Vu la procédure suivante :
Mme B...A...a demandé au tribunal administratif de Pau de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2005 et 2006. Par un jugement n° 1102046 du 30 septembre 2013, ce tribunal a fait droit à sa demande.
Par un arrêt n° 14BX00345 du 26 avril 2016, la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté l'appel formé par le ministre de l'économie et des finances contre ce jugement.
Par un pourvoi, enregistré le 15 juin 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre des finances et des comptes publics demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Manon Perrière, maître des requêtes,
- les conclusions de M. Benoît Bohnert, rapporteur public.
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Lévis, avocat de MmeA....
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que Mme A...a fait l'objet d'une vérification de sa comptabilité pour la période du 1er janvier 2005 au 31 décembre 2006. A l'issue de ce contrôle, l'administration, après avoir mis en oeuvre la procédure d'évaluation d'office des bases d'imposition prévue par les dispositions de l'article L. 74 du livre des procédures fiscales en cas d'opposition à contrôle fiscal, a évalué d'office les bénéfices non commerciaux de l'intéressée et a assujetti Mme A... à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu au titre des années 2005 et 2006. Par un jugement du 30 septembre 2013, le tribunal administratif de Pau a prononcé la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu en litige au motif que la situation d'opposition à contrôle fiscal n'était pas caractérisée. Le ministre de l'économie et des finances se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 26 avril 2016 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté l'appel qu'il avait formé contre ce jugement.
2. Si l'administration peut, à tout moment de la procédure contentieuse, invoquer un nouveau fondement juridique pour justifier l'imposition, une telle substitution de base légale est subordonnée à la condition que le contribuable ait disposé des garanties dont est assortie l'application du texte sur le fondement duquel l'imposition aurait dû être établie. En particulier, une telle substitution ne saurait avoir pour effet de priver le contribuable de la faculté, prévue par les articles L. 59 et L. 59 A du livre des procédures fiscales, de demander la saisine de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, lorsque celle-ci est compétente pour connaître de tout ou partie du différend opposant le contribuable à l'administration fiscale.
3. Il résulte des dispositions de l'article L. 59 du livre des procédures fiscales que lorsqu'un contribuable demande que le désaccord qui l'oppose à l'administration et qui relève de la compétence consultative de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires au titre, notamment, du 1° de l'article 59 A du livre des procédures fiscales, soit soumis à cette commission, l'administration est tenue de la saisir et satisfait à l'obligation qui lui est ainsi faite en la saisissant régulièrement. Lorsque la commission se déclare incompétente pour examiner les questions qui lui ont ainsi été soumises, en se méprenant le cas échéant sur l'étendue du domaine d'intervention que lui attribuent les dispositions de l'article L. 59 A du livre des procédures fiscales, cette erreur n'affecte pas la régularité de la procédure d'imposition.
4. La substitution de base légale sollicitée par le ministre en appel, qui ne portait que sur la procédure d'imposition et consistait à substituer la procédure de rectification contradictoire prévue par l'article L. 55 du livre des procédures fiscales à la procédure d'évaluation d'office des bases d'imposition prévue par l'article L. 74 du livre des procédures fiscales, n'était susceptible de soulever aucune question nouvelle entrant dans le champ de compétence de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires. Il ressort en outre des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, bien que le montant de ses bases d'imposition ait été établi selon la procédure d'évaluation d'office, Mme A... a pu effectivement saisir, en temps utile, cette commission et s'est bornée, devant celle-ci, à contester le recours à la procédure prévue à l'article L. 74 du livre des procédures fiscales. Par suite, en jugeant que la substitution de base légale sollicitée par le ministre conduisait à priver la contribuable d'une garantie attachée à la procédure contradictoire de redressement au seul motif que la commission, effectivement saisie, s'était déclarée incompétente pour connaître d'un différend relatif uniquement à l'application de la procédure d'imposition, la cour administrative d'appel a entaché son arrêt d'une erreur de droit.
5. Il résulte de ce qui précède que le ministre est fondé à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque.
6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.
D E C I D E :
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Article 1er : L'arrêt du 26 avril 2016 de la cour administrative d'appel de Bordeaux est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Bordeaux.
Article 3 : Les conclusions présentées par Mme A...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'économie et des finances et à Mme B...A....