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16/04/2015 | FRANCE | N°361438

France | France, Conseil d'État, 9ème ssjs, 16 avril 2015, 361438


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La Société générale de transports de liquides a demandé au tribunal administratif de Melun la décharge, d'une part, des cotisations supplémentaires de taxe professionnelle auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2002 à 2005 dans les rôles de la commune de Villeneuve-le-Roi, d'autre part des cotisations supplémentaires de taxe additionnelle à la taxe professionnelle perçue au profit des chambres de commerce et d'industrie et de frais de dégrèvement et de non-valeur. Par un jugement n° 07

00115 du 20 décembre 2010, le tribunal administratif de Melun, après l'avoir déc...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La Société générale de transports de liquides a demandé au tribunal administratif de Melun la décharge, d'une part, des cotisations supplémentaires de taxe professionnelle auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2002 à 2005 dans les rôles de la commune de Villeneuve-le-Roi, d'autre part des cotisations supplémentaires de taxe additionnelle à la taxe professionnelle perçue au profit des chambres de commerce et d'industrie et de frais de dégrèvement et de non-valeur. Par un jugement n° 0700115 du 20 décembre 2010, le tribunal administratif de Melun, après l'avoir déchargée des cotisations supplémentaires de taxe additionnelle à la taxe professionnelle perçue au profit des chambres de commerce et d'industrie et de frais de dégrèvement et de non-valeur, a rejeté le surplus de sa demande par l'article 3 de son jugement.

Par un arrêt n° 11PA01005 du 12 juin 2012, la cour administrative d'appel de Paris, sur appel de la Société générale de transports de liquides, a annulé l'article 3 du jugement du tribunal, a déchargé la société des cotisations supplémentaires de taxe professionnelle en litige et a condamné l'Etat à lui verser une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant le Conseil d'Etat

Par un pourvoi, enregistré le 27 juillet 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat et un mémoire en réplique, enregistré le 30 août 2013, le ministre de l'économie et des finances demande au Conseil d'Etat d'annuler cet arrêt.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Maïlys Lange, maître des requêtes,

- les conclusions de Mme Marie-Astrid Nicolazo de Barmon, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Odent, Poulet, avocat de la Société générale de transport de liquides ;

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article 1473 du code général des impôts, dans sa rédaction alors applicable : " La taxe professionnelle est établie dans chaque commune où le redevable dispose de locaux ou de terrains, en raison de la valeur locative des biens qui y sont situés ou rattachés (...) ". Aux termes de l'article 1474 du même code, alors en vigueur : " Les conditions de répartition des bases d'imposition des entreprises de transport de toutes natures (...) font l'objet d'un décret en Conseil d'Etat tenant compte de l'importance relative des installations et des activités ainsi que des lieux d'exploitation et de direction de ces entreprises (...) ". Selon l'article 310 HK de l'annexe II au même code, alors en vigueur : " Pour l'application du premier alinéa de l'article 1473 du code général des impôts, les véhicules sont rattachés au local ou au terrain qui constitue leur lieu de stationnement habituel ou, s'il n'en existe pas, au local où ils sont entretenus et réparés par le redevable ; à défaut ils sont rattachés au principal établissement de l'entreprise (...) ". Enfin, aux termes de l'article 310 HM, alors applicable, de cette même annexe II : " La valeur locative des véhicules des entreprises de transport est imposée dans les communes définies à l'article 310 HK. / Cet élément est toutefois réparti : a. Lorsque la majorité des véhicules n'a pas de lieu de stationnement habituel, entre toutes les communes où l'entreprise dispose de locaux ou de terrains ; la répartition est proportionnelle aux valeurs locatives des locaux et terrains (...) ".

2. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la Société générale de transport de liquides (SGTL), qui exerce une activité de location, de gestion et d'entretien de wagons ferroviaires destinés au transport de marchandises, dispose d'un local à Paris, où est situé son siège social, et de locaux et d'installations à Villeneuve-le-Roi (Val-de-Marne), comportant notamment un embranchement ferroviaire et permettant le stationnement d'environ quatre-vingt wagons. Pour la déclaration de ses bases d'imposition à la taxe professionnelle au titre des années 2002 à 2005, elle a réparti la valeur locative des wagons dont elle est propriétaire mais qui ne faisaient pas l'objet de locations en cours proportionnellement aux valeurs locatives des locaux et terrains dont elle disposait à Paris et à Villeneuve-le-Roi, sur le fondement des dispositions précitées du a de l'article 310 HM de l'annexe II au code général des impôts. L'administration, estimant que la valeur locative de l'ensemble des wagons en litige devait être imposée dans les rôles de la commune de Villeneuve-le-Roi, a remis en cause cette répartition des bases d'imposition à la suite d'une vérification de comptabilité de la société, et les a rehaussées dans ces rôles à concurrence de la valeur locative des wagons qui avaient été déclarés à Paris. Le ministre de l'économie et des finances se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 12 juin 2012 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a accordé à la SGTL la décharge des cotisations supplémentaires de taxe professionnelle auxquelles elle a ainsi été assujettie au titre des années 2002 à 2005 dans les rôles de la commune de Villeneuve-le-Roi.

3. Devant la cour administrative d'appel, la SGTL s'est prévalue, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, des énonciations du paragraphe 217 de l'instruction de la direction générale des impôts n° 6 E-7-75 du 30 octobre 1975, qui précise les modalités d'application du deuxième alinéa de l'article 310 HM précité de l'annexe II au code général des impôts, lequel prévoit, pour les entreprises de transport, des exceptions à la règle générale selon laquelle la taxe professionnelle est établie dans chaque commune où le redevable dispose de locaux ou de terrains, en raison de la valeur locative des biens qui y sont situés ou rattachés. Ses trois premiers alinéas énoncent que : " La première [exception] concerne les entreprises de transport dont la majorité des véhicules n'a pas de lieu de stationnement habituel, c'est-à-dire principalement la SNCF et les entreprises qui donnent des wagons en location. / La valeur locative des véhicules et le montant des salaires versés à leur équipage est alors répartie entre toutes les communes où l'entreprise dispose de locaux et de terrains. / La répartition est proportionnelle aux valeurs locatives des locaux et terrains, c'est-à-dire à celle de toutes les installations passibles d'une taxe foncière (bâtiments, ouvrages d'art, voies ferrées, etc.). " Ils ont été complétés par un quatrième alinéa, ajouté par l'instruction n° 6-E-1-76 du 14 janvier 1976, aux termes duquel : " Certains redevables de la taxe professionnelle peuvent être propriétaires de wagons qui n'ont pas de lieu de garage habituel (exemple : wagons appartenant aux sociétés de produits pétroliers). Dans ce cas, il y a lieu de répartir la valeur locative de ces éléments entre les communes où l'entreprise dispose de dépôts dotés d'embranchements ferroviaires. ", dont l'administration revendiquait l'application dans ses écritures en défense devant la cour administrative d'appel.

4. En jugeant que la seconde instruction, réunie au paragraphe 217 de la première dans la documentation administrative publiée sous la référence DB 6 E 3133, dans sa version du 1er juin 1995, n'avait pas eu pour effet l'abrogation des trois premiers alinéas du paragraphe issus de la première instruction, dans les prévisions desquels la société requérante entrait, la cour administrative d'appel n'a pas commis d'erreur de droit. Elle n'a pas davantage méconnu l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales en déduisant des termes de la doctrine invoquée que la condition de défaut de lieu de stationnement habituel de la majorité des véhicules qu'elle prévoyait se référait aux véhicules dont la société était propriétaire, et non aux seuls véhicules dont la société disposait. Enfin, le ministre ne peut utilement soutenir, pour la première fois devant le juge de cassation, que les énonciations de la doctrine invoquée seraient contradictoires et ambiguës et ne contiendraient de ce fait aucune interprétation formelle opposable à l'administration.

5. Il résulte de ce qui précède que le pourvoi du ministre de l'économie et des finances doit être rejeté. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros demandée par la Société générale de transport de liquides sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

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Article 1er : Le pourvoi du ministre de l'économie et des finances est rejeté.

Article 2 : L'Etat versera à la Société générale de transport de liquides une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au ministre des finances et des comptes publics et à la Société générale de transport de liquides.


Synthèse
Formation : 9ème ssjs
Numéro d'arrêt : 361438
Date de la décision : 16/04/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 16 avr. 2015, n° 361438
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Maïlys Lange
Rapporteur public ?: Mme Marie-Astrid Nicolazo de Barmon
Avocat(s) : SCP ODENT, POULET

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2015:361438.20150416
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