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29/07/2015 | FRANCE | N°391544

France | France, Conseil d'État, Juge des référés, 29 juillet 2015, 391544


Vu la procédure suivante :

Par une requête enregistrée le 6 juillet 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la Mutuelle des Etudiants (LMDE) demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, d'ordonner la suspension de l'exécution de la décision n° 2015-C-36 du 29 mai 2015 par laquelle le collège de supervision de l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) a prolongé de quatre mois la mission de l'administrateur provisoire qu'il avait désigné.

Elle soutien

t que :

- elle a qualité à agir dès lors que son vice-président reste stat...

Vu la procédure suivante :

Par une requête enregistrée le 6 juillet 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la Mutuelle des Etudiants (LMDE) demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, d'ordonner la suspension de l'exécution de la décision n° 2015-C-36 du 29 mai 2015 par laquelle le collège de supervision de l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) a prolongé de quatre mois la mission de l'administrateur provisoire qu'il avait désigné.

Elle soutient que :

- elle a qualité à agir dès lors que son vice-président reste statutairement habilité malgré la nomination d'un administrateur provisoire ;

- la condition d'urgence est remplie dès lors que le prolongement du placement sous administration provisoire porte atteinte à sa réputation et à son image ainsi qu'à ses relations avec ses partenaires et ses adhérents et compromet les adhésions pour la prochaine année universitaire ;

- il y a un doute sérieux quant à la légalité de la décision contestée ;

- l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) n'a pas suffisamment motivé sa décision dès lors que le collège n'a pris en compte ni la réalité de l'engagement d'Intériale de consentir une avance de trésorerie, ni la réalité et la date à laquelle Intériale sera en mesure de reprendre la gestion de la Mutuelle des Etudiants (LMDE) ;

- l'ACPR a commis une erreur de qualification juridique des faits dès lors que le collège n'a pas pris en compte les éléments nouveaux qui démontrent que la LMDE est en mesure d'assurer sa gestion dans des conditions normales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 22 juillet 2015, l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de la LMDE la somme de 3 500 euros en vertu de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que la condition d'urgence n'est pas remplie, que les moyens soulevés par la LMDE ne sont pas fondés.

Mme B...A..., administrateur provisoire de la LMDE, a présenté des observations, enregistrées le 21 juillet 2015.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code monétaire et financier ;

- le code de commerce ;

- le code de la mutualité ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir convoqué à une audience publique la Mutuelle des Etudiants et l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution ;

Vu le procès-verbal de l'audience publique du 27 juillet 2015 à 15h30 heures au cours de laquelle ont été entendus :

- Me de la Burgade, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de la LMDE ;

- les représentants de la LMDE ;

- Me Uzan-Sarano, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de l'ACPR ;

- les représentants de l'ACPR ;

1. Considérant que l'article L. 521-1 du code de justice administrative prévoit que le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution d'une décision administrative lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision contestée ;

2. Considérant qu'en vertu de l'article L. 612-1 du code monétaire et financier, l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution est une autorité administrative indépendante chargée de veiller " à la préservation de la stabilité du système financier et à la protection des clients, assurés, adhérents et bénéficiaires des personnes soumises à son contrôle " ; qu'elle dispose à cette fin de pouvoirs de police administrative déterminés par les articles L. 612-30 à L. 612-37 du code monétaire et financier ; qu'aux termes du I de l'article L. 612-34, elle peut " désigner un administrateur provisoire auprès d'une personne qu'elle contrôle, auquel sont transférés tous les pouvoirs d'administration, de direction et de représentation de la personne morale " ;

3. Considérant que la Mutuelle des Etudiants (LMDE), qui a succédé en 2000 à la Mutuelle nationale des étudiants de France (MNEF), est une société mutuelle régie par le livre II du code de la mutualité et placée sous le contrôle de l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) ; que ses résultats, constamment déficitaires depuis sa création, ont conduit à une situation financière gravement préoccupante ; qu'à la suite d'un contrôle sur place diligenté en janvier 2013, qui a fait apparaître des insuffisances dans la gestion de la mutuelle, l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution a recherché différentes mesures de rétablissement puis placé la LMDE sous surveillance spéciale le 21 novembre 2013 ; que, devant la persistance des difficultés, elle a désigné un administrateur provisoire pour une période d'un an, du 30 juin 2014 au 30 juin 2015 ; que l'administrateur provisoire a engagé, le 28 janvier 2015, une procédure de sauvegarde judiciaire qui a conduit le tribunal de grande instance de Créteil à ouvrir une période d'observation de six mois, du 9 février au 9 août 2015, et à désigner un administrateur judiciaire, chargé d'une mission de surveillance et de mandataire de justice ; qu'à la demande de ce dernier, le tribunal a, par jugement du 6 juillet 2015, prolongé de six mois la période d'observation ; que, par la décision du 29 mai 2015 dont la suspension est demandée, le collège de supervision de l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution a prolongé de quatre mois, jusqu'au 31 octobre 2015, la mission de l'administrateur provisoire qu'il avait désigné ;

4. Considérant que le moyen tiré de ce que la décision dont la suspension est demandée serait insuffisamment motivée n'est, au regard des termes mêmes de cette décision, pas de nature à créer un doute sérieux sur sa légalité ; que la légalité de la décision de prolonger de quatre mois la mission de l'administrateur provisoire s'apprécie au regard des circonstances de fait et de droit qui existaient à la date de cette décision ; que, si des mesures de redressement ont été engagées pour commencer à mettre en oeuvre les préconisations de l'administrateur provisoire, la situation financière de la LMDE continue d'être préoccupante ; que si le projet de reprise par la mutuelle Intériale de la gestion du régime complémentaire, qui s'accompagnerait d'une avance de trésorerie, a fait l'objet, postérieurement au demeurant à la décision contestée, d'un accord approuvé par l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution, il ne prend effet qu'au 1er janvier 2016 et qu'en tout cas à la date de la décision contestée, des incertitudes, qui ne sont d'ailleurs pas entièrement levées, subsistaient quant au versement de l'avance de trésorerie ; que, s'agissant du régime obligatoire, les perspectives de reprise par la Caisse nationale d'assurance-maladie des travailleurs salariés ne sont pas encore finalisées ; que l'estimation du passif de la LMDE par l'autorité judiciaire, dans le cadre de la procédure de sauvegarde en cours, n'est pas non plus achevée ; que, dans ces conditions, le moyen tiré de ce que l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution aurait inexactement apprécié la situation en estimant que la situation de la LMDE justifiait, dans l'intérêt public comme dans l'intérêt de ses adhérents, de prolonger de quatre mois, conformément d'ailleurs au souhait de l'administrateur judiciaire, la mission de l'administrateur provisoire n'est pas non plus de nature à faire naître, en l'état de l'instruction, un doute sérieux sur la légalité de la décision contestée ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'en l'absence de moyen propre à créer un doute sérieux sur la légalité de la décision dont la suspension est demandée la requête de la LMDE ne peut être accueillie ;

6. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre une somme à la charge de la LMDE au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

O R D O N N E :

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Article 1er : La requête de la Mutuelle des Etudiants est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à la Mutuelle des Etudiants et à l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution.


Synthèse
Formation : Juge des référés
Numéro d'arrêt : 391544
Date de la décision : 29/07/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 29 jui. 2015, n° 391544
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Avocat(s) : SCP ROCHETEAU, UZAN-SARANO

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2015:391544.20150729
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