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03/08/2016 | FRANCE | N°401904

France | France, Conseil d'État, Juge des référés, 03 août 2016, 401904


Vu la procédure suivante :

Mme A...B...a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative :

1°) d'enjoindre au directeur de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) d'indiquer le ou les centres d'hébergement et de réinsertion sociale susceptibles de l'accueillir dans un délai de 24 heures à compter de la notification de l'ordonnance, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 eur

os sur le fondement de dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 199...

Vu la procédure suivante :

Mme A...B...a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative :

1°) d'enjoindre au directeur de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) d'indiquer le ou les centres d'hébergement et de réinsertion sociale susceptibles de l'accueillir dans un délai de 24 heures à compter de la notification de l'ordonnance, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros sur le fondement de dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par une ordonnance n° 163882 du 12 juillet 2016, le juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg a, d'une part, enjoint à l'OFII d'indiquer à Mme B... dans le délai de vingt-quatre heures à compter de la réception de l'ordonnance un lieu d'hébergement susceptible de les accueillir avec ses trois enfants mineurs et, d'autre part, mis à la charge de l'Etat le versement à Mme B...de la somme de 800 euros au titre de l'article 761-1 du code de justice administrative.

Par une ordonnance n° 1604134 du 22 juillet 2016, le juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg, saisi sur le fondement de l'article L. 521-4 du code de justice administrative, a assorti l'injonction qu'il a prononcée d'une astreinte de 100 euros par jour de retard s'il n'était pas justifié de l'exécution de l'ordonnance dans un délai de vingt-quatre heures à compter de sa notification.

Par une requête, enregistrée le 27 juillet 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'OFII demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative :

1°) d'annuler l'ordonnance du 12 juillet 2016 telle que modifiée par l'ordonnance du 22 juillet 2016 ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme B...en première instance.

Il soutient que :

- la condition d'urgence n'est pas remplie ;

- le refus d'accorder un hébergement à Mme B...ne porte aucune atteinte grave et manifestement illégale à son droit d'asile ;

- les ordonnances attaquées méconnaissent les dispositions de l'article L. 723-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en ce que la dernière demande de la requérante doit s'analyser comme une demande de réexamen et non comme une nouvelle demande d'asile ;

- le préfet de la Moselle pouvait refuser d'admettre la requérante au séjour au titre de l'asile en application de l'article L. 743-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la requérante ne remplit pas les conditions de l'article D. 744-17 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile énumérant les conditions d'éligibilité au bénéfice des conditions matérielles d'accueil des demandeurs d'asile.

Par un mémoire en défense, enregistré le 2 août 2016, Mme B...conclut au rejet de la requête et à ce que l'OFII lui verse une somme de 1500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Elle soutient que les moyens soulevés par l'OFII ne sont pas fondés.

Vu les pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part, l'OFII, d'autre part, MmeC... ;

Vu la lettre du 2 août 2016 informant les parties du report de l'audience initialement prévue le 2 août 2016 à 16 h au 3 août 2016 à 11 h ;

Vu le procès-verbal de l'audience publique du 3 août 2016 à 11 heures au cours de laquelle ont été entendus :

- le représentant de l'OFII ;

- Me Lesourd, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de Mme B...;

et à l'issue de laquelle le juge des référés a clos l'instruction.

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : " Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. Le juge des référés se prononce dans un délai de quarante-huit heures ".

2. Il résulte de l'instruction que Mme B...et ses trois enfants mineurs, de nationalité monténégrine, sont entrés en France pour la première fois en avril 2013 et ont sollicité le bénéfice de la protection au titre de l'asile le 17 juin 2013. L'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA), a rejeté cette demande par une décision du 26 août 2013 confirmée par la Cour nationale du droit d'asile, le 9 avril 2014. Le 1er octobre 2015, elle a sollicité le réexamen de sa demande d'asile par l'OFPRA qui l'a rejetée par une nouvelle décision du 29 octobre 2015 qui est devenue définitive. Mme B...est ensuite retournée, avec ses enfants, au Monténégro, après avoir bénéficié de l'aide au retour volontaire proposée par l'OFII. Le 7 juin 2016, Mme B...est revenue en France avec ses enfants et a souhaité présenter une nouvelle demande d'asile. Elle a saisi le juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg, sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, d'une demande tendant à obtenir, de l'OFII, un hébergement pour elle et ses enfants. Le juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg a fait droit à la demande de MmeC..., par deux ordonnances n° 1601535 du 12 juillet 2016 et n° 1604134 du 22 juillet 2016 dont l'OFII relève appel.

3. Aux termes de l'article L.744-1 du code d'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Les conditions matérielles d'accueil du demandeur d'asile, au sens de la directive 2013/33/UE du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2013, établissant des normes pour l'accueil des personnes demandant la protection internationale, sont proposées à chaque demandeur d'asile par l'Office français de l'immigration et de l'intégration après l'enregistrement de la demande d'asile par l'autorité administrative compétente, en application du présent chapitre. Les conditions matérielles d'accueil comprennent les prestations et l'allocation prévues au présent chapitre ".

4. Si la date à laquelle Mme B...s'est présentée aux services de la préfecture de le Moselle ne résulte pas de l'instruction, les parties s'accordent sur le fait qu'aucune demande d'asile émanant de Mme B...n'a été enregistrée et transmise à l'OFPRA. Dans ces conditions et quelles que soient les circonstances et les motifs ayant conduit à cette absence d'enregistrement, il résulte de l'article L744-1 précité que l'OFII ne saurait, en tout état de cause, voir mises à sa charge l'obligation de proposer à Mme B...et à ses enfants des conditions matérielles d'accueil. La question de savoir si la demande constitue ou non une seconde demande de réexamen et aurait pu, sur le fondement du 5° de l'article L. 743-2 du code d'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, fonder un refus de délivrer une attestation de demande d'asile est sans incidence sur ce point. Il s'ensuit que Mme B...et ses enfants sont seulement éligibles au dispositif d'hébergement d'urgence de droit commun dont il résulte d'ailleurs de l'instruction qu'ils bénéficient depuis le 28 juillet 2016. Dès lors et tout état de cause, l'absence de proposition par l'OFII de solution d'hébergement ne saurait caractériser une carence manifestement illégale portant une atteinte grave aux libertés fondamentales invoquées.

5. Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la condition d'urgence, l'OFII est fondé à soutenir que c'est à tort que, par les ordonnances attaquées, le juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg a prononcé les injonctions litigieuses. Il s'ensuit que l'ordonnance du 22 juillet 2016 doit être annulée. Les conclusions présentées par Mme B...devant le juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg ainsi que celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.

O R D O N N E :

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Article 1er : L'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg du 22 juillet 2016 est annulée.

Article 2 : Les conclusions présentées par Mme B...devant le juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg ainsi que celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.

Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à l'Office français de l'immigration et de l'intégration et à Mme A...B....


Synthèse
Formation : Juge des référés
Numéro d'arrêt : 401904
Date de la décision : 03/08/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 03 aoû. 2016, n° 401904
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Avocat(s) : SCP LESOURD

Origine de la décision
Date de l'import : 04/10/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2016:401904.20160803
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