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29/06/2015 | FRANCE | N°366626

France | France, Conseil d'État, 8ème ssjs, 29 juin 2015, 366626


Vu l'ordonnance n° 10MA03077 du 11 février 2013, enregistrée le 6 mars 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, par laquelle le président de la cour administrative d'appel de Marseille a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, le pourvoi présenté à cette cour par M. et Mme A...B...;

Vu le pourvoi enregistré le 4 août 2010 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, présenté pour M. et MmeB..., demeurant ... ; ils demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement n° 0903124

du 27 mai 2010 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté le...

Vu l'ordonnance n° 10MA03077 du 11 février 2013, enregistrée le 6 mars 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, par laquelle le président de la cour administrative d'appel de Marseille a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, le pourvoi présenté à cette cour par M. et Mme A...B...;

Vu le pourvoi enregistré le 4 août 2010 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, présenté pour M. et MmeB..., demeurant ... ; ils demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement n° 0903124 du 27 mai 2010 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté leur demande de décharge de l'obligation de payer, pour avoir paiement, avant saisie-vente, de la somme totale de 210 520,91 euros, procédant de cinq avis à tiers détenteur qui leur ont été notifiés le 12 mai 2009, en tant qu'elle porte, pour partie sur les cotisations de taxes foncières dues au titre des années 2003 à 2008 et de taxes d'habitation au titre des années 2004 à 2008 ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit dans cette mesure à leur demande ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de commerce ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Esther de Moustier, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Benoît Bohnert, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Delaporte, Briard, Trichet, avocat de M. et Mme A...B...;

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par un jugement en date du 20 octobre 1989 du tribunal de commerce de Nîmes, M. et Mme B... ont été placés en liquidation judiciaire ; que des avis à tiers détenteur ont été émis par le trésorier principal de Bagnols-sur-Cèze pour avoir paiement, notamment, de cotisations mises à la charge de M. et Mme B...portant sur la taxe foncière au titre des années 2003 à 2008 et la taxe d'habitation au titre des années 2004 à 2008 ; que ces derniers se pourvoient en cassation contre le jugement du 27 mai 2010 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté leurs demandes d'être déchargés de l'obligation de payer les sommes correspondantes ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 641-9 du code de commerce applicable à la date de l'introduction de la demande au tribunal administratif : " Le jugement qui ouvre ou prononce la liquidation judiciaire emporte de plein droit, à partir de sa date, dessaisissement pour le débiteur de l'administration et de la disposition de ses biens même de ceux qu'il a acquis à quelque titre que ce soit tant que la liquidation judiciaire n'est pas clôturée. Les droits et actions du débiteur concernant son patrimoine sont exercés pendant toute la durée de la liquidation judiciaire par le liquidateur (...) " ; que les règles ainsi posées n'étant édictées que dans l'intérêt des créanciers, seul le liquidateur peut s'en prévaloir pour s'opposer à ce que le débiteur se pourvoie seul contre une décision qui lui est préjudiciable : que, dès lors, la fin de non-recevoir qu'oppose le ministre, tirée de ce que M. et Mme B... ne pouvaient contester les actes de recouvrement en litige dès lors qu'ils étaient placés en liquidation judiciaire et que, par suite, seul le liquidateur avait compétence pour exercer cette contestation, ne peut qu'être écartée ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article R. 711-2 du code de justice administrative, dans sa rédaction applicable à la procédure devant le tribunal administratif : " Toute partie est avertie, par une notification faite par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ou par la voie administrative mentionnée à l'article R. 611-4, du jour où l'affaire sera appelée à l'audience (...) L'avertissement est donné sept jours au moins avant l'audience (...) " ; qu'il ressort des pièces du dossier que le tribunal administratif de Nîmes a adressé au conseil des requérants, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, un avis d'audience daté du 28 avril 2010 l'informant de ce que leur demande serait examinée lors de l'audience du 12 mai 2010 ; que ce courrier n'a été retiré que le 19 mai 2010 ; qu'en se bornant à relever que le greffe du tribunal ne pouvait ignorer que le bureau de poste correspondant était alors affecté par une grève, les requérants n'établissent pas que la circonstance de ce retrait tardif n'aurait pas été imputable à leur mandataire ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que le jugement attaqué aurait été rendu irrégulièrement ne peut qu'être écarté ;

4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 253 du livre des procédures fiscales : " Un avis d'imposition est adressé sous pli fermé à tout contribuable (...) " ; que dans le cas où il est établi que l'administration a omis d'adresser l'avis d'imposition prévu par ces dispositions ou l'a notifié avec retard, l'impôt n'est exigible qu'à compter de la date à laquelle le contribuable a été informé de la mise en recouvrement du rôle ; que saisi d'une contestation par les requérants tirée de ce qu'ils n'auraient pas reçu les avis d'imposition, le tribunal administratif de Nîmes, qui a précisé dans ses motifs qu'il résultait de l'instruction que les impositions dont le paiement était recherché avaient été émises annuellement à leur nom, que les avis et commandements de payer correspondants leur avaient été envoyés à la même adresse que les avis d'imposition et qu'un bordereau de situation leur avait été communiqué en octobre 2006, lequel faisait apparaître le détail des impositions mises en recouvrement à leur nom, a suffisamment motivé ses jugements et n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant que M. et Mme B...n'ignoraient pas l'existence des impositions ; que le tribunal administratif n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant inopérant au regard du moyen tiré par les époux B...de ce qu'ils n'auraient pas été informés des impositions dont ils étaient redevables l'argument tiré de ce que les avis d'imposition n'auraient pas été adressés au liquidateur ;

5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 274 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable aux faits de l'espèce : " Les comptables du Trésor qui n'ont fait aucune poursuite contre un contribuable retardataire pendant quatre années consécutives, à partir du jour de la mise en recouvrement du rôle perdent leur recours et sont déchus de tous droits et de toute action contre ce redevable. / Le délai de quatre ans mentionné au premier alinéa, par lequel se prescrit l'action en vue du recouvrement, est interrompu par tous actes comportant reconnaissance de la part des contribuables et par tous autres actes interruptifs de la prescription " ; qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que des commandements de payer et avis à tiers détenteur ont été délivrés aux fins de recouvrer ces impositions les 28 mai 2005 et 30 mars 2006 ; qu'en conséquence, le tribunal n'a pas méconnu ces dispositions en regardant les commandements de payer en date du 27 août 2008 comme interruptifs de prescription à l'égard des taxes locales portant sur les années 2003 et 2004 ;

6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 281 du livre des procédures fiscales : " Les contestations relatives au recouvrement des impôts, taxes, redevances et sommes quelconques dont la perception incombe aux comptables publics compétents mentionnés à l'article L. 252 doivent être adressées à l'administration dont dépend le comptable qui exerce les poursuites. Les contestations ne peuvent porter que : 1° Soit sur la régularité en la forme de l'acte ; 2° Soit sur l'existence de l'obligation de payer, sur le montant de la dette compte tenu des paiements effectués, sur l'exigibilité de la somme réclamée, ou sur tout autre motif ne remettant pas en cause l'assiette et le calcul de l'impôt. Les recours contre les décisions prises par l'administration sur ces contestations sont portés, dans le premier cas, devant le juge de l'exécution, dans le second cas, devant le juge de l'impôt tel qu'il est prévu à l'article L. 199 " ; qu'en jugeant que le moyen tiré de ce que les actes de recouvrement en litige étaient insuffisamment motivés en ce qui concerne l'application de la majoration de 10 % au titre du paiement tardif de l'impôt ne relevait pas de la compétence du juge administratif, sans avoir au préalable informé les parties qu'il entendait soulever ce moyen d'ordre public, alors qu'aucune irrecevabilité n'était soulevée par l'administration, le tribunal administratif a méconnu l'article R. 611-7 du code de justice administrative ; que les requérants sont fondés dans cette mesure à demander l'annulation du jugement qu'ils attaquent ;

7. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond dans la mesure de l'annulation prononcée au point 6 en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;

8. Considérant que la contestation de la régularité des actes de recouvrement en litige, tirée de ce qu'ils étaient insuffisamment motivés en ce qui concerne l'application de la majoration de 10 % au titre du paiement tardif de l'impôt, ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative ; qu'en conséquence, la demande des requérants doit être rejetée ;

9. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas la partie perdante verse aux requérants la somme qu'ils demandent sur ce fondement ;

D E C I D E :

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Article 1er : Le jugement du 27 mai 2010 du tribunal administratif de Nîmes est annulé en tant qu'il porte sur la pénalité de 10 %.

Article 2 : La demande présentée au tribunal administratif de Nîmes en tant qu'elle porte sur la pénalité de 10 %, le surplus des conclusions du pourvoi de M. et Mme B...et leurs conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. et Mme A... B...et au ministre des finances et des comptes publics.


Synthèse
Formation : 8ème ssjs
Numéro d'arrêt : 366626
Date de la décision : 29/06/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 29 jui. 2015, n° 366626
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Esther de Moustier
Rapporteur public ?: M. Benoît Bohnert
Avocat(s) : SCP DELAPORTE, BRIARD, TRICHET

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2015:366626.20150629
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