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07/12/2015 | FRANCE | N°373381

France | France, Conseil d'État, 5ème ssjs, 07 décembre 2015, 373381


Vu la procédure suivante :

Par une décision n°373381 du 9 juillet 2014, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a prononcé l'admission des conclusions du pourvoi du Syndicat mixte interdépartemental d'aménagement et de mise en valeur du Vidourle et de ses affluents (SIAV) dirigées contre l'arrêt n°13MA00831 de la cour administrative d'appel de Marseille du 19 septembre 2013 en tant que cet arrêt fixe le montant de l'indemnité due aux époux B...par le syndicat pour les préjudices subis par leur propriété, le Mas du Bornier.

A l'appui de ces conclusions, le SIAV

soutient que la cour administrative d'appel :

- a entaché son arrêt d'ins...

Vu la procédure suivante :

Par une décision n°373381 du 9 juillet 2014, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a prononcé l'admission des conclusions du pourvoi du Syndicat mixte interdépartemental d'aménagement et de mise en valeur du Vidourle et de ses affluents (SIAV) dirigées contre l'arrêt n°13MA00831 de la cour administrative d'appel de Marseille du 19 septembre 2013 en tant que cet arrêt fixe le montant de l'indemnité due aux époux B...par le syndicat pour les préjudices subis par leur propriété, le Mas du Bornier.

A l'appui de ces conclusions, le SIAV soutient que la cour administrative d'appel :

- a entaché son arrêt d'insuffisance de motivation, de dénaturation et d'erreur de droit en indemnisant les consorts B...au titre de la perte de valeur vénale de leur propriété, sans répondre à l'argumentation tirée de ce que leur bâtiment, situé en amont de la zone de déversement, n'avait subi aucune inondation après 2003, et alors que les intéressés n'avaient pas cherché à vendre leur bien, en sorte que le préjudice résultant de la perte de valeur vénale ne présentait pas un caractère certain, et que leurs conclusions relatives à la perte de la valeur vénale étaient nouvelles en appel et, par suite, irrecevables ;

- dénaturé les faits soumis à son appréciation ou commis une erreur de droit en retenant un préjudice de 11 000 euros pour les troubles dans les conditions d'existence résultant de la crainte d'être surexposé au risque d'inondation, alors que les requérants n'étayaient pas leurs prétentions sur ce point.

Par un mémoire en défense, enregistré le 16 septembre 2014, M. et Mme B..., concluent au rejet du pourvoi et à ce qu'une somme de 5 000 euros soit mise à la charge du SIAV au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ils soutiennent que les moyens du pourvoi ne sont pas fondés.

Par un mémoire en réplique, enregistré le 10 juin 2015, le SIAV maintient les conclusions de son pourvoi par les mêmes moyens.

Par un nouveau mémoire, enregistré le 21 juillet 2015, M. et Mme B...maintiennent leurs précédentes conclusions.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Lionel Collet, conseiller d'Etat,

- les conclusions de Mme Laurence Marion, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Lyon-Caen, Thiriez, avocat du syndicat mixte interdépartemental d'aménagement du Vidourle et à la SCP Delvolvé, avocat de M. et MmeB... ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 10 novembre 2015 présentée par le SIAV ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 12 novembre, présentée par M. et Mme B... ;

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'à la suite d'une crue survenue en septembre 2002 le syndicat mixte interdépartemental d'aménagement et de mise en valeur du Vidourle et de ses affluents (SIAV) a procédé à la réfection des digues du Vidourle qui avaient été endommagées ; qu'estimant que ces travaux avaient accru l'exposition de leur propriété au risque d'inondation, M. et Mme B...ont demandé au tribunal administratif de Nîmes de condamner le syndicat, d'une part, à leur verser des dommages-intérêts et, d'autre part, à prendre en charge des travaux de protection contre le risque d'inondation ou, à défaut, à leur allouer une indemnité à raison de la perte de valeur vénale de leurs biens ; que cette demande a été rejetée par un jugement du 11 mars 2008 au motif que la responsabilité du syndicat n'était pas engagée ; que, par un arrêt rendu le 19 septembre 2013 après annulation par le Conseil d'Etat statuant au contentieux d'un arrêt du 12 mai 2011, la cour administrative d'appel de Marseille a annulé le jugement et condamné le syndicat à verser aux intéressés une indemnité de 270 048,34 euros, dont 250 000 euros au titre de la perte de valeur vénale de leur propriété et 11 000 au titre de troubles dans leurs conditions d'existence ; que, par une décision du 9 juillet 2014, le Conseil d'Etat a admis le pourvoi présenté par le SIAV contre cet arrêt, en tant seulement qu'après avoir annulé le jugement du tribunal administratif et admis le principe de la responsabilité du syndicat il fixe le montant de l'indemnité mise à la charge de celui-ci ;

Sur l'indemnité mise à la charge du SIAV au titre d'une perte de valeur vénale de la propriété de M. et MmeB... :

2. Considérant, d'une part, que, contrairement à ce que soutient le SIAV, la cour administrative d'appel n'a pas commis d'erreur de droit en regardant la perte de valeur vénale de la propriété de M. et Mme B...résultant d'une exposition accrue aux risques d'inondation comme un préjudice leur ouvrant droit à réparation, même en l'absence de mise en vente de leur bien ; que c'est par une appréciation souveraine exempte de dénaturation que la cour, dont l'arrêt est suffisamment motivé sur ce point, a admis le caractère certain de cette perte de valeur vénale ;

3. Considérant, d'autre part, qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, dans leur requête devant le tribunal administratif, M. et Mme B... ont demandé que soit mis à la charge du SIAV le versement d'une provision de 74 000 euros au titre des travaux nécessaires pour protéger leur propriété contre les inondations, et que, dans l'hypothèse où la réalisation de travaux s'avérerait impossible, ils devraient être indemnisés de la perte de valeur vénale de la propriété ; qu'ils devaient ainsi être regardés comme présentant, à titre alternatif, des conclusions tendant à l'octroi d'une indemnité au titre d'une perte de valeur vénale ; que si ces conclusions n'étaient pas chiffrées, le tribunal administratif, eu égard aux dispositions de l'article R. 612-1 du code de justice administrative et en l'absence d'une fin de non-recevoir opposée par la partie adverse, n'aurait pu les rejeter pour ce motif qu'après avoir invité les requérants à préciser le montant sollicité ; que le tribunal ayant rejeté l'ensemble des conclusions dont il était saisi au motif que la responsabilité du SIAV n'était pas engagée, sans avoir à procéder à cette invitation, les intéressés ont pu valablement indiquer pour la première fois devant la cour administrative d'appel le montant qu'ils sollicitaient au titre de la perte de valeur vénale ; que, par suite, le moyen tiré de ce qu'en leur accordant une indemnité à ce titre, pour un montant excédant celui demandé en première instance, la cour aurait fait droit à des conclusions irrecevables doit être écarté ;

Sur l'indemnité réparant les troubles subis par les intéressés dans leurs conditions d'existence :

4. Considérant que par l'arrêt attaqué, la cour administrative d'appel de Marseille a accordé 11 000 euros à M. et Mme B...en raison de troubles dans leurs conditions d'existence ; qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, pour justifier avoir subi de tels troubles, les requérants avaient fait état tant des inondations survenues que des craintes liées à l'exposition de leur propriété à des risques accrus ; que la cour, qui a porté sur les faits qui lui étaient soumis une appréciation souveraine exempte de dénaturation, n'a pas commis d'erreur de droit en indemnisant ce chef de préjudice ;

Sur l'indemnité allouée au titre de frais d'expertise :

5. Considérant que l'arrêt attaqué met à la charge du SIAV, d'une part, des indemnités de 1 810,86 euros et 2 381,63 euros au titre des frais exposés par M. et Mme B...pour faire réaliser des expertises et, d'autre part, au titre des dépens, les frais d'une expertise ordonnée en référé, taxés et liquidés à la somme de 4 202,30 euros ; que, contrairement à ce que soutient le syndicat requérant, ces sommes ne correspondent pas aux mêmes opérations ; que le moyen tiré de ce que le syndicat aurait été condamné à payer une somme qu'il ne devait pas doit donc être écarté ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le SIAV n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ; que ses conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par suite, qu'être rejetées ; qu'il y a lieu dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du SIAV la somme de 3 000 euros à verser à M. et MmeB..., au titre des mêmes dispositions ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi du SIAV est rejeté.

Article 2 : Le SIAV versera la somme de 3 000 euros à M. et MmeB....

Article 3 : La présente décision sera notifiée au Syndicat mixte interdépartemental d'aménagement du Vidourle, à M. A... B...et Mme D... C..., épouseB....


Synthèse
Formation : 5ème ssjs
Numéro d'arrêt : 373381
Date de la décision : 07/12/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 07 déc. 2015, n° 373381
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Lionel Collet
Rapporteur public ?: Mme Laurence Marion
Avocat(s) : SCP LYON-CAEN, THIRIEZ ; SCP DELVOLVE

Origine de la décision
Date de l'import : 17/12/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2015:373381.20151207
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