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28/11/2016 | FRANCE | N°390638

France | France, Conseil d'État, 10ème - 9ème chambres réunies, 28 novembre 2016, 390638


Vu la procédure suivante :

La société Autoguadeloupe Développement a demandé au tribunal administratif de Basse-Terre de réduire le montant de la cotisation de taxe professionnelle à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2006 en faisant valoir que le local-type ayant servi à l'évaluation des locaux n'était pas pertinent. Par un jugement du 10 octobre 2013, le tribunal administratif de Basse-Terre a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 13BX03108 du 16 avril 2015 la cour administrative d'appel de Bordeaux, a annulé le jugement n° 0801142 du tribunal adm

inistratif de Basse-Terre du 10 octobre 2013.

Par un recours, un mémoire en ...

Vu la procédure suivante :

La société Autoguadeloupe Développement a demandé au tribunal administratif de Basse-Terre de réduire le montant de la cotisation de taxe professionnelle à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2006 en faisant valoir que le local-type ayant servi à l'évaluation des locaux n'était pas pertinent. Par un jugement du 10 octobre 2013, le tribunal administratif de Basse-Terre a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 13BX03108 du 16 avril 2015 la cour administrative d'appel de Bordeaux, a annulé le jugement n° 0801142 du tribunal administratif de Basse-Terre du 10 octobre 2013.

Par un recours, un mémoire en réplique et un nouveau mémoire enregistrés le 2 juin 2015 et les 7 juin et 4 juillet 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre des finances et des comptes publics demande au Conseil d'Etat d'annuler cet arrêt.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- la loi n° 2014-1655 du 29 décembre 2014 de finance rectificative pour 2014 ;

- la décision n° 2015-525 QPC du Conseil constitutionnel du 2 mars 2016 Société civile immobilière PB 12 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Arno Klarsfeld, conseiller d'Etat,

- les conclusions de M. Edouard Crépey, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Delaporte, Briard, avocat de la société Autoguadeloupe Développement ;

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article 1498 du code général des impôts : " La valeur locative de tous les biens autres que les locaux visés au I de l'article 1496 et que les établissements industriels visés à l'article 1499 est déterminée au moyen de l'une des méthodes indiquées ci-après : (...) 2° a. Pour les biens loués à des conditions de prix anormales ou occupés par leur propriétaire, occupés par un tiers à un autre titre que la location, vacants ou concédés à titre gratuit, la valeur locative est déterminée par comparaison. Les termes de comparaison sont choisis dans la commune. Ils peuvent être choisis hors de la commune pour procéder à l'évaluation des immeubles d'un caractère particulier ou exceptionnel ; b. La valeur locative des termes de comparaison est arrêtée : Soit en partant du bail en cours à la date de référence de la révision lorsque l'immeuble type était loué normalement à cette date, Soit, dans le cas contraire, par comparaison avec des immeubles similaires situés dans la commune ou dans une localité présentant, du point de vue économique, une situation analogue à celle de la commune en cause et qui faisaient l'objet à cette date de locations consenties à des conditions de prix normales ; 3° A défaut de ces bases, la valeur locative est déterminée par voie d'appréciation directe. ". Aux termes de l'article 333 C de l'annexe II au code général des impôts applicable dans les départements d'outre-mer : " La valeur locative de tous les locaux commerciaux et biens divers peut être déterminée par application de la méthode de comparaison prévue au a du 2° de l'article 1498 du code général des impôts. Les termes de comparaison sont choisis dans la commune ou hors de celle-ci. La date du 1er janvier 1970 mentionnée au deuxième alinéa de l'article 324 A C de l'annexe III au code général des impôts est remplacée par celle du 1er janvier 1975 ". Aux termes du III de l'article 32 de la loi n° 2014-1655 du 29 décembre 2014 de finance rectificative pour 2014 " Sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée, pour la détermination de la valeur locative des locaux mentionnés à l'article 1496 du code général des impôts et de ceux évalués en application du 2° de l'article 1498 du même code, sont validées les évaluations réalisées avant le 1er janvier 2015 en tant que leur légalité serait contestée au motif que, selon le cas, le local de référence ou le local-type ayant servi de terme de comparaison, soit directement, soit indirectement, a été détruit ou a changé de consistance, d'affectation ou de caractéristiques physiques ".

2. La SAS Autoguadeloupe Développement, qui exerce une activité de vente et réparation de véhicules automobiles dans un établissement sis à Baie-Mahault (Guadeloupe), a relevé appel du jugement du 10 octobre 2013 par lequel le tribunal administratif de Basse-Terre avait rejeté sa demande tendant à la réduction de la cotisation de taxe professionnelle à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2006 dans les rôles de la commune de Baie-Mahault à raison de cet établissement. Pour annuler le jugement du tribunal administratif de Basse-Terre et accorder à la contribuable la réduction, dans la limite de ses conclusions, de la cotisation de taxe professionnelle en litige à hauteur du montant procédant de l'application du tarif au m² applicable au local-type n° 18 du procès-verbal des évaluations foncières de la commune de Baie-Mahaut, la cour administrative d'appel de Bordeaux s'est fondée sur ce qu'ainsi que le soutenait la contribuable, le local-type n° 13 du même procès-verbal, que l'administration avait utilisé comme terme de comparaison pour déterminer la valeur locative du local-type n° 37, lui-même retenu comme terme de comparaison pour évaluer l'immeuble de la société, avait fait l'objet de plusieurs changements d'utilisation de nature à caractériser une restructuration et que l'exercice, à chaque étage du bâtiment, de deux activités distinctes sans rapport avec celle de la contribuable faisait obstacle à ce qu'il pût constituer un terme de comparaison pertinent.

3. Si un local-type qui, depuis son inscription régulière au procès-verbal des opérations de révision foncière d'une commune, a été détruit ou a été entièrement restructuré, notamment à la suite d'un changement de destination, ne peut en principe plus servir de terme de comparaison, pour évaluer directement ou indirectement la valeur locative d'un bien au 1er janvier d'une année postérieure à sa restructuration ou à sa disparition, le ministre fait valoir que l'adoption des dispositions précitées du III de l'article 32 de la loi n° 2014-1655 de finances rectificative pour 2014 du 29 décembre 2014 a eu pour effet de rendre inopérant, pour les évaluations effectuées avant le 1er janvier 2015, le moyen tiré de ce qu'un terme de comparaison devait être écarté pour un tel motif.

4. Cependant, le Conseil constitutionnel, par sa décision n° 2015-525 QPC du 2 mars 2016, a déclaré contraire à la Constitution le paragraphe III de l'article 32 de la loi du 29 décembre 2014 de finances rectificative pour 2014. Il résulte des termes du point 12 de ladite décision que cette déclaration d'inconstitutionnalité prend effet à compter de la date de la publication de la décision et qu'elle peut être invoquée dans toutes les instances introduites à cette date et non jugées définitivement. Doivent être entendues comme de telles instances, pour l'application des décisions du Conseil constitutionnel qui déterminent les modalités d'application dans le temps des déclarations d'inconstitutionnalité qu'il prononce, celles qui n'ont pas donné lieu à des décisions devenues irrévocables. Il s'ensuit que, contrairement à ce que soutient le ministre des finances et des comptes publics, la société Autoguadeloupe Développement peut se prévaloir, dans la présente instance, y compris devant le Conseil d'Etat, juge de cassation, de la déclaration d'inconstitutionnalité prononcée par la décision du Conseil constitutionnel du 2 mars 2016.

5. Il résulte de ce qui précède que le ministre des finances et des comptes publics n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 2 500 euros à la société Autoguadeloupe Développement au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

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Article 1er : Le recours du ministre des finances et des comptes publics est rejeté.

Article 2°: L'Etat versera à la société Autoguadeloupe Développement une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'économie et des finances et à la société Autoguadeloupe Développement.


Synthèse
Formation : 10ème - 9ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 390638
Date de la décision : 28/11/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

54-10-09 PROCÉDURE. - DÉCISION DU CONSEIL CONSTITUTIONNEL PRÉCISANT QUE L'INCONSTITUTIONNALITÉ QU'ELLE CONSTATE PEUT ÊTRE INVOQUÉE DANS TOUTES LES INSTANCES NON JUGÉES DÉFINITIVEMENT - PORTÉE.

54-10-09 Décision du Conseil constitutionnel déclarant une disposition législative contraire à la Constitution et précisant que cette déclaration d'inconstitutionnalité prend effet à compter de la date de la publication de la décision et qu'elle peut être invoquée dans toutes les instances introduites à cette date et non jugées définitivement.,,,Doivent être entendues comme de telles instances, pour l'application des décisions du Conseil constitutionnel qui déterminent les modalités d'application dans le temps des déclarations d'inconstitutionnalité qu'il prononce, celles qui n'ont pas donné lieu à des décisions devenues irrévocables. Il en résulte que la déclaration d'inconstitutionnalité peut être invoquée pour la première fois devant le juge de cassation.


Publications
Proposition de citation : CE, 28 nov. 2016, n° 390638
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Arno Klarsfeld
Rapporteur public ?: M. Edouard Crépey
Avocat(s) : SCP DELAPORTE, BRIARD

Origine de la décision
Date de l'import : 18/04/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2016:390638.20161128
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