effet, désigner une personne figurant sur l'un des tableaux établis en application de l'article R. 221-9. Il peut, le cas échéant, désigner toute autre personne de son choix. / Avis en est donné immédiatement aux défendeurs éventuels. / Par dérogation aux dispositions des articles R. 832-2 et R. 832-3, le délai pour former tierce opposition est de quinze jours " ;

3. Considérant, en premier lieu, que les dispositions précitées de l'article L. 511-3 du code de la construction et de l'habitation, selon lesquelles le maire doit avertir le propriétaire de son intention de demander au tribunal administratif de désigner un expert, impliquent seulement qu'un arrêté de péril imminent ne peut légalement être pris que si le propriétaire a été informé, avant la fin des opérations d'expertise, soit de la saisine du tribunal, soit de la désignation de l'expert ; que, par ailleurs, les dispositions applicables à la procédure de péril imminent ne subordonnent la légalité de l'arrêté ni au caractère contradictoire de l'expertise ni à la notification au propriétaire de l'ordonnance du juge des référés désignant l'expert ; que, dès lors, après avoir relevé que la SCI Saint-Pons-La-Tour, qui avait été destinataire les 25 et 28 octobre 2011 de courriers du maire relatifs à l'état de son domaine, avait été avisée par une lettre du 1er décembre suivant de l'intention de celui-ci de saisir le tribunal administratif en vue de la désignation d'un expert et qu'au surplus un membre de la SCI était présent lors des opérations d'expertise, la cour administrative d'appel, dont l'arrêt est suffisamment motivé sur ce point, n'a pas commis d'erreur de droit en écartant les moyens tirés de ce que l'arrêté litigieux avait été pris au terme d'une procédure irrégulière ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'après avoir relevé, sur la base du rapport d'expertise du 9 décembre 2011 et d'un rapport des services techniques de la commune d'Aix-en-Provence, que la toiture de plusieurs bâtiments et la tour du pigeonnier du château s'étaient effondrées et que des tuiles et des morceaux de crépi menaçaient de tomber, notamment sur la voie publique, la cour a pu estimer, par une appréciation souveraine des faits exempte de dénaturation, que la propriété de la SCI Saint-Pons-La-Tour présentait un risque de péril grave et imminent justifiant les mesures ordonnées, notamment la dépose de tous les éléments de toiture instables, la purge de tous les éléments instables, la mise hors d'eau du domaine ou la constitution d'un périmètre de sécurité continu le long de la façade d'un bâtiment côté route d'Apt ;

5. Considérant, en dernier lieu, que, si la SCI Saint-Pons-La-Tour a, dans sa requête d'appel devant la cour, soutenu que l'expert avait outrepassé sa mission en préconisant d'interdire l'accès au domaine, elle n'a pas soulevé de moyen relatif à l'étendue des pouvoirs de police du maire ; que, s'il ressortait des pièces du dossier soumis à la cour que le maire d'Aix-en-Provence avait ordonné à la SCI d'empêcher provisoirement l'accès du terrain dont elle est propriétaire en raison du risque d'effondrement de plusieurs parties de bâtiments, cette seule circonstance n'était pas de nature à faire apparaître qu'il aurait ordonné une mesure excédant celles qui peuvent être prises en application de l'article L. 511-3 du code de la construction et de l'habitation ; que, par suite, les moyens tirés de ce que la cour aurait omis de répondre au moyen tiré de ce que le maire ne pouvait pas prendre un arrêté de péril portant sur un terrain alors que ses pouvoirs sont limités aux murs, édifices et immeubles ou de ce qu'elle aurait commis une erreur de droit en ne relevant pas ce moyen d'office ne sauraient être accueillis ;

6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le pourvoi de la SCI Saint-Pons-La-Tour doit être rejeté, y compris ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SCI Saint-Pons-La-Tour la somme de 3 000 euros à verser à la commune d'Aix-en-Provence, au titre des mêmes dispositions ;

D E C I D E :

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Article 1er : Le pourvoi de la société civile immobilière Saint-Pons-La-Tour est rejeté.

Article 2 : La société civile immobilière Saint-Pons-La-Tour versera la somme de 3 000 euros à la commune d'Aix-en-Provence au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la société civile immobilière Saint-Pons-La-Tour et à la commune d'Aix-en-Provence.


Synthèse
Formation : 5ème - 4ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 400220
Date de la décision : 18/12/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 18 déc. 2017, n° 400220
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Jean-Dominique Langlais
Rapporteur public ?: Mme Laurence Marion
Avocat(s) : SCP GARREAU, BAUER-VIOLAS, FESCHOTTE-DESBOIS ; HAAS

Origine de la décision
Date de l'import : 26/12/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2017:400220.20171218
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