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15/02/2016 | FRANCE | N°375048

France | France, Conseil d'État, 9ème ssjs, 15 février 2016, 375048


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Salesky Rhône-Alpes a demandé au tribunal administratif de Lyon de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires de taxe professionnelle auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2006, 2007 et 2008 dans les rôles de la commune de Montagny. Par un jugement n° 1100469 du 12 mars 2013, le tribunal administratif de Lyon a réduit la base d'imposition de la société Salesky Rhône-Alpes à la taxe professionnelle au titre de l'année 2006 à concurrence du rehaussement de la val

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Salesky Rhône-Alpes a demandé au tribunal administratif de Lyon de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires de taxe professionnelle auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2006, 2007 et 2008 dans les rôles de la commune de Montagny. Par un jugement n° 1100469 du 12 mars 2013, le tribunal administratif de Lyon a réduit la base d'imposition de la société Salesky Rhône-Alpes à la taxe professionnelle au titre de l'année 2006 à concurrence du rehaussement de la valeur locative des immobilisations reçues par cette société par apport partiel d'actifs de la société Transports Salesky, l'a déchargée des cotisations supplémentaires de taxe professionnelle correspondantes et a rejeté le surplus de ses conclusions.

Par un arrêt n° 13LY01287 du 5 décembre 2013, la cour administrative d'appel de Lyon, après avoir constaté un non-lieu à statuer à hauteur des dégrèvements prononcés en cours d'instance, a rejeté le surplus des conclusions de la requête formée par la société Salesky Rhône-Alpes contre ce jugement, ainsi que l'appel incident du ministre de l'économie et des finances.

Procédures devant le Conseil d'Etat :

1° Par une décision n° 375183 du 12 mai 2015, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a prononcé l'admission des conclusions du pourvoi de la société Salesky Rhône-Alpes dirigées contre cet arrêt en tant seulement qu'il s'est prononcé sur la demande de décharge, présentée sur le fondement de l'article 1647 C quinquies du code général des impôts, des cotisations supplémentaires de taxe professionnelle mises à la charge de cette société.

Par un mémoire en défense enregistré le 22 juillet 2015, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet du pourvoi.

2° Par un pourvoi, enregistré le 30 janvier 2014, le ministre délégué chargé du budget demande au Conseil d'Etat d'annuler cet arrêt en tant qu'il a rejeté son appel incident.

....................................................................................

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu :

- le code général des impôts ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Séverine Larere, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Frédéric Aladjidi, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Célice, Blancpain, Soltner, Texidor, avocat de la société Salesky Rhône-Alpes ;

Considérant ce qui suit :

1. Les pourvois du ministre délégué chargé du budget et de la société Salesky Rhône-Alpes sont dirigés contre le même arrêt. Il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision.

2. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société Salesky Rhône-Alpes, qui exerce une activité de transport frigorifique routier, a été assujettie à des cotisations supplémentaires de taxe professionnelle au titre des années 2006, 2007 et 2008 dans les rôles de la commune de Montagny. Par un jugement du 12 mars 2013, le tribunal administratif de Lyon a réduit la base d'imposition de la société requérante à la taxe professionnelle au titre de l'année 2006 à concurrence des rehaussements de valeur locative des immobilisations qu'elle avait reçues à la suite d'un apport partiel d'actifs de la société Transports Salesky, l'a déchargée des cotisations supplémentaires de taxe professionnelle correspondantes, et a rejeté le surplus de ses conclusions. La cour administrative d'appel de Lyon, par un arrêt du 5 décembre 2013, d'une part, a rejeté l'appel formé par la société Salesky Rhône-Alpes contre ce jugement en tant qu'il avait rejeté le surplus de sa demande, d'autre part, a rejeté l'appel incident du ministre de l'économie et des finances contre le même jugement en tant qu'il avait partiellement déchargé la société. Le ministre et la société Salesky Rhône-Alpes se pourvoient en cassation contre cet arrêt, chacun en tant qu'il leur est partiellement défavorable. Par une décision du 12 mai 2015, le Conseil d'Etat a prononcé l'admission des conclusions du pourvoi de la société Salesky Rhône-Alpes seulement en tant que l'arrêt attaqué s'est prononcé sur la demande de décharge présentée par cette société sur le fondement de l'article 1647 C quinquies du code général des impôts.

Sur le pourvoi du ministre délégué chargé du budget :

3. Aux termes de l'article 1467 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux impositions en litige : "La taxe professionnelle a pour base : / 1° Dans le cas des contribuables autres que ceux visés au 2° : / a. la valeur locative, telle qu'elle est définie aux articles 1469, 1518 A et 1518 B, des immobilisations corporelles dont le redevable a disposé pour les besoins de son activité professionnelle pendant la période de référence définie aux articles 1467 A et 1478, à l'exception de celles qui ont été détruites ou cédées au cours de la même période (...) ". Aux termes du 3° quater de l'article 1469 du même code, dans sa rédaction alors applicable : " Le prix de revient d'un bien cédé n'est pas modifié lorsque ce bien est rattaché au même établissement avant et après la cession et lorsque, directement ou indirectement : / a. l'entreprise cessionnaire contrôle l'entreprise cédante ou est contrôlée par elle ; / b. ou ces deux entreprises sont contrôlées par la même entreprise ". Enfin, aux termes du premier alinéa de l'article 1518 B du même code, " A compter du 1er janvier 1980, la valeur locative des immobilisations corporelles acquises à la suite d'apports, de scissions, de fusions de sociétés ou de cessions d'établissements réalisés à partir du 1er janvier 1976 ne peut être inférieure aux deux tiers de la valeur locative retenue l'année précédant l'apport, la scission, la fusion ou la cession ".

4. Il résulte des termes mêmes des dispositions précitées du 3° quater de l'article 1469 du code général des impôts que, comme l'a relevé l'arrêt attaqué, les cessions de biens qu'elles visent s'entendent des seuls transferts de propriété consentis entre un cédant et un cessionnaire. Ces dispositions, dont les termes renvoient à une opération définie et régie par le droit civil, ne sauraient s'entendre comme incluant toutes autres opérations qui, sans constituer des " cessions " proprement dites, ont pour conséquence une mutation patrimoniale.

5. Pour autant, la notion de cession au sens du droit civil recouvre tous les transferts de propriété consentis entre un cédant et un cessionnaire, effectués à titre gratuit ou à titre onéreux, y compris ceux qui, réalisés dans le cadre d'opération de restructuration, portent sur la totalité ou une partie du patrimoine du cédant. Par ailleurs, la circonstance que des biens ont été cédés par l'effet d'un apport partiel d'actifs ne peut avoir pour effet d'écarter l'application des dispositions du 3° quater de l'article 1469 du code général des impôts au profit de celles de l'article 1518 B du même code lorsque les biens en cause répondent aux conditions posées par le 3° quater de l'article 1469 précité.

6. Par suite, en jugeant, d'une part, que l'opération par laquelle une société apporte une partie de ses éléments d'actif à une autre société et reçoit en contrepartie des droits sociaux de la société bénéficiaire de l'apport ne peut être regardée comme une cession au sens du droit civil, pour en déduire que les apports partiels d'actifs n'entrent pas dans les prévisions du 3° quater de l'article 1469 du code général des impôts, et, d'autre part, qu'à supposer que les dispositions du 3° quater de l'article 1469 aient été applicables, celles-ci ne primeraient pas sur les dispositions de l'article 1518 B du même code, la cour administrative d'appel de Lyon a entaché son arrêt d'erreurs de droit. Le ministre délégué chargé du budget est, par suite, fondé à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque en tant qu'il a rejeté son appel incident.

Sur le pourvoi de la société Salesky Rhône-Alpes :

7. Aux termes de l'article 1647 C quinquies du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux impositions litigieuses : " I. - Les immobilisations corporelles neuves éligibles aux dispositions de l'article 39 A ouvrent droit à un dégrèvement égal respectivement à la totalité, aux deux tiers et à un tiers de la cotisation de taxe professionnelle pour la première année au titre de laquelle ces biens sont compris dans la base d'imposition et pour les deux années suivantes. / Pour bénéficier du dégrèvement, les redevables indiquent chaque année sur les déclarations prévues à l'article 1477 la valeur locative et l'adresse des biens éligibles. / Les biens pour lesquels les redevables demandent le bénéfice du dégrèvement ne peuvent faire l'objet des dégrèvements mentionnés aux articles 1647 C à 1647 C quater ".

8. La cour a jugé que la société Salesky Rhône-Alpes ne justifiait pas remplir les conditions requises pour pouvoir bénéficier du dégrèvement prévu à l'article 1647 C quinquies du code général des impôts et ne démontrait pas que les biens pour lesquels elle sollicitait ce dégrèvement étaient des immobilisations créées ou acquises à l'état neuf au cours des périodes de référence des impositions litigieuses. En statuant ainsi, la cour s'est, implicitement mais nécessairement, prononcée sur les seuls biens pour lesquels l'administration, après avoir considéré que les biens en question entraient dans l'assiette de la taxe, ne les avait, par ailleurs, pas reconnus éligibles au dispositif de dégrèvement pour investissement nouveau prévu par cet article. Or, si la requérante soutient qu'elle a versé au dossier du tribunal administratif de Lyon un contrat de crédit-bail en date du 3 mars 2006, attestant de la prise à bail de sept " porteurs Kalysse " et en fournit la preuve à l'appui de son pourvoi, il ressort des pièces du même dossier, et notamment de l'annexe II à la proposition de rectification du 25 juin 2007, que l'administration, pour calculer les cotisations supplémentaires de la société Salesky Rhône-Alpes, avait pris en compte douze " porteurs Kalysse " au titre du dispositif du dégrèvement pour investissements nouveaux, dont la société ne conteste pas qu'ils comprendraient ceux qui sont visés au contrat de crédit-bail en date du 3 mars 2006. Il suit de là que la cour n'a pas dénaturé les pièces du dossier en estimant que la requérante ne démontrait pas, pour les immobilisations créées ou acquises à l'état neuf pour lesquelles elle sollicitait le dégrèvement prévu à l'article 1647 C quinquies du code général des impôts, que de telles immobilisations auraient été omises par l'administration dans le calcul du dégrèvement en question.

9. Il résulte de ce qui précède que la société Salesky Rhône-Alpes n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque. Ses conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par suite, qu'être rejetées.

D E C I D E :

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Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Lyon du 5 décembre 2013 est annulé en tant qu'il rejette l'appel incident du ministre de l'économie et des finances.

Article 2 : L'affaire est renvoyée, dans cette mesure, à la cour administrative d'appel de Lyon.

Article 3 : Le pourvoi de la société Salesky Rhône-Alpes est rejeté.

Article 4 : La présente décision sera notifiée au ministre des finances et des comptes publics et à la société Salesky Rhône-Alpes.


Synthèse
Formation : 9ème ssjs
Numéro d'arrêt : 375048
Date de la décision : 15/02/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 15 fév. 2016, n° 375048
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Séverine Larere
Rapporteur public ?: M. Frédéric Aladjidi

Origine de la décision
Date de l'import : 20/02/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2016:375048.20160215
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