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13/05/2015 | FRANCE | N°385814

France | France, Conseil d'État, 7ème et 2ème sous-sections réunies, 13 mai 2015, 385814


Vu la procédure suivante :

Mme A...B...a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la décision du 16 août 2010 du trésorier payeur général d'Ille-et-Vilaine rejetant sa demande tendant au bénéfice de l'indemnité temporaire réservée aux anciens fonctionnaires pensionnés résidant notamment à Mayotte.

Par un jugement n° 1100718 du 15 juillet 2014, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa requête.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 19 novembre 2014 et 20 février 2015 au secrétariat du contentieux du

Conseil d'Etat, Mme B... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) r...

Vu la procédure suivante :

Mme A...B...a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la décision du 16 août 2010 du trésorier payeur général d'Ille-et-Vilaine rejetant sa demande tendant au bénéfice de l'indemnité temporaire réservée aux anciens fonctionnaires pensionnés résidant notamment à Mayotte.

Par un jugement n° 1100718 du 15 juillet 2014, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa requête.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 19 novembre 2014 et 20 février 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme B... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa requête ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la Constitution, notamment son Préambule et son article 61-1 ;

- le code des pensions civiles et militaires de retraite ;

- la loi n° 2008-1443 du 30 décembre 2008, notamment son article 137 ;

- le décret n° 52-1050 du 10 septembre 1952 ;

- le décret n° 2009-114 du 30 janvier 2009 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Vincent Montrieux, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Bertrand Dacosta, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Barthélemy, Matuchansky, Vexliard, Poupot, avocat de Mme B...;

Sur la question prioritaire de constitutionnalité :

1. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel : " Le moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution peut être soulevé, y compris pour la première fois en cassation, à l'occasion d'une instance devant le Conseil d'Etat (...) " ; qu'il résulte des dispositions de ce même article que le Conseil constitutionnel est saisi de la question prioritaire de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et que la question soit nouvelle ou présente un caractère sérieux ;

2. Considérant qu'aux termes du II de l'article 137 de la loi du 30 décembre 2008 de finances rectificative pour 2008 : " A compter du 1er janvier 2009, l'attribution de nouvelles indemnités temporaires est réservée aux pensionnés ayants droit remplissant, à la date d'effet de leur pension, en sus de l'effectivité de la résidence, les conditions suivantes : / 1° a) Justifier de quinze ans de services effectifs dans une ou plusieurs collectivités mentionnées au I à partir d'un état récapitulatif de ces services fourni par les pensionnés et communiqué par leurs ministères d'origine ; (...) " ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que MmeB..., adjudant-chef dans l'armée de l'air, a, par un arrêté du 14 août 2008, été radiée des cadres et admise à faire valoir ses droits à la retraite à compter du 23 mars 2009 ; qu'elle se prévaut d'un droit à l'indemnité temporaire de retraite sur le fondement du décret du 10 septembre 1952 abrogé par le décret du 30 janvier 2009, pris pour l'application des dispositions législatives de la loi du 30 décembre 2008 citées ci-dessus, lequel permettait à tout retraité titulaire d'une pension concédée au titre du code des pensions civiles et militaires de retraite justifiant de conditions de résidence effective dans certaines collectivités d'outre-mer, dont Mayotte, de bénéficier d'une indemnité temporaire ; qu'à l'appui de sa question prioritaire de constitutionnalité, Mme B...soutient que les dispositions de l'article 137 de la loi du 30 décembre 2008, en ce qu'elles s'appliquent aux fonctionnaires dont l'admission à la retraite a été prononcée avant le 1er janvier 2009 quoique prenant effet postérieurement à cette date, portent atteinte à la garantie des droits proclamée par l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen ;

4. Considérant que les dispositions législatives litigieuses n'affectent pas le montant de pensions civiles ou militaires de retraite liquidées ; qu'elles sont relatives aux conditions d'octroi d'une indemnité, qui, si elle est calculée en fonction du montant de la pension, était et demeure soumise à d'autres conditions que le seul bénéfice de la pension ; qu'elles ne sont entrées en vigueur qu'à compter du 1er janvier 2009 ; qu'elles ne revêtent donc aucun caractère rétroactif et n'affectent pas, en tout état de cause, des situations entrant dans le champ de la garantie des droits proclamée par l'article 16 de la déclaration de 1789 ; que par suite, la question soulevée, qui n'est pas nouvelle, ne présente pas un caractère sérieux ; que, dès lors, il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par Mme B...;

Sur les autres moyens du pourvoi en cassation :

5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 822-1 du code de justice administrative : " Le pourvoi en cassation devant le Conseil d'Etat fait l'objet d'une procédure préalable d'admission. L'admission est refusée par décision juridictionnelle si le pourvoi est irrecevable ou n'est fondé sur aucun moyen sérieux " ;

6. Considérant que, pour demander l'annulation du jugement qu'elle attaque, Mme B...soutient que le magistrat ayant rendu le jugement n'était pas compétent pour statuer comme juge unique sur sa requête ; qu'il a insuffisamment motivé sa décision en ne répondant pas aux moyens, opérants, qu'elle soulevait, relatifs à l'exception d'illégalité du décret n° 2009-114 du 30 janvier 2009 en ce qu'il trouve à s'appliquer à des fonctionnaires dont l'admission à la retraite était définitivement acquise avant sa publication ou, à tout le moins, en ce qu'il a omis d'édicter des mesures transitoires pour les agents se trouvant dans cette situation ; qu'il a commis une erreur de droit en appliquant le nouveau régime de l'indemnité temporaire de retraite à des agents dont l'admission à la retraite a été prononcée de manière définitive avant la publication de la loi du 30 décembre 2008 ; qu'il a également commis une erreur de droit en refusant d'annuler la décision litigieuse alors que la remise en cause de l'espérance légitime qu'elle avait de bénéficier de cette indemnité méconnaissait le droit au respect des biens garanti par l'article premier du protocole additionnel de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, le principe de sécurité juridique et le principe de confiance légitime ;

7. Considérant qu'aucun de ces moyens n'est de nature à justifier l'admission du pourvoi ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution des dispositions du II de l'article 137 de la loi de finances rectificative pour 2008.

Article 2 : Le pourvoi de Mme B...n'est pas admis.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à Mme A...B..., au ministre de la fonction publique et de la décentralisation et au ministre des finances et des comptes publics.

Copie en sera adressée pour information au Conseil constitutionnel et au Premier ministre.


Synthèse
Formation : 7ème et 2ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 385814
Date de la décision : 13/05/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 13 mai. 2015, n° 385814
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Vincent Montrieux
Rapporteur public ?: M. Bertrand Dacosta
Avocat(s) : SCP BARTHELEMY, MATUCHANSKY, VEXLIARD, POUPOT

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2015:385814.20150513
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