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27/07/2015 | FRANCE | N°387159

France | France, Conseil d'État, 5ème ssjs, 27 juillet 2015, 387159


Vu la procédure suivante :

La Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a transmis au tribunal administratif de Cergy-Pontoise, en application des dispositions de l'article L. 52-15 du code électoral, la décision du 18 septembre 2014 par laquelle elle a rejeté le compte de campagne de M. B...A..., candidat tête de la liste " Persan c'est nous " aux élections municipales et communautaires qui se sont déroulées le 23 mars 2014 dans la commune de Persan (Val d'Oise). Par un jugement n° 1409977 du 19 décembre 2014, le tribunal administratif a conf

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Vu la procédure suivante :

La Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a transmis au tribunal administratif de Cergy-Pontoise, en application des dispositions de l'article L. 52-15 du code électoral, la décision du 18 septembre 2014 par laquelle elle a rejeté le compte de campagne de M. B...A..., candidat tête de la liste " Persan c'est nous " aux élections municipales et communautaires qui se sont déroulées le 23 mars 2014 dans la commune de Persan (Val d'Oise). Par un jugement n° 1409977 du 19 décembre 2014, le tribunal administratif a confirmé le rejet du compte de campagne de M.A..., a prononcé son inéligibilité pour une durée de 18 mois, l'a déclaré démissionnaire d'office de ses fonctions de conseiller municipal de Persan et a proclamé M. C...D...élu en qualité de conseiller municipal.

Par une requête, enregistrée le 15 janvier 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 400 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu :

- le code électoral ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Olivier Rousselle, conseiller d'Etat,

- les conclusions de Mme Fabienne Lambolez, rapporteur public ;

1. Considérant qu'il résulte de l'instruction que, par une décision du 18 septembre 2014, la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a rejeté le compte de campagne de M. A..., qui avait conduit la liste " Persan c'est nous " lors des opérations électorales qui se sont tenues le 23 mars 2014 pour la désignation des conseillers municipaux et communautaires de la commune de Persan (Val-d'Oise), en estimant qu'eu égard à l'importance des dépenses non déclarées par ce candidat, son compte ne pouvait être regardé comme comportant une description sincère des dépenses relatives à l'élection ; qu'en application des dispositions de l'article L. 52-15 du code électoral, la Commission a saisi le tribunal administratif de Cergy-Pontoise ; que celui-ci, par un jugement du 19 décembre 2014, a confirmé le rejet du compte de campagne de M.A..., a prononcé son inéligibilité pour une durée de dix-huit mois, l'a déclaré démissionnaire d'office de ses fonctions de conseiller municipal et a déclaré élu au conseil municipal de cette commune M.D..., premier candidat non élu de la liste qu'il avait conduite ; que M. A...relève appel de ce jugement ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 52-12 du code électoral : " Chaque candidat ou candidat tête de liste soumis au plafonnement prévu à l'article L. 52-11 et qui a obtenu au moins 1 % des suffrages exprimés est tenu d'établir un compte de campagne retraçant, selon leur origine, l'ensemble des recettes perçues et, selon leur nature, l'ensemble des dépenses engagées ou effectuées en vue de l'élection, hors celles de la campagne officielle par lui-même ou pour son compte, au cours de la période mentionnée à l'article L. 52-4. (...) Le candidat estime et inclut, en recettes et en dépenses, les avantages directs ou indirects, les prestations de services et dons en nature dont il a bénéficié. Le compte de campagne doit être en équilibre ou excédentaire et ne peut présenter un déficit. / Au plus tard avant 18 heures le dixième vendredi suivant le premier tour de scrutin, chaque candidat ou candidat tête de liste présent au premier tour dépose à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques son compte de campagne et ses annexes accompagné des justificatifs de ses recettes ainsi que des factures, devis et autres documents de nature à établir le montant des dépenses payées ou engagées par le candidat ou pour son compte. (...). " ; que le troisième alinéa de l'article L. 52-15 de ce même code dispose que, lorsque le compte de campagne a été rejeté, la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques saisit le juge de l'élection ; qu'aux termes de l'article L. 118-3 du code électoral : " Saisi par la commission instituée par l'article L. 52-14, le juge de l'élection peut prononcer l'inéligibilité du candidat dont le compte de campagne, le cas échéant après réformation, fait apparaître un dépassement du plafond des dépenses électorales. (...) / Il prononce également l'inéligibilité du candidat ou des membres du binôme de candidats dont le compte de campagne a été rejeté à bon droit en cas de volonté de fraude ou de manquement d'une particulière gravité aux règles relatives au financement des campagnes électorales. / L'inéligibilité prévue aux trois premiers alinéas du présent article est prononcée pour une durée maximale de trois ans et s'applique à toutes les élections. (...) " ;

3. Considérant qu'il résulte de l'instruction que le compte de campagne transmis le 30 mai 2014 à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques par M. A... faisait apparaître un montant total de dépenses de 769,85 euros pour des recettes déclarées de 2 305,40 euros ; que ce compte ne faisait pas mention d'une somme de 756 euros correspondant à l'impression de différents tracts ; que le montant ainsi omis représentait environ 98 % du montant total des dépenses déclarées par l'intéressé dans le compte déposé ;

4. Considérant que si, au cours de la procédure contradictoire devant la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, M.A... a reconnu l'omission de ces dépenses et a présenté, par l'intermédiaire de son expert-comptable, un compte de campagne rectifié, il est constant que le compte déposé par l'intéressé le 30 mai 2014, dans le délai qui lui était imparti, n'intégrait pas l'ensemble des dépenses engagées au titre de sa campagne et facturées avant le dépôt de ce compte ; que, dès lors que les dépenses d'impression de 756 euros ne figuraient pas dans le compte de campagne déposé le 30 mai 2014, l'unique moyen soulevé par M. A...à l'appui de son appel, tiré de ce que l'irrégularité qui lui est reprochée s'expliquerait par une simple erreur d'imputation comptable commise par son mandataire financier, manque en fait ; qu'il suit de là que ce compte de campagne était entaché d'un défaut de sincérité ; que compte tenu de la nature des dépenses en cause et de leur montant, qui n'était pas modique, et eu égard au caractère substantiel de l'obligation méconnue ainsi qu'à l'absence d'ambiguïté des règles applicables, c'est à bon droit que la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a rejeté le compte de campagne de M. A... ; que celui-ci n'est, dès lors, pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a confirmé ce rejet ;

5. Considérant que, compte tenu des montants en cause, de la nature de la règle qui a été méconnue et des circonstances de l'espèce rappelées ci-dessus, M. A...doit être regardé comme ayant commis un manquement d'une particulière gravité aux règles relatives au financement des campagnes électorales ; que, par suite, M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif l'a déclaré inéligible, l'a déclaré démissionnaire d'office de son mandat de conseiller municipal et a proclamé M. D... élu en qualité de conseiller municipal ; que, toutefois, la période d'inéligibilité, fixée à dix-huit mois par le tribunal administratif, doit être ramenée à un an ; que cette période commencera à courir à compter de la date de la présente décision ; que M. A...est fondé à demander que le jugement du tribunal administratif soit réformé sur ce point ;

6. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme demandée par M. A...au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : M. A...est déclaré inéligible pendant un an à compter de la date de la présente décision.

Article 2 : Le jugement du 19 décembre 2014 du tribunal administratif de Cergy-Pontoise est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A...est rejeté.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. B...A..., à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques et à M. C...D....

Copie pour information en sera adressée au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 5ème ssjs
Numéro d'arrêt : 387159
Date de la décision : 27/07/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 27 jui. 2015, n° 387159
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Olivier Rousselle
Rapporteur public ?: Mme Fabienne Lambolez

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2015:387159.20150727
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