Vu la procédure suivante :
Par deux mémoires, enregistrés les 2 juin et 27 juin 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A...B...demande au Conseil d'État, en application de l'article 23-5 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 et à l'appui de sa requête tendant à l'annulation du paragraphe 130 des commentaires administratifs du ministre de l'économie et des finances publiée au Bulletin officiel des finances publiques - Impôts le 8 mars 2017 sous la référence BOI-CF-INF-20-10-50, de renvoyer au Conseil constitutionnel la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution du second alinéa de l'article 1766 du code général des impôts dans sa rédaction issue de l'article 14 de la loi du 14 mars 2012 de finances rectificative pour 2012.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la Constitution, notamment son Préambule et son article 61-1 ;
- l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;
- le code général des impôts, notamment son article 1766 ;
- la loi n° 98-1266 du 30 décembre 1998, notamment son article 37 ;
- la loi n° 2012-354 du 14 mars 2012, notamment son article 14 ;
- la loi n° 2013-1279 du 29 décembre 2013, notamment son article 10 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Vincent Uher, maître des requêtes en service extraordinaire,
- les conclusions de M. Benoît Bohnert, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes du premier alinéa de l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel : " Le moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution peut être soulevé (...) à l'occasion d'une instance devant le Conseil d'Etat (...) ". Il résulte des dispositions de ce même article que le Conseil constitutionnel est saisi de la question prioritaire de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et que la question soit nouvelle ou présente un caractère sérieux.
2. Aux termes du premier alinéa du même article 1649 AA dans sa rédaction issue de l'article 10 de la loi de finances rectificative pour 2013 et applicable à compter du 1er janvier 2016 : " Lorsque des contrats de capitalisation ou des placements de même nature, notamment des contrats d'assurance vie, sont souscrits auprès d'organismes mentionnés au I de l'article 1649 ter qui sont établis hors de France, les souscripteurs sont tenus de déclarer, en même temps que leur déclaration de revenus, les références des contrats ou placements concernés, la date d'effet et la durée de ces contrats ou placements, les opérations de remboursement et de versement des primes effectuées au cours de l'année précédente et, le cas échéant, la valeur de rachat ou le montant du capital garanti, y compris sous forme de rente, au 1er janvier de l'année de la déclaration. Les modalités d'application du présent alinéa sont fixées par décret ". Aux termes de l'article 1766 du même code dans sa rédaction issue de l'article 14 de la loi de finances rectificative pour 2012 et applicable aux déclarations devant être souscrites à compter du 1er janvier 2013 : " Les infractions aux dispositions du premier alinéa de l'article 1649 AA sont passibles d'une amende de 1 500 euros par contrat non déclaré. Ce montant est porté à 10 000 euros par contrat non déclaré lorsque l'obligation déclarative concerne un Etat ou territoire qui n'a pas conclu avec la France une convention d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l'évasion fiscales permettant l'accès aux renseignements bancaires. / Si le total de la valeur du ou des contrats non déclarés est égal ou supérieur à 50 000 euros au 31 décembre de l'année au titre de laquelle la déclaration devait être faite, l'amende est portée pour chaque contrat non déclaré à 5 % de la valeur de ce contrat, sans pouvoir être inférieure aux montants prévus au premier alinéa ".
3. Le second alinéa de l'article 1766 du code général des impôts est applicable au présent litige au sens et pour l'application de l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958. Cette disposition n'a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution par le Conseil constitutionnel. Le moyen tiré de ce qu'elle porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution, et notamment au principe de proportionnalité des peines qui découle de l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, soulève une question présentant un caractère sérieux. Ainsi, il y a lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité invoquée.
D E C I D E :
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Article 1er : La question de la conformité à la Constitution des dispositions du second alinéa de l'article 1766 du code général des impôts, dans sa rédaction issue de l'article 14 de la loi du 14 mars 2012 de finances rectificative pour 2012, est renvoyée au Conseil constitutionnel.
Article 2 : Il est sursis à statuer sur la requête de M. B...jusqu'à ce que le Conseil constitutionnel ait tranché la question de constitutionnalité ainsi soulevée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. A...B...et au ministre de l'action et des comptes publics.
Copie en sera adressée au Premier ministre.