La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

02/05/2016 | FRANCE | N°386655

France | France, Conseil d'État, 5ème - 4ème chambres réunies, 02 mai 2016, 386655


Vu la procédure suivante :

Par une requête enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 22 décembre 2014, la SARL Nice Music demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 7 octobre 2014 par laquelle le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) a, d'une part, rejeté sa demande tendant à la modification des conditions dont est assortie l'autorisation d'usage d'une fréquence hertzienne qui lui a été délivrée le 11 mars 2008, d'autre part, refusé d'agréer la cession de la totalité des parts sociales de la SARL Nice

Music à M. B...A... ;

2°) d'enjoindre au CSA, sous astreinte, de lui accorde...

Vu la procédure suivante :

Par une requête enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 22 décembre 2014, la SARL Nice Music demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 7 octobre 2014 par laquelle le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) a, d'une part, rejeté sa demande tendant à la modification des conditions dont est assortie l'autorisation d'usage d'une fréquence hertzienne qui lui a été délivrée le 11 mars 2008, d'autre part, refusé d'agréer la cession de la totalité des parts sociales de la SARL Nice Music à M. B...A... ;

2°) d'enjoindre au CSA, sous astreinte, de lui accorder les modifications demandées ;

3°) de mettre à la charge du CSA une somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 ;

- le décret n° 2011-732 du 24 juin 2011 ;

- la délibération n° 2011-31 du 12 juillet 2011 du Conseil supérieur de l'audiovisuel ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Alain Seban, conseiller d'Etat,

- les conclusions de Mme Laurence Marion, rapporteur public ;

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la société Nice Music exploite le service radiophonique " Nice Music " diffusé dans la zone de Nice dans le cadre d'une autorisation délivrée par le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) le 11 mars 2008 et renouvelée le 4 juillet 2012 ; que, par une lettre du 20 juin 2014, la société a demandé au comité technique de l'audiovisuel de Marseille, d'une part, d'agréer la cession de l'intégralité de son capital social à M. A...et, d'autre part, d'apporter certaines modifications à la convention conclue le 4 juillet 2012 qui fixe les règles particulières applicables au service " Nice Music " ; que le comité technique de l'audiovisuel, statuant au nom du CSA, a accueilli cette demande par une décision du 5 septembre 2014 ; que, toutefois, par une décision du 7 octobre 2014, le CSA a évoqué l'affaire et rejeté la demande de la société Nice Music ; que la requête de la société tend à l'annulation de cette décision, qui s'est substituée à celle du comité technique de l'audiovisuel de Marseille ;

Sur la compétence du Conseil d'Etat :

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 311-1 du code de justice administrative : " Le Conseil d'Etat est compétent pour connaître en premier et dernier ressort : (...) 4° Des recours dirigés contre les décisions prises par les organes des autorités suivantes, au titre de leur mission de contrôle ou de régulation : (...) - le Conseil supérieur de l'audiovisuel, sous réserve des dispositions de l'article R. 311-2 " ; qu'aux termes de l'article R. 311-2 du même code : " La cour administrative d'appel de Paris est compétente pour connaître en premier et dernier ressort : (...) 2° Des litiges relatifs aux décisions prises par le Conseil supérieur de l'audiovisuel en application des articles 28-1, 28-3 et 29 à 30-7 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, à l'exception de celles concernant les services de télévision à vocation nationale " ; qu'aux termes de l'article R. 341-1 du même code : " Lorsque le Conseil d'Etat est saisi de conclusions relevant de sa compétence de premier ressort, il est également compétent pour connaître de conclusions connexes relevant normalement de la compétence de premier ressort d'un tribunal administratif ou d'une cour administrative d'appel " ;

3. Considérant qu'en tant qu'elle refuse d'agréer la cession du capital social de la société Nice Music, la décision attaquée a été prise sur le fondement de l'article 42-3 de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, dont le cinquième alinéa prévoit que " tout éditeur de services détenteur d'une autorisation délivrée en application des articles 29,29-1,30-1,30-5 et 96 doit obtenir un agrément du Conseil supérieur de l'audiovisuel en cas de modification du contrôle direct ou indirect, au sens de l'article L. 233-3 du code de commerce, de la société titulaire de l'autorisation " ; que, par suite, les conclusions de la société dirigées contre ce refus ne sont pas au nombre de celles dont la cour administrative d'appel de Paris connaît en premier et dernier ressort en application des dispositions du 2° de l'article R. 311-2 du code de justice administrative ; qu'en vertu des dispositions du 4° de l'article R. 311-1 du même code, elles relèvent de la compétence de premier et dernier ressort du Conseil d'Etat ;

4. Considérant qu'en tant qu'elle refuse de modifier la convention fixant les règles particulières applicables au service " Nice Music ", la décision attaquée a été prise sur le fondement des dispositions combinées de l'article 28 de la loi du 30 septembre 1986, relatif aux conventions à la conclusion desquelles est subordonnée la délivrance des autorisations d'utiliser des fréquences radioélectriques, et de l'article 29 de la même loi, relatif à la délivrance des autorisations de diffuser des services de radio par voie hertzienne terrestre ; que, par suite, en vertu des dispositions du 2° de l'article R. 311-2 du code de justice administrative, ces conclusions relèvent normalement de la compétence de la cour administrative d'appel de Paris ; que, toutefois, elles sont connexes à celles dirigées contre le refus d'agréer la cession du capital social de la société Nice Music ; que le Conseil d'Etat est dès lors compétent pour en connaître en vertu des dispositions de l'article R. 341-1 du même code ;

Sur les conclusions dirigées contre le refus d'agréer la cession du capital social de la société Nice Music :

5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, par une lettre du 17 novembre 2014, la SARL Nice Music a renouvelé sa demande d'agrément de la cession de son capital social ; que le CSA a accordé cet agrément par une délibération du 17 décembre 2014 ; qu'il a ainsi rapporté la décision attaquée du 7 octobre 2014 en tant qu'elle refusait d'agréer la même opération ; que cette délibération a été portée à la connaissance de la société postérieurement à l'introduction de la requête ; qu'il suit de là que les conclusions de la requête tendant à l'annulation de la décision du 7 octobre 2014 en tant qu'elle portait refus d'agrément ont perdu leur objet en cours d'instance; qu'il n'y a pas lieu d'y statuer ;

Sur les conclusions dirigées contre le refus de modifier la convention fixant les règles particulières applicables au service " Nice Music " :

6. Considérant qu'aux termes de l'article 28 de la loi du 30 septembre 1986 modifiée relative à la liberté de communication : " La délivrance des autorisations d'usage de la ressource radioélectrique pour chaque nouveau service diffusé par voie hertzienne terrestre autre que ceux exploités par les sociétés nationales de programme, est subordonnée à la conclusion d'une convention passée entre le Conseil supérieur de l'audiovisuel au nom de l'Etat et la personne qui demande l'autorisation. Dans le respect de l'honnêteté et du pluralisme de l'information et des programmes et des règles générales fixées en application de la présente loi et notamment de son article 27, cette convention fixe les règles particulières applicables au service, compte tenu de l'étendue de la zone desservie, de la part du service dans le marché publicitaire, du respect de l'égalité de traitement entre les différents services et des conditions de concurrence propres à chacun d'eux, ainsi que du développement de la radio et de la télévision numériques de terre " ; que ces dispositions, qui subordonnent la délivrance des autorisations d'usage de la ressource radioélectrique pour la diffusion d'un service par voie hertzienne terrestre à la conclusion entre le CSA et la personne qui demande l'autorisation d'une convention fixant les règles particulières applicables au service, ne font pas obstacle à ce que les conventions ainsi conclues fassent l'objet de modifications à la demande du titulaire de l'autorisation ; que, saisi par le titulaire d'une autorisation d'exploiter un service radiophonique d'une demande tendant à ce que la convention afférente à ce service soit modifiée en ce qui concerne le programme à diffuser, le CSA ne peut légalement l'autoriser dans le cas où la modification sollicitée revêt, du fait de son objet ou de son ampleur, un caractère substantiel ;

7. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, selon la convention conclue le 4 juillet 2012 qui fixe les règles particulières applicables au service " Nice Music ", le programme diffusé par ce service vise prioritairement un public jeune et propose une programmation musicale composée de " musique actuelle, 50 à 70% de nouveautés, golds et nouveaux talents " ainsi qu'" un programme parlé important regroupant infos locales, commentaires sportifs et rubriques " ; que la société requérante a demandé que la convention soit modifiée pour lui permettre de diffuser une part significative de programmes en langue russe ; que, compte tenu de l'objet et de l'ampleur de cette modification, c'est à juste titre que le CSA a considéré, par la décision attaquée du 7 octobre 2014, qu'elle revêtait un caractère substantiel ; que, dès lors, il ne pouvait légalement accueillir la demande de la société Nice Music ; que les moyens invoqués par la société requérante, tirés de ce que sa demande n'était pas contraire à l'intérêt du public ni à l'impératif de pluralisme et n'entraînait pas de modification de l'équilibre du marché publicitaire local sont par suite inopérants et ne peuvent qu'être écartés ; que la société n'est donc pas fondée à demander l'annulation de la décision qu'elle attaque en tant qu'elle rejette sa demande de modification des conditions de l'autorisation dont elle est titulaire ; que par voie de conséquence ses conclusions à fin d'injonction ne peuvent qu'être rejetées ;

8. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées par la société Nice Music sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de la société Nice Music dirigées contre la décision du CSA du 7 octobre 2014 en tant qu'elle a refusé d'agréer la cession de la totalité du capital social de la SARL Nice Music à M.A....

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de la société Nice Music est rejeté.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la Société Nice Music et au Conseil supérieur de l'audiovisuel.

Copie pour information en sera adressée au ministre de la culture et de la communication.


Synthèse
Formation : 5ème - 4ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 386655
Date de la décision : 02/05/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

COMPÉTENCE - COMPÉTENCE À L'INTÉRIEUR DE LA JURIDICTION ADMINISTRATIVE - COMPÉTENCE EN PREMIER ET DERNIER RESSORT DE LA COUR ADMINISTRATIVE D'APPEL DE PARIS (ART - R - 311-2 DU CJA) - 1) EXISTENCE - REFUS DU CSA DE MODIFIER LA CONVENTION FIXANT LES RÈGLES PARTICULIÈRES APPLICABLES À UN SERVICE DE RADIO (ART - 28 ET 29 DE LA LOI DU 30 SEPTEMBRE 1986) - 2) ABSENCE - REFUS DU CSA D'AGRÉER LA MODIFICATION DU CONTRÔLE DIRECT OU INDIRECT DU TITULAIRE DE L'AUTORISATION (ART - 42-3 - 5E AL - - DE LA LOI DU 30 SEPTEMBRE 1986).

17-05 1) La décision par laquelle le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) refuse de modifier la convention fixant les règles particulières applicables à un service de radio est prise sur le fondement des dispositions combinées de l'article 28 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986, relatif aux conventions à la conclusion desquelles est subordonnée la délivrance des autorisations d'utiliser des fréquences radioélectriques, et de l'article 29 de la même loi, relatif à la délivrance des autorisations de diffuser des services de radio par voie hertzienne terrestre. Par suite, en vertu du 2° de l'article R. 311-2 du code de justice administrative (CJA), la cour administrative d'appel de Paris est compétente pour connaître en premier et dernier ressort d'une requête tendant à l'annulation de cette décision.,,,2) La décision par laquelle le CSA refuse d'agréer une modification du contrôle direct ou indirect de la société titulaire de l'autorisation est prise sur le fondement de l'article 42-3 de la loi du 30 septembre 1986. Par suite, des conclusions tendant à l'annulation de cette décision ne sont pas au nombre de celles dont la cour administrative d'appel de Paris connaît en premier et dernier ressort en application du 2° de l'article R. 311-2 du code de justice administrative. En vertu du 4° de l'article R. 311-1 du même code, elles relèvent de la compétence de premier et dernier ressort du Conseil d'Etat.

PROCÉDURE - INTRODUCTION DE L'INSTANCE - RECEVABILITÉ - CONCLUSIONS TENDANT À L'ANNULATION D'UN REFUS D'AGRÉMENT - RETIRÉ PAR UNE DÉCISION ACCORDANT L'AGRÉMENT - PRISE AVANT INTRODUCTION DE LA REQUÊTE MAIS PORTÉE À LA CONNAISSANCE DE LA REQUÉRANTE POSTÉRIEUREMENT À CETTE INTRODUCTION - EXISTENCE (SOL - IMPL - ) - LA PERTE D'OBJET DU LITIGE ÉTANT INTERVENUE EN COURS D'INSTANCE.

54-01 Refus, par le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA), de l'agrément de la cession du capital social d'une société titulaire d'une autorisation. A la suite d'un renouvellement, par la société requérante, de sa demande d'agrément, le CSA a, par une nouvelle délibération, accordé cet agrément. Il a ainsi rapporté sa première décision refusant l'agrément.... ,,Cette seconde délibération a été prise avant l'introduction de la requête dirigée contre le refus initial, mais portée à la connaissance de la société postérieurement à l'introduction de cette requête. Il suit de là que les conclusions de la requête tendant à l'annulation de la décision initiale en tant qu'elle portait refus d'agrément ont perdu leur objet en cours d'instance. Il n'y a pas lieu d'y statuer.

PROCÉDURE - INCIDENTS - NON-LIEU - EXISTENCE - DÉCISION RETIRÉE - CONCLUSIONS TENDANT À L'ANNULATION D'UN REFUS D'AGRÉMENT - RETIRÉ PAR UNE DÉCISION ACCORDANT L'AGRÉMENT - PRISE AVANT INTRODUCTION DE LA REQUÊTE MAIS PORTÉE À LA CONNAISSANCE DE LA REQUÉRANTE POSTÉRIEUREMENT À CETTE INTRODUCTION.

54-05-05-02-04 Refus, par le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA), de l'agrément de la cession du capital social d'une société titulaire d'une autorisation. A la suite d'un renouvellement, par la société requérante, de sa demande d'agrément, le CSA a, par une nouvelle délibération, accordé cet agrément. Il a ainsi rapporté sa première décision refusant l'agrément.... ,,Cette seconde délibération a été prise avant l'introduction de la requête dirigée contre le refus initial, mais portée à la connaissance de la société postérieurement à l'introduction de cette requête. Il suit de là que les conclusions de la requête tendant à l'annulation de la décision initiale en tant qu'elle portait refus d'agrément ont perdu leur objet en cours d'instance. Il n'y a pas lieu d'y statuer.


Publications
Proposition de citation : CE, 02 mai. 2016, n° 386655
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Alain Seban
Rapporteur public ?: Mme Laurence Marion

Origine de la décision
Date de l'import : 16/06/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2016:386655.20160502
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award