La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

15/02/2016 | FRANCE | N°375667

France | France, Conseil d'État, 8ème - 3ème ssr, 15 février 2016, 375667


Vu la procédure suivante :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Paris la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 2003 au 1er septembre 2004 ainsi que des pénalités correspondantes. Par un jugement n° 1122444 du 14 novembre 2012, ce tribunal a rejeté cette demande.

Par un arrêt n° 13PA00125 du 20 décembre 2013, la cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel formé contre ce jugement par M.A....

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en répliqu

e, enregistrés les 21 février et 21 mai 2014 et le 23 septembre 2015 au secrétariat ...

Vu la procédure suivante :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Paris la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 2003 au 1er septembre 2004 ainsi que des pénalités correspondantes. Par un jugement n° 1122444 du 14 novembre 2012, ce tribunal a rejeté cette demande.

Par un arrêt n° 13PA00125 du 20 décembre 2013, la cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel formé contre ce jugement par M.A....

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 21 février et 21 mai 2014 et le 23 septembre 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code pénal ;

- la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Mathieu Herondart, conseiller d'Etat,

- les conclusions de M. Benoît Bohnert, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Piwnica, Molinié, avocat de M. A...;

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. A..., qui exerce la profession d'avocat, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité au titre de la période du 1er janvier 2003 au 31 décembre 2004 ; que, dans le cadre de ce contrôle, l'administration fiscale a examiné et rapproché les montants figurant sur les documents comptables, les notes d'honoraires, les déclarations de taxe sur la valeur ajoutée déposées et les encaissements bancaires recensés lors du contrôle ; qu'à l'issue de cette vérification, l'administration a procédé à des rappels de taxe sur la valeur ajoutée ; que M. A...se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 20 décembre 2013 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté son appel formé contre le jugement du tribunal administratif de Paris du 14 novembre 2012 rejetant sa demande de décharge de ces rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités correspondantes ;

Sur les motifs de l'arrêt relatifs à la procédure d'imposition :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 226-13 du code pénal : " La révélation d'une information à caractère secret par une personne qui en est dépositaire soit par état ou par profession, soit en raison d'une fonction ou d'une mission temporaire, est punie d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende " ; qu'aux termes de l'article 226-14 du même code : " L'article 226-13 n'est pas applicable dans les cas où la loi impose ou autorise la révélation du secret " ; qu'aux termes de l'article 66-5 de la loi du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques, dans sa rédaction à l'époque des faits : " En toutes matières, que ce soit dans le domaine du conseil ou dans celui de la défense, les consultations adressées par un avocat à son client ou destinées à celui-ci, les correspondances échangées entre le client et son avocat, entre l'avocat et ses confrères, à l'exception pour ces dernières de celles portant la mention " officielle ", les notes d'entretien et, plus généralement, toutes les pièces du dossier sont couvertes par le secret professionnel " ;

3. Considérant qu'en vertu de l'article 1649 quater G du code général des impôts, les documents comptables tenus par les adhérents des associations agrées des professions libérales comportent " quelle que soit la profession exercée par l'adhérent, l'identité du client ainsi que le montant, la date et la forme du versement des honoraires " ; qu'aux termes de l'article 99 du même code : " Les contribuables soumis obligatoirement au régime de la déclaration contrôlée ou qui désirent être imposés d'après ce régime sont tenus d'avoir un livre-journal servi au jour le jour et présentant le détail de leurs recettes et de leurs dépenses professionnelles. / Le livre-journal tenu par les contribuables non-adhérents d'une association de gestion agréée comporte, quelle que soit la profession exercée, l'identité déclarée par le client ainsi que le montant, la date et la forme du versement des honoraires " ; qu'aux termes de l'article L. 13-0-A du livre des procédures fiscales : " Les agents de l'administration des impôts peuvent demander toutes informations relatives au montant, à la date et à la forme des versements afférents aux recettes de toute nature perçues par les personnes dépositaires du secret professionnel en vertu des dispositions de l'article 226-13 du code pénal. Ils ne peuvent demander de renseignements sur la nature des prestations fournies par ces personnes " ;

4. Considérant, d'une part, que les dispositions des articles 99 et 1649 quater G du code général des impôts imposent aux membres des professions dépositaires d'un secret professionnel en vertu de l'article 226-13 du code pénal d'indiquer sur leurs documents comptables, outre le montant, la date et la forme du versement des honoraires, l'identité du client ; qu'il résulte, d'autre part, des dispositions de l'article L. 13-0-A du livre des procédures fiscales, éclairées par les débats parlementaires à l'issue desquels elles ont été adoptées, que le législateur a entendu délimiter strictement le champ des informations que l'administration fiscale est susceptible de demander à ces professionnels ; que ces dispositions ne font pas obstacle à ce que l'administration prenne connaissance, pendant les opérations de contrôle, de factures établies par un avocat pour des prestations destinées à des clients nommément désignés, dès lors que ces documents ne comportent aucune indication, même sommaire, sur la nature des prestations fournies à ces clients ; qu'elles font, en revanche, obstacle à ce que le vérificateur procède à des demandes complémentaires relatives à l'identité des clients concernés ou cherche à obtenir des renseignements sur la nature des prestations fournies ;

5. Considérant qu'en estimant que les notes d'honoraires litigieuses établies par Me A... pour ses clients, qui se bornaient à indiquer l'existence d'un forfait pour services professionnels rendus pour certaines périodes, ne permettaient pas à l'administration de connaître la nature des prestations fournies à ces clients, la cour a porté sur les faits qui lui étaient soumis une appréciation souveraine exempte de dénaturation et n'a entaché son arrêt d'aucune contradiction de motifs ; qu'en en déduisant que les dispositions précitées de l'article L. 13-0-A du livre des procédures fiscales et celles des articles 99 et 1649 quater G du code général des impôts ne faisaient pas obstacle à ce que le vérificateur prenne connaissance de ces notes d'honoraires, la cour n'a pas commis d'erreur de droit ;

6. Considérant qu'il résulte des termes mêmes de l'arrêt attaqué que le motif par lequel la cour a estimé qu'en tout état de cause, les rehaussements litigieux en matière de taxe sur la valeur ajoutée n'étaient pas fondés sur des éléments tirés de l'identité des clients de M. A...présente un caractère surabondant ; que, dès lors, le moyen du pourvoi dirigé contre ce motif est sans influence sur le bien-fondé de l'arrêt ;

Sur les motifs de l'arrêt relatifs au bien-fondé de l'imposition :

7. Considérant qu'aux termes du 3 de l'article 283 du code général des impôts : "Toute personne qui mentionne la taxe sur la valeur ajoutée sur une facture ou tout autre document en tenant lieu est redevable de la taxe du seul fait de sa facturation " ; que, toutefois, ainsi que l'a jugé la Cour de justice des Communautés européennes dans son arrêt du 13 décembre 1989 Genius Holding BV (C-342/87), le principe de neutralité de la taxe sur la valeur ajoutée implique qu'une taxe indûment facturée puisse être régularisée, sans que cette régularisation ne dépende d'un pouvoir d'appréciation discrétionnaire de l'administration fiscale ; que la Cour a également dit pour droit, notamment dans son arrêt du 18 juin 2009 Staatssecretaris van Financiën c/ Stadeco BV (C-566/07), que les mesures que les Etats membres ont la faculté d'adopter afin d'assurer l'exacte perception de la taxe et d'éviter la fraude ne doivent pas aller au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre de tels objectifs et qu'elles ne peuvent être utilisées de manière telle qu'elles remettraient en cause la neutralité de la taxe sur la valeur ajoutée, laquelle constitue un principe fondamental du système de cette taxe ; que ce principe ne s'oppose toutefois pas à ce qu'un État membre subordonne la correction de la taxe sur la valeur ajoutée mentionnée par erreur sur une facture à la condition que l'émetteur de la facture initiale ait envoyé à son destinataire une facture rectifiée ne mentionnant pas la taxe sur la valeur ajoutée si cet émetteur n'a pas éliminé complètement, en temps utile, le risque de perte de recettes fiscales ;

8. Considérant qu'en se fondant, pour juger que M. A...était redevable de la taxe sur la valeur ajoutée dont il soutenait qu'elle avait été indûment facturée, sur la circonstance qu'il ne démontrait pas avoir complètement éliminé, en temps utile, le risque de perte de recettes et que les factures qu'il avait produites en appel ne pouvaient être regardées comme des factures rectificatives, la cour, dont l'arrêt est suffisamment motivé, n'a pas commis d'erreur de droit ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque ; que, par suite, ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de M. A...est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. B...A...et au ministre des finances et des comptes publics.


Synthèse
Formation : 8ème - 3ème ssr
Numéro d'arrêt : 375667
Date de la décision : 15/02/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-01-03-01 Contributions et taxes. Généralités. Règles générales d'établissement de l'impôt. Contrôle fiscal.


Publications
Proposition de citation : CE, 15 fév. 2016, n° 375667
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Mathieu Herondart
Rapporteur public ?: M. Benoît Bohnert
Avocat(s) : SCP PIWNICA, MOLINIE

Origine de la décision
Date de l'import : 04/10/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2016:375667.20160215
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award