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10/03/2017 | FRANCE | N°396596

France | France, Conseil d'État, 10ème chambre, 10 mars 2017, 396596


Vu la procédure suivante :

La société civile immobilière Carimmo a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler les décisions du 2 septembre 2013 et du 22 septembre 2014 par lesquelles le directeur de la direction spécialisée de contrôle fiscal Ouest a rejeté ses réclamations préalables, de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires de taxe foncière sur les propriétés bâties auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2011 et 2012 et de prononcer la réduction de la cotisation supplémentaire de taxe foncière sur les propriétés bâtie

s à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2013.

Par un jugement n...

Vu la procédure suivante :

La société civile immobilière Carimmo a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler les décisions du 2 septembre 2013 et du 22 septembre 2014 par lesquelles le directeur de la direction spécialisée de contrôle fiscal Ouest a rejeté ses réclamations préalables, de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires de taxe foncière sur les propriétés bâties auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2011 et 2012 et de prononcer la réduction de la cotisation supplémentaire de taxe foncière sur les propriétés bâties à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2013.

Par un jugement nos 1304104, 1405062 du 2 décembre 2015, ce tribunal a réduit les bases d'imposition de taxe foncière mises à la charge de la société Carimmo au titre des années 2011, 2012 et 2013, déchargé, dans cette mesure, la société des cotisations de taxe foncière au titre de ces années et rejeté le surplus de ses conclusions.

Par un pourvoi, enregistré le 29 janvier 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre des finances et des comptes publics demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler les articles 1er et 2 de ce jugement ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter la demande de la société Carimmo.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code civil ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Manon Perrière, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Benoît Bohnert, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société civile immobilière Carimmo a loué, à compter du 1er décembre 2007 et pour une durée de neuf ans, un terrain et un ensemble de bâtiments, dont elle est propriétaire, à la société Carrosserie de l'Iroise. Cette dernière a édifié de nouveaux bâtiments et les a inscrits à son bilan. A l'issue d'une vérification de comptabilité, l'administration a regardé la société Carimmo comme propriétaire de ces nouveaux bâtiments et a, en conséquence, rehaussé les bases d'imposition de taxe foncière sur les propriétés bâties à laquelle la société a été assujettie au titre des années 2011, 2012 et 2013. La société Carimmo a demandé au tribunal administratif de Rennes, d'une part, d'annuler les décisions par lesquelles le directeur de la direction spécialisée de contrôle fiscal Ouest a rejeté ses réclamations préalables, d'autre part, de prononcer la décharge des impositions supplémentaires mises à sa charge au titre des années 2011 et 2012 et la réduction de l'imposition supplémentaire à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2013. Le ministre des finances et des comptes publics se pourvoit en cassation contre les articles 1er et 2 du jugement du tribunal administratif par lesquels celui-ci a réduit les bases d'imposition de la société Carimmo au titre des années 2011, 2012 et 2013 et l'a déchargée, dans cette mesure, des cotisations de taxe foncière sur les propriétés bâties au titre de ces années.

2. Aux termes du I de l'article 1400 du code général des impôts : " I. Sous réserve des dispositions des articles 1403 et 1404, toute propriété, bâtie ou non bâtie, doit être imposée au nom du propriétaire actuel (...) ". Aux termes de l'article 555 du code civil : " Lorsque les plantations, constructions et ouvrages ont été faits par un tiers et avec des matériaux appartenant à ce dernier, le propriétaire du fonds a le droit (...) soit d'en conserver la propriété, soit d'obliger le tiers à les enlever. / Si le propriétaire du fonds exige la suppression des constructions, plantations et ouvrages, elle est exécutée aux frais du tiers, sans aucune indemnité pour lui ; le tiers peut, en outre, être condamné à des dommages-intérêts pour le préjudice éventuellement subi par le propriétaire du fonds ".

3. En application des dispositions citées ci-dessus du code civil, l'accession à la propriété des biens construits par un tiers sur le terrain que lui loue son propriétaire ne peut avoir lieu qu'à l'expiration du bail conclu avec ce tiers, sauf stipulations contraires. Le tribunal administratif a relevé qu'il résultait des stipulations du f) de l'article 6.4 du bail conclu entre la société Carimmo, bailleur, et la société Carrosserie de l'Iroise, preneur, que " toute construction nouvelle, adjonction, embellissement notamment, qui seraient faite par le Preneur, même avec l'autorisation du Bailleur, deviendra la propriété du Bailleur en fin de bail, sans indemnité, à moins que le Bailleur ne préfère demander la remise des lieux dans leur état d'origine ". Ainsi, il n'a pas dénaturé les termes du contrat en estimant qu'il était de la commune intention des parties à ce contrat que les bâtiments élevés par la société Carrosserie de l'Iroise resteraient sa propriété jusqu'à l'expiration du bail la liant à la société Carimmo. Par suite, il résulte de ce qu'il a été dit ci-dessus qu'il n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant que les constructions édifiées par la société Carrosserie de l'Iroise n'étaient, ni au 1er janvier 2011, ni au 1er janvier 2012, ni au 1er janvier 2013, la propriété de la société Carimmo et que leur valeur locative ne devait pas être comprise dans les bases d'imposition de la taxe foncière sur les propriétés bâties à laquelle cette société a été assujettie au titre des années 2011, 2012 et 2013. Le ministre n'est, dès lors, pas fondé à demander l'annulation de l'article 1er du jugement attaqué.

4. Aux termes du I de l'article 1404 du code général des impôts : " Lorsque au titre d'une année une cotisation de taxe foncière a été établie au nom d'une personne autre que le redevable légal, le dégrèvement de cette cotisation est prononcé à condition que les obligations prévues à l'article 1402 aient été respectées. L'imposition du redevable légal au titre de la même année est établie au profit de l'Etat dans la limite de ce dégrèvement ". Alors qu'il avait déchargé la société Carimmo des cotisations de taxe foncière sur les propriétés bâties auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2011, 2012 et 2013 à raison des constructions édifiées par la société Carrosserie de l'Iroise, le tribunal administratif a méconnu l'obligation qui pèse sur lui, en vertu du I de l'article 1404 du code général des impôts, en s'abstenant de désigner, comme il y était tenu même en l'absence de toute demande des parties, le redevable légal de ces impositions au titre des mêmes années au vu des éléments portés à sa connaissance et après l'avoir mis en cause. Par suite, le ministre des finances et des comptes publics est fondé à demander l'annulation, dans cette mesure, de l'article 2 du jugement qu'il attaque.

D E C I D E :

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Article 1er : L'article 2 du jugement du tribunal administratif de Rennes du 2 décembre 2015 est annulé en tant qu'il a omis, après avoir déchargé la société Carimmo des cotisations de taxe foncière sur les propriétés bâties auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2011, 2012 et 2013 à raison des constructions édifiées par la société Carrosserie de l'Iroise, de désigner le redevable légal de ces impositions.

Article 2 : L'affaire est renvoyée, dans la mesure de l'annulation prononcée à l'article 1er, au tribunal administratif de Rennes.

Article 3 : Le surplus des conclusions du ministre est rejeté.

Article 4 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'économie et des finances et à la société civile immobilière Carimmo.


Synthèse
Formation : 10ème chambre
Numéro d'arrêt : 396596
Date de la décision : 10/03/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 10 mar. 2017, n° 396596
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Manon Perrière
Rapporteur public ?: M. Benoît Bohnert

Origine de la décision
Date de l'import : 21/03/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2017:396596.20170310
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