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10/02/2016 | FRANCE | N°394701

France | France, Conseil d'État, 10ème - 9ème ssr, 10 février 2016, 394701


Vu la procédure suivante :

Mme A...B..., à l'appui de sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu mises à sa charge au titre des années 2010 et 2011, a produit un mémoire, enregistré le 22 avril 2015 au greffe du tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie, en application de l'article 23-1 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958, par lequel elle soulève une question prioritaire de constitutionnalité.

Par une ordonnance n° 1500386 du 13 novembre 2015, enregistrée le 20 novembre 2015 au secrétariat du contentieux du

Conseil d'Etat, le président du tribunal administratif de Nouvelle-Calédoni...

Vu la procédure suivante :

Mme A...B..., à l'appui de sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu mises à sa charge au titre des années 2010 et 2011, a produit un mémoire, enregistré le 22 avril 2015 au greffe du tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie, en application de l'article 23-1 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958, par lequel elle soulève une question prioritaire de constitutionnalité.

Par une ordonnance n° 1500386 du 13 novembre 2015, enregistrée le 20 novembre 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le président du tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie, avant qu'il soit statué sur la demande de MmeB..., a décidé, par application des dispositions de l'article 23-2 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958, de transmettre au Conseil d'Etat la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution de l'article Lp. 52 du code des impôts de la Nouvelle-Calédonie dans sa réaction issue de l'article 4 de la loi du pays du 21 janvier 2010, en ce qu'il soumet à une imposition commune les seules personnes mariées ayant chacune leur domicile fiscal en Nouvelle-Calédonie.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la Constitution, notamment son article 61-1 ;

- l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;

- la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 ;

- la loi n° 83-676 du 26 juillet 1983, ensemble la décision du Conseil constitutionnel n° 83-160 DC du 19 juillet 1983 ;

- la loi du pays n° 2010-3 du 21 janvier 2010, notamment son article 4 ;

- le code des impôts de la Nouvelle-Calédonie, notamment son article Lp. 52 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Anne Iljic, auditeur,

- les conclusions de M. Edouard Crépey, rapporteur public ;

1. Considérant qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article 107 de la loi organique du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie : " Les dispositions d'une loi du pays peuvent faire l'objet d'une question prioritaire de constitutionnalité, qui obéit aux règles définies par les articles 23-1 à 23-12 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel. " ;

2. Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article 23-4 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel que, lorsqu'une juridiction relevant du Conseil d'Etat a transmis à ce dernier, en application de l'article 23-2 de cette même ordonnance, la question de la conformité à la Constitution d'une disposition législative, le Conseil constitutionnel est saisi de cette question de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et que la question soit nouvelle ou présente un caractère sérieux ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article Lp. 52 du code des impôts de la Nouvelle-Calédonie, dans sa rédaction issue de l'article 4 de la loi du pays du 21 janvier 2010 portant diverses dispositions d'ordre fiscal : " I - Chaque contribuable est imposable à l'impôt sur le revenu tant en raison de ses bénéfices et revenus personnels que de ceux de ses enfants et des personnes considérées comme étant à sa charge au sens de l'article Lp. 134./ Sauf application des dispositions figurant aux paragraphes III. et IV., les personnes mariées ayant chacune leur domicile fiscal en Nouvelle-Calédonie sont soumises à une imposition commune pour les revenus perçus par chacune d'elles et ceux de leurs enfants et des personnes à charge constituant le foyer fiscal. Cette imposition est établie aux noms de chacun des époux ou épouses, séparés par le mot : " ou ". Le terme contribuable employé au premier alinéa s'entend de la personne ou des époux faisant l'objet d'une même imposition (...) " ;

4. Considérant que le litige soulevé par la requérante devant le tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie tend à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu mises à sa charge en application des dispositions qui régissent l'imposition des personnes mariées lorsque l'un des conjoints ne réside pas en Nouvelle Calédonie ; qu'il suit de là que la requérante doit être regardée comme contestant les dispositions du deuxième alinéa du I de l'article Lp. 52 du code des impôts de la Nouvelle-Calédonie citées au point 2, en tant qu'elles réservent le bénéfice de l'imposition commune aux personnes mariées ayant chacune leur domicile fiscal en Nouvelle-Calédonie ; que ces dispositions sont applicables au présent litige ;

5. Considérant que Mme B...soutient qu'en ce qu'elles conduisent à imposer séparément des personnes mariées dont l'une des deux n'a pas son domicile fiscal en Nouvelle-Calédonie, les dispositions litigieuses porteraient atteinte aux principes d'égalité devant la loi fiscale et devant les charges publiques garantis par les articles 6 et 13 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen ;

6. Considérant que les dispositions du deuxième alinéa du I de l'article Lp. 52 du code des impôts de la Nouvelle-Calédonie n'ont pas déjà été déclarées conformes à la Constitution par le Conseil constitutionnel ; que le moyen tiré de ce qu'elles méconnaîtraient le principe d'égalité devant la loi fiscale garanti par l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen soulève une question présentant un caractère sérieux ; qu'ainsi, il y a lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité invoquée ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La question de la conformité à la Constitution du deuxième alinéa du I de l'article Lp. 52 du code des impôts de la Nouvelle-Calédonie est renvoyée au Conseil constitutionnel.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme A...B..., au président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, au président du congrès de la Nouvelle-Calédonie et au haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie.

Copie en sera adressée au tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie.


Synthèse
Formation : 10ème - 9ème ssr
Numéro d'arrêt : 394701
Date de la décision : 10/02/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Publications
Proposition de citation : CE, 10 fév. 2016, n° 394701
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Anne Iljic
Rapporteur public ?: M. Edouard Crépey

Origine de la décision
Date de l'import : 20/02/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2016:394701.20160210
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