Vu la procédure suivante :
Par une requête, un mémoire en réplique et trois nouveaux mémoires, enregistrés les 9 février 2015, 29 septembre 2015, 29 octobre 2015, 28 décembre 2015 et 16 février 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'association Plastics Europe demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir la note de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes du 8 décembre 2014, intitulée " Mise en oeuvre de la Loi bisphénol A (BPA) " ou, subsidiairement, de surseoir à statuer et de poser une question préjudicielle à la Cour de justice de l'Union européenne ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 8 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la Constitution, notamment son article 62 ;
- la directive 98/34/CE du Parlement européen et du Conseil du 22 juin 1998 prévoyant une procédure d'information dans le domaine des normes et réglementations techniques et des règles relatives aux services de la société de l'information ;
- le règlement (CE) n° 178/2002 du Parlement européen et du Conseil du 28 janvier 2002 établissant les principes généraux et les prescriptions générales de la législation alimentaire, instituant l'Autorité européenne de sécurité des aliments et fixant des procédures relatives à la sécurité des denrées alimentaires ;
- le règlement (CE) n° 1935/2004 du Parlement européen et du Conseil du 27 octobre 2004 concernant les matériaux et objets destinés à entrer en contact avec des denrées alimentaires et abrogeant les directives 80/590/CEE et 89/109/CEE ;
- le règlement (CE) n° 1895/2005 de la Commission du 18 novembre 2005 concernant la limitation de l'utilisation de certains dérivés époxydiques dans les matériaux et objets destinés à entrer en contact avec des denrées alimentaires ;
- le règlement (UE) n° 10/2011 de la Commission du 14 janvier 2011 concernant les matériaux et objets en matière plastique destinés à entrer en contact avec des denrées alimentaires ;
- le code de la santé publique ;
- la loi n° 2010-729 du 30 juin 2010 ;
- la loi n° 2012-1442 du 24 décembre 2012 ;
- le décret n° 2008-1281 du 8 décembre 2008 ;
- la décision n° 387805 du 17 juin 2015 par laquelle le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a renvoyé au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par l'association Plastics Europe ;
- la décision n° 2015-480 QPC du 17 septembre 2015 du Conseil constitutionnel statuant sur la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par l'association Plastics Europe ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Marie Sirinelli, maître des requêtes,
- les conclusions de M. Rémi Decout-Paolini, rapporteur public.
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Delaporte, Briard, avocat de l'association Plastics Europe.
Vu la note en délibéré, enregistrée le 16 novembre 2016, présentée par l'association Plastics Europe ;
1. Considérant que l'article 1er de la loi du 30 juin 2010 tendant à suspendre la commercialisation de tout conditionnement comportant du bisphénol A et destiné à recevoir des produits alimentaires, dans sa rédaction issue de l'article 1er de la loi du 24 décembre 2012, suspend la fabrication, l'importation, l'exportation et la mise sur le marché à titre gratuit ou onéreux, à compter du 1er janvier 2013, de tout conditionnement, contenant ou ustensile comportant du bisphénol A et destiné à entrer en contact direct avec des denrées alimentaires pour les nourrissons et enfants en bas âge et, à compter du 1er janvier 2015, de tout autre conditionnement, contenant ou ustensile comportant du bisphénol A et destiné à entrer en contact direct avec des denrées alimentaires, jusqu'à ce que le Gouvernement, après avis de l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail, autorise la reprise de ces opérations ; que l'association Plastics Europe demande l'annulation pour excès de pouvoir d'une note du 8 décembre 2014 publiée sur le site internet du ministère de l'économie, de l'industrie et du numérique (direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes), intitulée " Mise en oeuvre de la Loi bisphénol A (BPA) ", prescrivant l'interprétation de plusieurs termes utilisés par l'article 1er de la loi du 30 juin 2010, dans sa rédaction issue de l'article 1er de la loi du 24 décembre 2012 ;
Sur l'existence d'un non-lieu à statuer :
2. Considérant que, par sa décision n° 2015-480 QPC du 17 septembre 2015, le Conseil constitutionnel a déclaré contraires à la Constitution les mots " La fabrication " et " l'exportation " figurant au premier alinéa de l'article 1er de la loi du 30 juin 2010, au motif que le législateur avait apporté à la liberté d'entreprendre des restrictions qui n'étaient pas en lien avec l'objectif de protection de la santé poursuivi ; qu'il a, dans cette même décision, jugé que cette déclaration d'inconstitutionnalité prenait effet à compter de la date de la publication de sa décision ; qu'il suit de là que, postérieurement à l'introduction de la requête, les termes " La fabrication " et " l'exportation " figurant à l'article 1er de la loi du 30 juin 2010 ont été abrogés ; que, par suite, les dispositions de la note attaquée qui rappellent la suspension de la fabrication et de l'exportation de tout conditionnement, contenant ou ustensile comportant du bisphénol A et destiné à entrer en contact direct avec des denrées alimentaires, en interprétant ainsi des dispositions législatives abrogées, sont devenues caduques ; que, dès lors, la requête de l'association Plastics Europe a perdu son objet en ce qu'elle tend à l'annulation de la note dans cette mesure ;
Sur les fins de non-recevoir opposées par le ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique :
3. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte des dispositions combinées des articles R. 421-1 et R. 421-7 du code de justice administrative qu'une personne qui demeure à l'étranger dispose d'un délai de quatre mois à compter de la notification ou de la publication d'une décision pour former un recours contre cet acte devant le Conseil d'Etat ; qu'il ressort des pièces du dossier que la requête de l'association Plastics Europe, dont le siège est situé en Belgique, a été enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 9 février 2015, soit moins de quatre mois après la publication, le 8 décembre 2014, de la note attaquée sur le site internet du ministère de l'économie, de l'industrie et du numérique ; qu'ainsi et en tout état de cause, la requête ne saurait être regardée comme tardive ;
4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 2 de ses statuts, l'association Plastics Europe a notamment pour objectifs de " coordonner et soutenir tous les efforts visant à développer la production et l'utilisation économique des plastiques dans des conditions de sécurité " ; que la note du 8 décembre 2014 a pour objet la mise en oeuvre de l'article 1er de la loi du 30 juin 2010, qui concerne notamment les conditionnements, contenants ou ustensiles fabriqués en matière plastique ; qu'ainsi, l'association requérante justifie d'un intérêt lui donnant qualité pour demander l'annulation de cette note, en tant qu'elle concerne les plastiques, sans qu'y fasse obstacle la circonstance qu'elle aurait été informée avant son adoption, dans le cadre de ses contacts informels avec la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, des éléments qui y sont exposés ;
5. Considérant, en troisième lieu, que l'interprétation que par voie, notamment, de circulaires ou d'instructions l'autorité administrative donne des lois et règlements qu'elle a pour mission de mettre en oeuvre n'est pas susceptible d'être déférée au juge de l'excès de pouvoir lorsque, étant dénuée de caractère impératif, elle ne saurait, quel qu'en soit le bien-fondé, faire grief ; qu'en revanche, les dispositions impératives à caractère général d'une circulaire ou d'une instruction doivent être regardées comme faisant grief ; que le paragraphe de la note attaquée relatif aux orientations définies pour les contrôles portant sur la mise en oeuvre de la loi du 24 décembre 2012, concernant plus particulièrement les matériaux et objets pour lesquels il a été fait un usage intentionnel du bisphénol A, ne revêt aucun caractère impératif, et ne saurait donc faire grief ; qu'en revanche, pour le surplus, la note attaquée, qui réitère, au moyen de dispositions impératives à caractère général, les dispositions de l'article 1er de la loi du 30 juin 2010 modifiée et prescrit l'interprétation qu'il convient de retenir de plusieurs de ses termes à destination des opérateurs, doit être regardée comme faisant grief ; que la circonstance que cette note n'a pas été publiée dans les conditions prévues par l'article 1er du décret du 8 décembre 2008 relatif aux conditions de publication des instructions et circulaires est, à cet égard, dépourvue d'incidence ; qu'ainsi, la fin de non-recevoir tirée de ce que cette note ne ferait pas grief ne peut être accueillie qu'à l'égard du paragraphe mentionné ci-dessus, relatif aux orientations définies pour les contrôles portant sur la mise en oeuvre de la loi du 24 décembre 2012 ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne la compétence de l'auteur de la circulaire :
6. Considérant qu'il est toujours loisible à un ministre de donner l'interprétation des lois et règlements sous réserve que l'interprétation qu'il prescrit d'adopter ne méconnaisse pas le sens et la portée des dispositions législatives ou réglementaires qu'il entend expliciter et ne réitère pas une règle contraire à une norme juridique supérieure ; qu'en revanche, le recours formé à l'encontre des dispositions impératives à caractère général d'une circulaire ou d'une instruction doit être accueilli si ces dispositions fixent, dans le silence des textes, une règle nouvelle entachée d'incompétence ou illégale pour un autre motif ;
7. Considérant que le directeur général de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes avait compétence pour donner, par délégation du ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, à l'intention notamment des opérateurs économiques du secteur, l'interprétation des différents termes utilisés par l'article 1er de la loi du 30 juin 2010 ; que, par suite, l'association requérante n'est pas fondée à soutenir que la note attaquée serait, à ce titre, entachée d'incompétence ;
8. Considérant, en revanche, que la note attaquée, en déterminant les conditions dans lesquelles est prise en compte la présence de bisphénol A dans les matériaux fabriqués à partir de matières recyclées, ne se borne pas à interpréter les termes de la loi mais fixe des règles nouvelles ; que le ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique ne tenait d'aucun texte le pouvoir de fixer de telles règles, relatives à la suspension de la commercialisation des conditionnements, contenants et ustensiles comportant du bisphénol A et destinés à entrer en contact direct avec des denrées alimentaires, prévue par la loi du 30 juin 2010 modifiée ; que l'association Plastics Europe est, dès lors, fondée à demander l'annulation des cinq derniers paragraphes de la note attaquée, qui prévoient les conditions d'application de cette suspension aux matériaux fabriqués à partir de matières recyclées, en tant qu'ils s'appliquent à des matériaux contenant du plastique ;
En ce qui concerne le respect des obligations de notification résultant de la directive 98/34/CE du 22 juin 1998 :
9. Considérant, d'une part, qu'aux termes du 1 de l'article 18 du règlement (CE) n° 1935/2004 du 27 octobre 2004 concernant les matériaux et objets destinés à entrer en contact avec des denrées alimentaires : " Si un État membre conclut, sur la base d'une motivation circonstanciée, en raison de nouvelles données ou d'une nouvelle évaluation des données existantes, que l'emploi d'un matériau ou d'un objet, bien que conforme aux mesures spécifiques applicables, présente un danger pour la santé humaine, cet État membre peut provisoirement suspendre ou restreindre sur son territoire l'application des dispositions en question. / Il en informe immédiatement les autres États membres et la Commission, en précisant les motifs de la suspension ou de la restriction " ; que les mesures spécifiques mentionnées par cet article sont celles arrêtées par la Commission sur le fondement de l'article 5 du même règlement, telles que, pour ce qui concerne le bisphénol A, celles précisées par le règlement (UE) n° 10/2011 du 14 janvier 2011 concernant les matériaux et objets en matière plastique destinés à entrer en contact avec des denrées alimentaires et par le règlement (CE) n° 1895/2005 du 18 novembre 2005 concernant l'utilisation de certains dérivés époxydiques dans les matériaux et objets destinés à entrer en contact avec des denrées alimentaires, ces derniers produits étant pour certains des dérivés du bisphénol A ;
10. Considérant, d'autre part, qu'en application de l'article 8 de la directive 98/34/CE du 22 juin 1998 prévoyant une procédure d'information dans le domaine des normes et réglementations techniques et des règles relatives aux services de la société de l'information, tout Etat membre qui souhaite adopter une nouvelle règle technique au sens de cette directive ou modifier une règle technique existante doit, sauf s'il s'agit d'une simple transposition intégrale d'une norme internationale ou européenne et sauf exception expressément prévue par la directive, en communiquer le projet à la Commission européenne dans les conditions prévues par cet article ; que constitue une règle technique au sens de la directive, selon les termes du 11) de son article 1er, " une spécification technique ou une autre exigence, y compris les dispositions administratives qui s'y appliquent, dont l'observation est obligatoire de jure ou de facto, pour la commercialisation (...) ou l'utilisation dans un Etat membre ou dans une partie importante de cet Etat ", de même que, " sous réserve de celles visées à l'article 10, les dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres interdisant la fabrication, l'importation, la commercialisation ou l'utilisation d'un produit " ; que, cependant, aux termes de l'article 10 de cette directive, les dispositions de son article 8 ne sont pas applicables aux dispositions législatives par lesquelles, notamment, les Etats membres font usage des clauses de sauvegarde prévues dans des actes communautaires contraignants ;
11. Considérant que la suspension décidée par l'article 1er de la loi du 30 juin 2010, telle que modifiée par la loi du 24 décembre 2012, doit être regardée comme une règle technique au sens des dispositions précitées de la directive 98/34/CE ; que, toutefois, en application des dispositions de son article 10, l'obligation de communication de tout projet de règle technique ne trouvait pas à s'appliquer, en l'espèce, aux domaines où l'Etat doit être regardé comme ayant fait usage de la clause de sauvegarde prévue par l'article 18 du règlement n° 1935/2004 du 27 octobre 2004, c'est-à-dire ceux qui sont couverts par le règlement n° 10/2011 du 14 janvier 2011 concernant les matériaux et objets en matière plastique ou par celui, n° 1895/2005 du 18 novembre 2005, concernant l'utilisation de certains dérivés époxydiques ; que, par suite, l'association Plastics Europe n'est pas fondée à soutenir que les dispositions législatives interprétées par la circulaire attaquée, s'agissant des matériaux contenant du plastique, ni, en tout état de cause, cette circulaire elle-même, n'auraient pas été valablement notifiées à la Commission ;
En ce qui concerne le respect par la loi des dispositions du droit de l'Union européenne relatives aux matériaux destinés à entrer en contact avec les denrées alimentaires :
12. Considérant que, ainsi qu'il a été rappelé au point 9 ci-dessus, l'article 18 du règlement n° 1935/2004 du 27 octobre 2004 concernant les matériaux et objets destinés à entrer en contact avec des denrées alimentaires prévoit la possibilité, pour un Etat membre, en raison de nouvelles données ou d'une nouvelle évaluation des données existantes, de suspendre ou de restreindre provisoirement sur son territoire, sur la base d'une motivation circonstanciée, les mesures spécifiques applicables à un matériau ou à un objet qui présente un danger pour la santé humaine ; qu'il ressort des pièces du dossier, ainsi que le rappellent les travaux préparatoires à l'adoption de la loi du 24 décembre 2012 et l'information faite par les autorités françaises à la Commission, qu'un rapport d'expertise collective menée dans le cadre de l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail sur les effets sanitaires du bisphénol A, remis en septembre 2011 et tenant compte des études les plus récentes, a relevé les effets avérés du bisphénol A sur l'animal, transposables à l'homme, et ses effets, qualifiés de " suspectés " compte tenu du petit nombre d'études disponibles, sur l'être humain, notamment s'agissant de la maturation ovocytaire ainsi que des pathologies cardiovasculaires et du diabète ; que plusieurs études ont mis en évidence des relations non linéaires entre dose et effet, et montré la difficulté, sur la base des données scientifiques disponibles, de définir un seuil de dose sans effet ; que l'exposition au bisphénol A durant les périodes de sensibilité particulière que sont la gestation et les premiers mois de développement de l'enfant trouve son origine non seulement dans l'usage de biberons en polycarbonate mais également dans l'alimentation de la mère puis dans la diversification alimentaire de l'enfant ; qu'ainsi, la suspension de l'importation et de la mise sur le marché, à compter du 1er janvier 2015, de tout conditionnement, contenant ou ustensile comportant du bisphénol A et destiné à entrer en contact direct avec des denrées alimentaires constitue une restriction régulièrement fondée sur les données les plus récentes, au vu desquelles, dans un domaine encore marqué par de fortes incertitudes scientifiques, l'existence d'un danger pour la santé humaine, aux conditions d'exposition admises par les mesures spécifiques de l'Union européenne, a été relevée de manière circonstanciée ; qu'ainsi cette restriction, qui présente un caractère provisoire dès lors que la suspension n'est décidée que jusqu'à ce que le Gouvernement, après avis de l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail, autorise la reprise de ces opérations, et qui n'apparaît ni disproportionnée ni incohérente au regard de l'objet même d'une mesure de sauvegarde, ne méconnaît pas les dispositions du règlement n° 1935/2004, ainsi que celles des règlements n° 10/2011 et n° 1895/2005 pris pour son application ; que d'ailleurs, d'une part, il ne résulte d'aucun avis postérieur de l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail, notamment son étude publiée en mars 2013 ou sa note d'appui scientifique et technique datée du 16 juin 2015, que les dangers identifiés à la date de la suspension aient pu être écartés ; que, d'autre part, la procédure d'examen par la Commission des motifs avancés par la France pour justifier la suspension, prévue par l'article 18 du règlement n° 1935/2004, est toujours en cours ; que, par suite, l'association requérante n'est pas fondée à soutenir que la note attaquée réitèrerait dans cette mesure une règle contraire à une norme juridique supérieure ;
En ce qui concerne le respect par la loi des stipulations du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, des principes généraux du droit de l'Union européenne et du règlement n° 178/2002 du 28 janvier 2002 :
13. Considérant que lorsqu'un domaine a fait l'objet d'une harmonisation exhaustive au niveau européen, toute mesure nationale qui s'y rapporte doit être appréciée au regard des dispositions de cette mesure d'harmonisation et non pas de celles du droit primaire ; que sont ainsi inopérants les moyens tirés de la méconnaissance des articles 34, 35 et 36 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne et du principe de précaution par les dispositions de l'article 1er de la loi du 30 juin 2010 applicables aux conditionnements, contenants et ustensiles qui sont en matière plastique ou comprennent des dérivés époxydiques du bisphénol A, lesquels relèvent, comme il a été dit plus haut, de règlements pris sur le fondement du règlement n° 1935/2004 du 27 octobre 2004 ; qu'il en est de même du moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du règlement n° 178/2002 du 28 janvier 2002 établissant les principes généraux et les prescriptions générales de la législation alimentaire, qui ne trouvent pas à s'appliquer au présent litige, relatif à un domaine harmonisé dans le cadre du seul règlement n° 1935/2004 ;
14. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de saisir à titre préjudiciel la Cour de justice de l'Union européenne, que l'association Plastics Europe est fondée à demander l'annulation de la note du 8 décembre 2014 relative à la " mise en oeuvre de la loi bisphénol A " en tant seulement qu'elle prévoit, pour ceux contenant du plastique, les conditions d'application de la loi aux matériaux fabriqués à partir de matières recyclées ;
Sur les conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
15. Considérant qu'il y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme demandée par l'association Plastics Europe, au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
D E C I D E :
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Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête de l'association Plastics Europe en ce qu'elle tend à l'annulation des dispositions de la note du ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique du 8 décembre 2014 relative à la mise en oeuvre de la loi bisphénol A qui rappellent la suspension de la fabrication et de l'exportation de tout conditionnement, contenant ou ustensile comportant du bisphénol A et destiné à entrer en contact direct avec des denrées alimentaires.
Article 2 : La note du ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique du 8 décembre 2014 est annulée en tant qu'elle prévoit, pour ceux contenant du plastique, les conditions d'application de la loi aux matériaux fabriqués à partir de matières recyclées.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de l'association Plastics Europe est rejeté.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à l'association Plastics Europe, au ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique et à la ministre des affaires sociales et de la santé.
Copie en sera adressée, à l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail et au Premier ministre.