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23/10/2015 | FRANCE | N°381916

France | France, Conseil d'État, 8ème ssjs, 23 octobre 2015, 381916


Vu la procédure suivante :

La Société immobilière du logement de l'Eure (SILOGE) a demandé au tribunal administratif de Rouen de prononcer la réduction des cotisations de taxe foncière sur les propriétés bâties auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2011 dans les rôles de la commune de Brionne (Eure) à raison de deux immeubles qu'elle y possède. Par un jugement n° 1202545 du 24 avril 2014, le tribunal administratif a rejeté cette demande.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 30 juin et 30 septembre 2014 au secr

tariat du contentieux du Conseil d'Etat, la SILOGE demande au Conseil d'Etat :
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Vu la procédure suivante :

La Société immobilière du logement de l'Eure (SILOGE) a demandé au tribunal administratif de Rouen de prononcer la réduction des cotisations de taxe foncière sur les propriétés bâties auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2011 dans les rôles de la commune de Brionne (Eure) à raison de deux immeubles qu'elle y possède. Par un jugement n° 1202545 du 24 avril 2014, le tribunal administratif a rejeté cette demande.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 30 juin et 30 septembre 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la SILOGE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'article 2 de ce jugement ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa demande dans la limite des sommes non dégrevées en cours d'instance ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la construction et de l'habitation ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jean-Marc Anton, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Benoît Bohnert, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Piwnica, Molinié, avocat de la Société Immobilière du Logement de l'Eure (SILOGE) ;

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que la SILOGE a fait réaliser au cours des années 2009 et 2010 sur deux immeubles situés dans la commune de Brionne des travaux de menuiseries extérieures par la société Cuiller, d'étanchéité et d'isolation des toitures terrasses par la société SOPREMA et de chauffage et ventilation par la société La Maison du sanitaire pour un montant total de 599 442,56 euros ; qu'elle s'est acquittée de la somme de 590 416,93 euros au cours des années 2009 et 2010, le solde correspondant à une retenue de garantie ayant été versé à la société La maison du Sanitaire au cours de l'année 2011 ; que, par réclamation en date du 26 décembre 2011, elle a sollicité pour les cotisations de taxe foncière auxquelles elle a été assujettie à raison de ces deux immeubles au titre de l'année 2011 le bénéfice du dégrèvement prévu à l'article 1391 E du code général des impôts à raison des travaux d'économie d'énergie effectués ; qu'après le rejet de sa réclamation, l'administration a, par décision intervenue en cours d'instance devant le tribunal administratif de Rouen, prononcé le dégrèvement à hauteur de 59 588 euros de ces cotisations ; que la société se pourvoit en cassation contre l'article 2 du jugement du 24 avril 2014 par lequel le tribunal administratif, après avoir jugé qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur ses conclusions à concurrence de ce dégrèvement, a rejeté le surplus des conclusions de sa demande ;

Sur l'étendue du litige :

2. Considérant que, par une décision en date du 21 avril 2015 postérieure à l'introduction du pourvoi, l'administration a prononcé le dégrèvement des cotisations de taxe foncière sur les propriétés bâties en litige pour la somme de 57 008 euros au titre de l'année 2011 correspondant au quart des dépenses de 82 742 euros payées en 2010 à raison de travaux de chauffage et de ventilation et des dépenses de 145 289 euros payées la même année à raison de travaux d'étanchéité et d'isolation ; que, par suite, les conclusions du pourvoi sont, à concurrence de cette somme, devenues sans objet ; qu'il n'y a pas lieu, dans cette mesure, d'y statuer ;

Sur le surplus des conclusions du pourvoi :

3. Considérant qu'aux termes de l'article 1391 E du code général des impôts dans sa rédaction applicable à l'imposition en litige : " Il est accordé sur la cotisation de taxe foncière sur les propriétés bâties afférente à des immeubles affectés à l'habitation, appartenant aux organismes d'habitations à loyer modéré visés à l'article L. 411-2 du code de la construction et de l'habitation ou aux sociétés d'économie mixte ayant pour objet statutaire la réalisation ou la gestion de logements, ainsi qu'aux organismes mentionnés à l'article L. 365-1 du même code, un dégrèvement égal au quart des dépenses payées, à raison des travaux d'économie d'énergie visés à l'article L. 111-10 du même code au cours de l'année précédant celle au titre de laquelle l'imposition est due (...) " ;

4. Considérant, d'une part, que si la SILOGE soutient que le tribunal administratif a commis une erreur de droit en lui refusant le bénéfice de ces dispositions au titre des dépenses payées à la société Cuiller à raison de la fourniture et des travaux de pose de stores au motif que les attestations qu'elles avaient présentées n'établissaient pas que ces travaux étaient éligibles au dégrèvement, le moyen manque en fait, le tribunal administratif n'ayant opposé ce motif que pour les travaux d'étanchéité des toitures terrasses ;

5. Considérant, d'autre part, que toute somme versée par un organisme d'habitations à loyer modéré pour l'exécution d'un marché de travaux d'économie d'énergie visés à l'article L. 111-10 du code de la construction et de l'habitation, et venant en déduction du montant total de ce marché, a le caractère d'une dépense payée à raison de tels travaux au sens de l'article 1391 E du code général des impôts, que cette somme ne solde qu'une fraction de la facture ou qu'elle en constitue le règlement intégral ; qu'il ne résulte ni de ces dispositions ni des débats parlementaires ayant précédé leur adoption que le législateur aurait entendu exclure par principe de leur champ d'application le versement d'une somme versée à titre de paiement partiel, qui doit, dès lors, être retenue pour le calcul des dépenses payées que mentionnent ces dispositions ;

6. Considérant que pour rejeter les conclusions de la requête de la SILOGE relatives aux factures établies par La Maison du sanitaire pour le système de chauffage et la ventilation, le tribunal a jugé que les conditions de l'article 1391 E du code général des impôts n'étaient pas remplies au motif que la retenue de garantie n'avait été versée qu'au cours de l'année 2011 ; qu'en statuant ainsi, les premiers juges ont implicitement mais nécessairement entendu juger que seuls des travaux intégralement payés ouvrent droit à l'avantage fiscal, alors que les sommes versées à titre de paiement partiel ont le caractère de dépenses payées au sens de l'article 1391 E du code général des impôts ; que, ce faisant, le tribunal administratif a commis une erreur de droit ; que, par suite, la SILOGE est fondée à demander l'annulation de l'article 2 du jugement attaqué en tant qu'il n'a pas fait droit à sa demande de dégrèvement à raison de ces dépenses ;

7. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de régler l'affaire au fond dans cette mesure en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;

8. Considérant que, pour ouvrir droit au dégrèvement de l'article 1391 E du code général des impôts, les dépenses payées à raison des travaux d'économie d'énergie doivent être effectivement mises en paiement au cours de l'année civile précédant celle au titre de laquelle l'imposition est due ; que, par suite, si les sommes payées en 2009 par la SILOGE à la société La Maison du Sanitaire à hauteur de 87 508 euros étaient éligibles au dégrèvement prévu par cet article pour les cotisations de taxe foncière sur les propriétés bâties auxquelles la société a été assujettie au titre de l'année 2010, elles ne l'étaient pas pour les cotisations dues au titre de l'année 2011 ; que, dès lors, les conclusions de la demande de la société relatives à ces dépenses doivent être rejetées ;

9. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions du pourvoi de la SILOGE à concurrence des dégrèvements prononcés en cours d'instance.

Article 2 : L'article 2 du jugement du 24 avril 2014 du tribunal administratif de Rouen est annulé en tant qu'il a rejeté la demande de dégrèvement partiel de la cotisation de taxe foncière sur les propriétés bâties à laquelle la SILOGE a été assujettie pour l'immeuble en cause au titre de l'année 2011, à raison des sommes payées à la société La Maison du sanitaire.

Article 3 : Les conclusions de la demande de la SILOGE relatives au bénéfice du dégrèvement instauré par l'article 1391 E du code général des impôts à raison des sommes payées à la société La Maison du sanitaire sont rejetées.

Article 4 : L'Etat versera à la SILOGE la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions du pourvoi de la SILOGE est rejeté.

Article 6 : La présente décision sera notifiée à la Société Immobilière du Logement de l'Eure et au ministre des finances et des comptes publics.


Synthèse
Formation : 8ème ssjs
Numéro d'arrêt : 381916
Date de la décision : 23/10/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 23 oct. 2015, n° 381916
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Jean-Marc Anton
Rapporteur public ?: M. Benoît Bohnert
Avocat(s) : SCP PIWNICA, MOLINIE

Origine de la décision
Date de l'import : 21/06/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2015:381916.20151023
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