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17/10/2016 | FRANCE | N°393852

France | France, Conseil d'État, 8ème chambre, 17 octobre 2016, 393852


Vu la procédure suivante :

Mme B...A...a demandé à la Cour nationale du droit d'asile l'annulation de la décision du 30 octobre 2014 du directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) rejetant sa demande d'asile et refusant de lui reconnaître la qualité de réfugié ou, à défaut, de lui accorder le bénéfice de la protection subsidiaire. Par une décision n° 14035729 du 4 mai 2015, la Cour nationale du droit d'asile a rejeté sa demande.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire enregistrés les 30 septembre et 29

décembre 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme A...demande au...

Vu la procédure suivante :

Mme B...A...a demandé à la Cour nationale du droit d'asile l'annulation de la décision du 30 octobre 2014 du directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) rejetant sa demande d'asile et refusant de lui reconnaître la qualité de réfugié ou, à défaut, de lui accorder le bénéfice de la protection subsidiaire. Par une décision n° 14035729 du 4 mai 2015, la Cour nationale du droit d'asile a rejeté sa demande.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire enregistrés les 30 septembre et 29 décembre 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme A...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cette décision de la Cour nationale du droit d'asile ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à ses conclusions de première instance ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés et le protocole signé à New York le 31 janvier 1967 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jacques Reiller, conseiller d'Etat,

- les conclusions de M. Edouard Crépey, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Gatineau, Fattaccini, avocat de Mme B...A...;

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes des stipulations du paragraphe A, 2° de l'article 1er de la convention de Genève du 28 juillet 1951 et du protocole signé à New York le 31 janvier 1967, doit être considérée comme réfugiée toute personne qui " craignant avec raison d'être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut, ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays ".

2. Aux termes de l'article L. 712-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, " sous réserve des dispositions de l'article L. 712-2, le bénéfice de la protection subsidiaire est accordé à toute personne qui ne remplit pas les conditions d'octroi du statut de réfugié énoncées à l'alinéa précédent et qui établit qu'elle est exposée dans son pays à l'une des menaces graves suivantes : a) la peine de mort ; b) la torture ou des peines ou traitements inhumains ou dégradants ; c) s'agissant d'un civil, une menace grave, directe et individuelle contre sa vie ou sa personne en raison d'une violence généralisée résultant d'une situation de conflit armé interne ou international ".

3. Pour solliciter son admission au bénéfice de l'asile, MmeA..., de nationalité rwandaise, soutenait qu'en cas de retour au Rwanda, elle craignait d'être persécutée par les autorités en raison des opinions politiques qui lui ont été imputées du fait de son histoire familiale et de sa possession de tracts d'un parti d'opposition. La Cour nationale du droit d'asile a rejeté son recours contre la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides en jugeant qu'il n'était pas établi que Mme A... soit personnellement exposée, dans le cas d'un retour dans son pays d'origine, à des persécutions au sens des stipulations précitées de la convention de Genève du 28 juillet 1951 ou à l'une des menaces graves mentionnées par l'article L. 712-1 précité du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

4. Il appartient à la Cour nationale du droit d'asile, qui statue comme juge de plein contentieux sur le recours d'un demandeur d'asile dont la demande a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides de se prononcer elle-même sur le droit de l'intéressé à la qualité de réfugié ou, à défaut, sur le bénéfice de la protection subsidiaire, au vu de l'ensemble des circonstances de fait dont elle a connaissance au moment où elle statue. A ce titre, il lui revient, pour apprécier la réalité des risques invoqués par le demandeur, de prendre en compte l'ensemble des pièces que celui-ci produit à l'appui de ses prétentions. En particulier, lorsque le demandeur produit devant elle des pièces qui comportent des éléments circonstanciés en rapport avec les risques allégués, il lui incombe, après avoir apprécié si elle doit leur accorder crédit et les avoir confrontées aux faits rapportés par le demandeur, d'évaluer les risques qu'elles sont susceptibles de révéler et, le cas échéant, de préciser les éléments qui la conduisent à ne pas regarder ceux-ci comme sérieux.

5. Alors que, dans sa requête devant la Cour, Mme A...avait évoqué l'arrestation dont elle avait été l'objet par la police rwandaise et les mauvais traitements qu'elle avait subis lors des interrogatoires et produit un certificat médical en date du 8 décembre 2014 qui précisait qu'elle portait " des cicatrices longitudinales sur le bras droit à la face externe qui pourraient être des cicatrices de fouet ", la Cour, qui n'a pas pris ce certificat médical en compte, ne s'est pas prononcée sur la réalité des risques ainsi allégués. Ce faisant, elle a entaché sa décision d'erreur de droit et d'insuffisance de motivation.

6. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, que Mme A...est fondée à demander l'annulation de la décision qu'elle attaque.

7. Il y a lieu dans les circonstances de l'espèce de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La décision n° 14035729 de la Cour nationale du droit d'asile est annulée.

Article 2 : L'affaire est renvoyée à la Cour nationale du droit d'asile.

Article 3 : L'Office français de protection des réfugiés et apatrides versera à Mme A...une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à Mme B...A...et à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides.


Synthèse
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 393852
Date de la décision : 17/10/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 17 oct. 2016, n° 393852
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Jacques Reiller
Rapporteur public ?: M. Edouard Crépey
Avocat(s) : SCP GATINEAU, FATTACCINI

Origine de la décision
Date de l'import : 22/11/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2016:393852.20161017
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