Vu la procédure suivante :
M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 30 octobre 2009 par laquelle le garde des sceaux, ministre de la justice, a refusé d'agréer son projet de cession de l'office d'huissier de justice dont il était titulaire à Saint-Martin d'Hères, en tant que le prix de cession s'élevait à 140 000 euros, et de condamner l'Etat à lui verser une indemnité de 32 000 euros à raison du préjudice résultant de l'illégalité de cette décision, ainsi qu'une indemnité de 15 000 euros à raison du préjudice résultant des négligences commises par le ministre dans le suivi de la demande de nomination de son successeur.
Par un jugement n° 1005080 du 4 juillet 2013, le tribunal administratif de Grenoble a annulé la décision du 30 octobre 2009 du garde des sceaux, ministre de la justice, et rejeté le surplus de ses conclusions.
Par une ordonnance n° 13LY02577 du 27 mars 2014, le président de la 6ème chambre de la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté l'appel formé par M. A...contre ce jugement, en tant qu'il a rejeté le surplus de ses conclusions.
Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un nouveau mémoire, enregistrés les 26 mai et 26 août 2014 et le 19 octobre 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A...demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cette ordonnance ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à ses conclusions d'appel et de rejeter l'appel incident formé par le garde des sceaux, ministre de la justice contre le même jugement, en tant qu'il a annulé sa décision du 30 octobre 2009 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 7 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de justice administrative.
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Cyrille Beaufils, auditeur,
- les conclusions de M. Xavier de Lesquen, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Garreau, Bauer-Violas, Feschotte-Desbois, avocat de M. A...;
1. Considérant qu'aux termes de l'article R. 811-2 du code de justice administrative : " Sauf disposition contraire, le délai d'appel est de deux mois. Il court contre toute partie à l'instance à compter du jour où la notification a été faite à cette partie dans les conditions prévues aux articles R. 751-3 à R. 751-4-1 (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 751-3 du même code : " Sauf disposition contraire, les décisions sont notifiées le même jour à toutes les parties en cause et adressées à leur domicile réel, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, sans préjudice du droit des parties de faire signifier ces décisions par acte d'huissier de justice. " ;
2. Considérant qu'en vertu de ces dispositions combinées, le délai d'appel, de deux mois, court pour chaque partie à compter du jour où le jugement lui a été notifié à son domicile réel par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ; que l'adresse du domicile réel correspond à celle indiquée par les parties dans leur mémoire introductif d'instance sauf si, dans une correspondance ultérieure à celui-ci et antérieure à la notification, elles ont mentionné de manière explicite leur changement d'adresse ;
3. Considérant que le président de la 6ème chambre de la cour administrative d'appel de Lyon a jugé que l'appel formé par M. A...contre le jugement du tribunal administratif de Grenoble du 4 juillet 2013 était tardif, en se fondant sur le délai d'appel courant à compter de la première notification adressée à l'intéressé par le greffe du tribunal administratif de Grenoble ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier soumis aux juges du fond, que par une lettre du 8 janvier 2013, M. A...avait fait connaître à ce greffe sa nouvelle adresse ; qu'après avoir transmis une première notification à l'adresse initiale de l'intéressé et reçu un pli portant la mention " destinataire inconnu à l'adresse ", ce greffe a procédé à une seconde notification à sa nouvelle adresse ; que M. A...est fondé à soutenir qu'en retenant que le délai d'appel à son égard courait à compter de la première notification, alors que celle-ci n'avait pas été régulière, faute de tenir compte du changement d'adresse qu'il avait signalé, l'ordonnance attaquée a méconnu les dispositions citées au point 1 ;
4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le requérant est fondé à demander l'annulation de l'ordonnance qu'il attaque ;
5. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
D E C I D E :
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Article 1er : L'ordonnance du 27 mars 2014 du président de la 6ème chambre de la cour administrative d'appel de Lyon est annulée.
Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Lyon.
Article 3 : L'Etat versera à M. A...la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. B...A...et à la garde des sceaux, ministre de la justice.