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30/12/2014 | FRANCE | N°366149

France | France, Conseil d'État, 1ère et 6ème sous-sections réunies, 30 décembre 2014, 366149


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La société DDM Patrimoine a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 9 mars 2010 par laquelle la communauté urbaine de Strasbourg a préempté un ensemble de biens immobiliers situés 26, rue Himmerich à Strasbourg (Bas-Rhin). Par un jugement n° 1003516 du 21 juillet 2011, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé la décision du 9 mars 2010.

Par un arrêt n° 11NC01589 du 13 décembre 2012, la cour administrative de Nancy a rejeté l'appel

formé contre ce jugement par la communauté urbaine de Strasbourg.

Procédure devant l...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La société DDM Patrimoine a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 9 mars 2010 par laquelle la communauté urbaine de Strasbourg a préempté un ensemble de biens immobiliers situés 26, rue Himmerich à Strasbourg (Bas-Rhin). Par un jugement n° 1003516 du 21 juillet 2011, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé la décision du 9 mars 2010.

Par un arrêt n° 11NC01589 du 13 décembre 2012, la cour administrative de Nancy a rejeté l'appel formé contre ce jugement par la communauté urbaine de Strasbourg.

Procédure devant le Conseil d'Etat

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 18 février et 14 mai 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la communauté urbaine de Strasbourg demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt de la cour administrative d'appel de Nancy du 13 décembre 2012 ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de la société DDM Patrimoine la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu le code de justice administrative.

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Rémi Decout-Paolini, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Alexandre Lallet, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Roger, Sevaux, Mathonnet, avocat de la communauté urbaine de Strasbourg et à la SCP Lyon-Caen, Thiriez, avocat de la société DDM Patrimoine.

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par une décision du 9 mars 2010, la communauté urbaine de Strasbourg a préempté plusieurs biens immobiliers situés rue Himmerich à Strasbourg, en vue de confier à un bailleur social, pour la mise en oeuvre du programme local de l'habitat approuvé par le conseil de communauté le 27 novembre 2009, la réalisation d'un programme immobilier sous la forme de " 16 à 18 logements répartis en trois petits immeubles collectifs " ou de " maisons en bande " ; qu'à la demande de la société DDM Patrimoine, acquéreur évincé, le tribunal administratif de Strasbourg a, par un jugement du 21 juillet 2011, annulé cette décision de préemption ; que, par un arrêt du 13 décembre 2012, contre lequel la communauté urbaine de Strasbourg se pourvoit en cassation, la cour administrative d'appel de Nancy a rejeté l'appel formé par la communauté contre ce jugement ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 210-1 du code de l'urbanisme : " Les droits de préemption institués par le présent titre sont exercés en vue de la réalisation, dans l'intérêt général, des actions ou opérations répondant aux objets définis à l'article L. 300-1, à l'exception de ceux visant à sauvegarder ou à mettre en valeur les espaces naturels, ou pour constituer des réserves foncières en vue de permettre la réalisation desdites actions ou opérations d'aménagement. (...) / Toute décision de préemption doit mentionner l'objet pour lequel ce droit est exercé (...). / Lorsque la commune a délibéré pour définir le cadre des actions qu'elle entend mettre en oeuvre pour mener à bien un programme local de l'habitat (...), la décision de préemption peut (...) se référer aux dispositions de cette délibération (...) " ;

3. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que les collectivités titulaires du droit de préemption urbain peuvent légalement exercer ce droit, d'une part, si elles justifient, à la date à laquelle elles l'exercent, de la réalité d'un projet d'action ou d'opération d'aménagement répondant aux objets mentionnés à l'article L. 300-1 du code de l'urbanisme, alors même que les caractéristiques précises de ce projet n'auraient pas été définies à cette date, et, d'autre part, si elles font apparaître la nature de ce projet dans la décision de préemption ; qu'en outre, la mise en oeuvre de ce droit doit, eu égard notamment aux caractéristiques du bien faisant l'objet de l'opération ou au coût prévisible de cette dernière, répondre à un intérêt général suffisant ;

4. Considérant que, pour juger que l'existence d'un projet n'était pas établie, la cour a relevé que le terrain d'assiette du projet dont la communauté urbaine se prévalait ne figurait pas dans les zones définies par le plan local de l'habitat, auquel la décision de préemption se référait ; qu'en subordonnant ainsi la réalité d'un projet d'aménagement à la condition que son terrain d'assiette se situe dans une des zones définies par le plan local de l'habitat, dont le zonage ne revêt pas de caractère réglementaire, et en déduisant du seul fait que la rue Himmerich ne figurait pas au nombre des secteurs de réalisation de logements identifiés dans le programme local de l'habitat pour les années 2009-2014 auquel la décision de préemption litigieuse se référait que la communauté urbaine de Strasbourg ne justifiait pas de la réalité d'un projet d'aménagement, la cour administrative d'appel de Nancy a commis une erreur de droit ;

5. Considérant, au surplus, qu'en jugeant qu'il ne ressortait d'aucune des notes internes du service Habitat de la communauté urbaine de Strasbourg que celle-ci justifiait d'un projet d'aménagement, la cour a dénaturé les pièces du dossier ;

6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen du pourvoi, que la communauté urbaine de Strasbourg est fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque ;

7. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société DDM Patrimoine le versement à la communauté urbaine de Strasbourg d'une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Nancy du 13 décembre 2012 est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Nancy.

Article 3 : La société DDM Patrimoine versera une somme de 3 000 euros à la communauté urbaine de Strasbourg au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à la communauté urbaine de Strasbourg et à la société DDM Patrimoine.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 30 déc. 2014, n° 366149
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Rémi Decout-Paolini
Rapporteur public ?: M. Alexandre Lallet
Avocat(s) : SCP ROGER, SEVAUX, MATHONNET ; SCP LYON-CAEN, THIRIEZ

Origine de la décision
Formation : 1ère et 6ème sous-sections réunies
Date de la décision : 30/12/2014
Date de l'import : 23/03/2016

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 366149
Numéro NOR : CETATEXT000029998398 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2014-12-30;366149 ?
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