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10/07/2015 | FRANCE | N°369454

France | France, Conseil d'État, 6ème / 1ère ssr, 10 juillet 2015, 369454


Par une requête sommaire, un mémoire complémentaire et un nouveau mémoire, enregistrés les 18 juin 2013, 18 septembre 2013 et 19 juin 2015, au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. O... B... F... demande au Conseil d'Etat d'annuler la décision du 16 avril 2013 par laquelle la commission des sanctions de l'Autorité des marchés financiers a prononcé à son encontre une sanction pécuniaire de 200 000 euros et décidé de publier cette sanction sur son site internet.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la directive 2003/6/CE du Parlement européen

et du Conseil du 28 janvier 2003 ;

- le code des marchés financiers ;

- le règ...

Par une requête sommaire, un mémoire complémentaire et un nouveau mémoire, enregistrés les 18 juin 2013, 18 septembre 2013 et 19 juin 2015, au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. O... B... F... demande au Conseil d'Etat d'annuler la décision du 16 avril 2013 par laquelle la commission des sanctions de l'Autorité des marchés financiers a prononcé à son encontre une sanction pécuniaire de 200 000 euros et décidé de publier cette sanction sur son site internet.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la directive 2003/6/CE du Parlement européen et du Conseil du 28 janvier 2003 ;

- le code des marchés financiers ;

- le règlement général de l'Autorité des marchés financiers ;

- la décision du 13 septembre 2013 par laquelle le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a jugé qu'il n'y avait pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par M. B...F...;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jean-Baptiste de Froment, maître des requêtes,

- les conclusions de Mme Suzanne von Coester, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Spinosi, Sureau, avocat de M. B...F...et à la SCP Vincent, Ohl, avocat de l'Autorité des marchés financiers ;

1. Considérant que, par la décision attaquée du 16 avril 2013, la commission des sanctions de l'Autorité des marchés financiers (AMF) a infligé à M. B...F...une sanction pécuniaire de 200 000 euros pour avoir recommandé à deux personnes, dans l'exercice de ses fonctions de président d'une banque d'affaires et sur la base d'une information privilégiée dont il était détenteur, de céder leurs titres de la société Transgène, avec publication sur le site internet de l'AMF, sous une forme préservant l'anonymat de l'intéressé ;

Sur la régularité de la procédure :

2. Considérant que si le requérant soutient qu'il n'a pas eu accès avant son audition par le rapporteur, le 11 janvier 2013, à quatre fichiers informatiques du dossier d'enquête, qui avaient fait l'objet d'un cryptage par des mots de passe, il résulte de l'instruction que ces fichiers contenaient des extraits des relevés des communications téléphoniques de M. B... F..., indiquant les numéros appelés et la durée des appels ; que M. B...F...a eu accès à une version papier des documents au plus tard le 11 janvier 2013, lors de son audition, au cours de laquelle ces documents lui ont été présentés, et a été en mesure de produire des observations à leur sujet jusqu'au 8 février 2013, date de clôture de l'enquête ; que, dans ces conditions, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision litigieuse aurait été prise en méconnaissance du caractère contradictoire de la procédure et des droits de la défense ;

Sur le bien-fondé de la décision attaquée :

3. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société anonyme Transgène, spécialisée dans la biopharmaceutique et cotée en bourse, avait pour banquier conseil M. O... B...F..., président de la banque d'affaire Bryan B...et co Limited ; que Transgène développait notamment depuis 2007 un produit de traitement de certaines maladies sous contrat de licence exclusif avec la société Roche ; qu'à la fin de l'année 2010, la société Roche a décidé de résilier ce contrat de licence au vu des résultats jugés insuffisants du partenariat avec la société Transgène ; que cette résiliation a été notifiée à la société Transgène le 17 février 2011 et que cette dernière a rendu publique cette information le 22 février 2011 ; qu'ayant observé des mouvements de ventes suspects sur le titre Transgène, l'Autorité des marchés financiers a ouvert une enquête portant sur le marché du titre et sur l'information financière de la société Transgène ; que l'enquête a permis d'établir que M. B...F...a appelé le 1er février 2011 M.A..., directeur général d'une société suisse dont il était un ancien associé ; que, moins de dix minutes après cet appel, M. A...a passé un ordre de vente sur ses titres Transgène et qu'il a vendu entre le 1er et le 4 février la totalité des 50 000 titres qu'il détenait, évitant ainsi une perte de 165 000 euros par rapport au cours du 23 février 2011 ; que l'enquête a aussi permis d'établir que le requérant a contacté le 8 février 2011 M.D..., directeur d'une société suisse, lequel a, immédiatement après leur conversation, transmis un ordre de vente sur des titres Transgène et vendu entre le 9 et 22 février 2011 plus de 46 000 titres, évitant ainsi une perte de 137 248 euros par rapport au cours du 23 février 2011 ; que, par la décision attaquée, la commission des sanctions de l'AMF a estimé, en premier lieu, que l'information relative à la décision de la société Roche de résilier le contrat de licence conclu avec la société Transgène était précise, non publique et susceptible d'avoir une influence sur le cours du titre au sens de l'article 621-1 du règlement général de l'AMF et avait ainsi le caractère d'une information privilégiée, en deuxième lieu, que cette information privilégiée avait été portée à la connaissance du requérant au plus tard lors de la réunion qu'il a tenue le 25 janvier 2011 avec le président directeur général de Transgène, en troisième lieu, que le requérant, détenteur de l'information privilégiée, avait recommandé à MM. A...et D...de vendre rapidement leurs titres Transgène ;

En ce qui concerne le manquement de recommandation donnée à un tiers sur la base d'une information privilégiée :

4. Considérant qu'aux termes du I de l'article L. 621-14 du code monétaire et financier, dans sa rédaction applicable au litige : " Le collège peut, après avoir mis la personne concernée en mesure de présenter ses explications, ordonner qu'il soit mis fin, en France et à l'étranger, aux manquements aux obligations résultant des dispositions législatives ou réglementaires ou des règles professionnelles visant à protéger les investisseurs contre les opérations d'initiés, les manipulations de cours et la diffusion de fausses informations, ou à tout autre manquement de nature à porter atteinte à la protection des investisseurs ou au bon fonctionnement du marché. (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 621-15 du même code : " La commission des sanctions peut, après une procédure contradictoire, prononcer une sanction à l'encontre des personnes suivantes : / (....) /c) Toute personne qui, sur le territoire français ou à l'étranger, s'est livrée ou a tenté de se livrer à une opération d'initié ou s'est livrée à une manipulation de cours, à la diffusion d'une fausse information ou à tout autre manquement mentionné au premier alinéa du I de l'article L. 621-14, dès lors que ces actes concernent : / - un instrument financier ou un actif mentionné au II de l'article L. 421-1 admis aux négociations sur un marché réglementé ou sur un système multilatéral de négociation qui se soumet aux dispositions législatives ou réglementaires visant à protéger les investisseurs contre les opérations d'initiés, les manipulations de cours et la diffusion de fausses informations, ou pour lequel une demande d'admission aux négociations sur de tels marchés a été présentée, dans les conditions déterminées par le règlement général de l'Autorité des marchés financiers. (...) " ; qu'aux termes du premier alinéa de l'article 2 de la directive 2003/6/CE du Parlement européen et du Conseil du 28 janvier 2003 sur les opérations d'initiés et les manipulations de marché (abus de marché) : " Les Etats membres interdisent à toute personne visée au deuxième alinéa qui détient une information privilégiée d'utiliser cette information en acquérant ou en cédant, ou en tentant d'acquérir ou de céder, pour son compte propre ou pour le compte d'autrui, soit directement, soit indirectement, les instruments financiers auxquels se rapporte cette information. " ; qu'aux termes de l'article 3 de cette même directive : " Les États membres interdisent à toute personne soumise à l'interdiction prévue à l'article 2: / a) de communiquer une information privilégiée à une autre personne, si ce n'est dans le cadre normal de l'exercice de son travail, de sa profession ou de ses fonctions ; / b) de recommander à une autre personne d'acquérir ou de céder, ou de faire acquérir ou céder par une autre personne, sur la base d'une information privilégiée, les instruments financiers auxquels se rapporte cette information " ; qu'aux termes de l'article 622-1 du règlement général de l'AMF, pris notamment pour la transposition de la directive 2003/6/CE, dans sa rédaction en vigueur entre le 19 janvier 2006 et le 11 juillet 2012 : " Toute personne mentionnée à l'article 622-2 doit s'abstenir d'utiliser l'information privilégiée qu'elle détient en acquérant ou en cédant, ou en tentant d'acquérir ou de céder, pour son propre compte ou pour le compte d'autrui, soit directement soit indirectement, les instruments financiers auxquels se rapporte cette information ou les instruments financiers auxquels ces instruments sont liés. / Elle doit également s'abstenir de : / 1° Communiquer cette information à une autre personne en dehors du cadre normal de son travail, de sa profession ou de ses fonctions ou à des fins autres que celles à raison desquelles elle lui a été communiquée ; / 2° Recommander à une autre personne d'acquérir ou de céder, ou de faire acquérir ou céder par une autre personne, sur la base d'une information privilégiée, les instruments financiers auxquels se rapportent cette information ou les instruments financiers auxquels ces instruments sont liés. / Les obligations d'abstention posées au présent article ne s'appliquent pas aux opérations effectuées pour assurer l'exécution d'une obligation d'acquisition ou de cession d'instruments financiers devenue exigible, lorsque cette obligation résulte d'une convention conclue avant que la personne concernée détienne une information privilégiée " ;

5. Considérant qu'il résulte des dispositions citées ci-dessus que l'article L. 621-14 du code monétaire et financier interdit les manquements d'initiés ; qu'ainsi que le précise l'article 622-1 du règlement général de l'AMF, il est notamment interdit aux personnes mentionnées à son article 622-2 de recommander à un tiers de céder, sur la base d'une information privilégiée, un instrument financier auquel se rapporte cette information ; que cette règle est suffisamment claire pour que le requérant ait été en mesure de déterminer si la recommandation de cession d'un titre sur le fondement d'une information privilégiée constituait un manquement à ses obligations professionnelles ; que, par ailleurs, la caractérisation du manquement de recommandation défini par le 2° de l'article 622-1 du règlement général n'est nullement subordonnée à la mise en cause par l'AMF des personnes ayant reçu la recommandation litigieuse ; qu'enfin, compte tenu de ce qui précède, la circonstance que la décision contestée aurait constitué la première sanction prononcée sur le fondement du " manquement de recommandation " n'est en tout état de cause pas de nature à mettre en cause sa légalité ; qu'ainsi, le moyen tiré de ce que la sanction serait entachée d'erreur de droit au regard des dispositions citées ci-dessus et aurait été prise en méconnaissance du principe de légalité des délits et des peines et du principe de non rétroactivité de la loi répressive plus sévère doit être écarté ;

S'agissant de l'existence d'une information privilégiée :

6. Considérant qu'aux termes de l'article 621-1 du règlement général de l'AMF : " Une information privilégiée est une information précise qui n'a pas été rendue publique, qui concerne, directement ou indirectement, un ou plusieurs émetteurs d'instruments financiers, ou un ou plusieurs instruments financiers, et qui si elle était rendue publique, serait susceptible d'avoir une influence sensible sur le cours des instruments financiers concernés ou le cours d'instruments financiers qui leur sont liés. / Une information est réputée précise si elle fait mention d'un ensemble de circonstances ou d'un événement qui s'est produit ou qui est susceptible de se produire et s'il est possible d'en tirer une conclusion quant à l'effet possible de ces circonstances ou de cet événement sur le cours des instruments financiers concernés ou des instruments financiers qui leur sont liés. / Une information, qui si elle était rendue publique, serait susceptible d'avoir une influence sensible sur le cours des instruments financiers concernés ou le cours d'instruments financiers dérivés qui leur sont liés est une information qu'un investisseur raisonnable serait susceptible d'utiliser comme l'un des fondements de ses décisions d'investissement " ; que si le requérant soutient que l'information portant sur la rupture du contrat de licence qui liait la société Transgène à la société Roche ne pouvait être qualifiée d'information privilégiée, il résulte de l'instruction que le partenariat avec la société Roche revêtait un caractère stratégique pour la société Transgène, qui ne pouvait mener seule le développement du produit qui faisait l'objet du partenariat ; qu'un investisseur raisonnable, en possession de l'information relative à la décision de la société Roche de résilier son accord de licence avec la société Transgène, aurait été susceptible de l'utiliser comme l'un des fondements de ses décisions d'investissement ; que la publication du communiqué du 22 février 2011 a d'ailleurs entraîné, le lendemain, une chute du cours du titre de 19 % ; que, par suite, la commission des sanctions a exactement apprécié les faits qui lui étaient soumis en estimant que le fait d'avoir connaissance, avant qu'elle ne soit rendue publique, de la rupture du partenariat entre les sociétés Transgène et Roche constituait une information privilégiée au sens de l'article 621-1 du règlement général de l'AMF ;

S'agissant de la détention de l'information privilégiée par M. B...F...:

7. Considérant, en premier lieu, qu'à défaut de preuve matérielle à l'encontre d'une personne mentionnée aux articles 622-1 et 622-2 du règlement général de l'AMF, la détention d'une information privilégiée peut être établie par un faisceau d'indices concordants, sans que la commission des sanctions de l'AMF n'ait l'obligation d'établir précisément les circonstances dans lesquelles l'information est parvenue jusqu'à la personne qui l'a utilisée ;

8. Considérant qu'il résulte de l'instruction que le président-directeur-général de la société Transgène et M. B...F...ont échangé, entre le 23 janvier et le 16 février 2011, de très nombreux appels téléphoniques et SMS ; qu'ils se sont rencontrés le 25 janvier pour une réunion consacrée aux rendez-vous prévus au cours du mois de mars suivant avec les investisseurs pour la communication des comptes 2010 de la société Transgène, à l'occasion de laquelle le président-directeur général de la société savait qu'il serait tenu de faire état de la rupture du contrat de licence, dont le principe avait déjà été arrêté par la société Roche ; que la personne chargée des relations de la société Transgène avec les investisseurs détenait alors cette information, qui avait également été donnée à l'agence de communication de la société ; que deux projets de communiqués de presse, réalisés en interne et annonçant la résiliation du contrat, étaient d'ailleurs prêts depuis la veille ; qu'en qualité de banquier conseil de la société, M. B...F...était habituellement associé très en amont à la stratégie de communication financière de la société ; que, par ailleurs, ni les échanges de courriels du 17 janvier 2011 entre le président directeur général de la société Transgène et le requérant, ni ceux du 23 janvier 2011 entre le président directeur général délégué et le président directeur général de Transgène n'établissent, eu égard à l'ambiguïté de leur contenu, que M. B...F...n'aurait pas été détenteur à ces dates de l'information en question ; qu'il résulte ainsi de l'instruction que, pris dans leur ensemble, les différents éléments relevés ci-dessus constituent, contrairement à ce que soutient le requérant, des indices concordants, desquels il résulte que l'information privilégiée doit être regardée comme ayant été portée à la connaissance de M. B... F..., au plus tard, lors de la réunion du 25 janvier 2011 ; que par suite, la commission des sanctions a pu, sans erreur de droit ni erreur d'appréciation, estimer que M. B... F...était détenteur de l'information privilégiée au moins depuis cette date ;

S'agissant de la recommandation de cession de titres :

9. Considérant, d'une part, qu'il résulte de l'instruction qu'entre le 27 janvier et le 2 février 2011, M. B...F...a eu quatre conversations téléphoniques avec M. C... A..., à la suite desquelles ce dernier a immédiatement donné ou modifié un ordre de vente sur ses titres Transgène ; que les affirmations du requérant selon lesquelles ces conversations auraient porté sur l'introduction en bourse d'une autre société ne sont pas étayées ; que M. A...a lui-même indiqué lors de son audition qu'il ne prenait " aucune initiative d'opérations sans consulter M. B...F..." ; qu'en cédant, de façon très rapide, entre le 1er et le 4 février 2011, l'intégralité de ses titres Transgène, M. A...a réalisé une moins-value, décision qui, en l'absence de tout autre motif allégué, ne peut se justifier que par la crainte que la valeur du titre ne baisse davantage les jours suivants ; qu'il résulte de ces éléments concordants que les opérations de vente effectuées par M. A...sur le titre Transgène doivent être regardées comme la conséquence de la recommandation donnée par M. B...F... ;

10. Considérant, d'autre part, qu'il résulte de l'instruction que M. E...D...a vendu plus de 47 000 titres Transgène entre le 8 et le 22 février 2011 ; que son premier ordre de vente a été passé immédiatement après l'appel téléphonique de M. B...F...du 8 février 2011 ; que l'explication donnée pour justifier cette décision présentait des incohérences ; qu'un échange téléphonique avec M. B...F...a précédé la plupart des interventions de M. D...auprès de son vendeur afin d'ajuster le prix auquel il était prêt à céder ses titres Transgène ; que M. B...F...a indiqué que M. D...faisait partie de son " cercle proche de relations professionnelles " et participait " pratiquement à toutes les opérations " qu'il suggérait ; que si M. D...a soutenu qu'il avait décidé de passer l'ordre de vente du 8 février 2011 à l'issue de la réunion du comité de gestion mensuel de Federal Finance qui s'était tenue entre 14h30 et 15h45, il ne résulte pas de l'instruction que la situation de Transgène ou l'évolution de son titre auraient été évoquée lors de cette réunion ; qu'il résulte ainsi de ces éléments concordants que les opérations effectuées par M. D...sur le titre Transgène doivent elles aussi être regardées comme la conséquence de la recommandation donnée par M. B...F...;

11. Considérant que le fait de recommander à un tiers, sur la base d'une information privilégiée, une opération de vente ou d'acquisition n'implique pas nécessairement la communication à ce tiers de l'information privilégiée elle-même ; qu'ainsi, la commission des sanctions a pu, sans erreur de droit, estimer que la décision de MM. A...et D...de céder des titres Transgène qu'ils possédaient était la conséquence de la recommandation que leur avait donnée M. B...F..., sans rechercher si l'information privilégiée avait été transmise aux intéressés ;

12. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que la commission des sanctions a exactement apprécié les faits qui lui étaient soumis en estimant que M. B...F...avait commis le manquement de recommandation à un tiers sur la base d'une information privilégiée ;

En ce qui concerne les sanctions prononcées :

13. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du quatrième alinéa du III de l'article L. 621-15 du code monétaire et financier : " Le montant de la sanction doit être fixé en fonction de la gravité des manquements commis et en relation avec les avantages ou les profits éventuellement tirés de ces manquements. " ; qu'il résulte de ces dispositions, d'une part, qu'une sanction peut être prononcée même en l'absence d'avantages ou de profits tirés du manquement, d'autre part, que la commission des sanctions n'a commis aucune erreur de droit en se fondant exclusivement, pour déterminer le montant de la sanction pécuniaire prononcée, sur la gravité du manquement commis ;

14. Considérant, en second lieu, qu'il résulte de l'instruction qu'en infligeant à M. B...F...une sanction pécuniaire d'un montant de 200 000 euros, avec publication sur le site internet de l'AMF sous une forme préservant l'anonymat de l'intéressé, la commission des sanctions n'a pas prononcé des sanctions disproportionnées à la gravité du manquement commis, eu égard aux obligations qui s'imposaient à l'intéressé dans l'exercice de ses fonctions de banquier-conseil et à l'atteinte portée à l'ordre public économique ;

15. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...F...n'est pas fondé à demander l'annulation de la sanction qui lui a été infligée ;

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

16. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. B...F...la somme de 3 000 euros à verser à l'AMF, au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de M. B...F...est rejetée.

Article 2 : M. B...F...versera à l'Autorité des marchés financiers une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. O... B... F..., à l'Autorité des marchés financiers et au ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique.


Synthèse
Formation : 6ème / 1ère ssr
Numéro d'arrêt : 369454
Date de la décision : 10/07/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

13-01-02-01 CAPITAUX, MONNAIE, BANQUES. CAPITAUX. OPÉRATIONS DE BOURSE. AUTORITÉ DES MARCHÉS FINANCIERS. - DÉLIT D'INITIÉ - MANQUEMENT DE RECOMMANDATION - ELÉMENTS CONSTITUTIFS.

13-01-02-01 L'article L. 621-14 du code monétaire et financier interdit les manquements d'initiés. Ainsi que le précise l'article 622-1 du règlement général de l'Autorités des marchés financiers (AMF), il est notamment interdit aux personnes mentionnées à son article 622-2, de recommander à un tiers de céder, sur la base d'une information privilégiée, un instrument financier auquel se rapporte cette information (manquement de recommandation).... ,,Le fait de recommander à un tiers, sur la base d'une information privilégiée, une opération de vente ou d'acquisition n'implique pas nécessairement la communication à ce tiers de l'information privilégiée elle-même, et la caractérisation du manquement de recommandation défini par le 2° de l'article 622-1 du règlement général n'est nullement subordonnée à la mise en cause par l'AMF des personnes ayant reçu la recommandation litigieuse.


Publications
Proposition de citation : CE, 10 jui. 2015, n° 369454
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Jean-Baptiste de Froment
Rapporteur public ?: Mme Suzanne von Coester
Avocat(s) : SCP SPINOSI, SUREAU ; SCP VINCENT, OHL

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2015:369454.20150710
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