Vu la procédure suivante :
M. B...A...a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Nantes, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, d'une part, d'enjoindre au maire de la commune de Laval et au président de la communauté d'agglomération de Laval agglomération de mettre en oeuvre, sous 15 jours, tous les moyens humains et matériels afin de lui permettre d'exercer ses fonctions d'agent de maîtrise principal, conformément à sa fiche de poste du 22 avril 2015 et à ses aptitudes professionnelles, ainsi que de régulariser son transfert au pôle de géomatique dépendant de la communauté d'agglomération et, d'autre part, d'enjoindre au directeur général des services de la commune de procéder, dans les meilleurs délais, à son entretien d'évaluation pour les années 2015 et 2016.
Par une ordonnance n° 1610051 du 5 décembre 2016, le juge des référés du tribunal administratif de Nantes a enjoint à la commune de Laval, d'une part, de confier à M. A... des missions effectives correspondant à sa fiche de poste ainsi que les moyens de les exercer dans un délai d'une semaine et, d'autre part, de procéder à son évaluation au titre des années 2015 et 2016 dans un délai de trois semaines.
Par une requête, enregistrée le 20 décembre 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, et un mémoire complémentaire, enregistré le 6 janvier 2017, la commune de Laval, représentée par son maire, demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative :
1°) d'annuler cette ordonnance ;
2°) de rejeter la demande de M. A...en première instance.
Elle soutient que :
- aucune atteinte grave et manifestement illégale n'a été portée à la situation de M. A...en l'absence de harcèlement moral ;
- l'ordonnance attaquée est entachée d'erreurs de droit tenant, d'une part, au déroulement incorrect du régime probatoire propre au harcèlement moral et, d'autre part, à l'absence de prise en considération de l'attitude de M. A... pour caractériser l'existence dudit harcèlement ;
- l'ordonnance attaquée est entachée d'une erreur de qualification juridique des faits de l'espèce ;
- la condition d'urgence n'est pas remplie.
Par un mémoire en défense, enregistré le 4 janvier 2017, et un mémoire en réplique, enregistré le 10 janvier 2017, M. B... A...conclut au rejet de la requête, à ce qu'il soit enjoint à la commune de Laval de régulariser son transfert au sein de la direction de l'eau et de l'assainissement et à ce qu'une somme de 4 000 euros soit mise à la charge de la commune au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par la commune n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part, la commune de Laval et, d'autre part, M. A...;
Vu le procès-verbal de l'audience publique du vendredi 6 janvier 2017 à 10 heures au cours de laquelle ont été entendus :
- Me Garreau, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de la commune de Laval ;
- les représentants de la commune de Laval ;
- Me Ricard, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de M. A... ;
- M.A... ;
et à l'issue de laquelle le juge des référés a différé la clôture de l'instruction au mardi 10 janvier 2016 à midi ;
1. Considérant qu'aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : " Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale " ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article 6 quinquiès de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. " ; que le droit de ne pas être soumis à un harcèlement moral constitue pour un fonctionnaire une liberté fondamentale au sens des dispositions de l'article L. 521-2 du code de justice administrative ;
3. Considérant que M.A..., agent de maîtrise principal, est employé depuis de nombreuses années par la commune de Laval en qualité de dessinateur-projeteur au service géomatique ; que, dans le cadre de la mutualisation des services de la commune et de la communauté d'agglomération de Laval, a été créée le 1er juillet 2015, au sein de la communauté d'agglomération, une direction des systèmes d'information et des télécommunications regroupant les informaticiens et techniciens spécialisés en informatique ; qu'au sein de cette direction, a été créé un pôle géomatique ; que M.A..., qui est affecté au service géomatique de la commune de Laval, soutient que la nouvelle organisation mise en place a donné lieu à des agissements de harcèlement moral à son encontre dès lors qu'il n'a pas été affecté à ce service commun, qu'il n'a plus d'activité effective depuis plusieurs mois, qu'il est privé des outils informatiques spécifiques à son activité depuis avril 2016, qu'il n'a pas été évalué au titre des années 2015 et 2016 et n'a pas reçu d'objectifs de travail, que son régime indemnitaire a été réduit en 2015 et, enfin, que son rattachement administratif au sein de la commune de Laval a été modifié en avril 2016 sans qu'il en ait été préalablement informé ; que, par une ordonnance du 5 décembre 2016, le juge des référés du tribunal administratif de Nantes, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, a estimé que les agissements de la commune de Laval étaient constitutifs de harcèlement moral et a enjoint à la commune de Laval, d'une part, de confier à M. A... des missions effectives correspondant à sa fiche de poste ainsi que les moyens de les exercer dans un délai d'une semaine et, d'autre part, de procéder à son évaluation au titre des années 2015 et 2016 dans un délai de trois semaines ; que la commune de Laval relève appel de cette ordonnance ;
4. Considérant qu'il résulte de l'instruction que les fonctions de M. A... consistent à intégrer des données géographiques produites par d'autres services dans une base de données géomatique ; que le pôle géomatique créé au sein de la direction des systèmes d'information et des télécommunications de la communauté d'agglomération de Laval agglomération a pour fonction de traiter et d'assurer la cohérence de tous les systèmes d'information utilisés par les différents services de l'agglomération et de ses membres, afin de connecter les différents systèmes et logiciels de géomatique entre eux à l'échelle communautaire ; que la décision de ne pas transférer à ce service commun le pôle géomatique de la commune de Laval relève d'un choix organisationnel qui relève de la seule appréciation de la commune de Laval ; que M. A... ne saurait se prévaloir de son absence de transfert au sein de la direction commune des systèmes d'information et des télécommunications de la communauté d'agglomération à l'appui de ses allégations de harcèlement à son encontre ; qu'en outre, les dysfonctionnements allégués au sein du service géomatique de la commune de Laval, au demeurant antérieurs au 1er juillet 2015, ainsi que les dysfonctionnements constatés dans la gestion des ressources humaines au sein de la direction de l'urbanisme de la commune ne permettent pas davantage de caractériser des agissements constitutifs de harcèlement moral, dont il n'est au surplus nullement indiqué à qui ils seraient imputables ; qu'enfin, il apparaît que le comportement même de M.A..., qui, au-delà des difficultés certaines de communication entre lui-même et sa hiérarchie, a refusé à plusieurs reprises les propositions d'entretien et de rendez-vous proposés par l'administration et dont l'attitude n'a pas favorisé le dialogue, ne peut qu'atténuer l'appréciation portée sur les agissements dénoncés ;
5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'ensemble des circonstances dont se prévaut M. A...ne peuvent être regardées comme étant constitutives d'un harcèlement moral sur sa personne et comme ayant porté une atteinte grave et manifestement illégale à son droit de ne pas y être soumis ; que, par suite, la commune de Laval est fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le juge des référés du tribunal administratif de Nantes a estimé qu'il était porté une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale et que la condition particulière d'urgence requise par les dispositions de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, qui était remplie, lui permettait de faire usage des pouvoirs qu'il tient de ces dispositions ; qu'il y a lieu, par voie de conséquence, d'annuler l'ordonnance attaquée et de rejeter la demande présentée par M. A...devant le juge des référés du tribunal administratif de Nantes ;
6. Considérant que les conclusions de M. A...tendant à ce qu'une somme de 4 000 euros soit mise à la charge de la commune au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent par suite être rejetées ;
O R D O N N E :
------------------
Article 1er : L'ordonnance n° 1610051 du 5 décembre 2016 du juge des référés du tribunal administratif de Nantes est annulée.
Article 2 : La demande présentée sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative par M. A...devant le juge des référés du tribunal administratif de Nantes est rejetée.
Article 3 : Les conclusions de M. A...présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : La présente ordonnance sera notifiée au maire de la commune de Laval et à M. B... A....