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28/12/2016 | FRANCE | N°398495

France | France, Conseil d'État, 7ème chambre, 28 décembre 2016, 398495


Vu la procédure suivante :

1° Sous le n° 398495, par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 4 avril et 2 novembre 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le Syndicat national pénitentiaire Force ouvrière-Direction demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 22 janvier 2016 du garde des sceaux, ministre de la justice, modifiant l'arrêté du 23 avril 2010 fixant la liste et la localisation des emplois de directeur fonctionnel des services pénitentiaires d'insertion et de probation du ministère de la jus

tice classés en première catégorie ou en deuxième catégorie ;

2°) de mettre ...

Vu la procédure suivante :

1° Sous le n° 398495, par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 4 avril et 2 novembre 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le Syndicat national pénitentiaire Force ouvrière-Direction demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 22 janvier 2016 du garde des sceaux, ministre de la justice, modifiant l'arrêté du 23 avril 2010 fixant la liste et la localisation des emplois de directeur fonctionnel des services pénitentiaires d'insertion et de probation du ministère de la justice classés en première catégorie ou en deuxième catégorie ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 400 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

2° Sous le n° 400033, par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés au greffe du tribunal administratif de Rennes les 3 septembre 2015 et 8 avril 2016, le Syndicat national pénitentiaire Force ouvrière-Direction demande :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 17 juin 2015 du garde des sceaux, ministre de la justice, modifiant l'arrêté du 23 avril 2010 fixant la liste et la localisation des emplois de directeur fonctionnel des services pénitentiaires d'insertion et de probation du ministère de la justice classés en première catégorie ou en deuxième catégorie ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 6 juillet 2015 du garde des sceaux, ministre de la justice nommant M. A...B..., directeur des services pénitentiaires d'insertion et de probation hors classe, en qualité de directeur interrégional adjoint des services pénitentiaires de Rennes, directeur des politiques pénitentiaires et détachant l'intéressé dans l'emploi de directeur fonctionnel des services pénitentiaires d'insertion et de probation de première catégorie pour une durée de quatre ans ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par une ordonnance n° 1504086 du 19 mai 2016, enregistrée le 23 mai 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le président du tribunal administratif de Rennes a transmis au Conseil d'Etat, en application des articles R. 351-2 et R. 341-4 du code de justice administrative, la requête présentée à ce tribunal par le Syndicat national pénitentiaire Force ouvrière-Direction.

....................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de procédure pénale ;

- la loi n° 2009-1436 du 24 novembre 2009, notamment ses articles 2 et 13 ;

- le décret n° 2007-930 du 15 mai 2007 ;

- le décret n° 2007-930 du 15 mai 2007 ;

- le décret n° 2010-1640 du 23 décembre 2010 ;

- le décret n° 2010-1638 du 23 décembre 2010 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jean-Philippe Mochon, conseiller d'Etat,

- les conclusions de M. Xavier de Lesquen, rapporteur public.

1. Considérant que le corps des directeurs pénitentiaires d'insertion et de probation est régi par le décret, portant statut particulier, du 23 décembre 2010 ; que le décret du 23 décembre 2010, qui porte statut d'emploi des directeurs fonctionnels des services pénitentiaires d'insertion et de probation, ouvre ce statut aux membres de ce corps ainsi qu'à d'autres catégories de fonctionnaires ; qu'en vertu de l'article 1er de ce dernier décret, ces emplois sont classés, en fonction des responsabilités qui y sont attachées, en deux catégories, la première catégorie étant dotée d'un échelon spécial ; qu'en application de l'article 3 du même décret, les ministres chargés de la justice, du budget et de la fonction publique ont, par un arrêté du 23 décembre 2010, fixé à quarante le nombre d'emplois de la première catégorie, dont quinze au plus donnant accès à l'échelon spécial ; qu'en application du même article, le garde des sceaux, ministre de la justice a, par un arrêté du 23 décembre 2010 fixé la liste et la localisation des emplois de directeur fonctionnel des services pénitentiaires d'insertion et de probation ; que, par deux arrêtés des 17 juin 2015 et 22 janvier 2016, le garde des sceaux, ministre de la justice a modifié la liste et la localisation des emplois de directeur fonctionnel des services pénitentiaires d'insertion et de probation de première catégorie et de ceux de ces emplois permettant l'accès à l'échelon spécial ;

2. Considérant, d'une part, que le Syndicat national pénitentiaire Force Ouvrière-Direction a saisi le tribunal administratif de Rennes de conclusions tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de l'arrêté du 17 juin 2015 mentionné au point 1, ainsi que de l'arrêté du 6 juillet 2015 du garde des sceaux, ministre de la justice portant nomination de M. A... B..., directeur des services pénitentiaires d'insertion et de probation hors classe, en qualité de directeur interrégional adjoint des services pénitentiaires de Rennes ; que, par une ordonnance du 19 mai 2016, le président du tribunal administratif de Rennes a, sur le fondement des dispositions des articles R. 351-2 et R. 341-4 du code de justice administrative, transmis cette requête, enregistrée sous le n° 400033, au Conseil d'Etat ; que, d'autre part, sous le n° 389495, le syndicat requérant demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 22 janvier 2016 mentionné au point 1 ;

3. Considérant que les requêtes visées ci-dessus présentent à juger des questions semblables ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;

Sur la requête n° 400033 :

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le garde des sceaux, ministre de la justice ;

En ce qui concerne l'arrêté du 17 juin 2015, en tant qu'il permet l'accès à l'échelon spécial des emplois fonctionnels de première catégorie des directeurs pénitentiaires d'insertion et de probation chargés des fonctions d'adjoint au directeur interrégional des services pénitentiaires :

4. Considérant que ces dispositions, qui sont divisibles des autres dispositions de l'arrêté, se bornent à reprendre, dans les mêmes termes, les dispositions, devenues définitives, de l'article 2 de l'arrêté du 23 décembre 2010 fixant la liste et la localisation des emplois de directeur fonctionnel, publié au Journal officiel du 28 décembre 2010 ; que les conclusions dirigées contre ces dispositions sont ainsi tardives et, par suite, irrecevables ; qu'il y a lieu, par un moyen qui, étant d'ordre public, doit être relevé d'office, de rejeter pour ce motif les conclusions dirigées contre l'arrêté du 17 juin 2015, en tant qu'il permet l'accès à l'échelon spécial des emplois fonctionnels de première catégorie des directeurs pénitentiaires d'insertion et de probation chargés des fonctions d'adjoint au directeur interrégional des services pénitentiaires ;

En ce qui concerne l'arrêté du 17 juin 2015, en tant qu'il inscrit les fonctions d'adjoint au sous-directeur à l'administration centrale de la direction de l'administration pénitentiaire sur la liste des postes correspondant à l'emploi de directeur fonctionnel des services pénitentiaires d'insertion et de probation de 1ère catégorie permettant l'accès à l'échelon spécial :

5. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 13 de la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009 : " Les personnels des services pénitentiaires d'insertion et de probation sont chargés de préparer et d'exécuter les décisions de l'autorité judiciaire relatives à l'insertion et à la probation des personnes placées sous main de justice, prévenues ou condamnées. / A cette fin, ils mettent en oeuvre les politiques d'insertion et de prévention de la récidive, assurent le suivi ou le contrôle des personnes placées sous main de justice et préparent la sortie des personnes détenues. Ils procèdent à l'évaluation régulière de la situation matérielle, familiale et sociale des personnes condamnées et définissent, au vu de ces évaluations, le contenu et les modalités de leur prise en charge. " ; qu'aux termes de l'article D. 572 du code de procédure pénale : " Dans chaque département, est créé un service pénitentiaire d'insertion et de probation, service déconcentré de l'administration pénitentiaire, chargé d'exécuter les missions prévues par les articles D. 573 à D. 574. / Le directeur du service pénitentiaire d'insertion et de probation est placé sous l'autorité du directeur interrégional des services pénitentiaires. Le siège du service pénitentiaire d'insertion et de probation et la liste des antennes locales d'insertion et de probation sont fixés par arrêté du ministre de la justice. " ; qu'aux termes de l'article 1er du décret du 23 décembre 2010 portant statut particulier du corps des directeurs pénitentiaires d'insertion et de probation : " Les directeurs pénitentiaires d'insertion et de probation sont responsables de l'organisation et du fonctionnement des services pénitentiaires d'insertion et de probation. Ils sont chargés d'élaborer et de mettre en oeuvre la politique de prévention de la récidive et d'insertion des personnes placées sous main de justice dans les conditions prévues par les dispositions du code de procédure pénale. / Ils exercent des fonctions d'encadrement, de direction, de conception, d'expertise, de contrôle de leurs services et d'évaluation des politiques publiques en matière d'insertion et de probation. " ; qu'enfin, l'article 2 du décret n° 2010-1638 du 23 décembre 2010 relatif aux emplois de directeur fonctionnel des services pénitentiaires d'insertion et de probation dispose que : " Les directeurs fonctionnels des services pénitentiaires d'insertion et de probation sont principalement chargés de la direction, de l'organisation et du fonctionnement des services pénitentiaires d'insertion et de probation dans un ou plusieurs départements. Ils peuvent également occuper des emplois de direction au niveau interrégional ou à l'Ecole nationale d'administration pénitentiaire et exercer des fonctions demandant un haut niveau de responsabilité en administration centrale. Ils élaborent et mettent en oeuvre les politiques de prévention de la récidive et d'insertion des personnes placées sous main de justice dans le cadre des lois et règlements. " ;

6. Considérant qu'il résulte de l'ensemble des dispositions citées au point précédent que les membres du corps des directeurs pénitentiaires d'insertion et de probation peuvent être nommés dans des postes de responsabilité au sein de l'administration centrale de la direction de l'administration pénitentiaire du ministère de la justice ; que ces dispositions n'imposent pas de confier aux intéressés des missions relevant exclusivement du domaine de l'insertion et de la probation ; que par suite, le moyen tiré de ce que l'arrêté serait illégal en permettant l'exercice de missions ne relevant pas exclusivement de ce domaine ne peut qu'être écarté ;

7. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 1er de l'arrêté interministériel du 23 décembre 2010 précité : " Le nombre d'emplois de directeur fonctionnel des services pénitentiaires d'insertion et de probation de première catégorie ne peut excéder 40, dont 15 emplois donnant l'accès à l'échelon spécial. " ; que les dispositions de l'arrêté du 17 juin 2015 attaqué, qui se bornent à préciser la liste des emplois ouvrant l'accès à la première catégorie et à l'échelon spécial et leur localisation, n'ont en tout état de cause ni pour objet ni pour effet d'augmenter, en méconnaissance des dispositions de l'arrêté interministériel précité, le nombre d'emplois concernés ; que les conclusions dirigées contre l'arrêté du 17 juin 2015, en tant qu'il inscrit les fonctions d'adjoint au sous-directeur à l'administration centrale de la direction de l'administration pénitentiaire sur la liste des postes correspondant à l'emploi de directeur fonctionnel des services pénitentiaires d'insertion et de probation de 1ère catégorie permettant l'accès à l'échelon spécial doivent par suite être rejetées :

En ce qui concerne l'arrêté du 6 juillet 2015 nommant M. A... B...en qualité de directeur interrégional adjoint des services pénitentiaires de Rennes, directeur des politiques pénitentiaires et détachant l'intéressé dans l'emploi de directeur fonctionnel des services pénitentiaires d'insertion et de probation de première catégorie :

8. Considérant qu'aux termes de l'article R. 341-3 du code de justice administrative : " Dans le cas où un tribunal administratif ou une cour administrative d'appel est saisi de conclusions distinctes mais connexes relevant les unes de sa compétence et les autres de la compétence en premier et dernier ressort du Conseil d'Etat, son président renvoie l'ensemble de ces conclusions au Conseil d'Etat. " ;

9. Considérant que tout justiciable est recevable à invoquer au soutien d'une requête formée à l'encontre d'une décision administrative individuelle l'illégalité éventuelle de l'acte administratif réglementaire qui sert de fondement à cette décision ; qu'il ne saurait cependant en être inféré qu'il existerait un lien de connexité, au sens des dispositions précitées de l'article R. 341-3 du code de justice administrative, entre les conclusions tendant à l'annulation pour excès de pouvoir d'un acte réglementaire et celles contestant la légalité d'une décision individuelle prise sur le fondement de cet acte réglementaire ;

10. Considérant qu'en l'absence de connexité entre les conclusions de la requête critiquant l'arrêté du 17 juin 2015 et celles mettant en cause une mesure individuelle prise sur son fondement, le Conseil d'Etat n'est pas compétent en premier et dernier ressort pour connaître des conclusions dirigées contre l'arrêté du 6 juillet 2015 par lequel le garde des sceaux, ministre de la justice a nommé M. A... B...directeur interrégional adjoint des services pénitentiaires de Rennes ; que dès lors, il y a lieu, en application des dispositions de l'article R. 351-1 du code de justice administrative, de renvoyer le jugement de ces conclusions au tribunal administratif de Rennes ;

11. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance la somme que demande le Syndicat national pénitentiaire Force ouvrière-Direction au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

Sur la requête n° 398495 :

12. Considérant que, les dispositions de l'arrêté du 22 janvier 2016 attaqué, qui se bornent à préciser la liste des emplois ouvrant l'accès à la première catégorie et à l'échelon spécial et leur localisation, n'ont en tout état de cause ni pour objet ni pour effet d'augmenter, en méconnaissance des dispositions de l'arrêté interministériel du 23 décembre 2010 citées au point 6, le nombre d'emplois concernés ; que dès lors, la requête n° 398495 du Syndicat national pénitentiaire Force Ouvrière-Direction ne peut qu'être rejetée, y compris ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement des conclusions de la requête n° 400033 dirigées contre l'arrêté du 6 juillet 2015 nommant M. A... B...directeur interrégional adjoint des services pénitentiaires de Rennes est renvoyé au tribunal administratif de Rennes.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête n° 400033 et la requête n° 398495 du Syndicat national pénitentiaire Force ouvrière-Direction sont rejetés.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au Syndicat national pénitentiaire Force ouvrière-Direction, au garde des sceaux, ministre de la justice et à Monsieur A...B....


Synthèse
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 398495
Date de la décision : 28/12/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 28 déc. 2016, n° 398495
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Jean-Philippe Mochon
Rapporteur public ?: M. Xavier de Lesquen

Origine de la décision
Date de l'import : 10/01/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2016:398495.20161228
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