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07/04/2016 | FRANCE | N°386982

France | France, Conseil d'État, 10ème chambre, 07 avril 2016, 386982


Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 7 janvier 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la confédération générale des travailleurs à Mayotte (CGT-MA), MM. AC...AB..., P...AF..., Z...Y..., AI...F..., C...AA..., T...L..., O...S..., AK...I...M..., H...G..., J...A...R..., K...U..., AJ...B...J..., E...V..., A...AE..., C...V..., AD...W..., K...AG..., ainsi que Mmes N...Q...et X...AH...demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision implicite de rejet née du silence gardé par le Premier ministre sur leur demande tendant à l'abrog

ation des décrets nos 2005-138 et 2005-139 du 17 février 2005 relatifs au...

Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 7 janvier 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la confédération générale des travailleurs à Mayotte (CGT-MA), MM. AC...AB..., P...AF..., Z...Y..., AI...F..., C...AA..., T...L..., O...S..., AK...I...M..., H...G..., J...A...R..., K...U..., AJ...B...J..., E...V..., A...AE..., C...V..., AD...W..., K...AG..., ainsi que Mmes N...Q...et X...AH...demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision implicite de rejet née du silence gardé par le Premier ministre sur leur demande tendant à l'abrogation des décrets nos 2005-138 et 2005-139 du 17 février 2005 relatifs aux dispositions statutaires communes applicables respectivement aux corps des agents techniques et des agents administratifs des administrations de l'Etat à Mayotte, tels que modifiés par le décret n° 2009-1363 du 5 novembre 2009 ;

2°) d'annuler ces décrets ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la Constitution, notamment son article 73 ;

- la loi organique n° 2010-1486 du 7 décembre 2010 ;

- le code de la santé publique ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- la loi n° 2001-616 du 11 juillet 2001 ;

- l'ordonnance n° 2010-331 du 25 mars 2010 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Pauline Jolivet, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de Mme Aurélie Bretonneau, rapporteur public ;

1. La confédération générale des travailleurs à Mayotte (CGT-MA) et autres demandent l'annulation de la décision de rejet née du silence gardé par le Premier ministre sur leur demande tendant à l'abrogation des décrets nos 2005-138 et 2005-139 du 17 février 2005 relatifs aux dispositions statutaires communes applicables respectivement aux corps des agents techniques et des agents administratifs des administrations de l'Etat à Mayotte, tels que modifiés par le décret n° 2009-1363 du 5 novembre 2009. Ils demandent également l'annulation de ces décrets.

Sur les conclusions tendant à l'annulation des décrets litigieux :

2. Aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative : " Sauf en matière de travaux publics, la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée ". Le décret du 5 novembre 2009 modifiant les décrets du 17 février 2005 mentionnés au point 1 a été publié au Journal officiel du 8 novembre 2009. La requête de la CGT-MA et autres n'a été enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat que le 7 janvier 2015, soit plus de deux mois après cette publication. Par suite, les conclusions tendant à leur annulation sont irrecevables en raison de leur tardiveté.

Sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision refusant d'abroger les décrets litigieux :

3. En premier lieu, s'il appartient à toute personne intéressée, en cas de changement dans les circonstances qui ont pu motiver légalement une disposition réglementaire, de demander à toute époque à l'autorité compétente d'abroger ce règlement puis d'introduire un recours pour excès de pouvoir, le cas échéant, à l'encontre du refus opposé à sa demande, cette faculté doit, dans les matières où l'administration dispose de pouvoirs étendus pour adapter son action à l'évolution des circonstances de fait, être limitée au cas où le changement de circonstances a revêtu, pour des causes indépendantes de la volonté des intéressés, le caractère d'un bouleversement tel qu'il a eu pour effet de retirer à celle-ci son fondement juridique.

4. Si l'article 64-1 de la loi du 11 juillet 2001, qui a fait de Mayotte une collectivité départementale, a rendu applicables aux agents de la collectivité départementale, des communes et des établissements publics administratifs de Mayotte les lois relatives aux statuts de la fonction publique, il a prévu que des décrets en Conseil d'Etat pourront déroger à certaines des dispositions du statut général des fonctionnaires pour tenir compte des spécificités locales, notamment en matière de recrutement et de nomination ou intégration dans les corps et cadres d'emplois.

5. Il résulte nécessairement de cette disposition de valeur législative que ni la création du " Département de Mayotte " le 31 mars 2011 relevant du régime de l'identité législative prévu à l'article 73 de la Constitution ni la création d'une " agence de santé de l'océan Indien " exerçant à La Réunion et à Mayotte les compétences dévolues aux agences régionales de santé, en application de l'article 15 de l'ordonnance n° 2010-331 du 25 mars 2010, n'ont constitué un changement de circonstances revêtant, pour des causes indépendantes de la volonté du pouvoir réglementaire, le caractère d'un bouleversement tel qu'il rendrait l'objet initial des dispositions contestées caduc au point de priver celles-ci de leur fondement juridique.

6. En second lieu, le principe d'égalité de traitement entre agents appartenant à un même corps ne s'applique pas pour les conditions dans lesquelles un nouveau cadre d'emplois est constitué par voie d'intégration d'agents appartenant à des corps, cadres d'emplois ou emplois différents. En outre, le pouvoir réglementaire, expressément habilité par l'article 64-1 de la loi du 11 juillet 2001, pouvait tenir compte, dans l'intérêt du service, de différences de grade, d'indice ou d'ancienneté entre agents d'un même corps, d'un même cadre d'emplois ou dotés d'un même emploi, pour instituer des conditions d'intégration différentes entre ces agents. Dès lors, ne peut être accueilli le moyen tiré de ce que l'article 7 des décrets du 17 février 2005, dans leur version issue du décret du 5 novembre 2009, porterait une atteinte illégale au principe d'égalité en instituant pour les agents administratifs et techniques de l'administration de l'Etat à Mayotte des conditions de reprise d'ancienneté différentes de celles retenues par l'article 5 du décret n° 2005-1228 du 29 septembre 2005 applicable notamment aux agents de catégorie C de La Réunion, alors même qu'ils seraient tous affectés à l'agence de santé de l'océan Indien créée par l'ordonnance du 25 mars 2010.

7. Il résulte de ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à demander l'annulation de la décision implicite par laquelle le Premier ministre a rejeté leur demande tendant à l'abrogation des décrets nos 2005-138 et 2005-139 du 17 février 2005, dans leur version issue du décret du 5 novembre 2009.

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme que demandent les requérants soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.

D E C I D E :

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Article 1er : La requête de la confédération générale des travailleurs à Mayotte et autres est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la confédération générale des travailleurs à Mayotte, à MM.AB..., AF..., Y..., F..., AA..., L..., S..., I...M..., G..., R..., U..., B...J..., V..., AE..., V..., W..., AG..., MmesQ...et AH...et à la ministre de la fonction publique.


Synthèse
Formation : 10ème chambre
Numéro d'arrêt : 386982
Date de la décision : 07/04/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 07 avr. 2016, n° 386982
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Pauline Jolivet
Rapporteur public ?: Mme Aurélie Bretonneau

Origine de la décision
Date de l'import : 20/02/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2016:386982.20160407
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