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04/02/2015 | FRANCE | N°365269

France | France, Conseil d'État, 9ème / 10ème ssr, 04 février 2015, 365269


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 16 janvier et 17 avril 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la société Score-DDB, venant aux droits de la société Piment, dont le siège est au 5 rue de Bucarest à Paris (75008) ; elle demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 11PA00092 du 15 novembre 2012 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté la requête de la société Piment tendant à l'annulation du jugement n° 0719425 du 3 novembre 2010 du tribunal administratif de Paris rejetant sa

demande tendant à la décharge du complément d'impôt sur les sociétés et de...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 16 janvier et 17 avril 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la société Score-DDB, venant aux droits de la société Piment, dont le siège est au 5 rue de Bucarest à Paris (75008) ; elle demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 11PA00092 du 15 novembre 2012 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté la requête de la société Piment tendant à l'annulation du jugement n° 0719425 du 3 novembre 2010 du tribunal administratif de Paris rejetant sa demande tendant à la décharge du complément d'impôt sur les sociétés et des pénalités correspondantes, ainsi que de la contribution supplémentaire sur cet impôt, auxquels elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2003 ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à l'appel qu'elle avait présenté devant la cour ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Olivier Japiot, conseiller d'Etat,

- les conclusions de M. Frédéric Aladjidi, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Célice, Blancpain, Soltner, Texidor, avocat de la société Score-DDB ;

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société Piment a absorbé la société Concrètement le 23 décembre 2003, avec effet rétroactif au 1er janvier de cette même année, en se plaçant sous le régime prévu à l'article 210 A du code général des impôts ; que, par une décision du 8 août 2005, l'administration a accordé à la société Piment l'agrément prévu par les dispositions du II de l'article 209 du code général des impôts pour reporter sur ses résultats les déficits antérieurement subis par la société Concrètement, en mentionnant un déficit de 14 301 euros ; que la société requérante a toutefois déduit de son résultat imposable, au titre de l'exercice clos en 2003, le déficit de la société absorbée pour un montant de 425 356 euros, du fait de la déduction de charges engagées au cours d'exercices antérieurs à la fusion et qui n'avaient pas été déduites au titre de ces exercices ; qu'à la suite d'une vérification de comptabilité, l'administration a réintégré dans le résultat imposable de la société requérante les charges correspondant à la part du déficit excédant celui qui était mentionné dans l'agrément ; que la société Score-DDB, venant aux droits de la société Piment, se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 15 novembre 2012 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du 3 novembre 2010 du tribunal administratif de Paris rejetant sa demande tendant à la décharge du complément d'impôt sur les sociétés et des pénalités correspondantes, ainsi que de la contribution sur cet impôt, auxquels elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2003 ;

2. Considérant qu'aux termes du II de l'article 209 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux impositions en litige : " En cas de fusion ou opération assimilée placée sous le régime de l'article 210 A, les déficits antérieurs non encore déduits par la société absorbée ou apporteuse sont transférés, sous réserve d'un agrément délivré dans les conditions prévues à l'article 1649 nonies, à la ou aux sociétés bénéficiaires des apports, et imputables sur ses ou leurs bénéfices ultérieurs dans la limite édictée au troisième alinéa du I./ L'agrément est délivré lorsque : / a. L'opération est justifiée du point de vue économique et obéit à des motivations principales autres que fiscales ; / b. L'activité à l'origine des déficits dont le transfert est demandé est poursuivie par la ou les sociétés bénéficiaires des apports pendant un délai minimum de trois ans. / Les déficits sont transférés dans la limite de la plus importante des valeurs suivantes appréciées à la date d'effet de l'opération : / - la valeur brute des éléments de l'actif immobilisé affectés à l'exploitation hors immobilisations financières ; / - la valeur d'apport de ces mêmes éléments " ; qu'aux termes de l'article 1649 nonies A du même code : " 1. L'inexécution des engagements souscrits en vue d'obtenir un agrément administratif ou le non-respect des conditions auxquelles l'octroi de ce dernier a été subordonné entraîne le retrait de l'agrément, la déchéance des avantages fiscaux qui y sont attachés et l'exigibilité des impositions non acquittées du fait de celui-ci (...) / 2. Lorsque le bénéficiaire d'avantages fiscaux accordés du fait d'un agrément administratif ou d'une convention passée avec l'État se rend coupable (...) d'une infraction fiscale reconnue frauduleuse par une décision judiciaire ayant autorité de chose jugée, il est déchu du bénéfice desdits avantages (...) " ;

3. Considérant que les dispositions précitées du II de l'article 209 du code général des impôts, dans leur rédaction applicable aux impositions en litige, issues de l'article 85 de la loi du 28 décembre 2001 de finances pour 2002, ne prévoient pas, contrairement à leur rédaction antérieure, que le déficit de la société absorbée ne peut être transféré à la société absorbante que dans la mesure définie par l'agrément institué par ces dispositions ; qu'il suit de là que le montant du déficit mentionné dans celui-ci ne peut être opposé à un contribuable qui présenterait, dans les délais prévus par les textes en vigueur, une réclamation tendant au rehaussement de ce montant ; que l'administration peut seulement, lorsqu'elle constate que l'agrément a été délivré au vu de renseignements inexacts fournis par la société dans sa demande quant au montant du déficit à transférer, après avoir mis le contribuable en mesure de présenter ses observations, retirer l'agrément sur le fondement des dispositions précitées du 1 de l'article 1649 nonies A du code général des impôts, sans préjudice de l'application, le cas échéant, des dispositions du 2 du même article ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société Piment, venant aux droits de la société Concrètement qu'elle a absorbée, a demandé, dans sa réclamation contentieuse en date du 8 février 2007, une décharge d'impôt sur les sociétés au profit de celle-ci, correspondant aux charges que celle-ci avait omis de déclarer aux titres d'exercices antérieurs à la fusion ; qu'il résulte de ce qui a été dit au point 3 que la cour a commis une erreur de droit en jugeant que les dispositions du II de l'article 209 du code général des impôts, dans leur rédaction applicable aux impositions en litige, faisaient obstacle à ce que la société Piment puisse demander, dans sa réclamation, le droit de déduire de son résultat imposable un déficit supérieur à celui mentionné dans la décision d'agrément ; que la société Score-DDB est, par suite et sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen de son pourvoi, fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque ;

5. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à la société Score-DDB au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

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Article 1er : L'arrêt du 15 novembre 2012 de la cour administrative d'appel de Paris est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Paris.

Article 3 : L'Etat versera à la société Score-DDB, venant aux droits de la société Piment, une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à la société Score-DDB et au ministre des finances et des comptes publics.


Synthèse
Formation : 9ème / 10ème ssr
Numéro d'arrêt : 365269
Date de la décision : 04/02/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-01-04-03 CONTRIBUTIONS ET TAXES. IMPÔTS SUR LES REVENUS ET BÉNÉFICES. RÈGLES GÉNÉRALES. IMPÔT SUR LES BÉNÉFICES DES SOCIÉTÉS ET AUTRES PERSONNES MORALES. DÉTERMINATION DU BÉNÉFICE IMPOSABLE. - FUSION OU OPÉRATION ASSIMILÉE - TRANSFERT DES DÉFICITS ANTÉRIEURS DE LA SOCIÉTÉ ABSORBÉE - AGRÉMENT (ART. 209, II DU CGI) - POSSIBILITÉ POUR L'ADMINISTRATION D'OPPOSER À UNE RÉCLAMATION DU CONTRIBUABLE LE MONTANT DU DÉFICIT MENTIONNÉ DANS L'AGRÉMENT - ABSENCE - POSSIBILITÉ POUR L'ADMINISTRATION, SI L'AGRÉMENT EST FONDÉ SUR DES RENSEIGNEMENTS INEXACTS, DE LE RETIRER - EXISTENCE.

19-04-01-04-03 Les dispositions du II de l'article 209 du code général des impôts, dans leur rédaction issue de l'article 85 de la loi n° 2001-1275 du 28 décembre 2001 de finances pour 2002, ne prévoient pas, contrairement à leur rédaction antérieure, que le déficit de la société absorbée ne peut être transféré à la société absorbante que dans la mesure définie par l'agrément institué par ces dispositions. Il suit de là que le montant du déficit mentionné dans celui-ci ne peut être opposé à un contribuable qui présenterait, dans les délais prévus par les textes en vigueur, une réclamation tendant au rehaussement de ce montant. L'administration peut seulement, lorsqu'elle constate que l'agrément a été délivré au vu de renseignements inexacts fournis par la société dans sa demande quant au montant du déficit à transférer, après avoir mis le contribuable en mesure de présenter ses observations, retirer l'agrément sur le fondement des dispositions du 1 de l'article 1649 nonies A du code général des impôts, sans préjudice de l'application, le cas échéant, des dispositions du 2 du même article.


Publications
Proposition de citation : CE, 04 fév. 2015, n° 365269
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Olivier Japiot
Rapporteur public ?: M. Frédéric Aladjidi
Avocat(s) : SCP CELICE, BLANCPAIN, SOLTNER, TEXIDOR

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2015:365269.20150204
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