La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

15/02/2016 | FRANCE | N°389140

France | France, Conseil d'État, 2ème - 7ème ssr, 15 février 2016, 389140


Vu les procédures suivantes :

1° Sous le n° 389140, par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 1er avril et 27 octobre 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'association French Data Network, l'association La Quadrature du Net et la Fédération des fournisseurs d'accès à internet associatifs demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2015-125 du 5 février 2015 relatif au blocage des sites provoquant à des actes de terrorisme ou en faisant l'apologie et des sites diffusant des images et représent

ations de mineurs à caractère pornographique ;

2°) de mettre à la charge de l...

Vu les procédures suivantes :

1° Sous le n° 389140, par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 1er avril et 27 octobre 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'association French Data Network, l'association La Quadrature du Net et la Fédération des fournisseurs d'accès à internet associatifs demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2015-125 du 5 février 2015 relatif au blocage des sites provoquant à des actes de terrorisme ou en faisant l'apologie et des sites diffusant des images et représentations de mineurs à caractère pornographique ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 024 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

2° Sous le n° 389896, par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 30 avril et 27 octobre 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'association French Data Network, l'association La Quadrature du Net et la Fédération des fournisseurs d'accès à internet associatifs demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2015-253 du 4 mars 2015 relatif au déréférencement des sites provoquant à des actes de terrorisme ou en faisant l'apologie et des sites diffusant des images et représentations de mineurs à caractère pornographique ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 024 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

....................................................................................

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu :

- la Constitution ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code pénal, notamment ses articles 227-23 et 421-2-5 ;

- le code des postes et des communications électroniques ;

- la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 ;

- la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004, modifiée par la loi n° 2014-1353 du 13 novembre 2014 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Clément Malverti, auditeur,

- les conclusions de Mme Béatrice Bourgeois-Machureau, rapporteur public ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 3 février 2016, présentée par l'association French Data Network, l'association La Quadrature du Net et la Fédération des fournisseurs d'accès à internet associatifs ;

1. Considérant que les requêtes n° 389140 et 389896 de l'association French Data Network, de l'association La Quadrature du Net et de la Fédération des fournisseurs d'accès à internet associatifs présentent à juger des questions semblables ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;

2. Considérant que la société Article 19 justifie d'un intérêt suffisant à l'annulation du décret du 5 février 2015 relatif au blocage des sites provoquant à des actes de terrorisme ou en faisant l'apologie et des sites diffusant des images et représentations de mineurs à caractère pornographique ; qu'ainsi, son intervention est recevable ;

3. Considérant que l'article 6-1 de la loi du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique, créé par l'article 12 de la loi du 13 novembre 2014 renforçant les dispositions relatives à la lutte contre le terrorisme, prévoit que " lorsque les nécessités de la lutte contre la provocation à des actes terroristes ou l'apologie de tels actes relevant de l'article 421-2-5 du code pénal ou contre la diffusion des images ou des représentations de mineurs relevant de l'article 227-23 du même code le justifient, l'autorité administrative peut demander " à l'éditeur ou à l'hébergeur du site internet " le retrait des contenus " qui contreviennent à ces mêmes articles ; qu'en vertu de ces dispositions, l'autorité administrative peut, si le retrait demandé n'est pas effectué dans un délai de vingt-quatre heures, notifier aux fournisseurs d'accès à internet la liste des adresses électroniques des services de communication au public en ligne concernés, qui doivent alors empêcher sans délai l'accès à ces adresses ; que l'autorité administrative peut également notifier ces adresses électroniques aux exploitants de moteurs de recherche ou d'annuaires, qui prennent toute mesure utile pour faire cesser le référencement du service de communication au public en ligne ; qu'une personnalité qualifiée, désignée par la Commission nationale de l'informatique et des libertés, a pour mission de vérifier que les contenus dont l'autorité administrative demande le retrait ou que les sites dont elle ordonne le blocage ou le déréférencement entrent dans le champ des dispositions du code pénal sanctionnant la provocation au terrorisme, l'apologie du terrorisme ou la diffusion d'images pédopornographiques ;

4. Considérant que le décret du 5 février 2015 contesté par la requête n° 389140 précise la procédure permettant d'empêcher l'accès des internautes aux sites incitant à la commission d'actes de terrorisme ou en faisant l'apologie et aux sites diffusant des images et représentations de mineurs à caractère pornographique ; qu'il dispose que l'autorité administrative mentionnée à l'article 6-1 de la loi du 21 juin 2004 est l'office central de lutte contre la criminalité liée aux technologies de l'information et de la communication de la direction générale de la police nationale ; qu'il définit la notion d'" adresses électroniques " pour l'application des mêmes dispositions législatives ; qu'il prévoit que les internautes qui tentent de se connecter aux sites dont l'accès est bloqué sont dirigés vers une page d'information du ministère de l'intérieur indiquant les motifs de la mesure prise et les voies de recours ; qu'il prévoit en outre que les mesures de blocage sont levées dès que le service a disparu ou que son contenu ne présente plus de caractère illicite ; qu'il précise enfin que la personnalité qualifiée désignée au sein de la Commission nationale de l'informatique et des libertés dispose des services de cette autorité administrative indépendante ;

5. Considérant que le décret du 4 mars 2015 contesté par la requête n° 389896 précise la procédure selon laquelle est demandé aux exploitants de moteurs de recherche ou d'annuaires le déréférencement des sites incitant à la commission d'actes de terrorisme ou en faisant l'apologie et des sites diffusant des images et représentations de mineurs à caractère pornographique ; qu'il renvoie, pour l'identification de l'autorité administrative mentionnée à l'article 6-1 de la loi du 21 juin 2004 et pour les dispositions relatives à la personnalité qualifiée, au décret du 5 février 2015 relatif au blocage des mêmes sites ; qu'il prévoit enfin que les mesures de déréférencement sont levées dès que le service a disparu ou que son contenu ne présente plus de caractère illicite ;

6. Considérant que l'association French Data Network, l'association La Quadrature du Net et la Fédération des fournisseurs d'accès à internet associatifs demandent l'annulation de ces deux décrets ;

Sur la légalité externe :

7. Considérant, en premier lieu, que le premier alinéa de l'article 6-1 de la loi du 21 juin 2004 prévoit que " l'autorité administrative peut notifier aux [fournisseurs d'accès à Internet] la liste des adresses électroniques des services de communications au public en ligne contrevenant [aux] articles 421-2-5 et 227-23 [du code pénal]. Ces personnes doivent alors empêcher sans délai l'accès à ces adresses " ; que le quatrième alinéa de l'article 3 du décret du 5 février 2015 précise que " les utilisateurs des services de communication au public en ligne auxquels l'accès est empêché sont dirigés vers une page d'information du ministère de l'intérieur, indiquant pour chacun des deux cas de blocage les motifs de la mesure de protection et les voies de recours " ; que, si elle implique que le serveur du ministère de l'intérieur sera nécessairement destinataire des données de connexion des internautes tentant d'accéder à un site bloqué, cette réorientation des internautes vers une page d'information du ministère de l'intérieur ne constitue qu'une modalité de mise en oeuvre du dispositif de blocage prévu par la loi et n'implique pas une atteinte au secret des correspondances qui n'aurait pu être prévue que par celle-ci ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que le décret du 5 février 2015 serait entaché d'incompétence sur ce point doit être écarté ;

8. Considérant qu'aux termes du quatrième alinéa de l'article 6-1 de la loi du 21 juin 2004 : " L'autorité administrative peut également notifier les adresses électroniques dont les contenus contreviennent aux articles 421-2-5 et 227-23 du code pénal aux moteurs de recherche ou aux annuaires, lesquels prennent toute mesure utile destinée à faire cesser le référencement du service de communication au public en ligne (...) " ; que l'article 1er du décret du 4 mars 2015 prévoit que l'autorité administrative peut " notifier aux exploitants de moteurs de recherche ou d'annuaires les adresses électroniques dont les contenus contreviennent aux articles 421-2-5 et 227-23 du code pénal selon un mode de transmission sécurisé, qui en garantit la confidentialité et l'intégrité " ; que le décret du 4 mars 2015 ne prévoit ainsi aucune restriction à la liberté de communication qui ne résulte déjà de la loi ; que le moyen tiré de ce qu'il serait entaché d'incompétence sur ce point doit donc être écarté ;

9. Considérant, en second lieu, que les associations requérantes soutiennent que les décrets attaqués ont été pris à l'issue d'une procédure irrégulière faute d'avoir été précédés de l'étude d'impact prévue par la circulaire du 17 février 2011 relative à la simplification des normes concernant les entreprises et les collectivités territoriales ; que, toutefois, cette circulaire, adressée par le Premier ministre aux ministres, se borne à fixer des orientations pour l'organisation du travail gouvernemental ; que les associations requérantes ne peuvent dès lors utilement invoquer sa méconnaissance à l'appui de leurs requêtes contre les décrets attaqués ;

Sur la légalité interne :

En ce qui concerne la méconnaissance de l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 :

10. Considérant que, ainsi qu'il a été dit, le législateur a chargé l'autorité administrative de déterminer les adresses électroniques à bloquer ou à déréférencer, les décrets attaqués se bornant à désigner l'office central de lutte contre la criminalité liée aux technologies de l'information et de la communication pour l'exercice de cette mission et à préciser la procédure à suivre ; que la conformité des dispositions adoptées sur ce point par le législateur aux exigences constitutionnelles résultant de l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 ne saurait être contestée devant le Conseil d'Etat, statuant au contentieux en dehors de la procédure prévue à l'article 61-1 de la Constitution ;

En ce qui concerne l'atteinte disproportionnée à la liberté d'expression garantie par l'article 10 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales :

11. Considérant qu'aux termes de l'article 10 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit à la liberté d'expression. Ce droit comprend la liberté d'opinion et la liberté de recevoir ou de communiquer des informations ou des idées sans qu'il puisse y avoir ingérence d'autorités publiques et sans considération de frontière. Le présent article n'empêche pas les Etats de soumettre les entreprises de radiodiffusion, de cinéma ou de télévision à un régime d'autorisations. / 2. L'exercice de ces libertés comportant des devoirs et des responsabilités peut être soumis à certaines formalités, conditions, restrictions ou sanctions prévues par la loi, qui constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité nationale, à l'intégrité territoriale ou à la sûreté publique, à la défense de l'ordre et à la prévention du crime, à la protection de la santé ou de la morale, à la protection de la réputation ou des droits d'autrui, pour empêcher la divulgation d'informations confidentielles ou pour garantir l'autorité et l'impartialité du pouvoir judiciaire " ; qu'il résulte de ces stipulations que les restrictions apportées à la liberté d'expression ne peuvent être autorisées que si elles sont prévues par la loi, répondent à des finalités légitimes et sont adaptées, nécessaires et proportionnées à l'objectif poursuivi ;

12. Considérant, en premier lieu, que les dispositifs de blocage et de déréférencement prévus par les décrets attaqués ont pour objectifs légitimes, d'une part, de restreindre, pour les internautes de bonne foi, l'accès aux sites provoquant à des actes de terrorisme ou en faisant l'apologie et aux sites diffusant des images et représentations de mineurs à caractère pornographique et, d'autre part, de gêner l'accès volontaire de certains internautes à ces contenus ;

13. Considérant, en deuxième lieu, qu'au regard de ces objectifs, la circonstance qu'il serait techniquement possible, pour certains, de contourner le blocage ou le déréférencement des sites au contenu illégal ne peut conduire à regarder ces dispositifs comme inadaptés aux objectifs poursuivis ;

14. Considérant, en troisième lieu, qu'il ne résulte pas des stipulations précitées de l'article 10 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales que les mesures de blocage et de déréférencement en cause ne puissent être ordonnées que par un juge ;

15. Considérant, en quatrième lieu, que les risques limités de " sur-blocage " résultant de la technique du blocage par nom de domaine ne sauraient conduire à regarder comme disproportionné le dispositif de blocage prévu par l'article 6-1 de la loi du 21 juin 2004 ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que d'autres dispositifs, impliquant une ingérence dans l'exercice des droits des individus moins forte, permettraient d'atteindre les objectifs poursuivis ;

16. Considérant, en cinquième lieu, que le troisième alinéa de l'article 6-1 de la loi du 21 juin 2004 prévoit la transmission de la liste des adresses électroniques à bloquer ou à déréférencer à une personnalité qualifiée, désignée en son sein par la Commission nationale de l'informatique et des libertés, qui " s'assure de la régularité et des conditions d'établissement, de mise à jour, de communication et d'utilisation de la liste ", peut émettre des recommandations à l'autorité administrative et, le cas échéant, saisir le juge administratif ; que les articles 5 des décrets attaqués prévoient que cette personnalité qualifiée " dispose pour l'exercice de ses fonctions des services de la Commission nationale de l'informatique et des libertés ", peut bénéficier de l'assistance d'un interprète et se voit transmettre les motifs des demandes de retrait adressés aux éditeurs et aux hébergeurs ; qu'elle dispose ainsi des moyens humains, techniques et financiers nécessaires pour s'assurer de la régularité des demandes de blocage et de déréférencement formulées par l'autorité administrative ; que la décision de cette dernière est par ailleurs susceptible d'être contestée à tout moment et par toute personne intéressée devant le juge administratif, le cas échéant en référé ; qu'enfin, les articles 4 des décrets attaqués prévoient que " l'office central de lutte contre la criminalité liée aux technologies de l'information et de la communication vérifie au moins chaque trimestre que les adresses électroniques notifiées ont toujours un contenu présentant un caractère illicite " et que, si tel n'est plus le cas, ces adresses sont retirées de la liste et les mesures de blocage et de déréférencement levées ; que, contrairement à ce qui est soutenu, ces différents éléments sont de nature à permettre une mise en oeuvre des dispositifs de blocage et de déréférencement contestés sans atteinte disproportionnée à la liberté d'expression ;

En ce qui concerne la méconnaissance du principe de confiance légitime, du principe de sécurité juridique et de l'objectif à valeur constitutionnelle de clarté et d'intelligibilité de la norme :

17. Considérant que le principe de confiance légitime, qui est au nombre des principes généraux du droit de l'Union européenne, ne trouve à s'appliquer dans l'ordre juridique national que dans le cas où la situation juridique dont a à connaître le juge administratif français est régie par le droit communautaire ; qu'aucun texte de droit de l'Union, notamment pas la directive du Parlement européen et du Conseil du 12 juillet 2002 concernant le traitement des données à caractère personnel et la protection de la vie privée dans le secteur des communications électroniques, n'a pour objet de régir les modalités de blocage et de déréférencement de sites au contenu illicite ; que, par suite, les associations requérantes ne peuvent utilement invoquer le principe de confiance légitime ;

18. Considérant que les dispositions des décrets attaqués ne sont pas équivoques et sont suffisamment précises ; qu'ainsi, contrairement à ce qui est soutenu, elles ne méconnaissent, pour ce motif, ni le principe de sécurité juridique ni l'objectif à valeur constitutionnelle de clarté et d'intelligibilité de la norme ;

En ce qui concerne la méconnaissance du paragraphe 1 de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales :

19. Considérant que les dispositifs de blocage et de déréférencement litigieux, dont l'objectif rappelé plus haut est de restreindre l'accès, volontaire ou involontaire, à des contenus illicites, constituent des mesures de police administrative ; que, par suite, et en tout état de cause, ni le principe général des droits de la défense ni les stipulations du paragraphe 1 de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peuvent être utilement invoqués ;

En ce qui concerne la méconnaissance des règles encadrant la mise en oeuvre d'un traitement de données à caractère personnel et sur l'atteinte à la vie privée et à la protection des données à caractère personnel :

20. Considérant qu'aux termes de l'article 2 de la loi du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés : " La présente loi s'applique aux traitements automatisés de données à caractère personnel, ainsi qu'aux traitements non automatisés de données à caractère personnel contenues ou appelées à figurer dans des fichiers (...). Constitue un traitement de données à caractère personnel toute opération ou tout ensemble d'opérations portant sur de telles données, quel que soit le procédé utilisé, et notamment la collecte, l'enregistrement, l'organisation, la conservation, l'adaptation ou la modification, l'extraction, la consultation, l'utilisation, la communication par transmission, diffusion ou toute autre forme de mise à disposition, le rapprochement ou l'interconnexion, ainsi que le verrouillage, l'effacement ou la destruction. " ; que, par ailleurs, selon ses termes mêmes, le I de l'article L. 34-1 du code des postes et des communications électroniques ne s'applique qu'au " traitement des données à caractère personnel dans le cadre de la fourniture de services de communication électronique " ; que, s'il a pour conséquence que le serveur du ministère de l'intérieur sera destinataire des données de connexion des internautes tentant d'accéder à un site bloqué, le dispositif de réorientation vers une page d'information de ce ministère prévu par l'article 3 du décret du 5 février 2015 n'implique pas, par lui-même et en l'absence de dispositions en ce sens, la mise en place d'un traitement de données à caractère personnel au sens des dispositions précitées ; que, dès lors que les décrets attaqués n'autorisent pas l'autorité administrative à effectuer une quelconque opération sur les données de connexion qu'elle reçoit, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de la loi du 6 janvier 1978 et de l'article L. 34-1 du code des postes et des communications électroniques ainsi que le moyen tiré de l'atteinte à la vie privée ou à la protection des données à caractère personnel ne peuvent qu'être écartés ;

21. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre de l'intérieur, que les associations requérantes ne sont pas fondées à demander l'annulation des décrets qu'elles attaquent ; que leurs conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par suite, qu'être rejetées ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'intervention de la société Article 19 est admise.

Article 2 : Les requêtes de l'association French Data Network, de l'association La Quadrature du Net et de la Fédération des fournisseurs d'accès à internet associatifs sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à l'association French Data Network, à l'association La Quadrature du Net, à la Fédération des fournisseurs d'accès à internet associatifs, au Premier ministre et au ministre de l'intérieur. Copie sera adressée à la société Article 19.


Synthèse
Formation : 2ème - 7ème ssr
Numéro d'arrêt : 389140
Date de la décision : 15/02/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 15 fév. 2016, n° 389140
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Clément Malverti
Rapporteur public ?: Mme Béatrice Bourgeois-Machureau

Origine de la décision
Date de l'import : 20/02/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2016:389140.20160215
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award