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04/02/2015 | FRANCE | N°364197

France | France, Conseil d'État, 9ème / 10ème ssr, 04 février 2015, 364197


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B...a demandé au tribunal administratif de Paris de prononcer la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de cotisations sociales, ainsi que des pénalités correspondantes, auxquelles il a été assujetti au titre des années 2002 et 2003. Par un jugement n° 0709761 du 12 octobre 2010, le tribunal administratif de Paris a réduit les bases d'imposition à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales de M. et Mme B...à concurrence du montant des moins-values résultant de la

cession des titres de la société d'exploitation Mirazur et a déchargé les co...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B...a demandé au tribunal administratif de Paris de prononcer la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de cotisations sociales, ainsi que des pénalités correspondantes, auxquelles il a été assujetti au titre des années 2002 et 2003. Par un jugement n° 0709761 du 12 octobre 2010, le tribunal administratif de Paris a réduit les bases d'imposition à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales de M. et Mme B...à concurrence du montant des moins-values résultant de la cession des titres de la société d'exploitation Mirazur et a déchargé les contribuables des droits et pénalités résultant de ces nouvelles bases d'imposition.

Par un arrêt n° 11PA00814 du 3 octobre 2012, la cour administrative d'appel de Paris a, sur le recours du ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat, porte-parole du Gouvernement, remis à la charge de M. et Mme B...les impositions et pénalités dont le tribunal avait prononcé la décharge, à l'exception des sommes correspondant aux majorations de 80 % prévues à l'article 1729 du code général des impôts, et réformé en ce sens le jugement du tribunal administratif.

Procédure devant le Conseil d'Etat

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 29 novembre 2012, 28 février 2013 et 16 décembre 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. et Mme B... demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 11PA00814 du 3 octobre 2012 de la cour administrative d'appel de Paris ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

-le code de justice administrative.

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Séverine Larere, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Frédéric Aladjidi, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Célice, Blancpain, Soltner, Texidor, avocat de M. et MmeB....

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. et Mme B...ont cédé, les 16 décembre 2002 et 1er décembre 2003, à leurs fils et à leur belle-fille, les actions de la société d'exploitation Mirazur (SEMSA), qu'ils avaient créée en 1999, et qu'ils ont constaté à cette occasion des moins-values d'un montant de 1 755 000 euros en 2002 et 1 658 543 euros en 2003 ; qu'à la suite d'un examen contradictoire de leur situation fiscale personnelle, l'administration a remis en cause l'imputation de ces moins-values sur les plus-values réalisées au titre des mêmes années au motif que les opérations en cause étaient constitutives d'un abus de droit réprimé par l'article L. 64 du livre des procédures fiscales ; que, par un jugement du 12 octobre 2010, le tribunal administratif de Paris a toutefois estimé que l'administration n'apportait pas la preuve de l'existence d'un abus de droit et a, en conséquence, prononcé la réduction des cotisations d'impôt sur le revenu et de contributions sociales et des pénalités correspondantes auxquelles M. et Mme B...avaient été assujettis au titre des années 2002 et 2003 ; que sur appel du ministre chargé du budget, la cour administrative d'appel de Paris, par l'arrêt attaqué du 3 octobre 2012, après avoir procédé à une substitution de base légale, a remis à la charge de M. et Mme B...les impositions et pénalités dont le tribunal administratif avait prononcé la décharge, à l'exception des sommes correspondant à la majoration de 80 % pour abus de droit prévue à l'article 1729 du code général des impôts ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 150-0 A du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux impositions en litige : " I. - 1. Sous réserve des dispositions propres aux bénéfices industriels et commerciaux, aux bénéfices non commerciaux et aux bénéfices agricoles ainsi que de l'article 150 A bis, les gains nets retirés des cessions à titre onéreux, effectuées directement ou par personne interposée, de valeurs mobilières, de droits sociaux, de titres mentionnés au 1° de l'article 118 et aux 6° et 7° de l'article 120, de droits portant sur ces valeurs, droits ou titres ou de titres représentatifs des mêmes valeurs, droits ou titres, sont soumis à l'impôt sur le revenu (...). / 3. Lorsque les droits détenus directement ou indirectement par le cédant avec son conjoint, leurs ascendants et leurs descendants dans les bénéfices sociaux d'une société soumise à l'impôt sur les sociétés et ayant son siège en France ont dépassé ensemble 25 % de ces bénéfices à un moment quelconque au cours des cinq dernières années, la plus-value réalisée lors de la cession de ces droits, pendant la durée de la société, à l'une des personnes mentionnées au présent alinéa, est exonérée si tout ou partie de ces droits sociaux n'est pas revendu à un tiers dans un délai de cinq ans. A défaut, la plus-value est imposée au nom du premier cédant au titre de l'année de la revente des droits au tiers " ; qu'aux termes du 11 de l'article 150-0 D du même code, dans sa rédaction applicable aux impositions en litige : " Les moins-values subies au cours d'une année sont imputables exclusivement sur les plus-values de même nature réalisées au cours de la même année ou des cinq années suivantes " ;

3. Considérant que doivent être regardées comme de même nature, au sens des dispositions du 11 de l'article 150-0 D du code général des impôts, telles qu'éclairées notamment par les travaux préparatoires de l'article 94 de la loi du 30 décembre 1999 de finances pour 2000, dont elle sont issues, les plus-values et moins-values afférentes à l'ensemble des cessions de titres mentionnées à l'article 150-0 A précité du même code, y compris celles pour lesquelles le 3 de cet article prévoit une exonération des plus-values réalisées ; qu'il en résulte qu'en jugeant que seules les plus-values et moins-values ayant résulté d'opérations réalisées sur des titres ou droits sociaux cédés à l'extérieur du groupe familial, ou à l'intérieur de ce groupe si tout ou partie de ces droits sociaux est revendu à un tiers dans un délai de cinq ans, pouvaient être regardées comme des gains et pertes de même nature et en en déduisant que les moins-values constatées lors des cessions réalisées par les époux B...en 2002 et 2003, qui entraient dans le champ d'application du 3 de l'article 150-0 A du code général des impôts, n'étaient pas de même nature que les plus-values effectivement imposables réalisées au titre des mêmes années, la cour a entaché son arrêt d'une erreur de droit ; que M. et Mme B...sont, par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de leur pourvoi, fondés à en demander l'annulation ;

4. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;

5. Considérant que, contrairement à ce que soutient le ministre à l'appui de son appel, l'exonération prévue au 3 du I de l'article 150-0 A du code général des impôts précité n'a pas pour effet de placer le gain net résultant de la cession de droits sociaux réalisée dans le cadre d'un groupe familial hors du champ d'application de l'impôt sur le revenu ni, par suite, de faire obstacle à ce que la moins-value subie à l'issue d'une telle cession soit imputable, en application des dispositions précitées du 11 de l'article 150-0 D du même code, sur les plus-values de même nature réalisées au cours de la même année ; qu'il en résulte que le ministre n'est pas fondé à demander que soient substituées, en tant que fondement légal du redressement opéré par l'administration, les dispositions du 3 du I de l'article 150-0 A à celles de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales, initialement retenues par l'administration ; que son recours ne peut, par suite, qu'être rejeté ;

6. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre une somme de 6 000 euros à la charge de l'Etat, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, au titre des frais exposés par M. et Mme B...devant la cour administrative d'appel de Paris et devant le Conseil d'Etat ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Paris du 3 octobre 2012 est annulé.

Article 2 : Le recours formé par le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat, porte-parole du Gouvernement devant la cour administrative d'appel de Paris est rejeté.

Article 3 : L'Etat versera une somme de 6 000 euros à M. et Mme B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. et Mme A...B...et au ministre des finances et des comptes publics.


Synthèse
Formation : 9ème / 10ème ssr
Numéro d'arrêt : 364197
Date de la décision : 04/02/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-08-01 CONTRIBUTIONS ET TAXES. IMPÔTS SUR LES REVENUS ET BÉNÉFICES. REVENUS ET BÉNÉFICES IMPOSABLES - RÈGLES PARTICULIÈRES. PLUS-VALUES DES PARTICULIERS. PLUS-VALUES MOBILIÈRES. - PLUS-VALUES ET MOINS-VALUES DE MÊME NATURE AU SENS DU 11 DE L'ARTICLE 150-0 D DU CGI - NOTION - PLUS-VALUES ET MOINS-VALUES AFFÉRENTES À L'ENSEMBLE DES CESSIONS DE TITRES MENTIONNÉES À L'ARTICLE 150-0 A DU CGI.

19-04-02-08-01 Doivent être regardées comme de même nature, au sens des dispositions du 11 de l'article 150-0 D du code général des impôts (CGI), telles qu'éclairées notamment par les travaux préparatoires de l'article 94 de la loi n° 99-1172 du 30 décembre 1999 de finances pour 2000, dont elle sont issues, les plus-values et moins-values afférentes à l'ensemble des cessions de titres mentionnées à l'article 150-0 A du même code, y compris celles pour lesquelles le 3 de cet article prévoit une exonération des plus-values réalisées.


Publications
Proposition de citation : CE, 04 fév. 2015, n° 364197
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Séverine Larere
Rapporteur public ?: M. Frédéric Aladjidi
Avocat(s) : SCP CELICE, BLANCPAIN, SOLTNER, TEXIDOR

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2015:364197.20150204
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