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23/12/2015 | FRANCE | N°380106

France | France, Conseil d'État, 7ème ssjs, 23 décembre 2015, 380106


Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés le 12 mai 2014 et le 19 février 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la CFE-CGC Réseaux consulaires demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision de la commission paritaire nationale du 11 mars 2014 modifiant les règles de fonctionnement de la commission paritaire nationale définies à l'annexe 1 de l'article 6 du statut du personnel administratif des chambres de commerce et d'industrie ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 500 euros au titre des dispositions de l'article L

. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossi...

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés le 12 mai 2014 et le 19 février 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la CFE-CGC Réseaux consulaires demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision de la commission paritaire nationale du 11 mars 2014 modifiant les règles de fonctionnement de la commission paritaire nationale définies à l'annexe 1 de l'article 6 du statut du personnel administratif des chambres de commerce et d'industrie ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de commerce ;

- la loi n° 52-1311 du 10 décembre 1952 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Vincent Montrieux, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Olivier Henrard, rapporteur public ;

Sur l'intervention du syndicat des directeurs généraux des établissements du réseau des chambres de commerce et d'industrie :

1. Considérant que le syndicat des directeurs généraux des établissements du réseau des chambres de commerce et d'industrie justifie d'un intérêt suffisant à l'annulation de la décision attaquée ; qu'ainsi son intervention est recevable ;

Sur la décision de la commission paritaire nationale :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 10 décembre 1952 relative à l'établissement obligatoire d'un statut du personnel administratif des chambres d'agriculture, des chambres de commerce et des chambres de métiers : " La situation du personnel administratif des chambres d'agriculture, des chambres de commerce et des chambres de métiers de France est déterminée par un statut établi par des commissions paritaires nommées, pour chacune de ces institutions, par le ministre de tutelle " ; qu'aux termes de l'article 2 de la même loi : " Chaque commission se compose : - d'un représentant du ministre de tutelle, président ; - de six présidents de chambres désignés par le bureau de l'assemblée des présidents de chambres, dont son président ; - de six représentants du personnel des chambres désignés par les organisations syndicales les plus représentatives ; " qu'aux termes de l'article A. 711-1 du code de commerce : " La commission paritaire prévue à l'article 1er de la loi n° 52-1311 du 10 décembre 1952 relative à l'établissement obligatoire d'un statut du personnel administratif des chambres d'agriculture, des chambres de commerce et des chambres de métiers et chargée d'établir le statut du personnel administratif des chambres de commerce et d'industrie est composée comme suit : a) Un représentant du ministre chargé de leur tutelle, président de la commission ; b) Une délégation patronale composée comme suit : - cinq présidents de chambres de commerce et d'industrie territoriales ou de région, désignés par le bureau de l'assemblée des chambres françaises de commerce et d'industrie ; - le président de l'assemblée des chambres françaises de commerce et d'industrie ; c) Une délégation du personnel composée de six représentants du personnel et répartie en trois collèges : cadres, agents de maîtrise et employés. Les membres de la délégation sont désignés à l'issue de la consolidation des résultats du premier tour aux élections des commissions paritaires des établissements du réseau, en application de l'article R. 712-11-1, par les organisations syndicales représentatives appelées à siéger à la commission paritaire nationale, parmi leurs candidats aux élections des commissions paritaires des établissements du réseau des chambres de commerce et d'industrie. Le nombre de sièges attribué à chaque collège s'établit selon la règle du quotient électoral et du plus fort reste. Chaque délégation peut être accompagnée de conseillers techniques dans les conditions prévues par les règles de fonctionnement de la commission paritaire nationale annexées au statut du personnel administratif des chambres de commerce et d'industrie. (...) " ; que par une décision du 11 mars 2014, la commission paritaire nationale (CPN) des chambres de commerce et d'industrie (CCI) a procédé à une modification du statut du personnel administratif des CCI, ci-après dénommé " statut ", en particulier de l'annexe 1 de l'article 6 du statut, ayant pour objet, d'une part, de limiter à douze pour chacune des délégations patronale et syndicale le nombre de conseillers techniques admis en CPN, et d'autre part, de définir la qualité des conseillers techniques, qui, pour la délégation des présidents, doivent être choisis parmi les présidents, membre des bureaux, directeurs généraux, directeurs généraux adjoints, directeurs en charge des ressources humaines de la CCI France et des CCI de France, et, pour la délégation syndicale parmi les agents des CCI ayant la capacité d'électeur aux élections professionnelles ;

Sur la légalité externe de la décision attaquée :

3. Considérant, en premier lieu, que les dispositions de l'article 5.1 de l'annexe 1 de l'article 6 du statut ont pour seul objet de déterminer l'ordre d'examen des questions inscrites à l'ordre du jour des réunions de la CPN ; qu'elles n'ont ni pour objet ni pour effet de priver cette commission de la possibilité d'adopter un texte rejeté par une délégation à l'occasion des réunions préparatoires ; que, par suite, la circonstance que les membres de la délégation du personnel appartenant à la CFE-CGC se soient opposés, lors de réunions préparatoires, à l'adoption du projet qui leur était présenté, est, en elle-même, sans incidence sur la régularité de la décision attaquée ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 4.3 de l'annexe 1 de l'article 6 du statut : " La délégation qui demande l'inscription à l'ordre du jour d'un projet de texte modificatif des règles statutaires doit présenter aux autres membres et au service de tutelle une proposition écrite une semaine avant la tenue de la réunion préparatoire à la CPN. / Tout projet de texte modifiant le Statut proposé au vote en CPN doit impérativement avoir fait l'objet d'une discussion en réunion préparatoire et être finalisé " ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le projet de texte modifiant le statut du personnel proposé au vote en CPN le 11 mars 2014 aurait traité de questions nouvelles, différentes de celles qui ont fait l'objet, notamment, d'une discussion lors des réunions préparatoires des 10 septembre et 27 novembre 2013 ; que si la CFE-CGC soutient qu'aucune proposition écrite n'aurait été adressée aux membres de la CPN avant la réunion préparatoire du 27 novembre, le document distribué lors de cette séance reprenait, en substance, les éléments déjà débattus le 10 septembre ; que, par suite, le moyen tiré de ce que ces dispositions auraient été méconnues doit être écarté ;

5. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 3.1 de l'annexe 1 de l'article 6 du statut : " (...) à la demande d'une ou plusieurs délégations, des réunions supplémentaires dites " CPN extraordinaires " peuvent se tenir dans les conditions prévues ci-dessous " ; qu'aux termes de l'article 3.3.2 de cette même annexe : " La ou les délégations(s) qui demande(nt) une réunion " extraordinaire " de la CPN, adresse(nt) à la tutelle une proposition d'ordre du jour. La tutelle communique sous huitaine cette proposition à la ou aux autres(s) délégations(s) qui dispose(nt) elle(s)-même(s) de 8 jours pour faire connaître les ajouts éventuels à l'ordre du jour qu'elle(s) souhaite(nt). Ces ajouts font l'objet d'un vote en début de la CPN " ; que contrairement à ce que soutient la requérante, il ne résulte pas de ces dispositions que la convocation d'une réunion extraordinaire soit subordonnée à la justification, par la délégation qui demande la réunion extraodinaire de la CPN, d'un motif d'intérêt général ; que la CFE-CGC n'apporte aucun élément à l'appui de ses allégations relatives au non-respect des délais prévus par l'article 3.3.2 ; qu'elle ne saurait utilement invoquer une méconnaissance de la procédure prévue à l'article 3.3.1, lequel est relatif aux réunions " ordinaires " de la CPN ;

6. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 5.2 de l'annexe 1 de l'article 6 : " Les votes ont lieu par délégation. La délégation des présidents représente six voix. Les délégations des organisations syndicales représentent six voix réparties au prorata du nombre de membres de chacune des délégations. Le président de la CPN dispose notamment de la faculté de participer au vote (...) " : qu'il ressort des pièces du dossier que la décision contestée a été adoptée par onze voix contre une, le président s'étant abstenu ; que, compte tenu du mécanisme de vote par délégation, les six voix de la délégation des présidents ont été prises en compte, alors même que deux membres de ladite délégation étaient absents lors du vote ; qu'en l'absence de disposition expresse fixant le quorum, la CPN a pu valablement délibérer dès lors qu'il ressort des pièces du dossier que plus de la moitié des membres de la CPN étaient présents lors de la réunion ;

7. Considérant, en cinquième lieu, que les conseillers techniques ne sont pas membres de la CPN ; qu'en vertu des dispositions précitées de l'article A. 711-1 du code de commerce, il appartient à celle-ci de déterminer les conditions dans lesquelles ils peuvent accompagner les délégations ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la CPN n'a pas compétence pour modifier les règles relatives à sa composition ne peut être utilement soulevé à l'encontre de la décision de modifier le nombre et la qualité des conseillers techniques ;

Sur la légalité interne de la décision attaquée :

En ce qui concerne le nombre de conseillers techniques susceptibles d'accompagner les délégations ;

8. Considérant que les modifications portant sur le nombre de conseillers techniques de la délégation syndicale à la CPN ont pour objet de les répartir au prorata du nombre de sièges obtenus lors des dernières élections par chacune des organisations syndicales ; que cette différence de traitement entre organisations syndicales, s'agissant, au demeurant, de fonctions facultatives, est justifié par une différence de situation entre ces dernières résultant des résultats aux élections professionnelles ; que par suite, la décision contestée, en tant qu'elle porte sur le nombre de conseillers techniques au sein de la CPN, n'est pas constitutive d'une rupture d'égalité entre organisations syndicales représentatives, ni d'une atteinte à la liberté syndicale ; que la seule circonstance que la CFE-CGC Réseaux consulaires perde deux conseillers techniques alors que les autres organisations syndicales représentatives maintiennent ou augmentent le nombre de leurs conseillers techniques, ne saurait suffire à établir une discrimination à l'égard de la CFE-CGC Réseaux consulaires ;

En ce qui concerne l'exigence que les conseillers techniques aient la qualité d'électeurs aux élections professionnelles :

9. Considérant qu'en décidant que seuls les électeurs aux élections professionnelles pourraient désormais, en principe, exercer les fonctions de conseillers techniques, la CPN s'est fondée sur l'intérêt qui s'attache à ce qu'une telle mission soit exercée, eu égard à son objet, par des agents des chambres ; qu'une telle décision, qui réserve d'ailleurs la possibilité que les délégations puissent également choisir des conseillers techniques n'appartenant pas aux CCI, n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation ; que le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi ;

En ce qui concerne l'exclusion des directeurs généraux de la fonction de conseiller technique :

10. Considérant qu'aux termes de l'article R. 711-70 du code de commerce : " (...) Les services des chambres de commerce et d'industrie territoriales sont dirigés par un directeur général, nommé par le président de la chambre territoriale après consultation du bureau de la chambre concernée et avis conforme du président de la chambre de région à laquelle cette chambre est rattachée. Il est placé sous l'autorité du président de la chambre territoriale. (...) Sous l'autorité du président, dans le cadre des orientations définies par l'établissement consulaire et dans le respect du règlement intérieur, le directeur général est seul chargé de l'animation de l'ensemble des services ainsi que du suivi de leurs activités, de la réalisation de leurs objectifs et du contrôle de leurs résultats dont il rend compte au président. Le directeur général assiste les membres élus dans l'exercice de leurs fonctions. A ce titre, il informe les élus des conditions de régularité dans lesquelles les décisions doivent être prises. Il a la charge de leur mise en oeuvre et contrôle la régularité de toutes les opérations correspondantes. (...) Le directeur général est astreint au devoir de réserve et, dans l'exercice de ses fonctions, au principe de neutralité " ; que compte-tenu des fonctions exercées auprès des présidents et de leur devoir de réserve, les directeurs généraux sont placés dans une situation différente de celle des autres agents des CCI ; que la modification contestée, qui limite à la délégation des présidents la possibilité de se faire assister de directeurs généraux, n'est pas constitutive d'une rupture d'égalité entre les délégations des présidents et des syndicats de la CPN ; que le syndicat requérant n'établit pas en quoi les modifications ainsi apportées seraient constitutives d'une discrimination à son égard ; que ces modifications ne portent pas atteinte à la liberté syndicale ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la requête de la CFE-CGC Réseaux consulaires doit être rejetée, y compris ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

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Article 1er : L'intervention du syndicat des directeurs généraux des établissements du réseau des chambres de commerce et d'industrie est admise.

Article 2 : La requête de la CFE-CGC Réseaux consulaires est rejetée.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la CFE-CGC Réseaux consulaires, au syndicat des directeurs généraux des établissements du réseau des chambres de commerce et d'industrie et au ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique.


Synthèse
Formation : 7ème ssjs
Numéro d'arrêt : 380106
Date de la décision : 23/12/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 23 déc. 2015, n° 380106
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Vincent Montrieux
Rapporteur public ?: M. Olivier Henrard

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2015:380106.20151223
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