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16/06/2017 | FRANCE | N°399733

France | France, Conseil d'État, 4ème chambre, 16 juin 2017, 399733


Vu la procédure suivante :

La société PHB Distribution a demandé à la cour administrative d'appel de Marseille d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 1er juillet 2015 par laquelle la Commission nationale d'aménagement commercial a rejeté sa demande tendant à porter de 997 m2 à 2463 m2 la surface de vente d'un magasin implanté sur la commune de Bouc-Bel-Air (Bouches-du-Rhône). Par un arrêt n° 15MA03921 du 11 mars 2016, la cour administrative d'appel a annulé cette décision.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 12 mai et

12 août 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Distri...

Vu la procédure suivante :

La société PHB Distribution a demandé à la cour administrative d'appel de Marseille d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 1er juillet 2015 par laquelle la Commission nationale d'aménagement commercial a rejeté sa demande tendant à porter de 997 m2 à 2463 m2 la surface de vente d'un magasin implanté sur la commune de Bouc-Bel-Air (Bouches-du-Rhône). Par un arrêt n° 15MA03921 du 11 mars 2016, la cour administrative d'appel a annulé cette décision.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 12 mai et 12 août 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Distribution Casino France demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter la requête de la société PHB Distribution ;

3°) de mettre à la charge de cette société la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de commerce ;

- la décision du Conseil d'Etat, statuant au contentieux, n° 364250 du 26 juin 2013 ;

- le décret n° 2012-1530 du 28 décembre 2012 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jean-François de Montgolfier, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Frédéric Dieu, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Foussard, Froger, avocat de la société Distribution Casino France et à la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, Hannotin, avocat de la société PHB Distribution ;

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par une décision du 11 septembre 2012, la Commission nationale d'aménagement commercial a rejeté la demande de la société PHB Distribution en vue de créer un supermarché d'une surface de vente de 2 500 m2 à Bouc-Bel-Air ; que, par une décision du 26 juin 2013, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a rejeté la requête de cette société tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de cette décision ; que, sous couvert d'un permis de construire délivré le 9 décembre 2012, cette société a néanmoins procédé à la construction du bâtiment commercial projeté et y a exploité, à compter de 2014, un magasin d'une surface de vente inférieure à 1 000 m², non soumis à autorisation préalable d'exploitation commerciale ; que, par une décision du 1er juillet 2015, la Commission nationale d'aménagement commercial a rejeté la demande de cette même société tendant à porter cette surface de vente à 2 463 m², au triple motif que le projet ne participera pas à l'animation de la vie urbaine et rurale de la zone de chalandise, que les modes de déplacements " doux " pour y accéder sont actuellement limités et que le bâtiment ne respecte pas les normes " RT 2012 " ; que, par un arrêt du 13 mars 2016 contre lequel la société Distribution Casino France se pourvoit en cassation, la cour administrative d'appel de Marseille a annulé cette décision ;

2. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'au soutien de ses conclusions aux fins d'annulation, la société Distribution Casino France ne présentait pas de moyens tirés de la méconnaissance de l'autorité de la chose jugée s'attachant à la décision du Conseil d'Etat du 26 juin 2013 citée au point 1 ni, en tout état de cause, de l'autorité de la chose décidée par la Commission nationale d'aménagement commercial le 11 septembre 2011 ; que, par suite, elle n'est pas fondée à reprocher à la cour de ne pas y avoir répondu ; qu'elle ne saurait davantage les présenter pour la première fois en cassation, dès lors que ces moyens ne sont pas d'ordre public ; qu'enfin, si elle reproche à la cour, par des moyens tirés de l'inexacte qualification juridique des faits et de leur dénaturation, de ne pas avoir substitué aux motifs du refus d'autorisation opposé à la société PHB Distribution par la décision litigieuse celui que cette dernière avait recouru à des manoeuvres frauduleuses pour obtenir cette autorisation, il ressort de l'arrêt attaqué que la cour, dont il n'est pas soutenu qu'elle se serait, sur ce point, méprise sur la portée des écritures des parties, ne s'est pas estimé saisie de l'invocation du caractère frauduleux de la demande en question ; que ces moyens sont, par suite, inopérants ;

3. Considérant, en deuxième lieu, que, dans sa rédaction applicable à la date à laquelle la commission départementale d'aménagement commercial a autorisé le projet d'extension en cause, l'article L. 752-6 du code de commerce dispose, que, lorsqu'elle examine une demande d'autorisation d'exploitation commerciale mentionnée à l'article L. 752-1 du même code : " La commission départementale d'aménagement commercial prend en considération : / 1° En matière d'aménagement du territoire : / a) La localisation du projet et son intégration urbaine ; / b) La consommation économe de l'espace, notamment en termes de stationnement ; / c) L'effet sur l'animation de la vie urbaine, rurale et dans les zones de montagne et du littoral ; / d) L'effet du projet sur les flux de transports et son accessibilité par les transports collectifs et les modes de déplacement les plus économes en émission de dioxyde de carbone ; / 2° En matière de développement durable : / a) La qualité environnementale du projet, notamment du point de vue de la performance énergétique, du recours le plus large qui soit aux énergies renouvelables et à l'emploi de matériaux ou procédés éco-responsables, de la gestion des eaux pluviales, de l'imperméabilisation des sols et de la préservation de l'environnement (...) " ; qu'il appartient aux commissions d'aménagement commercial, lorsqu'elles statuent sur les dossiers de demande d'autorisation, d'apprécier la conformité du projet à ces objectifs, au vu des critères d'évaluation mentionnés à l'article L. 752-6 du code de commerce ; que l'autorisation d'exploitation commerciale ne peut être refusée que si, eu égard à ses effets, le projet contesté compromet la réalisation des objectifs énoncés par la loi ;

4. Considérant, qu'en se fondant, pour juger que le projet ne compromet pas l'animation urbaine de la commune de Bouc-Bel-Air, sur la circonstance qu'en dépit de son implantation à 4 km du centre-ville dans une zone d'habitat diffus, le projet en cause est situé dans une zone d'activités existante qui a vocation à accueillir des activités commerciales, qu'il est accessible par plusieurs routes de traverse et situé à proximité d'un habitat continu constitué de maisons individuelles et en extension, la cour administrative d'appel a porté sur les faits de l'espèce une appréciation souveraine exempte de dénaturation et n'a pas commis d'erreur de droit ;

5. Considérant que le II de l'article 2 du décret du 28 décembre 2012 relatif aux caractéristiques thermiques et aux exigences de performance énergétique des bâtiments nouveaux prévoit que l'extension des nouvelles normes de performance énergétique s'applique à tous les bâtiments " qui font l'objet d'une demande de permis de construire déposée à compter " du 1er janvier 2013 ; qu'il n'est pas contesté que le permis délivré aux fins d'édifier le bâtiment dans lequel le projet en cause est destiné à s'implanter a fait l'objet d'une demande antérieure à cette date ; que, par suite, la cour administrative d'appel n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant que la Commission nationale d'aménagement commercial ne pouvait légalement se fonder sur cette réglementation pour refuser le projet ;

6. Considérant que pour juger que le projet n'est pas de nature à compromettre l'objectif d'aménagement du territoire au regard de son accessibilité par les modes de déplacement les plus économes en dioxyde de carbone, la cour s'est fondée sur la circonstance qu'une piste cyclable a été réalisée le long du magasin, lequel est également accessible à pied depuis les habitations avoisinantes ; que ce faisant, elle a porté sur les faits de l'espèce une appréciation souveraine exempte de dénaturation ; que contrairement à ce que soutient la requérante, il ressort des termes même de son arrêt qu'elle ne s'est pas fondée, sur ce point, sur les aménagements à venir de la route départementale n° 8 qui dessert le projet, notamment par la création de contre-allées, cette circonstance n'étant mentionnée dans son arrêt qu'à titre superfétatoire ; que la cour n'a, par suite, pas commis d'erreur de droit ni dénaturé les faits en retenant que ce projet d'aménagement était certain ;

7. Considérant, en dernier lieu, que la cour administrative d'appel n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant inopérante la demande de substitution de motifs présentée en défense par la société Distribution Casino France ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société Distribution Casino France n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille du 11 mars 2016 ; que son pourvoi doit être rejeté ;

9. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société Distribution Casino France une somme de 3 000 euros à verser à la société PHB Distribution au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que les dispositions de cet article font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de la société PHB Distribution qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de la société Distribution Casino France est rejeté.

Article 2 : La société Distribution Casino France versera à la société PHB Distribution la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la société Distribution Casino France et à la société PHB Distribution.

Copie en sera adressée au ministre de l'économie.


Synthèse
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 399733
Date de la décision : 16/06/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 16 jui. 2017, n° 399733
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Jean-François de Montgolfier
Rapporteur public ?: M. Frédéric Dieu
Avocat(s) : SCP FOUSSARD, FROGER ; SCP NICOLAY, DE LANOUVELLE, HANNOTIN

Origine de la décision
Date de l'import : 16/12/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2017:399733.20170616
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