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20/03/2017 | FRANCE | N°396009

France | France, Conseil d'État, 4ème - 5ème chambres réunies, 20 mars 2017, 396009


Vu la procédure suivante :

Par une requête, un mémoire en réplique et un nouveau mémoire, enregistrés les 11 janvier 2016, 5 juillet 2016 et 12 janvier 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme V...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret du 10 novembre 2015 du président de la République portant nomination et titularisation (tribunaux administratifs et cours administratives d'appel) ;

2°) d'enjoindre à l'administration de réexaminer sa candidature.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- le code de justice administrative ;

Vu la note en délib...

Vu la procédure suivante :

Par une requête, un mémoire en réplique et un nouveau mémoire, enregistrés les 11 janvier 2016, 5 juillet 2016 et 12 janvier 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme V...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret du 10 novembre 2015 du président de la République portant nomination et titularisation (tribunaux administratifs et cours administratives d'appel) ;

2°) d'enjoindre à l'administration de réexaminer sa candidature.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- le code de justice administrative ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 7 mars 2017, présentée par Mme T....

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Sophie Baron, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de Mme Sophie-Justine Lieber, rapporteur public ;

1. Considérant que MmeT..., administratrice des finances publiques adjointe, a présenté sa candidature au recrutement au tour extérieur, pour l'année 2016, de membres du corps des tribunaux administratif et des cours administratives d'appel aux grades de premier conseiller et de conseiller ; qu'elle demande l'annulation du décret du 10 novembre 2015 qui nomme et titularise trois candidats dans le grade de premier conseiller et huit candidats dans le grade de conseiller, sans retenir sa candidature ;

2. Considérant qu'il résulte des articles L. 232-1 et L. 233-1 du code de justice administrative que les membres du corps des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel sont nommés par décret du Président de la République pris sur la proposition du Conseil supérieur des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel ; qu'en vertu de l'article L. 232-2 du même code, le Conseil supérieur des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel comprend notamment, parmi ses membres, le conseiller d'Etat, chef de la mission permanente d'inspection des juridictions administratives ; qu'aux termes du premier alinéa de l'article R. 232-22 de ce code : " Le président du Conseil supérieur désigne pour chaque affaire un rapporteur qui peut être le secrétaire général des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ou l'un des membres du conseil. Lorsque le Conseil supérieur émet une proposition, le dossier au vu duquel il se prononce comporte l'avis écrit du conseiller d'Etat, chef de la mission permanente d'inspection des juridictions administratives " ; qu'enfin, aux termes du deuxième alinéa du même article : " Pour élaborer son rapport sur les propositions afférentes aux nominations, détachements et intégrations prévus aux articles L. 233-3, L. 233-4 et L. 233-5, le rapporteur peut être assisté par une formation restreinte du conseil supérieur, laquelle peut procéder à toutes mesures d'instruction utiles, y compris des auditions " ;

3. Considérant, en premier lieu, que, contrairement à ce que soutient Mme T..., il ne ressort pas des pièces du dossier que son audition par la formation restreinte du Conseil supérieur des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel qui a assisté le rapporteur dans l'examen des candidatures ait été entachée de partialité, ni que la teneur de cette audition ait été déformée au cours de l'instruction de sa candidature ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le Conseil supérieur des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel n'aurait pas disposé des informations lui permettant de se prononcer en toute connaissance de cause sur les différentes candidatures ; que, contrairement à ce que soutient la requérante, il ne résulte pas des dispositions de l'article R. 232-22 du code de justice administrative que le dossier qui a été remis aux membres du Conseil supérieur des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel et au vu duquel celui-ci s'est prononcé pour formuler ses propositions devait comporter l'ensemble des pièces des dossiers de candidature des candidats ; qu'au demeurant, ces dossiers ont été tenus à la disposition de l'ensemble des membres du Conseil supérieur ;

5. Considérant, en troisième lieu, qu'il résulte des dispositions citées au point 2 que le chef de la mission permanente d'inspection des juridictions administratives peut être désigné comme rapporteur sur toute affaire soumise au Conseil supérieur des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel et que, par ailleurs, lorsqu'une affaire soumise au Conseil supérieur est relative à une proposition qu'il lui appartient d'émettre, il doit formuler un avis écrit qui est communiqué aux membres du Conseil supérieur avant qu'il ne se prononce ;

6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le décret attaqué a été pris sur la proposition du Conseil supérieur émise lors de sa séance du 6 octobre 2015 ; que, en application des dispositions citées au point 2, le conseiller d'Etat, chef de la mission permanente d'inspection des juridictions administratives, a été désigné comme rapporteur pour l'ensemble des candidatures soumises au Conseil supérieur lors de cette séance ; qu'il est constant qu'en méconnaissance des mêmes dispositions, aucun avis écrit du chef de la mission permanente d'inspection des juridictions administratives sur ces différentes candidatures n'a été soumis au Conseil supérieur avant sa délibération ;

7. Considérant qu'il ressort toutefois des pièces du dossier, notamment du procès-verbal de la séance du Conseil supérieur du 6 octobre 2015, que le chef de la mission permanente d'inspection des juridictions administratives a présenté, lors de cette séance, un rapport oral, qui comportait un avis sur chacune des candidatures examinées ; que, par suite, compte tenu de l'objet de l'avis écrit prévu par les dispositions de l'article R. 232-22 du code de justice administrative, dont aucune disposition n'impose qu'il soit motivé, et de la présentation par le chef de la mission permanente d'inspection des juridictions administratives d'un rapport oral qui a permis aux membres du Conseil supérieur de prendre pleinement connaissance de son avis sur les candidatures, l'absence d'un avis écrit n'a, dans les circonstances de l'espèce, ni été susceptible d'exercer une influence sur le sens de la proposition émise, ni privé d'une garantie les membres du Conseil supérieur ou les candidats ;

8. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article L. 233-4-1 du code de justice administrative, relatif aux nominations au tour extérieur des membres du corps des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel : " Le Conseil supérieur des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel peut proposer, lorsque le nombre de nominations susceptibles d'être prononcées au grade de premier conseiller en application de l'article L. 233-4 n'est pas atteint, de reporter ces nominations sur le grade de conseiller " ; que, contrairement à ce que soutient MmeT..., il ne résulte ni de ces dispositions ni de celles de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 sur la motivation des actes administratifs, devenu l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration, que, lorsque le Conseil supérieur refuse de proposer un nombre de nominations au grade de premier conseiller égal à celui qui avait été initialement déterminé en application de l'article L. 233-4 du code de justice administrative et propose, en conséquence, de reporter ces nominations sur le grade de conseiller, cette proposition doive être motivée ; qu'en particulier, le refus de proposer le nombre initialement prévu de nominations au tour extérieur au grade de premier conseiller ne revêt pas le caractère d'une décision individuelle ayant refusé à la requérante un avantage auquel elle avait droit, au sens de ces dispositions ;

9. Considérant, enfin, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la proposition formulée par le Conseil supérieur des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel et le décret attaqué seraient, comme le soutient la requérante, entachés d'une erreur manifeste d'appréciation, faute de retenir sa candidature ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir soulevée par le garde des sceaux, ministre de la justice, la requérante n'est pas fondée à demander l'annulation du décret qu'elle attaque ; que, par suite, ses conclusions aux fins d'injonction doivent, également être rejetées ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de Mme T...est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à MmeV..., à M. M...S..., à M. L...R..., à MmeU..., à M. H...I..., à Mme A...B..., à M. P...J..., à Mme E...K..., à M. O...N..., à M. F...C..., à M. D...Q..., à Mme G...Le Duc, au garde des sceaux, ministre de la justice et au Premier ministre.


Synthèse
Formation : 4ème - 5ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 396009
Date de la décision : 20/03/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 20 mar. 2017, n° 396009
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Sophie Baron
Rapporteur public ?: Mme Sophie-Justine Lieber

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2017:396009.20170320
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