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27/07/2016 | FRANCE | N°386797

France | France, Conseil d'État, 10ème - 9ème chambres réunies, 27 juillet 2016, 386797


Vu la procédure suivante :

M. A...C...a demandé à la Cour nationale du droit d'asile d'annuler la décision du 31 octobre 2012 par laquelle le directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a rejeté sa demande d'admission au bénéfice de l'asile sur le fondement de la clause d'exclusion de l'article 1Fa) de la convention de Genève du 28 juillet 1951.

Par une décision n° 12035216 du 23 septembre 2014, la Cour nationale du droit d'asile a fait droit à la demande de M. C...et lui a reconnu la qualité de réfugié.

Par un pourvoi

sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 30 décembre 2014 et 23 févri...

Vu la procédure suivante :

M. A...C...a demandé à la Cour nationale du droit d'asile d'annuler la décision du 31 octobre 2012 par laquelle le directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a rejeté sa demande d'admission au bénéfice de l'asile sur le fondement de la clause d'exclusion de l'article 1Fa) de la convention de Genève du 28 juillet 1951.

Par une décision n° 12035216 du 23 septembre 2014, la Cour nationale du droit d'asile a fait droit à la demande de M. C...et lui a reconnu la qualité de réfugié.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 30 décembre 2014 et 23 février 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cette décision n° 12035216 du 23 septembre 2014 de la Cour nationale du droit d'asile ;

2°) de renvoyer l'affaire à la Cour nationale du droit d'asile.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative aux réfugiés ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jacques Reiller, conseiller d'Etat,

- les conclusions de M. Edouard Crépey, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Foussard, Froger, avocat de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et à la SCP Monod, Colin, Stoclet, avocat de M. A...C...;

Considérant ce qui suit :

1. En vertu des stipulations du paragraphe A, 2° de l'article 1er de la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative aux réfugiés, doit être considérée comme réfugié toute personne qui " craignant avec raison d'être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays ". En vertu de celles de l'article 1F de la même convention : " Les dispositions de cette Convention ne seront pas applicables aux personnes dont on aura des raisons sérieuses de penser : a) Qu'elles ont commis un crime contre la paix, un crime de guerre ou un crime contre l'humanité, au sens des instruments internationaux élaborés pour prévoir des dispositions relatives à ces crimes ".

2. La Cour nationale du droit d'asile a annulé, par une décision du 23 septembre 2014, la décision du directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 31 octobre 2012 opposant à M. C... la clause d'exclusion du bénéfice de l'asile, prévue à l'article 1er F a) cité ci-dessus. L'Office français de protection des réfugiés et apatrides se pourvoit en cassation contre cette décision de la Cour nationale du droit d'asile.

3. Il ressort des termes mêmes de la décision attaquée que, pour statuer sur le recours de M.C..., la Cour a refusé de prendre en considération les éléments d'information contenus dans le dossier de son épouse, Mme B...D..., qui a obtenu le statut de réfugiée, et sur lesquels l'OFPRA s'était notamment fondé pour opposer la clause d'exclusion à l'intéressé.

4. S'il incombe à l'OFPRA de garantir la confidentialité des éléments d'information susceptibles de mettre en danger les personnes qui sollicitent l'asile ainsi que le respect de la vie privée ou du secret médical, aucune règle ni aucun principe ne font obstacle, de manière absolue, à ce qu'il se fonde, pour apprécier le bien-fondé d'une demande d'asile, sur des éléments issus du dossier d'un tiers. Lorsqu'elle est saisie d'un recours dirigé contre une décision de l'OFPRA et qu'il apparaît que celui-ci s'est fondé, de manière déterminante, sur de tels éléments pour rejeter la demande d'asile, la Cour ne peut, sans erreur de droit, refuser d'en demander communication à l'Office et d'en tenir compte, au seul motif que le tiers dans le dossier duquel se trouvent ces éléments s'oppose à leur communication. Il s'ensuit qu'en refusant de prendre en considération les éléments sur lesquels s'était fondé, de manière déterminante, l'OFPRA pour refuser à M. C...la qualité de réfugié, issus du dossier de MmeD..., au seul motif que celle-ci s'était opposée à leur communication, la Cour a méconnu son office et, ce faisant, entaché sa décision d'erreur de droit.

5. Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, l'Office français de protection des réfugiés et apatrides est fondé à demander l'annulation de la décision de la Cour nationale du droit d'asile du 23 septembre 2014 accordant le statut de réfugié à M.C....

6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'OFPRA, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, verse la somme que demande M. C...à ce titre.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La décision n° 12035216 du 23 septembre 2014 de la Cour nationale du droit d'asile est annulée.

Article 2 : L'affaire est renvoyée à la Cour nationale du droit d'asile.

Article 3 : Les conclusions présentées par M. C...au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et à M. A...C....


Synthèse
Formation : 10ème - 9ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 386797
Date de la décision : 27/07/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

- CONFIDENTIALITÉ DES INFORMATIONS RELATIVES À UNE DEMANDE D'ASILE - 1) POSSIBILITÉ POUR L'OFPRA DE SE FONDER SUR LES ÉLÉMENTS DU DOSSIER D'UN TIERS - EXISTENCE - LIMITES - CONFIDENTIALITÉ - VIE PRIVÉE ET SECRET MÉDICAL - 2) POSSIBILITÉ DE LA CNDA - LORSQUE L'OFPRA S'EST FONDÉ SUR LES ÉLÉMENTS DU DOSSIER D'UN TIERS - DE SUBORDONNER LA PRODUCTION DE CES ÉLÉMENTS À L'ACCORD DU TIERS - ABSENCE.

095-01-01 1) S'il incombe à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) de garantir la confidentialité des éléments d'information susceptibles de mettre en danger les personnes qui sollicitent l'asile ainsi que le respect de la vie privée ou du secret médical, aucune règle ni aucun principe ne font obstacle, de manière absolue, à ce qu'il se fonde, pour apprécier le bien-fondé d'une demande d'asile, sur des éléments issus du dossier d'un tiers.,,,2) Lorsqu'elle est saisie d'un recours dirigé contre une décision de l'OFPRA et qu'il apparaît que celui-ci s'est fondé, de manière déterminante, sur de tels éléments pour rejeter la demande d'asile, la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) ne peut, sans erreur de droit, refuser d'en demander communication à l'Office et d'en tenir compte, au seul motif que le tiers dans le dossier duquel se trouvent ces éléments s'oppose à leur communication.

- POSSIBILITÉ POUR L'OFPRA DE SE FONDER SUR LES ÉLÉMENTS DU DOSSIER D'UN TIERS - EXISTENCE - LIMITES - CONFIDENTIALITÉ - VIE PRIVÉE ET SECRET MÉDICAL.

095-02-07 S'il incombe à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) de garantir la confidentialité des éléments d'information susceptibles de mettre en danger les personnes qui sollicitent l'asile ainsi que le respect de la vie privée ou du secret médical, aucune règle ni aucun principe ne font obstacle, de manière absolue, à ce qu'il se fonde, pour apprécier le bien-fondé d'une demande d'asile, sur des éléments issus du dossier d'un tiers.

- CAS OÙ L'OFPRA S'EST FONDÉ SUR LES ÉLÉMENTS DU DOSSIER D'UN TIERS - POSSIBILITÉ DE LA CNDA DE SUBORDONNER LA PRODUCTION DE CES ÉLÉMENTS À L'ACCORD DU TIERS - ABSENCE.

095-08-02-01-03 Lorsqu'elle est saisie d'un recours dirigé contre une décision de l'OFPRA et qu'il apparaît que celui-ci s'est fondé, de manière déterminante, sur des éléments issus du dossier d'un tiers pour rejeter la demande d'asile, la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) ne peut, sans erreur de droit, refuser d'en demander communication à l'Office et d'en tenir compte, au seul motif que le tiers dans le dossier duquel se trouvent ces éléments s'oppose à leur communication.


Publications
Proposition de citation : CE, 27 jui. 2016, n° 386797
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Jacques Reiller
Rapporteur public ?: M. Edouard Crépey
Avocat(s) : SCP FOUSSARD, FROGER ; SCP MONOD, COLIN, STOCLET

Origine de la décision
Date de l'import : 20/02/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2016:386797.20160727
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