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29/06/2015 | FRANCE | N°370980

France | France, Conseil d'État, 8ème ssjs, 29 juin 2015, 370980


Vu la procédure suivante :

Mme B...D...veuve C...a demandé au tribunal départemental des pensions de Haute-Corse, d'une part, d'annuler la décision de refus opposée le 23 juillet 2009 par le ministre de la défense à sa demande tendant à la révision, sur la base du grade de lieutenant-colonel, de sa pension de veuve au taux de réversion qui lui a été servie au titre du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, et d'autre part, d'ordonner la révision de la pension militaire d'invalidité de M. A...C..., sur cette même base, depuis sa cessation

d'activité le 16 septembre 1998, et de condamner le ministre de la dé...

Vu la procédure suivante :

Mme B...D...veuve C...a demandé au tribunal départemental des pensions de Haute-Corse, d'une part, d'annuler la décision de refus opposée le 23 juillet 2009 par le ministre de la défense à sa demande tendant à la révision, sur la base du grade de lieutenant-colonel, de sa pension de veuve au taux de réversion qui lui a été servie au titre du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, et d'autre part, d'ordonner la révision de la pension militaire d'invalidité de M. A...C..., sur cette même base, depuis sa cessation d'activité le 16 septembre 1998, et de condamner le ministre de la défense à lui régler le reliquat des sommes dues au titre de la pension militaire d'invalidité de M. C...de la date du 16 septembre 1998 jusqu'à son décès le 10 septembre 2008, et enfin, d'ordonner la révision, sur cette même base, de la pension de réversion d'invalidité qui lui est servie, avec effet rétroactif au jour du décès de son époux.

Par un jugement n° 11/00062 du 15 octobre 2012, le tribunal des pensions de Bastia a rejeté cette demande.

Par un arrêt n° 12/0035 du 17 juin 2013, la cour régionale des pensions de Bastia a infirmé ce jugement, ordonné la révision de la pension militaire d'invalidité du lieutenant-colonel Joseph C... à compter de sa cessation définitive d'activité le 19 septembre 1998 et jugé que le ministre de la défense devra régler à Mme C...le reliquat des sommes dues au titre de la pension militaire d'invalidité de son défunt mari calculée en fonction de son grade entre le 16 septembre 1998 et le 10 septembre 2008, date de son décès.

Par un pourvoi, enregistré le 6 août 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de la défense demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, d'annuler le jugement du 15 octobre 2012 du tribunal des pensions de Bastia et de rejeter la demande de MmeC....

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code des pensions civiles et militaires de retraite ;

- le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Esther de Moustier, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Benoît Bohnert, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à Me Carbonnier, avocat de Mme D...;

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis à la cour régionale des pensions de Bastia que M. A...C..., rayé des contrôles de l'armée active le 19 février 1997, a bénéficié d'une pension militaire de retraite et d'une pension militaire d'invalidité jusqu'à son décès, survenu le 10 septembre 2008 ; qu'il percevait ainsi une pension de nature mixte au sens de l'article L. 34 du code des pensions civiles et militaires de retraite ; que, le 17 décembre 2008, MmeC..., sa veuve, a présenté une demande tendant à obtenir la révision de la pension de réversion qui lui a été servie à la suite du décès de son époux ; que cette demande a été rejetée par une décision du ministre de la défense du 23 juillet 2009 ; que ce dernier se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 17 juin 2013 par lequel la cour régionale des pensions de Bastia, statuant sur l'appel de MmeC..., a infirmé le jugement du 15 octobre 2012 du tribunal des pensions de Bastia ayant rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 23 juillet 2009 et a fait droit aux conclusions de sa requête ;

2. Considérant qu'en vertu de l'article L. 79 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, les juridictions des pensions ne sont compétentes que sur les contestations soulevées par l'application du livre Ier et du livre II de ce code ; que les pensions mixtes de retraite et d'invalidité sont prévues par le code des pensions civiles et militaires de retraite ; que le contentieux de ces pensions relève de la compétence du juge administratif de droit commun, à l'exception des questions relatives à l'existence, à l'origine médicale et au degré de l'invalidité, lesquelles doivent être tranchées par la juridiction des pensions ;

3. Considérant que la pension de veuve dont est titulaire Mme C...constitue une pension mixte de retraite et d'invalidité ; que sa demande tendant à ce que cette pension fasse l'objet d'une révision dans les mêmes conditions que celles appliquées à la pension militaire de retraite que percevait M. C...ne portait sur aucune des questions qui relèvent de la juridiction des pensions ; qu'il en résulte qu'en n'annulant pas d'office pour incompétence le jugement du 15 octobre 2012 du tribunal des pensions de Bastia statuant sur la demande de MmeC..., la cour régionale des pensions de Bastia a entaché son arrêt d'erreur de droit ; que, par suite, le ministre de la défense est fondé à en demander l'annulation ;

4. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;

5. Considérant qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, le tribunal des pensions de Bastia n'était pas compétent pour statuer sur la demande de MmeC... ; que son jugement doit, par suite, être annulé ;

6. Considérant que, lorsqu'en la qualité de juge d'appel que lui confère l'application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, le Conseil d'Etat annule un jugement rendu en première instance au motif que la juridiction administrative saisie n'était pas compétente, il peut, soit, en vertu des dispositions de l'article R. 351-1 du même code, attribuer le jugement de l'affaire à la juridiction administrative compétente en première instance, soit évoquer et statuer immédiatement sur la demande présentée en première instance ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par MmeC... ;

7. Considérant qu'aux termes de l'article L. 34 du code des pensions civiles et militaires de retraite : " Les militaires qui ont été atteints en service d'infirmités susceptibles d'ouvrir droit à pension au titre du code des pensions militaires d'invalidité reçoivent la pension dudit code afférente à leur grade (...) " ; que, selon l'article R. 50 du même code : " La pension du code des pensions militaires d'invalidité attribuée aux militaires mentionnés à l'article L. 34 est calculée sur la base du grade détenu à la date de la radiation des cadres " ;

8. Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. C...était titulaire d'une pension militaire de retraite et d'une pension militaire d'invalidité concédées sur la base du grade de commandant qu'il détenait à la date de sa radiation des cadres, le 19 février 1997 ; que, s'il a été admis par un arrêt du Conseil d'Etat du 25 juillet 2007, par application de l'article L. 79 du code des pensions civiles et militaires de retraite, à voir sa pension militaire de retraite révisée sur la base du grade de lieutenant-colonel à compter du 17 septembre 1998 afin qu'il soit tenu compte de son engagement spécial au titre de la réserve accompli du 10 mars au 16 septembre 1998, cette circonstance est sans influence sur le calcul et le montant de la pension militaire d'invalidité qu'il percevait en application des dispositions précitées du code des pensions civiles et militaires de retraite dont il résulte que la pension militaire d'invalidité dont bénéficie le militaire qui y a droit est liquidée sur le grade atteint à la fin de la période d'activité au cours de laquelle a eu lieu l'évènement ouvrant droit à pension ;

9. Considérant, par suite, que MmeC..., qui a obtenu la réversion des pensions dont M. C...était titulaire, ne peut prétendre à la révision, sur la base du grade de lieutenant-colonel, de sa pension de veuve concédée au titre du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; que, dès lors, elle n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par sa décision du 23 juillet 2009, le ministre de la défense a rejeté sa demande ; qu'il convient, par voie de conséquence, de rejeter sa demande ainsi que ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt du 17 juin 2013 de la cour régionale des pensions de Bastia et le jugement du 15 octobre 2012 du tribunal des pensions de Bastia sont annulés.

Article 2 : La demande de Mme C...et ses conclusions présentées devant le Conseil d'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au ministre de la défense et à Mme B... D... veuveC....


Synthèse
Formation : 8ème ssjs
Numéro d'arrêt : 370980
Date de la décision : 29/06/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux des pensions

Publications
Proposition de citation : CE, 29 jui. 2015, n° 370980
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Esther de Moustier
Rapporteur public ?: M. Benoît Bohnert
Avocat(s) : CARBONNIER

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2015:370980.20150629
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