Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. et Mme A...B...ont demandé au tribunal administratif de Nice de les décharger des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2004 et des pénalités correspondantes. Par une ordonnance du 12 décembre 2008, l'affaire a été renvoyée au tribunal administratif de Marseille. Par un jugement n° 0808678 du 1er avril 2010, ce tribunal a rejeté la demande de M. et MmeB....
Par un arrêt n° 10MA02179 du 28 février 2013, la cour administrative d'appel de Marseille a annulé le jugement du tribunal administratif de Marseille et fait droit à la demande de M. et MmeB....
Procédure devant le Conseil d'Etat
Par un pourvoi et un mémoire en réplique, enregistrés les 29 avril 2013 et 4 avril 2014, au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre délégué chargé du budget demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt n° 10MA02179 du 28 février 2013 de la cour administrative d'appel de Marseille ;
2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter la demande de M. et MmeB....
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Romain Godet, maître des requêtes en service extraordinaire,
- les conclusions de M. Edouard Crépey, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de M. et Mme B...;
1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la SCI Les jardins du Palais a acquis en 1984 un terrain à bâtir dans le but d'y construire un immeuble; que, bien qu'ayant obtenu un permis de construire le 29 octobre 2001, qui a ensuite été prorogé et modifié, la SCI n'avait pas, à la date de sa transformation en SARL le 29 septembre 2004, engagé les travaux correspondants, qui ont été finalement achevés en août 2006 ; que la plus-value que la SCI a constatée sur le terrain à bâtir a été regardée comme imposable entre les mains de ses associés en tant que plus-value des particuliers ; qu'à la suite de la vérification de la comptabilité de la SARL Les jardins du Palais, l'administration fiscale a estimé que la plus-value devait être réintégrée dans les résultats de la SCI et imposée, en application des articles 239 ter et 8 du code général des impôts, entre les mains de chaque associé au prorata de ses droits sociaux dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux ; que le tribunal administratif de Marseille a rejeté la demande de décharge de M. B..., associé de la SCI, par un jugement du 1er avril 2010 ; que la cour administrative d'appel de Marseille, après avoir annulé ce jugement, a fait droit à ses prétentions par un arrêt du 28 février 2013 ; que le ministre se pourvoit en cassation contre cet arrêt ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article 206 du code général des impôts, dans sa version applicable aux impositions en litige, " 1. Sous réserve des dispositions des articles 8 ter, 239 bis AA et 1655 ter, sont passibles de l'impôt sur les sociétés, quel que soit leur objet, les sociétés anonymes, les sociétés en commandite par actions, les sociétés à responsabilité limitée n'ayant pas opté pour le régime fiscal des sociétés de personnes dans les conditions prévues au IV de l'article 3 du décret n° 55-594 du 20 mai 1955 modifié (...) / 2. Sous réserve des dispositions de l'article 239 ter, les sociétés civiles sont également passibles dudit impôt, même lorsqu'elles ne revêtent pas l'une des formes visées au 1, si elles se livrent à une exploitation ou à des opérations visées aux articles 34 et 35. " ; qu'en vertu du I de l'article 239 ter du même code : " les dispositions du 2 de l'article 206 ne sont pas applicables aux sociétés civiles créées après l'entrée en vigueur de la loi n° 64-1278 du 23 décembre 1964 et qui ont pour objet la construction d'immeubles en vue de la vente, à la condition que ces sociétés ne soient pas constituées sous la forme de sociétés par actions ou à responsabilité limitée et que leurs statuts prévoient la responsabilité indéfinie des associés en ce qui concerne le passif social. / Les sociétés civiles visées au premier alinéa sont soumises au même régime que les sociétés en nom collectif effectuant les mêmes opérations ; leurs associés sont imposés dans les mêmes conditions que les membres de ces dernières sociétés. " ; qu'en application de l'article 8 de ce code, dans sa version applicable aux impositions en litige : " Sous réserve des dispositions de l'article 6, les associés des sociétés en nom collectif et les commandités des sociétés en commandite simple sont, lorsque ces sociétés n'ont pas opté pour le régime fiscal des sociétés de capitaux, personnellement soumis à l'impôt sur le revenu pour la part de bénéfices sociaux correspondant à leurs droits dans la société. (...) / Il en est de même, sous les mêmes conditions : / 1° Des membres des sociétés civiles qui ne revêtent pas, en droit ou en fait, l'une des formes de sociétés visées à l'article 206 1 et qui, sous réserve des exceptions prévues à l'article 239 ter, ne se livrent pas à une exploitation ou à des opérations visées aux articles 34 et 35 " ; qu'enfin, aux termes du 1° bis du I de l'article 35 du même code, dans sa version applicable aux impositions en litige, " présentent également le caractère de bénéfices industriels et commerciaux, pour l'application de l'impôt sur le revenu, les bénéfices réalisés par les personnes physiques (...) qui, à titre habituel, achètent des biens immeubles, en vue d'édifier un ou plusieurs bâtiments et de les vendre, en bloc ou par locaux " ;
3. Considérant que la cour administrative d'appel de Marseille a jugé que la SCI Les jardins du Palais avait renoncé à réaliser son objet social de construction-vente d'immeubles ; qu'il ressort cependant des pièces du dossier qui lui était soumis que, ainsi qu'il a été dit, la SCI avait obtenu un permis de construire le 29 octobre 2001, prorogé le 30 décembre 2003 et modifié le 3 août 2004 et qu'elle gardait la propriété du terrain en cause, tout en changeant de forme juridique ; que la cour ne pouvait, dès lors, sans entacher son arrêt d'erreur de droit sur ce point, regarder la SCI comme ayant renoncé à son objet social au seul motif qu'elle n'avait réalisé aucune opération de construction ou de commercialisation à la date de sa transformation en SARL et de la constatation de la plus-value litigieuse ;
4. Considérant, toutefois, que la cour a également relevé, par des motifs non contestés en cassation, que la condition d'habitude posée par les dispositions précitées de l'article 35 du code général des impôts n'était pas remplie, d'où il résultait, en vertu des dispositions précitées des article 206 et 8 du code général des impôts, et sans qu'il y ait lieu de rechercher si la société remplissait les conditions pour bénéficier de la dérogation prévue par l'article 239 ter du même code, que la plus-value litigieuse n'était pas soumise à l'impôt sur les sociétés mais imposable à l'impôt sur le revenu entre les mains des associés comme plus-value immobilière des particuliers et non dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux ; qu'ainsi, c'est à bon droit que la cour administrative d'appel de Marseille a prononcé la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu qui ont été mises à la charge de M. et Mme B... au titre de la plus-value en litige dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux ;
5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le ministre n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à M. et MmeB..., au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
D E C I D E :
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Article 1er : Le pourvoi du ministre délégué chargé du budget est rejeté.
Article 2 : L'Etat versera à M. et Mme B...la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au ministre des finances et des comptes publics et à M. et Mme A...B....