Vu la procédure suivante :
La société Aclimat a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision de la commission d'examen des offres ainsi que les décisions subséquentes du maire et du conseil municipal de la Bohalle, notamment le marché conclu entre cette commune et la société Electrotechnic, ayant pour objet l'installation d'une chaudière à granulés bois dans l'école primaire communale ou, à titre subsidiaire, de résilier ce marché. Par un jugement n° 1107131 du 13 novembre 2013, le tribunal administratif de Nantes a annulé ce marché.
Par un arrêt n° 13NT03257 du 19 décembre 2014, la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté l'appel formé contre ce jugement par la commune de la Bohalle.
Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 19 février, 19 mai 2015 et 14 mars 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la commune de la Bohalle demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) de mettre à la charge de la société Aclimat la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code des marchés publics ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Vincent Montrieux, maître des requêtes en service extraordinaire,
- les conclusions de M. Gilles Pellissier, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Didier, Pinet, avocat de la commune de la Bohalle et à la SCP Masse-Dessen, Thouvenin, Coudray, avocat de la société Aclimat ;
1. Considérant que, pour assurer le respect des principes de liberté d'accès à la commande publique, d'égalité de traitement des candidats et de transparence des procédures, l'information appropriée des candidats sur les critères d'attribution d'un marché public est nécessaire, dès l'engagement de la procédure d'attribution du marché, dans l'avis d'appel public à concurrence ou le cahier des charges tenu à la disposition des candidats ; que, dans le cas où le pouvoir adjudicateur souhaite retenir d'autres critères que celui du prix, il doit porter à la connaissance des candidats la pondération ou la hiérarchisation de ces critères ; qu'il doit également porter à la connaissance des candidats la pondération ou la hiérarchisation des sous-critères dès lors que, eu égard à leur nature et à l'importance de cette pondération ou hiérarchisation, ils sont susceptibles d'exercer une influence sur la présentation des offres par les candidats ainsi que sur leur sélection et doivent en conséquence être eux-mêmes regardés comme des critères de sélection ; qu'il n'est, en revanche, pas tenu d'informer les candidats de la méthode de notation des offres ;
2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'aux termes du règlement de consultation du marché passé par la commune de la Bohalle en vue de l'installation d'une chaudière à granulés bois dans l'école primaire communale, les critères de sélection des offres étaient, pour 40 points, le prix, et pour 60 points, la valeur technique, elle-même divisée en deux sous-critères, intitulés " qualité du matériel proposé ", noté sur 25 points, et " quantitatif mis en oeuvre ", noté sur 35 points ; que le document d'analyse des offres intitulé " éléments de notation et de classement ", non communiqué aux candidats, précisait que la " qualité du matériel proposé " était appréciée en fonction de cinq éléments notés chacun sur 5 points, à savoir la puissance des radiateurs, la garantie, les références, la qualité du devis et la réactivité de l'entreprise, et que le " quantitatif mis en oeuvre " était apprécié sur la base de deux éléments respectivement notés sur 30 et 5 points, à savoir les " détails quantitatifs " et le contrat d'entretien proposé ;
3. Considérant que la cour administrative d'appel a jugé que la commune avait méconnu le principe de transparence des procédures de passation des marchés publics au motif qu'elle n'avait pas communiqué aux candidats ces " éléments de notation et de classement " alors que l'importance particulière accordée aux " détails quantitatifs " notés sur 30 points avait nécessairement eu une influence sur la présentation des offres et la sélection des entreprises dès lors que les six autres éléments d'appréciation du critère de la valeur technique n'étaient comptés chacun que pour 5 points sur un total de 60 points ; que, toutefois, ainsi qu'il a été dit au point 2, ce total se décomposait, selon les termes du règlement de consultation, en deux sous-critères, qualitatif pour 25 points et quantitatif pour 35 points ; qu'en se livrant à une appréciation au regard du total de points attribués au critère de la " valeur technique ", et non à une appréciation au regard du total de points attribués au sous-critère du " quantitatif mis en oeuvre ", qui avait été porté à la connaissance des candidats, la cour a commis une erreur de droit ; que, par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, la commune de la Bohalle est fondée à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ;
4. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société Aclimat la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que ces dispositions font, en revanche, obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de la commune de la Bohalle, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ;
D E C I D E :
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Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Nantes du 19 décembre 2014 est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Nantes.
Article 3 : La société Aclimat versera une somme de 3 000 euros à la commune de la Bohalle au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ses conclusions présentées sur le même fondement sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à la commune de la Bohalle et aux sociétés Aclimat, Electrotechnic et Ajire Energie.