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08/06/2017 | FRANCE | N°411129

France | France, Conseil d'État, Juge des référés, 08 juin 2017, 411129


Vu la procédure suivante :

M. A... B...et Mme C...B...ont demandé au juge des référés du tribunal administratif de Montpellier, sur le fondement des articles L. 521-2 et L. 911-4 du code de justice administrative :

- de condamner l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) à une astreinte de 200 euros par heure de retard en vue d'assurer l'exécution de l'ordonnance n° 1702315 du 20 mai 2017 par laquelle ce juge des référés, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, a enjoint à l'OFII de leur fournir un lieu

d'hébergement adapté dans un délai de cinq jours,

- d'enjoindre à l'OFI...

Vu la procédure suivante :

M. A... B...et Mme C...B...ont demandé au juge des référés du tribunal administratif de Montpellier, sur le fondement des articles L. 521-2 et L. 911-4 du code de justice administrative :

- de condamner l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) à une astreinte de 200 euros par heure de retard en vue d'assurer l'exécution de l'ordonnance n° 1702315 du 20 mai 2017 par laquelle ce juge des référés, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, a enjoint à l'OFII de leur fournir un lieu d'hébergement adapté dans un délai de cinq jours,

- d'enjoindre à l'OFII d'adresser leur demande d'asile à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) avec l'évaluation de leur vulnérabilité,

- d'enjoindre à l'OFII de remplir sa mission d'octroi des conditions matérielles d'accueil et de suivi social et administratif tant qu'une décision de retrait n'a pas été notifiée.

Par une ordonnance n° 1702483 du 30 mai 2017, le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande.

Par une requête, enregistrée le 1er juin 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. et Mme B...demandent au juge des référés du Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Montpellier du 30 mai 2017 ;

2°) d'assortir l'injonction prononcée par l'ordonnance du même juge du 20 mai 2017 d'une astreinte de 1 000 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le juge des référés a commis une erreur de droit et une erreur de procédure en conditionnant le prononcé d'une astreinte à l'urgence au sens de l'article L. 521-2 du code de justice administrative ;

- il a méconnu les principes du contradictoire et d'égalité des armes et a statué ultra petita en retenant l'existence d'un trouble à l'ordre public ;

- il a remis en cause le bien fondé de l'injonction prononcée par l'ordonnance du 20 mai 2017 en se fondant sur l'impossibilité pour l'OFII de trouver un logement adapté et sur le comportement de leur fils ;

- ils ont besoin d'un hébergement adapté, qui ne leur a toujours pas été proposé.

Par un mémoire en intervention, enregistré le 7 juin 2017, l'association la Cimade demande au Conseil d'Etat de faire droit aux conclusions des requérants. Elle se réfère aux moyens exposés par M. et Mme B...dans leur requête.

Par un mémoire en défense, enregistré le 7 juin 2017, l'Office français de l'immigration et de l'intégration conclut au rejet de la requête. Il fait valoir que :

- la famille a eu des comportements violents, pouvant fonder un retrait des conditions matérielles d'accueil ;

- il a recherché vainement une place adaptée à la situation particulière de la famille.

Vu les autres pièces du dossier :

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part, M. et Mme B... et l'association la Cimade, d'autre part, l'Office français de l'immigration et de l'intégration ;

Vu le procès-verbal de l'audience publique du mercredi 6 juin 2017 à 16 heures au cours de laquelle ont été entendus :

- Me Corlay, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de M. et Mme B... ;

- le représentant de la Cimade ;

- les représentants de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) ;

et à l'issue de laquelle le juge des référés a clos l'instruction.

Considérant ce qui suit :

Sur l'intervention :

1. La Cimade justifie, eu égard à son objet statutaire et à la nature du litige, d'un intérêt suffisant pour intervenir au soutien de l'appel de M. et MmeB.... Son intervention est, par suite, recevable.

Sur les conclusions à fin d'astreinte :

2. Aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : " Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. Le juge des référés se prononce dans un délai de quarante-huit heures ".

3. Aux termes de l'article L. 911-4 du code de justice administrative : " En cas d'inexécution d'un jugement ou d'un arrêt, la partie intéressée peut demander au tribunal administratif ou à la cour administrative d'appel qui a rendu la décision d'en assurer l'exécution. (...) la juridiction saisie (...) peut fixer un délai d'exécution et prononcer une astreinte (...) ". En vertu de l'article R. 921-1-1 du même code, dans le cas où le tribunal a ordonné une mesure d'urgence, cette demande peut être présentée sans délai ou, si le tribunal a déterminé un délai dans lequel l'administration doit prendre les mesures d'exécution qu'il a prescrites, à l'expiration de ce délai.

4. Par une ordonnance du 20 mai 2017, le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, a enjoint au directeur de l'Office français de l'immigration et de l'intégration de fournir un lieu d'hébergement adapté à M. et MmeB..., ressortissants albanais demandeurs d'asile, ainsi qu'à leur fils mineur, dans un délai de cinq jours à compter de la notification de l'ordonnance. En l'absence d'offre d'hébergement dans le délai imparti, M. et Mme B...ont demandé au juge des référés d'assortir son injonction d'une astreinte. Par une ordonnance du 30 mai 2017, dont M. et Mme B...font appel, le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande.

5. Lorsqu'une mesure a été ordonnée par le juge des référés sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, son exécution peut être recherchée dans les conditions définies par les articles L. 911-4 et R. 921-1-1 du même code, sans qu'il y ait alors besoin pour les requérants d'établir de nouveau que leur demande est justifiée par l'urgence. Par suite, M. et Mme B...sont fondés à soutenir que c'est à tort que le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier s'est fondé, pour rejeter leur demande d'exécution, sur la circonstance que la condition d'urgence posée par l'article L. 521-2 du code de justice administrative n'était pas remplie.

6. Il appartient toutefois au juge d'appel de vérifier s'il y a lieu, en application de l'article L. 911-4 du code de justice administrative, de faire droit à la demande d'exécution présentée par M. et MmeB.... Il résulte de l'instruction qu'à la date de la présente décision, postérieure au délai déterminé par le juge des référés, l'Office français de l'immigration et de l'intégration n'a pas pris les mesures propres à assurer l'exécution de l'ordonnance du 20 mai 2017, en proposant à M. et Mme B...un hébergement accessible aux personnes à mobilité réduite. D'une part, si l'Office fait valoir le comportement violent de leur fils, il résulte de l'instruction que le bénéfice des conditions matérielles d'accueil proposées aux demandeurs d'asile ne leur a, à ce jour, pas été retiré sur le fondement de l'article L. 744-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, une procédure ayant seulement été engagée à cette fin. D'autre part, le juge de l'exécution, saisi sur le fondement de l'article L. 911-4 du code de justice administrative, n'a pas le pouvoir de remettre en cause les mesures décidées par le dispositif de la décision juridictionnelle dont l'exécution est demandée. Il appartient, le cas échéant, à l'Office français de l'immigration et de l'intégration de saisir le juge des référés sur le fondement de l'article L. 521-4 du code de justice administrative, en lui demandant, au vu d'un élément nouveau, de modifier les mesures qu'il avait ordonnées ou d'y mettre fin.

7. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme B...sont fondés à demander l'annulation de l'ordonnance du 30 mai 2017 qu'ils attaquent et qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'affaire, et en dépit des difficultés rencontrées par l'Office français de l'immigration et de l'intégration dans la recherche d'un hébergement accessible aux personnes à mobilité réduite, de prononcer à son encontre, à défaut pour lui de justifier de l'exécution de l'ordonnance du 20 mai 2017, une astreinte de 100 euros par jour, à compter de l'expiration d'un délai de quatre jours suivant la notification de la présente décision et jusqu'à la date à laquelle cette ordonnance aura reçu exécution.

Sur les frais exposés par les parties à l'occasion du litige :

8. L'Etat n'étant pas partie à la présente instance, les conclusions de M. et Mme B...tendant à ce que celui-ci leur verse la somme qu'ils demandent sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

O R D O N N E :

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Article 1er : L'intervention de la Cimade est admise.

Article 2 : L'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Montpellier n° 1702483 du 30 mai 2017 est annulée.

Article 3 : Une astreinte est prononcée à l'encontre de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, s'il ne justifie pas avoir exécuté l'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Montpellier n° 1702315 du 20 mai 2017. Le taux de cette astreinte est fixé à 100 euros par jour, à compter de l'expiration du délai de quatre jours suivant la notification de la présente décision et jusqu'à la date de cette exécution.

Article 4 : L'Office français de l'immigration et de l'intégration communiquera à la section du rapport et des études du Conseil d'Etat copie des actes justifiant des mesures prises pour exécuter l'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Montpellier n° 1702315 du 20 mai 2017.

Article 5 : La présente ordonnance sera notifiée à M. A...B...et Mme C...B..., à la Cimade et à l'Office français de l'immigration et de l'intégration.

Copie en sera adressée au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et à la section du rapport et des études du Conseil d'Etat.


Synthèse
Formation : Juge des référés
Numéro d'arrêt : 411129
Date de la décision : 08/06/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 08 jui. 2017, n° 411129
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Avocat(s) : CORLAY

Origine de la décision
Date de l'import : 20/06/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2017:411129.20170608
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